Les applications pratiques du restavèk révèlent une réalité troublante : près de 300 000 enfants en Haïti vivent dans des conditions d’exploitation. Cette étude met en lumière les justifications culturelles et les impacts durables de cette tradition, redéfinissant ainsi notre compréhension des droits des enfants dans un contexte postcolonial.
Justification culturelle de la pratique du restavèk
La culture haïtienne joue aussi un rôle dans la pratique restavèk. Malgré le fait que de nombreux Haïtiens se vantent d’avoir été le premier peuple noir à obtenir sa libération de l’esclave colonial, nombreux sont ceux qui ne reconnaissent pas la pratique restavèk comme son équivalent à l’ère moderne (Lubin, 2002).
Plusieurs vont justifier la situation en insistant sur le fait que la situation du restavèk est temporaire et que l’enfant n’aurait pas eu d’autres ou meilleures alternatives (Lubin, 2002). Les attitudes qu’ont les familles d’accueil envers les enfants aggravent la situation, car il existe une distinction entre les enfants biologiques et l’enfant domestique.
Il y a un proverbe haïtien qui décrit bien cette pensée « lè wap benyen pitit moun, lave yon bò kite yon bò » ce qui signifie que lorsque vous prenez soin de l’enfant d’autrui vous devez le mépriser un peu.
Pour ajouter à cela, le gouvernement haïtien refuse de s’impliquer et justifie ce silence en expliquant que le système restavèk est tellement ancré en Haïti que trop de gens ne savent pas qu’ils enfreignent la loi (Lubin, 2007). Le gouvernement ne poursuit que très rarement les cas de mauvais traitements qui ont été dénoncés envers les restavèk.
Au contraire, il fait preuve d’indifférence face à cette pratique qui date de plusieurs siècles. Le conditionnement social perpétue le traitement discriminatoire, car le système restavèk est profondément ancré dans cette société, et le gouvernement permet à la pratique de persister de se développer (Lubin, 2007).
Face à ses constatations, la question qui doit être posée est est-ce que les enfants qui sont placés sont des esclaves ou des travailleurs ?
Les répercussions d’être un enfant restavèk
La plupart des restavèk font face à des problèmes de santé, dont les plus fréquents sont la malnutrition, des problèmes respiratoires chroniques et des problèmes de peau (Andrews, 2004). Sur le plan de l’équilibre psychique, les restavèk sont souvent confrontés à des problèmes d’estime de soi. Cela découle de la violence subie durant l’enfance.
Cette violence peut être sexuelle, émotionnelle et physique. Les problèmes d’estime de soi et les effets de la violence subie prennent de l’intensité dans un contexte où ces enfants sont dans l’impossibilité de contacter leurs familles biologiques.
L’absence de la famille biologique et le rôle de servitude attitrée à ces enfants se prêtent à des situations où il est rare, voire impossible pour ces derniers, de se sentir appréciés et de développer des liens solides ou un sentiment d’appartenance avec la famille d’accueil.
Le manque de contact avec la famille biologique ne s’explique pas seulement par l’abandon de l’enfant par cette dernière, mais très souvent les restavèk peuvent être battus pour avoir contacté des membres de leur famille biologique.
Cette violence s’ajoute aux autres formes de violence auxquelles sont exposés les restavèk et explique la raison pour laquelle ces enfants se retrouvent liés à leur famille d’accueil pour la vie (Andrews, 2004).
En amont, les chercheurs ont classé les types dviolences subies par les enfants restavèk en trois catégories, soit l’abus physique, et les abus émotionnels et sexuels. La plupart des restavèk sont victimes de ces abus (Smith, Gélineau & Seligson, 2012).
Lors de la Commission des Nations-Unis tenue à Genève en mai 2002, l’organisation gouvernementale internationale Anti-Slavery (AIS) a déclaré que « la pratique du restavèk en Haïti constitue l’une des pires formes et des plus répandues de manifestations de la servitude domestique des enfants dans le monde » (OIT, 2015).
Le Minnesota Lawyers Committe, mentionne également que cette pratique a violé un grand nombre de conventions juridiques internationales (Smith, Gélineau & Seligson, 2012).
La santé physique et psychologique des restavèk
Les restavèk et leurs parents biologiques n’ont que très peu de contacts, ils n’ont pas la possibilité de se rencontrer en raison de la distance et des contraintes financières (Lubin, 2002). Ces contraintes font qu’ils sont dépendants de leurs familles d’accueil, ce qui les rend vulnérables aux abus physiques et psychologiques.
Blagbrough (1999), constate que les enfants sont victimes de toutes sortes de violence, dont la violence verbale. Les jeunes filles sont à risques d’exploitation sexuelle, d’harcèlement, d’attouchements et de viol.
De plus, l’auteur explique que certains enfants rapportent souffrir du manque de sentiment d’appartenance et de lien face à la famille dans laquelle ils demeurent.
Les enfants rapportent aussi le fait qu’ils sont traités différemment des enfants biologiques. Ce sentiment d’exclusion s’explique par le fait qu’ils ne partagent pas de repas avec la famille ou par le fait qu’ils doivent manger dans une autre pièce (Blagbrough, 1999).
Les enfants domestiques ont en moyenne quatre centimètres et quatre livres de moins que les enfants du même âge habitant dans la même maison qu’eux (Lubin, 2002).
Questions Fréquemment Posées
Qu’est-ce que la pratique du restavèk en Haïti ?
La pratique du restavèk en Haïti consiste à placer des enfants comme domestiques dans des familles aisées par des parents en situation de pauvreté, souvent sans rémunération, et est décrite comme une forme d’esclavage moderne.
Quels sont les impacts du restavèk sur la santé des enfants ?
Les restavèk font face à des problèmes de santé tels que la malnutrition, des problèmes respiratoires chroniques et des problèmes de peau, ainsi qu’à des problèmes d’estime de soi dus à la violence subie durant l’enfance.
Comment le gouvernement haïtien réagit-il à la pratique du restavèk ?
Le gouvernement haïtien refuse de s’impliquer et justifie son silence en expliquant que le système restavèk est tellement ancré en Haïti que beaucoup de gens ne savent pas qu’ils enfreignent la loi, et il ne poursuit que très rarement les cas de mauvais traitements dénoncés envers les restavèk.