Le marché des livres électroniques: une concurrence technologique

Une concurrence technologique – Section II :
Si la lecture de livres sur un écran est possible depuis la mise en place du projet Gutenberg en 1971, les supports dédiés à la lecture d’ouvrages numérisés sont relativement jeunes. Ils apparaissent à la fin des années 90 aux Etats-Unis.
L’iPad n’est que le dernier né dans la gamme des lecteurs de livres électroniques. Cependant, doit- on l’inclure dans la notion de livre électronique ou doit-on simplement le placer dans la catégorie des supports qui permettent l’accès à la lecture d’un tel type de livre ?
§ 1 — Les prémisses d’une numérisation à grande échelle
Comme toutes les avancées technologiques, la numérisation du livre s’est fait par étape, qui ont vu naître successivement de nouvelles techniques, plus ou moins bien adaptées.
A — Les premiers appareils
Alors que le livre est né il y a plus de cinq siècles, il ne connaît sa première mutation majeure qu’aujourd’hui. Avec le passage au numérique, c’est tout un monde qui change, celui de l’édition d’abord mais aussi le nôtre, car ce sont toutes nos vieilles habitudes qui risquent d’être secouées.
Apparu dans les années 2000, le livre numérique n’a jamais réussi à séduire le grand public malgré de nombreuses tentatives. En France, l’aventure numérique a débuté en 2001 avec la Société Cytale de Jacques Attali et Erik Orsenna. Une expérimentation qui s’est soldé par un échec. Créée en 1998 et à l’origine du lecteur Cybook21 commercialisé à partir de 2001, la société Cytale été mise en liquidation judiciaire dès juillet 2002. Avec leurs Cybook, a été créé le premier matériel dédié à la lecture de livre électronique. Mais pesant près d’un kilo et coûtant environ 1000 euros, cet appareil fut un « échec complet » d’après Michaël Dahan, ancien salarié de l’entreprise. D’autres ont également tenté l’aventure du livre numérique, à l’instar de la société américaine Gemstar qui en 2000 n’a pu lancer sur le marché américain sa tablette de lecture numérique.
C’est donc aujourd’hui que renaît voire « naît » l’expérience du livre électronique, grâce notamment à une avancée technologique importante : le développement d’une encre électronique, nommé « E-Ink ».
B — Après l’arrivée de l’encre électronique
C’est Joseph Jacobson, un étudiant américain de l’Institut des technologies du Massachussetts, qui fasciné par une idée trouvée dans un livre de science-fiction, se mit au défi de la réaliser. Sur le site de la compagnie22 qu’il a fondée, ce nouveau support textuel est décrit comme une feuille de plastique enfermant un liquide à base de microcapsule contenant des particules blanches en suspension dans une teinture noire, et dont l’orientation varie en fonction du champ électrique. Ainsi, il sera possible de produire de façons industrielles des pages de ce matériau et de les réunir en un codex numérique qui aurait l’apparence et la maniabilité du papier. C’est avec cette encre électronique, qui reproduit l’apparence d’une feuille imprimée, sans éclairage lumineux, qu’un modèle de livre numérique va naître, celui du « reader » ou de liseuse pour les antis anglicismes.
Il existe tout une gamme de « reader ». L’offre la plus complète est celle lancée en janvier 2008 par Amazon aux États-Unis, intégrant son lecteur Kindle23 et l’accès à une plateforme de 125 000 ouvrages numériques. Le livre ne demandant de l’énergie que lors de l’actualisation d’une page, ce type d’appareil est très peu gourmand en énergie d’où une autonomie incroyable (on parle en mois) ; un coût tendant à baisser (concurrence féroce afin de sortir des « readers » à moins de 100 euros) ; une capacité de stockage énorme (capable de transporter une bibliothèque de plusieurs milliers d’ouvrages), ces tablettes de moins de 300 grammes proposent de nombreuses fonctionnalités dignes d’intérêt, et se présente comme les possibles alliées quant à l’apogée du livre électronique.
A titre d’exemple, il n’existe pas que le Kindle, le Cybook Opus24, permet de lire plus de formats que le Kindle et le PocketBook ukrainien se distingue quant à lui par les nombreuses fonctionnalités qu’il possède en plus.
Cependant, avec l’arrivée du géant américain sur les traces du livre électronique, les liseuses et autres « readers » voient un concurrent de taille arrivé.
§ 2 — L’iPad : premier de la classe
« Les readers se sont pour le moment succédés sans qu’aucun d’entre eux ne s’impose.
Tout reste ouvert : il n’existe pas de support de lecture numérique de référence », c’est ainsi qu’en 2008, le rapport sur le livre numérique décrivit l’état du marché des supports aux livres électroniques.
A — Qualité de l’appareil
L’iPad se présente comme l’outil de référence décrit. Alliant plusieurs qualités essentielles :
· mise à disposition d’une bibliothèque universelle portable ;
· accès à des contenus associés (dictionnaire intégré, matériel pédagogique, etc.) ;
· disponibilité immédiate de l’ouvrage via une connexion internet.
L’iPad n’est pas qu’un outil de lecture d’eBook mais bien plus. Il est le maillon terminal portable, dans des situations précises, du modèle d’Apple en tant que conduit pour du contenu. Il dispose d’un écran de taille appropriée qui lui permet de recevoir du contenu. Autant de qualité qui plaide à en faire l’outil de référence. Mais l’iPad ne s’arrêta pas là, et permet de redéfinir, voire redessiner la pensée quant à la lecture numérique. Le livre numérique ne doit-il être qu’un livre imprimé au format numérique ou serait-il les prémisses d’une mutation bien plus importante ?
C’est dans cette dernière lignée que l’ardoise numérique d’Apple s’inscrit. En effet, avec l’iPad, il est donné la possibilité aux éditeurs d’innover. Le livre numérique ne doit pas être un vulgaire PDF25 amélioré. Une idée que partage Alexandre Jardin, l’auteur de Fanfan, qui pense que « les œuvres existent à travers un certain mode d’expression, et il faut savoir s’y tenir ». Un livre électronique ne peut et ne doit pas être qu’une traduction numérique d’un livre papier, il faut penser plus loin et redessiner le livre. L’auteur doit inventer, penser, raisonner numérique, et ainsi élargir les barrières littéraires qui limitait auparavant sa créativité. Une nouvelle ère naît, celle de l’hyperlivre. Il devient possible d’inventer une nouvelle forme d’écriture, mêlant l’écrit, le sonore et le visuel. L’exemple américain du Nixonland26 illustre parfaitement cette démarche. Il s’agit du premier livre enrichi pour l’iBookstore. En plus du texte, l’eBook inclut 27 vidéos sur l’ancien président américain, interview et événements clefs de son arrivée au pouvoir. Le choix d’ajouter des contenus vidéos complète parfaitement cet ouvrage historique et offre ainsi une expérience de lecture de qualité27.

25 Portable Document Format.

26 Nixonland de Rick Perlstein, uniquement disponible sur l’iBookstore américain.
En outre, l’iPad fait de la lecture son point fort. Celui-ci fait un bien meilleur lecteur que le Kindle d’Amazon, bien qu’il n’utilise pas la technologie E-Ink. Plus un choix qu’un bug. En effet, les lecteurs E-Ink sont incapables d’afficher des images en couleur, des animations, ou bien des designs sophistiqués (éléments esthétiques essentiels concernant les livres illustrées pour enfants ou bien les livres de cuisine). L’iPad possède un écran LCD rétro-éclairé classique. L’affichage à cristaux liquides n’est pas tendre avec les yeux, mais possède des qualités que l’encre électronique n’a pas : il affiche les couleurs, permet des animations, et on peut s’en servir dans le noir. Quand le Kindle met une demi-seconde à tourner une page, l’iPad le fait instantanément.
Mais c’est ce qui fait la force (selon Jobs) de l’iPad en tant qu’outil numérique réside dans la plateforme qu’il met à disposition des lecteurs grâce à l’application iBookstore.
B — Sa bibliothèque virtuelle
Avec l’iPad, est sorti également iBookstore, la librairie numérique d’Apple. Pour pouvoir choisir un livre dans cette boutique, il suffit au préalable de télécharger l’application iBooks via l’App Store. Elle se présente sous la forme d’une bibliothèque imitation bois dans laquelle sont exposés les ouvrages achetés, et un accès à l’iBookstore.
Essentiel quant à la création d’un support universel, l’iBookstore laisse perplexe. En effet, les livres y sont trop mal classés. Il n’existe aucun index alphabétique par auteur, titre, langue ou même éditeur. Des progrès sont nécessaires, cependant on il est appréciable de pouvoir donner aux indécis la possibilité de télécharger des extraits de 15 à 30 pages.
Mais l’iBookstore n’est pas la seule librairie virtuelle disponible. D’autres applications permettent à l’heure actuelle de lire des livres sur iPad : Kindle d’Amazon, EdenReader édité par Gallimard, Flammarion et la Martinière, etc.
Avec la numérisation des textes, les rapports de force entre éditeurs et lecteurs échappent au modèle traditionnel. Essayons de voir comment Apple va gérer sa relation avec les éditeurs.28
Lire le mémoire complet ==> (L’iPad ou l’hypermédia au service d’Apple)
Mémoire Master Professionnel « Droit des médias »
Université Paul Cézanne Aix-Marseille III

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