Difficultés culturelles dans une entreprise franco-néerlandaise

Les réalités et difficultés culturelles dans une entreprise franco-néerlandaise – Chapitre 2 :
Dans le chapitre 1 a été mis en perspective l’état des lieux et le contexte pour les relations commerciales entre la France et les Pays-Bas. Cet état des lieux n’insiste que sur les aspects économiques et financiers d’une entreprise, dont lesquels un entrepreneur a tendance à considérer notamment ces facteurs-ci, comme par exemple les chiffres d’affaires, le nombre d’employés, la conjoncture, etc. Toutefois, nous voudrions également insister sur l’importance des facteurs linguistiques et culturels dans le contexte économique d’une société – ces facteurs sont souvent sous-estimés. Ce chapitre montre l’importance d’une prise de conscience des différences culturelles qui se manifestent lors d’une rencontre professionnelle bilatérale. D’abord, nous montrerons le cadre supranational en expliquant le rôle de l’Union européenne. Ensuite, nous nous concentrons sur un contexte plus étroit, c’est-à-dire les réalités et difficultés dans le contexte franco-néerlandais.
2.1 Langue et culture : attitudes et attentes commerciales en France et aux Pays-Bas
2.1.1 La définition de « culture »
Avant que les réalités et défis dans le domaine de la culture puissent être traités, il faut d’abord expliquer le terme de « culture ».
Le terme de la culture apparaît dans plusieurs disciplines. Par exemple, selon Leezenberg et De Vries 53, la définition de culture trouve ses origines dans le monde intellectuel allemand. Durant la deuxième moitié du XVIIIe siècle, il est question d’un changement de sens vers l’aspect intellectuel. Le fait que l’Allemagne et la France sont encore des opposants à ce moment -là fait que les termes de « Kultur » et « civilisation » sont diamétralement opposés. Ainsi les termes de « culture » et « civilisation » auront une connotation politique jusqu’au XXe siècle 54.
Langue et culture : attitudes et attentes commerciales en France et aux Pays-Bas
Au XXIe siècle, la définition de « culture » devrait être moins chargée politiquement. Est-ce que cela est le cas et quelle est la définition contemporaine de « culture » ? Dans le manuel de Holliday, Hyde et Kullman 55 est donnée la définition de culture comme elle a été définie et interprétée dans le domaine académique. Premièrement, Fay voit une culture comme l’ensemble des croyances, valeurs et concepts partagés. Cet ensemble qui est propre à une nation détermine la façon d’agir. Fay compare la civilisation d’un individu comme apprendre à lire : un individu apprend un vocabulaire et une grammaire qui seront l’outil pour lire un texte. De la même manière, un individu fait partie d’une culture et apprend les valeurs qui sont en vigueur et c’est par ce processus que l’individu apprend à faire partie d’une culture et donne sens à son existence au milieu d’un groupe auquel on appartient. Cependant, Fay ne considère pas péremptoire cette explication. Car en pratique, une culture est beaucoup plus complexe. La culture est l’ensemble de plusieurs membres d’un groupe culturel des histoires hétérogènes, intérêts divergents et interprétations antagonistes. Cela résulte dans une culture qui est loin d’être uniforme et il s’agit plutôt des différences et opposition. Le fait que le monde se modernise et les distances relatives diminuent, les cultures s’ouvrent vers les autres cultures et on est capable d’emprunter des éléments culturels de l’autre 56.
Ensuite, Roberts et Sarangi se concentrent sur la définition de culture dans la pratique des Linguistiques Appliquées (AL) et de la Communication Interculturelle (ICC). Ils considèrent problématique que les approches des chercheurs ont réduit le terme de « culture » à un modèle du comportement communicatif et que ce modèle peut être interprété seulement sur un niveau plus élevé d’abstraction. Ce qui est problématique, selon eux, c’est que les interactions sociales et réalités socio-politiques ne se correspondent pas. Ainsi s’agit-il d’un réductionnisme qui est propre aux études d’AL et d’ICC. Appliqué à notre sujet, cette problématique peut être analysée dans le contexte d’un e-commerce français aux Pays-Bas. Comme Roberts et Sarangi le soulignent, il ne faut pas penser en termes de distances géographique et linguistique qui augmenteront les différences culturelles au lieu de les réduire. Bien évidemment, un entrepreneur français qui ne connaît pas encore bien le marché néerlandais rencontrera des obstacles lors de l’implantation. Par exemple : quelle est la législation de la TVA aux Pays-Bas ? Et est-ce qu’il est nécessaire d’avoir un site web en néerlandais ou en anglais ? Roberts et Sarangi s’aperçoivent de trois problèmes majeurs de ce raisonnement. D’abord, le focus d’AL et d’ICC est concentré aux problèmes et difficultés, qui sont utilisées pour une communication ratée. Puis après, « culture » est limitée à une référence de ressources, modèles de comportement et valeurs fixes. Finalement, « culture » devient un terme négatif au lieu de positif à cause d’un focus sur les différences qui compliquent la communication interculturelle 57.
Bref, un entrepreneur français qui souhaite s’implanter sur le marché néerlandais et qui se rend compte des différences culturelles et linguistiques est plutôt retenu de faire une démarche à l’étranger qu’encouragé. Cela est dû à l’approche des différences, sans prendre en compte les solutions possibles pour une démarche réussie. C’est pour cela qu’il faudra lui offrir de l’aide pour augmenter ses chances sur le marché néerlandais. Cela sera traité dans le troisième chapitre.
Finalement, l’approche essentialiste et non-essentialiste (« small cultures »). Il présume que « des choses particulières ont des points essentiels qui servent à identifier les choses particulières qu’ils sont » 58. L’approche essentialiste définit que les cultures sont encadrées par les particularités et qui peuvent être visitées par un membre d’une autre culture qui en distingue les différences en les catégorisant d’une ‘culture asiatique’ ou un phénomène ‘typiquement français’. On réfère ainsi à notre propre culture qui est comparée à une autre culture au niveau de la religion, de la politique, des ethnicités et des langues qui ont tous en commun l’essentiel du contenant. Bien que l’approche essentialiste puisse sembler logique et reconnaissable, il semble pourtant problématique en risquant la formation des stéréotypes, car les cultures sont assimilées 59. L’approche non-essentialiste ne considère pas la culture comme étant une place géographique à visiter et à laquelle on peut appartenir, mais une force sociale qui est évidente au moment où elle apparaît comme étant signifiante. De cette façon, elle n’encadre pas les différences, comme dans l’approche essentialiste. Ainsi, il s’agit des différences qui peuvent se montrer au sein des « small cultures » – qui appartiennent aux âges, familles et autres contextes sociaux – et « large cultures » avec les particularités d’une culture nationale. Dans le cas où il s’agit d’une différence culturelle au niveau de la « large culture », cela n’implique pas nécessairement que la différence est en vigueur pour chaque membre de la société en question 60.
Ces trois approches ont toutes en commun de se concentrer sur la culture dans la communication quotidienne et ses influences. Une autre définition qui est également basée sur la culture et la communauté dans les discours quotidiens, est celle de l’anthropologue social suédois Ulf Hannerz 61, qui constate de plus en plus souvent que les exemples donnés pour les termes de « culture(s) » et « culturel(le)(s) » ont un ton négatif 62.
Ayant exposé la définition de « culture », il est nécessaire de considérer quels sont les aspects « interculturels » qui se manifestent pendant l’implantation sur un marché étranger. Au début des sciences humaines au XVIIIe siècle, « culture » était encore un terme chargé politiquement, elle l’est aujourd’hui surtout dans un sens négatif et la définition exprime une force distinctive entre deux cultures. Cette constatation est alarmante 63 ; dans le cas où deux personnes de différentes cultures coopèrent, il peut donc être question d’une distance entre les deux, et la culture de soi-même est souvent considérée comme supérieure par rapport à l’autre 64. Cette distance et différence peuvent surcharger la communication interculturelle. Par conséquent, il y a besoin d’une analyse des différences culturelles qui peuvent mener à une balance entre les deux acteurs de différentes cultures. C’est pour cela qu’il faut tenir compte des identités culturelles aussi.
2.1.2 La définition d’« identité »
L’identité d’une personne est influencée par sa culture, c’est-à-dire qu’une personnalité représente une identité culturelle, ce qui mène à un comportement d’un individu qui peut être reconnu à l’aide des éléments qui sont propres à une culture. Pour expliquer la définition d’« identité », chacun peut sûrement puiser un exemple dans sa propre vie. Personnellement, étant Néerlandaise, j’aime bien manger mon croissant au jambon et fromage, ce qu’un Français trouve bizarre ; pour lui, les viennoiseries ne se mangent pas salées. Cependant, aux Pays-Bas, on peut trouver des croissants au jambon et fromage dans chaque boulangerie et supermarché. Donc quand un copain m’a vue préparer mon croissant au jambon et fromage, il m’a dit qu’il le trouvait « bizarre et dégueulasse ». Le fait que cette façon de manger est considérée bizarre par l’autre et qu’il y attache un jugement moral, montre que cette différence alimentaire révèle une différence culturelle. Donc, la culture française est considérée comme supérieure par rapport à la néerlandaise dans cette situation spécifique. De plus, cette situation montre que chacun considère les particularités de sa culture comme une évidence, tandis qu´un individu qui appartient à une autre culture le considère comme une différence 65.
Notre comportement est donc non seulement lié à nos discours quotidiens, mais se manifeste également dans notre vie personnelle, nos goûts et nos façons d’agir. Tout cela fait partie de l’identité d’un individu. Dans Holliday et al. 66, « identité » est décrite en deux parties : les identités culturelles innées et les identités culturelles créatives:
Les deux côtés d’une identité culturelle d’un individu
Figure 2. Les deux côtés d’une identité culturelle d’un individu 67.
Ce schéma montre qu’un individu a une identité culturelle propre à une nation et c’est par l’apprentissage que l’on a une identité culturelle héritée. Mais un individu a également une identité culturelle qui se développe au cours des années et qui est influencée par l’environnement dans lequel il vit. Cela peut être la religion, le passe-temps préféré, le travail, etc. d’un individu, car dans une société, chacun(e) est libre et unique. C’est pour cela que dans le schéma sont dessinés les deux identités, dont une est fixe et l’autre variable. De ces deux identités ressort l’individu même, qui a une identité qui lui est propre, grâce au fait que les êtres-humains sont tous libres et uniques.
Ayant expliqué les termes de « culture » et d’« identité », il faudra également traiter le sujet de la « langue » qui est le troisième facteur sous-estimé dans la coopération internationale. C’est notamment l’impact des difficultés linguistiques sur les échanges commerciaux qui doit être expliqué afin que l’on puisse concrétiser les défis du commerce international outre les facteurs économiques et financiers.
Lire le mémoire complet ==> (Lancer une entreprise e-commerce aux Pays-Bas
Un guide pour une implantation réussie
)

Mémoire de fin d’études – Université d’Utrecht
Master de Langue et Civilisation Françaises – Spécialisation: Communication Interculturelle
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53 Leezenberg, M. et G. de Vries (2001) Wetenschapsfilosofie voor de geesteswetenschappen. Amsterdam: Amsterdam University Press.
54 Ibid., p. 130.
55 Holliday, A., M. Hyde & J. Kullman (2010). Intercultural Communication. An Advanced Resource Book for Students. Londres: New York: Routledge, p. 69-74.
56 Holliday, A., M. Hyde & J. Kullman (2010). Intercultural Communication. An Advanced Resource Book for Students. Londres: New York: Routledge, p. 69-70.
57 Ibid., p. 71-72.
58 Bullock, A. et S. Trombley (1999). The New Fontana Dictionary of Modern Thought. New York: Harper Collins, p. 283.
59 Holliday, A., M. Hyde & J. Kullman (2010). Intercultural Communication. An Advanced Resource Book for Students. Londres: New York: Routledge., p. 72-73.
60 Holliday, A., M. Hyde & J. Kullman (2010). Intercultural Communication. An Advanced Resource Book for Students. Londres: New York: Routledge., p. 73-74.
61 Ibid., p. 63.
62 Ibid., p.63-65.
63 Conclusion de l’auteur même.
64 Beller, M. & J. Leerssen (2007). Imagology: The cultural construction and literary representation of national character, a critical survey. Amsterdam: Rodopi, p 429.
65 Cet exemple découle d’une expérience personnelle pendant une année Erasmus en France.
66 Holliday, A., M. Hyde & J. Kullman (2010). Intercultural Communication. An Advanced Resource Book for Students. Londres: New York: Routledge, p. 21.
67 Ibid.

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