Définition et applications de la théorie d’adéquation des ressources

3.1.2 Définition et applications de la théorie d’adéquation des ressources

Principe

La théorie d’adéquation des ressources est initialement décrite par Anand et Sternthal (1989). Elle repose sur deux construits principaux : le niveau de ressources disponible et le niveau de ressources exigé. Les ressources disponibles correspondent aux capacités mentales que l’individu est en mesure de fournir pour traiter le message publicitaire.

Les ressources exigées correspondent aux capacités nécessaires pour que le message soit traité de façon adéquate (Larsen, Luna et Peracchio, 2004). D’après cette théorie d’adéquation des ressources, une publicité s’avère d’autant plus persuasive que le niveau de ressources nécessaire pour la traiter coïncide avec le niveau de ressources que l’individu souhaite et est en mesure de fournir pour la traiter (Anand et Block, 1997; Anand et Sternthal, 1989, 1990).

De nombreuses recherches ont recours à cette théorie pour étudier l’efficacité publicitaire (Larsen, Luna et Peracchio, 2004; Meyers-Levy et Malaviya, 1999; Meyers-Levy et Peracchio, 1995; Peracchio et Meyers-Levy, 1997; Powell-Mantel et Kellaris, 2003).

La plus grande efficacité de la publicité dans les cas d’adéquation des ressources s’explique de la façon suivante. Premièrement, lorsque le niveau de ressources exigé excède le niveau de ressources disponible, l’individu n’est pas en mesure de traiter le message dans sa totalité. Il doit alors compenser cette insuffisance en utilisant une stratégie heuristique de traitement de l’information, moins coûteuse en ressources cognitives (Peracchio et Meyers- Levy, 1997). Dans ce cas d’adoption d’une stratégie heuristique, le degré d’élaboration est minimal et le jugement est effectué sur la base d’indices périphériques (Powell-Mantel et Kellaris, 2003).

Ainsi, seul un faible niveau d’information se trouve être encodé et mémorisé. De plus, comme les arguments ne sont pas traités ou seulement de façon partielle, le pouvoir persuasif du message est limité. Deuxièmement, lorsque le niveau de ressources disponible excède le niveau de ressources exigé, l’individu tend à utiliser cet excédent de ressources pour élaborer des contre-arguments ou des pensées hors-sujet par rapport au message publicitaire (Anand-Keller et Bloch, 1997). Dans cette situation, le pouvoir persuasif du message est également limité.

Le tableau 1 présente une synthèse des différents cas possibles selon, d’une part le modèle de probabilité d’élaboration (ELM), et d’autre part la théorie d’adéquation des ressources.

Tableau 1 Une synthèse du modèle de probabilité d’élaboration (ELM) et de la théorie d’adéquation des ressources (RMT)

Ressources exigées

Ressources

disponibles

Publicité simplePublicité complexePublicité très complexe
FaiblesRoute périphérique ELM + RMT : Traitement heuristique du message
ElevéesRoute centrale ELM
RMT :

Elaboration de pensées idiosyncratiques et de contre-arguments

RMT : Persuasion maximaleRMT:

Traitement incomplet du message

Applications

Bien que cette théorie ait été développée il y a seulement une vingtaine d’années, il existe déjà un important volume de recherches faisant appel au principe d’adéquation des ressources. Anand et Sternthal (1990), par exemple, utilisent cette théorie pour étudier les effets de la répétition d’un message publicitaire radiophonique sur son pouvoir persuasif.

Les auteurs font varier le nombre d’expositions au message pour opérationnaliser le niveau de ressources disponible. Ils s’appuient pour cela sur l’argument de Cacioppo et Petty (1979), selon lequel la répétition d’un message permet à l’individu de disposer d’un supplément de temps pour réfléchir aux arguments présentés. Ce supplément de temps est alors l’équivalent d’un supplément de ressources.

De plus, Anand et Sternthal manipulent le niveau de ressources cognitives exigé selon le protocole de Galizio et Hendrick (1972) : un niveau élevé (message chanté), un niveau intermédiaire (message parlé sur fond musical), et un niveau faible (message parlé sans musique). Les auteurs montrent que l’effet de la répétition du message (niveau de ressources disponible) sur les évaluations de la marque est modéré par sa présentation lue ou chantée (niveau de ressources exigé).

Peracchio et Meyers-Levy (1997) utilisent la théorie d’adéquation des ressources pour étudier l’influence de la présentation des arguments d’une publicité-presse sur l’évaluation du produit promu. Le niveau de ressources disponible est ici manipulé à l’aide de la motivation des répondants : les répondants motivés disposent de plus de ressources disponibles que les répondants peu motivés.

Le niveau de ressources exigé est quant à lui manipulé par deux variables d’exécution publicitaire, selon les recommandations de Milton (1974): la présentation des arguments – factuelle (niveau faible) ou narrative (niveau élevé) -, et le lien entre le texte et l’image – séparation (niveau faible) ou imbrication (niveau élevé). Conformément à la théorie d’adéquation des ressources, les auteurs observent une triple interaction de la motivation du consommateur, de la rédaction des arguments, et de la position du texte par rapport à l’image.

La théorie d’adéquation des ressources s’avère très utile en publicité car ses implications sont directement transposables en termes de média-planning et de création publicitaire. Malaviya et Sternthal (1997) montrent ainsi comment cette théorie permet d’expliquer les résultats contradictoires relevés dans la littérature concernant les effets de la répétition d’une publicité sur l’élaboration de jugements vis-à-vis d’un produit.

En effet, certaines études montrent que la répétition a un effet positif sur l’élaboration de jugements favorables (Gorn et Goldberg, 1980), tandis que d’autres ne trouvent aucun effet (Burke et Srull, 1988; Rethans et al., 1986), voire certaines trouvent que la répétition entraine une diminution des jugements favorables (Petty et Cacioppo, 1979).

Selon Malaviya et Sternthal (1997), la théorie d’adéquation des ressources permet de comprendre ces résultats lorsque la répétition du message publicitaire est considérée comme l’opérationnalisation du niveau de ressources disponible. Ainsi, lorsque le niveau de ressources disponible lié au nombre de répétitions du message est en adéquation avec le niveau de ressources nécessaires pour traiter le message, les attitudes sont positives. En revanche, si les deux niveaux ne correspondent pas, les attitudes sont neutres, voire négatives.

Anand et Sternthal (1990) illustrent comment les média-planneurs peuvent tirer parti de la théorie d’adéquation des ressources. D’après les auteurs, si un message publicitaire est rendu moins persuasif du fait d’une exposition trop fréquente (surplus de ressources disponibles), deux solutions s’offrent aux managers pour y remédier. Ils peuvent décider de façon conventionnelle de réduire la fréquence d’exposition au message, réduisant ainsi le niveau de ressource disponible. Mais cette approche a l’inconvénient de réduire par la même occasion la part de voix de l’annonceur.

La deuxième solution, plus prudente, consiste alors à augmenter le niveau de ressource exigé par le message, par exemple en augmentant la complexité de la publicité. De façon similaire, si le message est moins persuasif du fait d’un surplus de ressources exigées pour le traiter, la solution conventionnelle consiste à augmenter le niveau de ressource disponible en augmentant la fréquence d’exposition au message. Mais cette option est coûteuse. On peut atteindre le même objectif en réduisant le niveau de ressource exigé pour traiter le message.

Enfin, Meyers-Levy et Peracchio (1995) dégagent de la théorie d’adéquation des ressources des implications en termes d’utilisation de la couleur vs. du noir et blanc dans les publicités. Dans le cas où le consommateur est motivé pour traiter le message de la publicité, c’est-à-dire quand le niveau de ressources disponible est élevé, l’usage de la couleur peut s’avérer utile pour obtenir des évaluations favorables.

En effet, si la publicité requiert peu de ressources pour être traitée, le consommateur dispose d’un surplus de ressources qui l’entraîne à élaborer des contre-arguments ou des pensées sans rapport avec le message. Pour y remédier, l’utilisation de la couleur permet d’augmenter le niveau de ressources exigé pour traiter la publicité. Ceci permet donc d’équilibrer les niveaux de ressources exigé et disponible, entraînant alors de meilleures évaluations de la publicité.

En revanche, si la publicité requiert beaucoup de ressources pour être traitée, le consommateur manque de ressources pour traiter le message dans sa totalité. Ainsi, il ne sera traité que de façon partielle, réduisant le pouvoir persuasif de la publicité.

Pour y remédier, l’usage du noir et blanc permet de diminuer le niveau de ressources exigé, ce qui permet d’obtenir des évaluations plus favorables par l’harmonisation des niveaux de ressources.

Pour citer ce mémoire (mémoire de master, thèse, PFE,...) :
📌 La première page du mémoire (avec le fichier pdf) - Thème 📜:
La fatigue du consommateur et le traitement visuel d’une publicité
Université 🏫: Université Paris 1 Panthéon – Sorbonne
Auteur·trice·s 🎓:
Dina Rasolofoarison

Dina Rasolofoarison
Année de soutenance 📅: Thèse en vue de l’obtention du Doctorat en sciences de gestion - 21 septembre 2011
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