B. Le modèle cognitif de la motivation au travail
Il s’agit de comprendre comment l’environnement conduit l’individu à construire ses motivations et d’analyser la façon dont il perçoit, comprend son environnement « Chacun d’entre nous réagit non pas à un environnement objectif, mais à celui qu’il perçoit, à la manière dont il interprète l’ensemble de la situation dans laquelle il travaille. »
Le modèle cognitif suppose que chaque individu se comporte de manière rationnelle, et qu’il décide consciemment de porter son effort vers des activités dont il prévoit qu’elles lui apporteront les résultats et les récompenses qu’il souhaite obtenir.
1. Valence/instrumentalité/expectation : modèle de VROOM, complété par la suite pas LAWLER et PORTER
L’hypothèse sous jacente à ce modèle pose que les choix individuels dont les choix professionnels (choix d’une tâche à accomplir, décisions concernant le niveau d’effort qui va s’ensuivre pour la réaliser) dépendent du produit de ces trois paramètres.
La valence est la caractérisation affective attachée par chacun aux résultats de ses activités. Il s’agit de la relation entre chaque individu et chaque résultat du travail. Elle n’est pas constante : elle évolue avec notre subjectivité.
La valence est liée à la hiérarchie de valeurs propres à une personne, à ses besoins du moment et à ce qu’elle croit être les conséquences de son comportement.
L’instrumentalité est la représentation des relations entre la performance (résultat immédiat du travail) et les résultats de second niveau à savoir : salaire, promotion, témoignage d’appréciation.
Si la perception de ces résultats de second niveau est valorisée, l’individu n’en sera que plus motivé pour réaliser son travail.
De même, si l’on ne comprend pas le pourquoi de la prime (résultat de second niveau), cette prime ne possède pas alors de pouvoir stimulant.
L’expectation est le troisième paramètre déterminant du processus motivationnel. Il s’agit de l’opinion que chacun a de lui même et de ses possibilités d’atteindre un but donné, dès lors qu’il produit les efforts nécessaires. En effet, on sera peu motivé si l’on sait d’avance qu’on ne parviendra pas à réaliser les buts fixés.
Ce paramètre met en jeu d’une part l’image que l’on a de soi et d’autre part la perception de son environnement : conviction de posséder les outils nécessaires, résultat d’une expérience précédente similaire, coopération adéquate ou non des autres collaborateurs.
La source de motivation reste la satisfaction des besoins, mais des besoins à valence positive, avec l’évitement des évènements à valence négative. Le modèle cognitif rationalise l’acteur : il cherche ainsi à maximiser son utilité (sa satisfaction) en en minimisant les coûts.
Cette perception de la motivation qui rend prégnants les processus cognitifs, nous montre que la composante affective n’est pas maîtresse dans l’art d’actionner le processus motivationnel. Au contraire, ce dernier est bien guidé par les deux facteurs.
2. Les théories de l’équité : le modèle d’Adams
Dans la même démarche (l’étude des rapports entre performance et satisfaction), ce chercheur révèle une facette déterminante de ce processus : le sentiment d’équité, de justice résultant du résultat (premier et second) du travail.
Il résulte d’un processus d’échange, de comparaison entre les « inputs » (ce que l’individu apporte à l’organisation) et les outputs (ce qu’il en reçoit), comparaison qui s’effectue par rapport à ce que donnent/reçoivent les collègues de travail. Ces deux composantes agissent à égalité sur la formation du sentiment d’(in)équité.
Cette comparaison est rationalisée par l’acteur, mais elle n’en reste pas moins subjective : ainsi, une nouvelle responsabilité peut être perçue comme une charge supplémentaire (input) ou comme un témoignage d’estime (output).
Le sentiment d’inéquité se caractérise par un déséquilibre provenant soit du fait de penser que la « récompense » est insuffisante par rapport aux inputs apportés, par exemple parce qu’elle leur est inférieure (je suis bien trop payé pour ce que je fais).
Dans le 1er cas, le motivation a tendance à se réduire, tandis que dans le second, elle a tendance à augmenter (on donne « plus » pour rétablir l’équilibre). Ainsi, dans un cas comme dans l’autre, les individus ajustent la quantité et la qualité de leur travail à ce que ce dernier leur apporte, pour rétablir ce qui leur paraît juste.
Des expérimentations ont validé cette hypothèse pour une large part, ce qui permet d’affirmer que des mécanismes cognitifs interviennent pour créer le sentiment d’équité et que celui-ci motive des comportements spécifiques.
Levy-Leboyer, Claude, La motivation dans l’entreprise, éditions d’Organisation, Paris, 2002, p.68
Vroom, V.H., Work and motivation, New York, Wiley, 1964
Porter, L.W., Lawler, E.E., Managerial attitudes and performance, Homewood, Dorsey Press, 1968
Adams, J.S., “Inequity in social exchange”, in L. Berkowitz, ed., advances in experimental and social psychology, Vol 2, 267-279, New York, Academic Press 1965
Transition
Les modèles cognitifs ne remplacent pas les schémas fondés sur la satisfaction des besoins, mais ils leur apportent un complément capital : l’idée que l’environnement de travail, en fonction de la perception que chacun en a, influe sur les comportements.
D’où l’importance de l’analyse des processus cognitifs qui sous tendent la signification donnée à l’environnement. Cependant, il fait combler un autre manque : analyser comment chacun passe du choix d’un but à sa mise en œuvre.
Comment passe t-on de l’intention à l’action ?