Résultats et Discussions sur la Végétation et les Inventaires Floristiques
CHAPITRE III : RÉSULTATS ET DISCUSSIONS
Résultats
Inventaires floristiques
Richesse spécifique et abondance taxonomique
Discussion
Végétation
Les résultats de cette étude fournissent les informations sur les parcelles de différent âge inventoriées dans une agroforêt de manguier et celle de la savane de Ngaoundéré. Au total 1912 individus ont été recensés dans les plantations. Ces individus sont répartis dans 23 familles, 36 genres et 39 espèces. Dans l’agrosystème à Mangifera indica, 5 familles sont les plus représentées. Elles constituent 89,98% du total des familles : les Anacardiaceae, Myrtaceae, Hymenocardiaceae, Caesalpiniaceae, Hypericaceae. Ce sont les Anacardiaceae qui sont dominants car on est dans un agrosystème des manguiers.
Pourtant dans la savane 1195 individus recensés repartis en 23 familles, 31 genres et 37 espèces, elle renferme 5 familles les plus représentées constituant 96,66% du total des familles : les Hymenocardiaceae, Caesalpiniaceae, Combretaceae, Annonaceae et Anacardiaceae. L’on remarque une forte richesse spécifique dans la savane par rapport aux autres parcelles des plantations. Les résultats des manguiers de +20 ans (796 arbres reparti dans 26 espèces, 25 genres et 20 familles) sont semblables à ceux obtenu au Gabon par Dany (2010) où 842 arbres répartis dans 27 espèces ont été recensé. En rapport avec le nombre d’individus ces résultats ne corroborent pas ceux cités par Awé (2016), Noiha et al. (2017), dans un agrosystème d’anacardier dans le Nord du Cameroun, par Witanou (2016) dans un agrosystème à Azadirachta indica à l’Extrême-Nord du Cameroun. La différence de richesse spécifique entre les agrosystèmes à Mangifera indica et la savane s’expliquent par le fait que les conditions écologiques sont non favorables à la régénération, la forte perturbation anthropique qui est un frein pour le développement des espèces présentes. Les agrosystèmes ont peu d’espèces que la savane parce que, le paysan favorise le développement des arbres fruitiers implantés pour leur importance économique et vivrière. L’espèce dominante de la savane est Hymenocardia acida. Ce résultat infirme l’idée selon laquelle la végétation de l’Adamaoua est constituée essentiellement de la savane à Daniellia oliveri et à Lophira lanceolata (Letouzey, 1985). On peut donc dire que Hymenocardia acida a pris de pas ou de l’ampleur sur ces dernières. L’implantation de ces espèces dans cette savane est fonction d’hasard et cet hasard est fonction de mode de dissémination et des certaines particularités qu’offrent le milieu (pente, ruissèlement, Type du sol, etc.).
L’étude de la distribution diamétrique dans nos quatre parcelles d’étude montre que les individus de petite taille sont beaucoup plus importants. Il serait nécessaire d’argumenter avec l’hypothèse de Rollet (1971) faisant croire que dans une forêt naturelle, les diamètres des arbres se conforment à une distribution exponentielle classique « L » (avec forte pente d’équation : y = 2719e-3,11 et R² = 0,987) caractérisée par les classes de faibles diamètres faisant penser à un peuplement récent et la présence de plusieurs individus d’avenir pouvant assurer une bonne régénération de la végétation. La valeur du coefficient de détermination R2 montre que les données tendent vers la réalité, et dans notre contexte, il confirme que le sous-bois est riche en individu de petit diamètre. C’est la principale caractéristique des peuplements forestiers supposés être en équilibre, avec beaucoup d’individus de petit diamètre et peu d’individus de gros diamètre. Ce résultat est en accord avec ceux de Sani (2009) cité par Jiagho et al. (2016), Adamou (2010), Halimatou (2010) cité par Awé (2016), Dorvil (2010), Tabue (2013), Tsoumou et al. (2016), Zapfack et al. (2016), Noiha et al. (2017). Il convient de signaler que parmi les quatre parcelles d’étude, la savane présente une abondance de tiges de petit diamètre, ce qui la différencie des autres parcelles. Cette structure classique est souvent observée pour les écosystèmes forestiers non perturbés ce qui indique aussi une bonne représentation des sous-bois grâce à la présence des individus sciaphiles dans les manguiers. Afin de mieux soutenir cette idée, il est intéressant d’observer aussi les indices de diversité floristique.
Les indices de diversité floristique constituent des critères objectifs pour apprécier la diversité d’une communauté végétale et servir de base pour l’étude des peuplements de chacun des sites retenus pour l’étude. L’indice de Shannon varie d’un peuplement à l’autre. La diversité est faible lorsque ISH<3; moyenne si 3≤ISH<4 puis élevée quand ISH ≥ 4 (Yédomonhan, 2009). Dans l’ensemble des parcelles étudiées, la valeur de l’indice de Shannon du sous-bois des manguiers est inférieur à 3 (1,31; 1,56 et 1,93).
Les manguiers de +20 ans montrent d’une part leur efficacité dans la conservation de la diversité végétale par rapport aux autres manguiers. La diversité générale est faible, ceci montre une forte homogénéité des manguiers en général. Cette assertion corrobore celle observée au Sahel qui rapporte que le nettoyage intensif entraîne la dominance d’un petit nombre d’espèces du sous-bois des agroforêts malgaches (ISH faible) (Hiernaux, 1998). Ceci s’explique par le fait que seuls quelques espèces utiles sont épargnées lors des défrichements et entretenues dans les manguiers ce qui réduit la diversité par rapport au peuplement naturel. Ces résultats s’opposent, en revanche, à ceux trouvés à Madagascar (Vonjison et al., 2008), qui stipule que le sous-bois des agroforêts peut être conserver au même rang que les plantations pour des raison diverses et par conséquent peut avoir un ISH moyenne. 3,07 bits, obtenue dans la parcelle de la savane témoigne aussi d’une flore moyennement diversifiée. Cet indice est similaire à celui obtenu par Sanon et al., (2015), où ISH= 3,01 bits dans la forêt claire à Anogeissus leiocarpus dans le Sud-Ouest du Burkina Faso ; Vonjison et al. (2008) dans la haute savane Malgache. L’équitabilité de Pielou (EQ = 1) dans l’ensemble des parcelles étant très élevées représente la présence d’aucune espèce dominante. Cela traduit d’une part que les individus sont bien répartis au sein des espèces et une bonne reconstitution de la diversité floristique du sous-bois d’autre part, sans doute en raison des conditions favorables du milieu. Ces résultats ne corroborent pas ceux de Jiagho (2016) à la périphérie du Parc national de Waza (Cameroun); Noiha et al. (2015) dans les agrosystèmes à Cacaoyère du littorale (Cameroun); Savadogo et al. (2015) dans les écosystèmes sahéliens du Niger et de Bouko et al. (2007) dans les forêts claires et savanes au Bénin. Mais similaire à celle trouvé par Tabue (2013) dans la partie Est de la Réserve de Faune du Dja; Noiha et al. (2017) dans les vergers à anacardiers dans le Nord-Cameroun.
L’indice de valeur d’importance (IVI) rend plus explicite la prédominance spécifique dans les parcelles inventoriées. Cet indice est de l’ordre de 300 dans les différentes parcelles. Ceci pourrait s’expliquer par la forte présence d’arbre à grandes cimes dans ces parcelles. Ce résultat corrobore à celui de Savadogo et al. (2016) qui affirme que les arbres à grands houppiers contribuent plus au recouvrement et jusqu’à un certain degré de recouvrement, ils modifient les conditions écologiques en réduisant le pouvoir évaporant de l’air, en favorisant le bilan hydrique du sol et en améliorant la fertilité. On a recensé 19 espèces ayant un indice de valeur d’importance élevé dans les plantations (IVI≥10). Ces IVI varient de 10,19 à 188,21 et occupent plus de 50% de IVI total. Mangifera indica est l’espèce la mieux représentée et par conséquent a un meilleur recouvrement, donc est la plus prédominante. Les résultats des IVI obtenus des espèces ne sont pas conforment à ceux de Mapongmetsem et al. (2016) dans les agroforêts de la Zone périurbaine de la ville Bafia où Mangifera indica avait un IVI= 21,07. Ces variations s’expliquent d’une part par les préférences des arbres laissés délibérément par des paysans, d’autre part serait fonction des conditions du milieu et d’abondance. La valeur d’importance écologique, la densité et la surface terrière de l’espèce témoignent de son importance dans des écosystèmes étudiés. Cela signifie qu’elle tient le premier rang selon les critères d’abondance et de dominance.
Les densités obtenues dans nos différentes plantations de manguier, varient de 387±5 à 796±12,5 tiges/ha avec une moyenne de 637,33±10,93 tiges/ha qui traduirait une régénération appréciable au sein des peuplements. La densité de manguier dans les parcelles de Ŕ 10 ans, 10 à 20 ans, + 20 ans sont respectivement 190, 331 et 266 tiges/ha. Ces résultats sont semblables à ceux obtenus au Burkina Faso où la densité variait de 100 à 330 tiges/ha, mais dissemblables par exemple à la densité qui varie de 400 à 450 tiges/ha au Mexique (Mazières, 2005). Ces différences peuvent s’expliquer par l’écart entre les pieds de manguiers utilisé par chaque paysan. En effet, l’importance de la régénération dans les parcelles étudiées est le fait qu’elle favorise la protection des terres en empêchant les eaux de pluie d’avoir un effet de battance grâce aux feuillages et aux systèmes racinaires (Malagnoux et al., 2007).
La valeur plus élevée de la surface terrière observée dans la parcelle de + 20 ans (14,53 ± 0,041 m²/ha) témoigne de l’existence de gros spécimens d’arbres. Parmi les espèces de son sous-bois, certaines ont un fort taux d’ombrage. La faible valeur de la surface terrière rencontrée dans la savane confirme qu’elle est anthropisée par le phénomène de l’abattage des grands arbres pour la fabrication du charbon et ainsi pour les cultures. C’est d’ailleurs, ce qui pourrait expliquer la forte proportion des espèces pouvant procurer de l’ombrage en toute saison (Leblanc & Malaisse, 1978).
On observe une similarité élevée de la composition des espèces dans les trois parcelles agroforestières échantillonnés (- 10 ans et 10 à 20 ans : – de 10 ans et + de 20 ans ; 10 à 20 ans et + de 20 ans), supérieures à 55 %, due au fait que ces parcelles sont situées dans la même zone agroécologique et constitué beaucoup plus des manguiers. Cette similarité très élevée signifie qu’il y a peu de différences entre les trois terroirs échantillonnés, d’où une faible diversité beta. Elle montre que ses parcelles sont homogènes floristiquement parce que la composition floristique de la végétation ne présente pas de variations. Ces résultats sont parfaitement proches à ceux de Savadogo et al. (2015) dans la zone Sahélienne du Burkina Faso. Par contre l’affinité floristique entre les groupements de manguier des parcelles (- de 10 ans et la savane ; 10 à 20 ans et la savane ; + de 20 ans et la savane) est inférieur à 50 %. Cela montre que la composition floristique dans ces parcelles ne présente aucune affinité proche qui pourrait s’expliquer par la présence de nombreuses espèces arbustives qui ne constituent pas les espèces fréquentes et dominantes de chaque site mais qui se sont développés à la suite de différentes perturbations de l’écosystème forestier et savanicole. Et aussi dû à la différence du couvert végétal ainsi que le sol entre les parcelles.