Les implications politiques restavèk révèlent une réalité troublante : entre 41 et 46 millions d’individus vivent encore sous l’esclavage moderne. Cette recherche met en lumière les conditions inhumaines des enfants haïtiens, tout en questionnant la persistance de cette pratique malgré les efforts des défenseurs des droits humains.
1. Le système restavèk et l’esclavage
L’esclavage contemporain ou encore l’esclavage moderne fait référence à l’esclavage qui continue d’exister dans la société actuelle. L’OIT estime qu’il y aurait entre 41 et 46 millions d’esclaves. 24,9 millions de ces personnes sont restreints au travail forcé, 16 millions sont exploités dans le travail domestique, 4,8 millions de personnes sont exploitation sexuelle et 15,4 millions de personnes sont mariés contre leur gré.
Cependant ces chiffres sont débattus puisqu’il n’existe pas de définition universellement acceptée pour décrire l’esclavage moderne (OIT, 2017). Même si le contexte de l’esclavage dans la société d’aujourd’hui peut-être différent, une masse abondante et croissante de preuves provenant de chercheurs démontre qu’il y a des similitudes entre l’esclavage actuel et l’esclavage passé (Bales, 2007).
La Convention des Nations Unies) mentionne que l’esclave est « le statut ou la condition d’une personne sur laquelle tout ou une partie des pouvoirs attachés au droit de la propriété est exercée » (Nation Unies, 1926).
Selon Bellagio-Harvard, basé sur la Convention de 1926, l’esclavage se rapporte à la notion de possession et au traitement associé à la propriété privée. Lorsque l’esclavage était une institution légale, les esclaves étaient la propriété privée de leurs maîtres et étaient traités comme tels à travers le monde. Les propriétaires détenaient des droits sur leurs biens tandis que les esclaves eux-mêmes n’avaient aucun droit sur leur personne.
Actuellement, l’esclavage est illégal en droit international et le droit de propriété n’est plus protégé lorsqu’il concerne la possession d’un être humain. Cependant, l’esclavage est persistant et continue d’exister illégalement dans le monde entier (Bellagio-Harvard, 2012).
La convention de 1926 explique les pouvoirs attachés au droit de propriété ne doivent pas être reconnue, mais exercée pour rendre la relation entre les deux parties impliquées comme de l’esclavage. Lorsque l’exercice de pouvoir a lieu et qu’une personne est traitée comme la propriété d’autrui, elle ne bénéficie plus d’aucune protection juridique en vertu du droit international, il est alors établi que la relation entre la personne perçue comme un bien et son propriétaire est une relation d’esclavage.
Bellagio-Harvard fait aussi comprendre que le contrôle constitutionnel sur une personne de manière a le privé de sa liberté individuelle dans le but de l’exploiter et de l’utiliser constitue aussi une forme d’esclavage (Bellagio-Harvard, 2012). L’auteur donne six exemples ou la présence de l’esclavage est évidente soit :
- acheter, vendre ou transférer une personne
- utiliser une personne
- gérer l’utilisation d’une personne
- profiter de l’utilisation d’une personne
- transférer une personne à un héritier ou un successeur
- élimination, mauvais traitements et négligence envers une personne (Bellagio-Harvard, 2012).
Le système restavèk peut être interprété comme un système d’esclavage puisque plusieurs des éléments de contrôle de Bellagio-Harvard sont présents dans la manière dont ces enfants sont traités. Pour faire un lien avec ce qu’avance Cooper, & al. (2012), les restavèk se voient refuser le droit de vivre librement, ils sont donnés par leurs parents dans un échange qui incluent une transaction financière ou en nature à leurs maîtres.
L’enfant est traité et contrôlé comme une possession qui n’ayant aucun pouvoir sur une situation qui le concerne (Cooper & al., 2012). De plus, l’enfant restavèk est utilisé et est contraint de fournir des services domestiques pour lesquelles ils ne sont pas rémunérés.
Mentionnons aussi que ces enfants sont généralement employés dans des petites maisons ce qui fait en sorte qu’ils sont gérés et maltraités par tous les membres de la famille. Dans certains cas la famille d’accueil principale va prêter l’enfant restavèk à ses proches afin qu’à leur tour ils puissent abuser de cet enfant et profiter de son travail gratuit (Cooper & al., 2012).
Même si le travail d’un enfant domestique n’a pas de valeur monétaire, parce que ses tâches se limitent à un travail au sein d’un ménage, son travail a une valeur économique et constitue donc une forme de profits des services rendus.
En ce qui a trait au transfert d’une personne à un héritier ou un successeur, il n’y a aucune preuve que l’enfant conserverait ce statut après la mort son « maitre », mais cependant il n’existe aucune preuve du contraire non plus. Puisque l’enfant est vulnérable, il est probable qu’il soit maintenu dans le ménage ou transféré dans une autre famille. Le décès d’un maître pourrait aussi être l’occasion de s’échapper.
Les restavèk sont des cibles extrêmement vulnérables aux mauvais traitements et aux abus, car leurs tuteurs ne sont pas concernés par leur santé, bien-être physique et émotionnel (Cooper & al., 2012). Les lignes directrices de Bellagio-Harvard en ce qui concerne les mauvais traitements stipulent qu’un « tel mépris peut conduire à l’épuisement physique ou psychologique d’une personne, et finalement à sa destruction ; en conséquence, l’acte de provoquer un tel épuisement sera un acte d’esclavage » (Bellagio-Harvard, 2012, p. 18).
Les mauvais traitements sont une partie intégrante de la pratique du restavèk, ceux-ci sont verbalement et physiquement maltraités et privés de sommeil, de plus en tant que domestiques ils sont épuisés psychologiquement et physiquement en raison des efforts physiques. Ces exigences réduisent considérablement leur capacité fonctionnelle en tant qu’humain (Bellagio-Harvard, 2012).
La violence est utilisée comme moyen de contrôle de leur corps ainsi que de punition, les enfants restavèk sont soumis aux abus sexuels sur une base régulière (Cooper & al., 2012, p. 33-34). Ils sont gravement négligés et sont contraints de continuer à travailler même en période de maladies et de blessures.
Tout comme le subissait les esclaves, les restavèk sont épuisés par le manque sommeil et le manque d’alimentation adéquate, car ils ne sont pas autorisés à manquer autant que les membres de la famille d’accueil, de plus ils doivent manger les restes de la famille (Cooper & al, 2012). Si l’on se fie aux critères de Bellagio-Harvard concernant l’esclavage, la pratique du restavèk tombe dans la catégorie de l’esclavage telle que définie par la loi de 1926 concernant l’esclavage.
Questions Fréquemment Posées
Qu’est-ce que le système restavèk en Haïti ?
Le système restavèk est une pratique où des enfants sont placés comme domestiques dans des familles aisées par des parents en situation de pauvreté, accomplissant des tâches domestiques sans rémunération.
Comment le système restavèk est-il lié à l’esclavage moderne ?
Le système restavèk peut être interprété comme un système d’esclavage, car plusieurs éléments de contrôle sont présents dans la manière dont ces enfants sont traités, les privant de leur liberté et les utilisant comme des possessions.
Quelles sont les conséquences du système restavèk sur les enfants ?
Les enfants restavèk sont souvent maltraités, gérés par tous les membres de la famille d’accueil, et peuvent être prêtés à d’autres pour qu’ils puissent également profiter de leur travail gratuit.