Mode d’accès et d’information sur les dispositifs de formation
5.4. Capital social et modes de fonctionnement des dispositifs de formation
Comme énoncé au § 5.2.1., il s’agit maintenant d’identifier le type de processus à l’œuvre au sein des dispositifs de formation étudiés, de repérer l’inscription de ces dispositifs dans des canaux relationnels, traduisant l’existence ou non d’un capital social.
Pour caractériser cela, les trois critères retenus sont successivement présentés : le mode d’accès à la formation (§ 5.4.1.), le mode de fonctionnement du dispositif de formation (§ 5.4.2.), et enfin les formes d’accès au premier emploi (5.4.3.).
5.4.1. Mode d’accès et d’information sur les dispositifs de formation : des modes relationnels dominants
Comment entre-t-on en contact avec les dispositifs de formation (tab. 11, annexe 4) ? Cette question a permis de disposer d’une information sur les canaux d’information mobilisés pour cela par les élèves163.
De façon symétrique au fonctionnement du marché du travail, ces canaux d’information peuvent être considérés à la fois comme des canaux d’accès du point de vue des étudiants, et comme des canaux de recrutement du point de vue des enseignants ou des responsables de ces formations.
N’ayant enquêté que les étudiants effectivement entrés dans ces formations, les résultats sur les canaux utilisés portent ainsi la marque de la pratique des responsables des dispositifs de formation étudiés.
En ce sens, cette question fournit un élément de caractérisation du fonctionnement du dispositif de formation, tel qu’instauré par son responsable.
5.4.1.1. Trois grands types de canaux d’information
Ce critère caractérise donc la façon dont les élèves accèdent à la formation, le canal d’information qui a été déterminant. Les canaux relationnels ont été distingués selon que le public était directement lié ou non au dispositif de formation : les objectifs des responsables des dispositifs différaient du point de vue de leurs pratiques de recrutement s’inscrivant dans des espaces sociaux différents (cf. § 5.3.3.).
Nous avons en effet pris acte que le passage du second au troisième cycle universitaire était marqué par une assez grande mobilité, comparé à ce qui se passait dans le premier ou le second cycle.
Et la distinction entre d’un coté des étudiants en phase terminale d’un parcours classique de formation amorçant leur première socialisation professionnelle, et de l’autre des personnes entrées dans la vie active et disposant déjà d’une expérience professionnelle paraissait significative à la fois de la nature de leurs acquis relationnels et du positionnement de chaque dispositif.
Les cinq dispositifs ont été positionnés selon le poids des trois grands types de canaux permettant d’y accéder164 :
Figure 8. Trois grands types de canaux d’information
Canal d’information de type relationnel |
– canaux relationnels internes à l’institution de formation (camarades, professeurs de la faculté ou de l’école)- canaux relationnels externes (amis, entourage familial, milieu professionnel) |
Canal d’information de type non relationnel (information médiatisée) |
– canaux ne reposant pas sur une identification relationnelle particulière, plus impersonnels, comme les centres d’information, les institutions, la presse…, un support (papier par ex.) autre qu’une discussion pouvant être à l’origine de l’information |
163 Cette question (cf. questionnaire en annexe 3) n’était pas prévue au départ de l’étude et a été incorporée à la demande pressante du commanditaire. Elle s’est avérée utilisable in fine. Par ailleurs, les personnes interrogées pouvaient ici fournir plusieurs réponses, et, comme indiqué à la note 12, les enquêtés ont ici aussi répondu spontanément à cette question sans avoir connaissance des items possibles précodés sur le support d’enquête. Le grand nombre des réponses « autres » (près de la moitié) nous a amené à la traiter comme une véritable question ouverte que nous avons refermée a posteriori.
164 Lièvre (1985, 1995), cf. chapitre 1, § 1.2.5.4.
5.4.1.2. Les modes d’accès aux dispositifs de formation
Les personnes interrogées pouvaient ici fournir plusieurs réponses (tableau 27). Tout d’abord, si l’on prend l’ensemble des dispositifs, plus de 60% des personnes interrogées ont accédé à leur formation par des canaux relationnels, c’est par eux qu’on a la bonne information, celle qui paraît pertinente.
Au sein de cela, le mode relationnel amical, qu’il soit interne ou externe au milieu de formation (donnée plus fine présentée dans le tableau 11, annexe 4), domine presque partout (40% des réponses).
Par ailleurs, expression d’une recherche active par opposition aux situations dans lesquelles l’information s’impose presque « naturellement » à l’individu à travers par exemple les discussions journalières avec l’entourage, les démarches personnelles représentent plus du quart des réponses (27,6%).
Tableau 27. Mode d’accès des étudiants dans la formation suivie
Fréquence de citation des items (réponses multiples possibles) | DispositifA78 rép. | DispositifB95 rép. | DispositifC35 rép. | DispositifD56 rép. | DispositifE30 rép. | Ensemble294 rép. | |
Mode relationnel | Canal relationnel interne à l’institution (camarade, pro- fesseur de la faculté, école) | 25,7% | 48,2% | 12,5% | 7,8% | 18,5% | 27,2% |
Canal relationnel externe (amis, famille, milieu professionnel) | 41,4%(amical dominant) | 28,2% | 28,1% | 53,0%(profesneldominant) | 14,8% | 35,1% | |
Mode non relationnel (médiatisé) | Démarche personnelle au-près de centre d’information (Cio, Cidj, Onisep…), d’ins- titution (fac…) ou de l’Anpe | 32,9% | 16,4% | 15,6% | 29,4% | 59,2% | 27,6% |
Annonce presse, affichage, plaquettes | 5,7% | 10,6% | 47% | 6% | 14,8% | 13,2% | |
Divers nonidentifiés | 5,7% | 8,2% | 6,3% | 13,7% | 3,7% | 7,9% |
Les réponses à cette question distinguent nettement les dispositifs entre eux. En toute bonne logique, les canaux d’accès pour chacun d’eux portent la marque des stratégies de recrutement de leurs responsables, et des filières qui se sont organisées autour de cela.
Ainsi les canaux relationnels dominent pour les dispositifs A, B et D, mais leur implantation diffère selon les cas. Pour B le réseau interne au milieu de formation prime, complété par une part non négligeable de canaux relationnels externes.
Pour les dispositifs A et D, c’est le réseau relationnel hors de l’institution qui domine (amical pour A, professionnel pour D), même si le quart des étudiants a accédé au dispositif A par une filière interne à l’institution.
A l’inverse, les canaux non relationnels dominent pour les formations E et C, mais on doit noter cependant une part non négligeable de canaux relationnels externes (essentiellement professionnels) pour C, cohérente avec la proportion d’étudiants disposant d’une expérience professionnelle antérieure (cf. § 5.3.3.2.).
Les résultats pour chaque dispositif peuvent se résumer ainsi :
Dispositif A : on en parle beaucoup à l’extérieur de l’institution (40% des réponses), mais on y accède aussi par des canaux relationnels internes ou en cherchant soi-même (effet de réputation ?).
Dispositif B : les canaux relationnels internes (étudiants+enseignants) représentent près de la moitié des modes d’accès, surtout suite à des échanges entre étudiants de la même institution (dimension filière interne forte), les canaux relationnels externes fournissant tout de même plus d’un quart des modes d’accès.
Dispositif C : devant assumer leurs objectifs d’alimentation extra nationale, les responsables de ce dispositif ne peuvent s’inscrire que dans une logique de recrutement à spectre large s’appuyant tant sur un usage important de canaux non relationnels (les annonces dans la presse, 47%), que sur des réseaux professionnels qui restent à développer pour l’instant du fait de sa création récente (28%).
Dispositif D : ce dispositif est fortement marqué par son ancrage professionnel (l’association avec une agence formation-conseil du secteur culturel, cf. § 5.2.3.) qui caractérise l’essentiel des réseaux d’accès le concernant : plus de la moitié des étudiants ont accédé à ce dispositif à travers une relation professionnelle ou amicale, hors de l’institution universitaire de rattachement.
De plus, on doit noter que ce dispositif se caractérise par une forte proportion d’étudiants se situant dans la tranche d’âge des plus de 30 ans (cf. § 5.3.1.2.), et lorsqu’on est dans ce cycle de vie, les amis sont aussi souvent d’autres professionnels.
Dispositif E : c’est surtout, et de manière écrasante, par un support non relationnel que les étudiants ont accédé à ce dispositif de formation (près de 60%).
De plus, si les échanges se font en partie au sein de l’institution de formation, il s’agit uniquement de relations entre élèves, le canal relationnel « enseignant » n’ayant jamais été cité (tableau 11, annexe 4).