Le budget, Outil de communication financière

Le budget, Outil de communication financière

Le budget, outil de communication financière ?

Résumé

Le budget est un outil privilégié du contrôle de gestion, vis-à-vis duquel il assume de nombreuses fonctions. Focalisé sur la recherche d’efficience, il a pour objet d’accompagner la gestion des activités internes à l’organisation.

La pression des nouvelles réglementations et du marché des capitaux, les changements de l’environnement institutionnel se traduisent par une demande accrue d’information financière prévisionnelle. En vue de promouvoir son image et dans une quête de légitimité vis-à-vis des différentes parties prenantes, l’organisation utilise l’outil budgétaire comme vecteur de communication externe, ce qui, en retour, tend à modifier sa pratique.

Mots clés: Contrôle de gestion, communication externe, légitimité, pratiques budgétaires, environnement institutionnel

The budget is a very important device in management accounting, opposite which it takes up many duties. Focused on the search for efficiency, it has the aim of improving the management of the internal activities. The pressure of the new regulations and of the financial market, the changes of the institutional environment lead to an increasing demand for financial forecast. In order to promote its image and in a search of legitimacy with respect to the various actors, the organization uses the budgetary tool like external vector of communication, which, in return, tends to modify its practice.

Introduction

L’organisation est composée d’acteurs qui interviennent sur différentes missions et à différents niveaux de sa structure. Pour assurer la cohérence des actions, pour vérifier l’utilisation des ressources vers la mise en œuvre de la stratégie, pour offrir une rémunération équitable aux divers partenaires, il est utile d’avoir le contrôle de l’organisation.

Outil de communication financièreDepuis son apparition dans de grandes entreprises américaines dans les années 1920, le contrôle budgétaire a répondu à de nombreuses attentes. Dans une vision classique, la finalité de l’entreprise est la maximisation du profit, la comptabilité de gestion est là pour aider les managers en responsabilisant les acteurs sur des objectifs de performance à atteindre (Sponem, 2004, p49).

En facilitant la convergence des buts, il améliore l’efficacité de l’organisation et la consommation des ressources (Anthony, 1965) (1). Le contrôle budgétaire permet notamment un contrôle complet, rationnel et objectif de la direction sur les centres de responsabilité (Covaleski et Dirsmith, 1983). Cependant d’autres courants de recherche font référence à des influences externes sur les pratiques de gestion.

La théorie de la contingence s’intéresse notamment aux relations entre l’environnement et les systèmes comptables et de gestion de l’organisation (Otley, 1980). L’impact des relations de pouvoir et des conflits d’intérêts sur la gestion des entreprises sont abordés par Latour ou l’approche marxiste (cité par Baxter et Chua, 2003).

Ainsi, Bouquin (2001) définit quatre types de contrôle utilisés par les acteurs de l’organisation, « celui qui résulte de liens de subordination, celui qui découle de contrats de fourniture ou de coopération, celui qui s’instaure sans aucun contrat » et celui qui s’appuie sur la détention du capital; les propriétaires veulent ainsi « s’assurer que leurs intérêts sont servis par les actions des membres de l’organisation ».

Les organisations vont adopter des outils qui leur permettent d’afficher une image de société sous contrôle. Pour avoir accès aux ressources, pour obtenir la confiance des marchés financiers, l’entreprise va informer sur sa stratégie et sa rentabilité future au travers des données prévisionnelles. Ekholm et Wallin (2000), dans une étude sur les critiques adressées au budget, font ressortir que l’outil budgétaire peut notamment jouer un rôle de communication vis-à-vis de l’actionnaire.

Des théories plus récentes, comme la perspective néo-institutionnelle, expliquent la pérennité du processus budgétaire par sa capacité à répondre à des attentes autres que la recherche d’efficience. Ainsi, pour Meyer et Rowan (1977), l’apparence de comportement rationnel, véhiculé par le budget, permet aux organisations faisant face à l’incertitude de convaincre leur environnement institutionnel de leur légitimité. La firme augmente ses ressources et sa capacité de survie si elle montre qu’elle agit en conformité avec les attentes des parties prenantes.

Ce qui nous intéresse dans le contrôle budgétaire, ce n’est pas tant la façon dont il répond aux attentes des gestionnaires mais plutôt comment il rend compte des pressions externes ou comment il accompagne l’organisation dans sa quête de légitimité. Notre question de recherche sera la suivante :

En quoi l’utilisation du budget comme outil de communication externe peut-elle affecter sa pratique ?

Après avoir étudié le budget comme outil de gestion interne puis intra groupe, dans une première partie, nous étudierons la façon dont cet outil peut être affecté par les exigences externes. Puis, sous une approche néo-institutionnelle, nous nous intéresserons dans une troisième partie au changement de l’environnement institutionnel et plus particulièrement au lien entre l’évolution de la communication de la firme et les pratiques de gestion prévisionnelle. Nous aborderons l’enquête terrain en expliquant la méthode choisie, dans une quatrième partie et enfin nous aborderons les résultats et la discussion.

Cette étude constitue la première partie d’une recherche hypothético-déductive. Elle consiste à définir des hypothèses sur la base d’une revue de la littérature et à les affiner au travers d’une enquête exploratoire, réalisée sous forme d’interviews auprès de neuf groupes de sociétés.

Le budget et ses utilisations

Le budget, outil de gestion interne

Le budget est apparu dans de grandes entreprises nord-américaines et d’une manière quasi simultanée en France et en Angleterre (Berland et al, 2001). Dans une approche classique, les hypothèses qui sous-tendent les pratiques de gestion sont les suivantes : les salariés sont réfractaires au travail, peu rentables et non efficients. Le rôle des managers est d’assurer la maximisation du profit de l’entreprise et donc de contrôler le travail des salariés.

La comptabilité de gestion va servir ces finalités. Pour Berland, (1999a), un certain contexte économique et idéologique a favorisé le développement plus particulier du contrôle budgétaire. Des réflexions sur la place de l’homme dans l’organisation ont accompagné le découpage de l’entreprise en centres autonomes, la responsabilisation des managers et la coordination par les résultats.

Le budget va devenir un outil central en contrôle de gestion et répondre à de nombreuses fonctions : autorisation de dépenses, prévisions d’évènements, planification, communication interne et coordination des actions, motivation des managers et évaluation des performances (Otley, 1977).

Il apparaît surtout que les rôles prêtés au contrôle budgétaire sont orientés vers la gestion interne de la firme et la recherche d’efficience. Par ailleurs, les différentes études font ressortir que ces différents rôles ne peuvent être remplis tous en même temps car certains sont contradictoires (Barett et Fraser, 1977) (2) et que l’utilisation des budgets doit être abordée dans son contexte. Ainsi certains jeux politiques dans l’entreprise vont influencer la présentation des données prévisionnelles.

Le budget est à la fois un outil de contrôle des unités pour le top management et un outil d’aide à la gestion pour les managers intermédiaires (Otley, 1977). Ces derniers perçoivent le budget plus comme un outil les contrôlant que comme un moyen à leur disposition, et ont tendance, en réaction, à créer du slack.

Selon Lowe et Shaw, (1970) (3), il y aurait trois sources de slack budgétaire. Il peut se caractériser par une sous-estimation des objectifs prévus afin de faire apparaître la performance réelle comme plus élevée. A l’opposé, il se matérialise aussi par une prévision optimiste, soit pour se conformer à une vision globale du top management, soit pour contrecarrer un sentiment d’insécurité face à une faible performance passée.

Pour Otley, (1977), ces trois sources de slack sont basées sur un comportement économique rationnel d’individus cherchant à trouver un équilibre entre une croissance de leur résultat futur et le maintien de leur sécurité actuelle.

Dans une approche classique et économique, le budget est un dispositif interne à l’organisation. Assimilé à un outil rationnel, il a pour objectif principal une amélioration de l’efficience. Le budget sert la coalition dominante en permettant un contrôle de l’activité des opérationnels et en orientant les comportements vers l’atteinte des objectifs de l’organisation.

Mais les responsables peuvent, dans le cadre de relations politiques, créer du slack pour conserver des marges de manœuvre. Le budget devient alors un enjeu de pouvoir. Cependant l’influence du budget dépasse la seule organisation et certaines recherches ont cependant mis en exergue les utilisations du budget dans les groupes d’entreprises.

Le budget, outil de contrôle intra groupe

Le budget s’est développé en Amérique du Nord dans des entreprises « confrontées à une

forte obligation de performance en matière de capitaux investis. » (Escoffier, 2000). Il répond à une demande des dirigeants actionnaires qui cherchent à contrôler que la mise à disposition du « cash » et que la délégation de pouvoir vis-à-vis des managers sont bien utilisées selon leurs attentes.

Le budget n’est donc pas uniquement un outil de gestion interne, mais il répond à un besoin d’information et de contrôle des actionnaires, qui ne sont pas forcément dirigeants ou salariés de l’entreprise. La typologie de Goold et Campbell (1987) (4) analyse, dans une étude réalisée en Grande Bretagne, le style de management de la société mère vis-à-vis de ses filiales et le mode de contrôle que cela induit.

A ce titre, elle constitue une approche du contrôle « externe ». « Les propriétaires doivent encore s’assurer que leurs intérêts sont servis par les actions des membres de l’organisation. Il leur faut donc orienter et suivre ces actions » (Bouquin, 2001).

Pour Goold et Campbell, le centre, c’est-à-dire la société mère, peut influencer les managers opérationnels de deux façons : en s’impliquant dans la stratégie des Business Units ou en intervenant dans le mode de définition des objectifs et en mettant en place un système de pression et d’incitations liées aux objectifs. De l’implication plus ou moins forte du centre dans la stratégie ou le contrôle des filiales, les auteurs vont dégager trois styles de management : la planification stratégique, le contrôle stratégique et le contrôle financier.

Les résultats de cette étude ont été complétés par les travaux de Berland (1999a) qui établit un lien entre le style de gestion du groupe et l’usage qui est fait des budgets. Le mode de contrôle est flexible, le contrôle budgétaire est peu utilisé, dans le cas de la planification stratégique. Il est utilisé pour vérifier la cohérence d’ensemble, dans le contrôle stratégique. Et, enfin pour le contrôle financier, le budget est utilisé comme un contrat passé entre le centre et les managers opérationnels.

Dans le cas des relations entre les filiales et la société mère, le budget sert des finalités qui sont à mi-chemin entre un contrôle interne, intra groupe, et un contrôle externe, tel qu’il est perçu par la filiale.

La littérature nous informe sur la disparité des fonctions et des pratiques budgétaires. Il existe cependant une constante dans les différents rôles observés, ils servent une même finalité : la gestion de la performance organisationnelle.

(1) Cité par Bouquin (2001)

(2) Cité par Berland, 1999a

(3) Cité par Otley, 1977

(4) Cité par H.Bouquin, 2001, N.Berland, 1999a, S.Sponem, 2004

Le budget est un outil central en contrôle, il s’insère donc parfaitement dans cette démarche de gestion interne. Certains travaux montrent qu’il est aussi influencé dans ses pratiques par une pression du groupe. La typologie de Goold et Campbell présente le budget comme servant des finalités de contrôle « externe ». La question qui se pose est de savoir si le budget peut servir à communiquer à l’extérieur du groupe et à quel titre : comme outil de contrôle externe ou comme facteur de communication financière.

Le budget, outil de communication financière ?

Introduction
1. Le budget et ses utilisations
1.1 Le budget, outil de gestion interne
1.2 Le budget, outil de contrôle intra groupe
2. Le contrôle budgétaire face à différentes attentes externes
2. L’influence externe sur le contrôle budgétaire
2.1 Le budget dans une quête de légitimité
1.2 Théorie néo-institutionnelle et contrôle budgétaire
3. Le contrôle budgétaire instrument de communication
2. Le changement de philosophie comptable
2.2 Communication financière
3 Enquête terrain
3.1 Méthodologie
3.2 Résultats
4. Discussion
Conclusion

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