Les motivations multiples des touristes de 18 à 25 ans en France 

Les motivations multiples des touristes de 18 à 25 ans en France

Section 2 – Les Motivations multiples des jeunes en autonomie de 18 à 25 ans

I) Une volonté d’affirmation de soi, d’utilité, de découverte et d’expérience

Il est important de noter que plus qu’une quête de plaisir associée au tourisme de loisir, ce segment entretient d’autres attentes envers le voyage. En effet, l’affirmation de soi, la quête d’utilité et surtout l’expérience sont des éléments fondamentaux qui guident ses choix de séjours.

François Delarue, Directeur du Centre International de Séjours de Paris et Président du Club Français du Tourisme des Jeunes déclare à propos de ces jeunes touristes que : « Le voyage est un moment fort de leur vie, pendant lequel ils peuvent confronter leurs premières expériences à de nouvelles situations auxquelles ils doivent donner des réponses personnelles et particulières. La construction de soi découle tout naturellement de la quête d’autonomie »33.

Pour satisfaire cette demande, cela suppose de mettre en place des produits touristiques dépassant la simple combinaison d’activités, de transports et d’hébergements. En effet, les jeunes en quête d’expérience et d’affirmation de soi vont être particulièrement sensibles aux offres évocatrices en termes de symbolique, que cela soit au niveau de l’intensité du voyage et des rencontres, de la découverte, de l’adrénaline… Afin de combler les attentes de ce segment les opérateurs vont dès lors devoir vendre plus que des produits touristiques en tentant de vendre une ambiance complète, un univers qui sera particulièrement attractif et évocateur pour cette cible.

Nous voyons cela, par exemple, à travers les ventes de séjours à la montagne qui représentent un produit relativement efficace envers ces populations car les opérateurs vendent là bien plus qu’un séjour et une destination : ils proposent un univers, une ambiance composée de la pureté de la nature mais également de l’adrénaline provoquée par les sports de glisse…

En plus de l’expérience et de l’affirmation de soi, les jeunes en autonomie accordent également une importance particulière à l’utilité de leurs voyages touristiques. En effet, si l’on considère par exemple l’importance des voyages linguistiques ou universitaires chez cette population, nous pouvons voir que l’utilité des déplacements reste un facteur important dans le choix de leurs destinations touristiques.

Ce segment a soif d’apprendre, de découvrir et de grandir, et les opérateurs touristiques doivent en tenir compte comme le signifiait Claudine Chaspoul dans son éditorial du Cahier Espace en déclarant « ….ce sont les voyages utiles qui font recettes auprès de cette cible : stages linguistiques, […] échanges universitaires […]. Autre voyage utile, le grand voyage initiatique à la fin des études ou entre deux emplois comme celui réalisé par les nouveaux routards… »34.

I) Une demande caractérisée par une volonté de partage, de rencontres et de convivialité

Les jeunes générations sont bien évidemment caractérisées par une volonté de festivités et de rencontres importantes, comme nous le dit Franck Michel, directeur de la revue Histoire et Anthropologie, en remarquant qu’en particulier pour les plus jeunes touristes, « Le caractère festif investit tout l’univers du voyage car, sans fête, le voyage n’est que déplacement. Les sites majeurs du tourisme international sont généralement propices à la fête, même artificielle ou commercialisée. »35.

Néanmoins, ce critère ne doit pas être appréhendé uniquement en termes de soirées festives et de bars bruyants et alcoolisés. En effet, au- delà de cette fête recherchée pour elle- même, ce segment semble également particulièrement sensible aux possibilités de rencontres.

Ce point semble en réalité rejoindre le précédant : ici encore l’expérience est un point primordial de la demande de cette cible. Ainsi, la volonté de partage et de rencontre s’inscrit totalement dans cette expérience, dans la mesure où, bien souvent, ce sont ces dernières qui permettent de découvrir et de profiter encore davantage d’un séjour touristique.

Dans cette optique, cette volonté de rencontre et de partage doit alors être approchée dans un sens large, soit dans une réalité comprenant l’ensemble des éléments du séjour, que cela soit, bien entendu, au niveau de l’hébergement (d’où notamment le succès international des « Backpackers »), mais également au niveau des autres composantes du séjour, à savoir les modes de transports (le plus possible en commun), les organisations de visites groupées… ODIT France illustre ces propos ainsi : « La convivialité est un paramètre structurant, un projet à part entière des vacances :

« Être / Faire ensemble » est un maître mot partagé par l’ensemble des jeunes (…). Dans sa forme ultime, la convivialité prend la forme d’un séjour festif en groupe. Mais sur les autres séjours, ce projet préside à de nombreux choix de composantes de séjours (le train ou la voiture, le camping, l’auberge de jeunesse… »36.

En revanche, il faut noter que malgré cette volonté de partage et de rencontre, les jeunes adultes se présentent comme une cible particulière qui a relativement du mal à se mêler aux autres générations. La cohabitation avec ces autres générations qu’elles soient plus jeunes ou plus vieilles semble souvent difficile dans la mesure où les attentes sur de nombreux éléments : horaires, activités, nourriture…ne se rejoignent que rarement.

Ce dernier élément doit être pris en compte de la part des opérateurs touristiques qui doivent un maximum tenter d’offrir des produits spécifiques ou du moins fortement orientés sur cette clientèle. ODIT remarque à ce sujet que « …la cohabitation avec d’autres clientèles n’est pas souhaitée ni par les jeunes ni par les autres (…) à côté d’offres exclusives jeunes, d’autres offres sont destinées à les fidéliser et à les accompagner dans leur évolution »37.

II) Une volonté de liberté et d’autonomie

Un autre élément fondamental de ce segment des jeunes en autonomie correspond à son désir d’autonomie et de liberté. Dans ce cadre, nous pouvons voir que cette cible entretient une relation paradoxale vis- à- vis des offres touristiques « toutes faites », soit des packages.

Ces jeunes en autonomie, pour la plupart d’entre eux, possèdent bien évidemment une réflexion par la raison, et dans cette optique, un package ne saurait pas par principe les rebuter, dans la mesure où ce dernier permet souvent de bénéficier d’avantages financiers non négligeables.

Néanmoins, il ne faut pas négliger le désir de liberté et d’autonomie de cette population qui reste certainement une de ses caractéristiques principales qu’elle vise par ailleurs à affirmer. Les jeunes en autonomie vont alors bien souvent par essence refuser les packages trop contraignants qu’ils assimilent à des cadres auxquels ils cherchent justement à échapper. De plus, comme nous l’avons dit précédemment, ce segment est particulièrement sensible à l’expérience reliée à la découverte et à l’affirmation de soi dans un cadre nouveau.

Les packages trop contraignants viennent alors limiter cette possibilité d’expérience en limitant les possibilités de liberté dans les choix d’activités. ODIT France conseille alors aux opérateurs touristiques de proposer des offres « … avec un cadre discret qui laisse place à la liberté : une offre tout compris mais laissant la possibilité de choisir de faire ou de ne pas faire telle ou telle activité, mais aussi de quand les faire (système de vouchers) (…) Les voyages organisés qui ressemblent trop à ce qui est proposé aux adultes ne fonctionnent eux pas bien, sauf si l’offre est conçue de manière ludique (scooter…) ; et sans horaires imposés »38.

Sur ce point, il faut nuancer nos propos en mettant en avant le fait que ces jeunes ne sont néanmoins pas toujours contre la présence d’un cadre. Ce dernier peut en effet dans certaines situations se révéler rassurant, notamment lorsque les autres éléments du voyage ne le sont pas.

Le bon dosage entre liberté et cadre semble dès lors se trouver dans une offre modulable pour ces jeunes en autonomie. Cette offre devrait combiner différentes alternatives de transports, d’hébergements, d’activités… sans que cela n’apparaisse trop contraignant pour les intéressés.

Leur désir de liberté et d’autonomie semblent donc les pousser à être d’autant plus exigeants vis- à- vis des produits touristiques offerts, et c’est pour cela qu’ils exigent une composition de séjours à la carte.

III) Au-delà de l’atmosphère, des exigences de qualité

Toujours en ce qui concerne les caractéristiques fondamentales de cette demande, nous pouvons mettre en avant le fait que ces jeunes sont des consommateurs parfaitement intégrés dans la société de consommation dans laquelle ils ont grandi.

Ceci implique dès lors que ce segment regroupe des personnalités particulièrement informées et rationnelles vis- à- vis des services offerts sur les différents marchés. Loin de l’image du jeune se satisfaisant de tout sans rechigner, nous pouvons alors noter que cette cible se révèle être en réalité une cible parfois exigeante. Romain Viennois, chef de projet France de l’entreprise Saint Christopher’s Inns déclarait ainsi lors d’un entretien à propos des inconvénients de cette cible, qu’elle représentait une « Clientèle exigeante » et qu’elle était animée d’une « … évolution constante des attentes et modes de voyage »39.

Ceci peut s’expliquer par différents facteurs et notamment par le fait même de la recherche d’autonomie et d’affirmation de soi, mais aussi par le budget relativement restreint de nombre de ces jeunes. Ces différents facteurs impliquent que ce segment cherchant à s’affirmer et réalisant un investissement conséquent afin de se payer des vacances refuse alors d’être considéré en deçà des clientèles traditionnelles. ODIT France relève ainsi que ces jeunes touristes « investissent financièrement mais aussi symboliquement dans leurs vacances et à ce titre n’entendent pas être traités comme une « sous clientèle » »40.

Outre l’ambiance générale des centres de vacances, mais également outre leur coût qui reste un élément important du choix d’opérateurs pour ce segment, nous pouvons voir qu’une multitude de critères rentre en compte quant à l’appréciation des séjours et notamment le confort, la propreté, la sécurité, la réception, la proximité des activités… Ce dernier point n’est certainement pas négligeable et doit être appréhendé à sa juste valeur par l’ensemble des opérateurs touristiques.

En effet, si l’on se reporte à l’analyse qualitative présentée dans la suite de ce mémoire, nous verrons que nombre d’interrogés citent notamment ces éléments comme essentiels dans leurs préférences touristiques.

Les opérateurs doivent ainsi proposer des produits de qualité afin de séduire cette clientèle mais aussi de la fidéliser, ce qui n’est pas tâche aisée tant cette dernière est volatile et instinctive (ou « zappeuse et difficile à fidéliser »41 selon les thermes de Laurence Dermenonville).

IV) Une sensibilité forte à l’événementiel et à l’opportunité mais aussi aux sensations fortes et aux activités

Comme nous l’avons vu précédemment le segment des jeunes en autonomie est sensible à l’opportunité, qu’elle soit caractérisée par le prix ou alors par l’exceptionnalité d’un événement particulier (opportunités tarifaires de transports et de séjours sur internet, vols Low cost, attractivité de grands événements sportifs et culturels…)42.

Ce segment est fortement caractérisé par son instinctivité et son opportunisme qui font qu’il essaie de profiter et de rentabiliser au maximum chacun de ses séjours touristiques. Nous pouvons voir ici que ces caractéristiques particulières de ce segment ont de fortes répercussions sur l’offre de produits touristiques et se présentent comme une réelle opportunité pour les opérateurs, ce type de demande entrainant généralement un contournement de la saisonnalité.

Au- delà de l’événementiel, nous pouvons aussi noter que ce segment s’avère particulièrement sensible à la recherche de sensations fortes et d’activités riches en expériences. Guy Raffour, directeur du cabinet Raffour Interactif déclare ainsi : « Alors que la moyenne des Français recherche avant tout des séjours « reposants » pour ses vacances (…), les deux tiers des jeunes de 15 à 24 ans privilégient les séjours actifs. Ils recherchent à se dépenser, à se défouler, il faut donc leur parler activité si l’on veut les intéresser … »43.

Ce segment se présente alors comme un des moins sensibles à la destination du moment où ses attentes en termes d’expériences et de sensations sont assouvies. A ce sujet, Etienne Pauchant écrit que « C’est dans ce segment que l’on trouve le moins d’intérêt pour la destination. Il semble que l’activité prime sur toute autre considération pour le choix d’une séquence de vacances, qu’elle soit dans le pays ou internationale »44.

Pour résumer les attentes des jeunes en autonomie, ODIT France en a dressé un triptyque dans son Grand Angle de Juin 2007, selon le schéma suivant:

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Source : « Grand Angle Spécial 18- 25 ans, Mieux comprendre et séduire les jeunes touristes Allemands, Britanniques et Français », ODIT France, Juin 2007, hors série n°2.

Nous voyons donc pour conclure cette section, que les trois principales motivations et attentes des jeunes de 18 à 25 ans face au voyage et au tourisme peuvent être regroupées en trois grands ensembles identifiés notamment par ODIT France, qui sont :

  •  Une volonté de construction de lien social (Besoin de découverte, Besoin d’universalité et Besoin de convivialité).
  •  Une construction et affirmation personnelle (Besoin d’implication personnelle, Besoin de reconnaissance et Besoin de rupture).
  •  Des attentes de consommateurs (Besoin de sécurité, Besoin de confort et Rapport qualité/prix)45.
Section 3 : Des modes spécifiques de composition et de consommation des produits touristiques de la part des jeunes en autonomie

I) L’utilisation d’Internet à toutes les étapes du choix et de la réservation touristique

L’usage d’internet, aujourd’hui démocratisé, se retrouve dans la quasi- totalité des démarches d’information et de réservations touristiques (séjours, hébergements, mais aussi transports, activités…). Par exemple, selon le rapport de la Direction du Tourisme, 91% des jeunes Français déclarent utiliser le Web pour planifier leurs voyages touristiques46.

Cette spécificité des modes d’information et de réservation de cette cible doit dès lors être appréhendée par les offreurs qui se doivent d’être bien évidemment présents mais également grandement visibles sur cette plateforme.

II) La non saisonnalité des départs touristiques de ce segment comme opportunité pour les offreurs

Le caractère instinctif et opportuniste de la demande de ce segment entraine nécessairement de nombreux départs de la part des jeunes en autonomie hors des périodes saisonnières, les prix étant souvent plus attractifs hors des périodes estivales.

GMV Conseil nous dit ainsi que « Même s’ils partent plus pendant les vacances scolaires (59% de leurs séjours), le hors vacances scolaires demeure une période d’opportunité (41%) »47 pour ces jeunes. Et la Direction du Tourisme déclare elle que « Le tourisme des jeunes est un tourisme assez bien réparti sur l’année avec près de la moitié des séjours en dehors de la période estivale, grâce aux voyages scolaires et estudiantins mais également des possibilités accrues de promotion de certaines destinations touristiques dans la mesure où cette demande, souvent ponctuelle, semble différente des demandes classiques de tourisme »48. Ceci permet dès lors aux offreurs de bénéficier de cette manne pour vendre des séjours et produits touristiques tout au long de l’année et ainsi réduire les difficultés de la saisonnalité.

III) Une cible difficile à fidéliser du fait de son envie de découverte

Une autre caractéristique de ce segment correspond à sa forte volatilité, à sa difficulté de fidélisation, et à sa volonté perpétuelle de découverte. En effet, les jeunes en autonomie sont très sensibles à la nouveauté et souhaitent continuellement découvrir de nouvelles expériences, de nouveaux lieux et par conséquent sont particulièrement difficiles à fidéliser et restent très volatiles.

Cette volatilité est également amplifiée par leur appartenance quasi- totale à la société de consommation qui fait qu’ils sont davantage sensibles que d’autres catégories à l’insatisfaction et particulièrement enclins au changement. « La clientèle jeune est zappeuse, difficile à fidéliser » nous dit la direction du tourisme49.

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