Les différents types de liens porteurs d’amour

Les différents types de liens porteurs d’amour

Les différents types de liens porteurs d’amour

Nous l’avons évoqué, il y a de nombreuses qualités d’amour. Nous ne sommes pas loin de penser qu’il y a autant de natures et de profondeurs d’amour que de « je t’aime » qui sont prononcés. Pour clarifier les formes d’amour qui se donnent à vivre, Alberoni propose une catégorisation qui a retenu notre intérêt et qui va nous permettre de mieux cerner les contours de la « relation de couple ». Pour l’auteur, les liens d’amour qui unissent les personnes entre-elles se répartissent en trois catégories : les liens forts, les liens moyens et les liens faibles.

Les liens forts

« Les liens forts sont ceux qui s’établissent pendant l’enfance entre l’enfant et ses parents, entre frères et sœurs. Les liens forts sont exclusifs. Personne ne peut prendre la place de notre père, de notre mère ou de notre enfant. Les liens forts résistent au changement du caractère ou à la modification de l’aspect physique ». Les liens forts seraient-ils donc circonscrits aux liens familiaux ? Non, pour Alberoni, ces mêmes liens forts peuvent se tisser à la faveur d’une rencontre : « La seule force capable d’établir un lien fort en dehors de l’enfance, en dehors des liens familiaux, est l’énamourement. » (Alberoni, op. cit., p.10). Deux personnes qui ne se connaissaient pourtant pas tombent amoureuses l’une de l’autre et par là même « deviennent indispensable l’une à l’autre » (Ibid.).

Faisons là une parenthèse pour définir succinctement ce qu’Alberoni entend par énamourement.

L’énamourement semble se rapprocher de ce que l’on nomme communément l’état amoureux associé à un état d’amour : « L’énamourement n’est pas seulement érotisme ou plaisir. C’est une expérience unique et incomparable, un bouleversement radical de la sensibilité, de l’esprit et du cœur, qui fond ensemble deux êtres différents et éloignés. L’énamourement transfigure le monde, c’est une expérience sublime. C’est un acte de folie, mais aussi la découverte de sa propre vérité, de son propre destin.

C’est une faim, un violent désir mais, en même temps, l’élan, l’héroïsme et l’oubli de soi » (Alberoni, op. cit., p.12). Dans un soucis d’adhérer aux faits, l’auteur reconnaît que tous les couples ne se fondent pas sur ce processus.

Certains couples reposent sur « l’attirance érotique, le plaisir d’être ensemble, l’habitude, l’aide réciproque, le besoin économique » (Ibid., p.13) mais il affirme que le mécanisme fondamental par lequel les liens amoureux forts se forment dans la vie adulte est l’énamourement. Ces éléments apportent un éclairage sur ce qu’il faut entendre par « relation de couple » en confirmant que les ressorts qui font la force de ces relations peuvent être de nature très différente.

Les liens moyens

Revenons à la description qu’Albéroni nous donne concernant les différents liens amoureux pour peut- être mieux appréhender l’expérience de l’inter réciprocité humaine (Alberoni, op. cit., pp.9-10). Qu’en est-il des liens moyens ? « Les liens moyens sont ceux qui s’établissent avec les amis intimes.

Ceux à qui nous nous confions, ceux qui jouissent de notre confiance. L’amitié est libre, désintéressée, exempte de la jalousie et des envies que nous trouvons parfois même entre frères. Mais même l’amitié la plus solide est vulnérable. Si notre ami nous déçoit ou nous trahit, quelque chose se brise pour toujours » (Alberoni, op. cit., p.9).

L’auteur nous propose-t-il une vision idéalisée de l’amitié en tant que une relation qui exclurait la jalousie par exemple ? Quoi qu’il en soit, pour l’auteur qui, dans sa recherche, s’est également consacré à l’amitié (1995), celle-ci se distingue des liens forts.

Les liens faibles

Les liens faibles ont de multiples visages. Ce sont par exemple « ceux que nous établissons avec les camarades de travail, les voisins et les amis de vacances » (2005, op. cit., p.10). Enlevons peut-être quelques idées reçues avec ce qui suit : « de nombreuses formes d’attraction érotique, mêmes intenses, créent des liens faibles. Une personne peut nous plaire, nous pouvons la désirer follement, mais il suffit d’un mot grossier, d’un geste vulgaire et méprisant, et nous n’avons plus envie d’être avec elle.

Il arrive qu’une fois le rapport sexuel terminé nous voudrions être déjà loin » (Ibid.). Il est bon de noter ici le fait que pour Alberoni, la force réelle d’un lien n’a que peu de rapport avec l’intensité que celui-ci fait vivre. Autre paramètre, celui de la durée qui s’exprime ici sous une forme particulière.

Même si la rencontre érotique n’a comme temporalité que celle d’un moment, « le fait que le lien soit faible ne signifie cependant pas que nous oublions la relation. […] Entre deux personnes qui ont fait l’amour il reste souvent un lien subtil de confiance et d’intimité, voire de complicité qui ressemble à l’amitié » (Alberoni, op. cit., p.10).

Ces précisions nous semblaient importantes pour inviter à différencier la relation sexuelle née de l’énamourement de celle vécue dans une rencontre peut-être plus charnelle qu’engageante affectivement. Rappelons que la première entre dans les liens forts alors que la deuxième appartient aux liens faibles.

Qu’est-ce qui caractérise les liens faibles alors ? Pour l’auteur : « La faiblesse du lien signifie seulement que nous n’éprouvons pas le besoin de nous trouver avec cette personne, que sa présence ne nous manque pas. Que nous ne formons pas avec elle une collectivité compacte, un ‘nous’ solidaire, uni par une foi, par un amour, par un devoir ou par un destin » (Ibid.).

Retour sur la relation de couple

Nous pouvons donc présupposer que pour qu’une relation soit répertoriée dans les liens forts, elle doit peut-être réunir les personnes autour de la donnée conjointe d’une durée et d’un chemin commun. Alberoni définit en effet le couple comme « une unité dynamique, un creuset créatif dans lequel deux personnalités se fondent, s’allient, discutent et se complètent afin d’affronter un monde de plus en plus complexe. L’amour est le mordant de cette tension et de cette union » (Alberoni, op. cit., p.8).

L’alchimie de la rencontre reste mystérieuse mais quand les liens forts se créent, le couple développe une solidité : « L’amour rend les individus malléables, les fond ensemble, les transforme et les soude. Il crée des liens forts capables de résister à des traumatismes, à des conflits et à des déceptions » (Ibid., p. 14).

Au passage, nous pourrons nous interroger sur le double mouvement que semble combiner l’énamourement, à savoir un développement de soi et de ses envies en même temps qu’un oubli de soi pour l’autre.

Enfin, il pourrait être intéressant d’examiner, au vu de l’expérience décrite par nos participants dans leur rencontre avec le mouvement interne, si celle-ci ne porte pas en elle les caractéristiques d’un énamourement, mais cette fois-ci avec la vie dans soi. Autre questionnement, de quelle nature est le lien que les personnes bâtissent avec le sensible ? Ce lien, spécifique dans la mesure où il concerne un partenaire intérieur à soi, entre- t-il dans l’une des catégories avancées par Alberoni ou celles-ci ne sont-elles pas adaptées pour caractériser cette relation ?

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