Quelles stratégies de mise en œuvre pour protéger l’environnement en RDC ?

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🏫 UNIVERSITÉ EVANGELIQUE EN AFRIQUE - Faculté de Sciences Agronomiques et de l'Environnement
📅 Mémoire de fin de cycle en vue de l'obtention du diplôme de Master - 2020-2021
🎓 Auteur·trice·s
BALEMBA MUBALAMA Bertin
BALEMBA MUBALAMA Bertin

Les stratégies de mise en œuvre environnementale révèlent des violations alarmantes des droits humains dans les sites miniers de Walungu. Cette étude met en lumière la dégradation environnementale persistante, malgré les lois en vigueur, suscitant des interrogations cruciales sur la protection des communautés locales.


Impact de l’exploitation des ressources aurifères sur la jouissance et la protection de la personne et des peuples dans le territoire de Walungu

Il n’est pas besoin d’aller jusqu’au capitalisme primaire dénoncé par le marxisme pour trouver des situations d’exploitations de l’homme par l’homme. De nombreuses situations de travail quotidiennes dans les sites miniers tel que constaté lors de nos recherches peuvent relever de ce phénomène (Cristallini, 2009).

En vue de lutter contre l’exploitation illégale des ressources naturelles, notamment celles non renouvelables, les Etats membres de la CIRGL ont adopté les normes de l’OCDE comme un des outils de l’« Initiative Régionale sur la lutte contre l’Exploitation Illégale des Ressources Naturelles » et ont lancé « un appel aux multinationales qui s’approvisionnent en minerais dans la Région des Grands Lacs à se conformer à ces directives (CJPB, 2012). C’est la raison pour laquelle aussi bien la loi de 2011 sur la protection de l’environnement que celle de 2018 portant code minier, ont mis en place des mécanismes de protection environnementale.

C’est notamment le plan de gestion environnementale et sociale (PGES) qui est un cahier des charges environnementales du projet consistant en un programme de mise en œuvre et de suivi des mesures envisagées par l’étude d’impact environnemental pour supprimer, réduire et éventuellement compenser les conséquences dommageables du projet minier sur l’environnement et l’étude d’impact environnemental et social (EIES) qui est un processus systématique d’identification, de prévision, d’évaluation et de réduction des effets physiques, écologiques, esthétiques et sociaux préalables au projet d’aménagement, d’ouvrage, d’équipement, d’installation ou d’implantation d’une exploitation minière ou de carrière permanente, ou d’une entité de traitement, et permettant d’en apprécier les conséquences directes ou indirectes sur l’environnement.

Les projets extractifs en cours d’exécution en Afrique en général et en République Démocratique du Congo en particulier, mettent à mal non seulement l’environnement, mais aussi la jouissance d’autres droits importants garantis par les instruments internationaux et régionaux (Manirakiza, 2016). Sur le plan socioéconomique, le secteur extractif engendre parfois des expulsions forcées de populations, la réduction des terres arables, la contamination des sols, la déforestation etc.

Sur le terrain au regard des résultats obtenus, ces mesures peinent à être mises en œuvre, d’où l’analyse du respect de certains droits en cas d’exploitation des ressources non renouvelables en territoire de Walungu. Il sied de relever que bien que nous ayons constaté plusieurs situations de violation des droits de la personne humaine lors de nos recherches, notre analyse ne concerne que quelques droits.

– Du droit à un travail décent.

Le secteur minier artisanal contribue fortement au commerce informel et illégal des matières premières en RDC (Nous l’avons plus découvert lors de l’exécution du projet intitulé « Les survivantes au Congo brisent le cycle de la violence sexuelle et accèdent à la santé sexuelle et reproductive en créant une chaine de valeur alternative : acheter, fabriquer et vendre des bijoux en or et en pierres semi-précieuses sans conflit » par la Fondation Panzi, 2020).

Bien que le nouveau Code minier réglemente théoriquement ce secteur, l’influence de dispositions législatives y est en réalité très faible. Les conditions de travail sont mauvaises, le travail des enfants et le travail forcé sont des pratiques courantes. De nombreux accidents se produisent en raison du manque de sécurité. Il a été constaté, par exemple, que dans le territoire de Walungu, les négociants ayant suffisamment des moyens, octroient souvent des prêts aux creuseurs artisanaux qui sont alors obligés de travailler pour rembourser, ce qui entraine une dépense à long terme (confidence nous livrée par un négociant de Mukungwe lors de nos recherches).

La production artisanale a peu d’accès aux marchés libres. Cet obstacle au développement est accentué par l’état catastrophique des voies de communication et donne en outre sur place la possibilité à des acheteurs en gros de dicter les prix.

A toutes les étapes de l’exploitation et de l’enrichissement des ressources naturelles non renouvelables, des impôts et taxes parallèles sont arbitrairement perçus par un nombre indéfini de dirigeants des secteurs publics, parapublics ou informels. De manière cynique, les services de l’Etat recourent souvent à la corruption pour subvenir à leurs besoins dans la mesure où leurs salaires ne sont pas payés10.

Dans les sites miniers du territoire de Walungu, certains creuseurs artisanaux, des femmes et des enfants travaillent généralement comme journaliers sans garantie de revenus. Alors que les droits des travailleurs des mines sont garantis par un certain nombre d’instruments juridiques adoptés dans le cadre de l’Organisation Internationale du Travail (OIT)11 et sur le plan africain12.

En raison de la mauvaise situation sociale et de la faible productivité du travail, le secteur minier artisanal, bien qu’employant un grand nombre de personnes, n’est pas en mesure actuellement de réduire la pauvreté et d’assurer le développement économique du territoire de Walungu tel qu’il pourrait le faire.

– Droit à la santé

Le droit à la santé consiste à assurer aux êtres humains le meilleur état de santé possible (L’article 12 du Pacte International relatif aux droits économiques, sociaux et culturels stipule que « les Etats parties au présent Pacte reconnaissent le droit qu’à toute personne de jouir du meilleur état de santé physique et mentale qu’elle soit capable d’atteindre, etc. ».

L’amélioration de tous les aspects de l’hygiène du milieu et de l’hygiène industrielle fait partie des mesures que les Etats devront prendre. Une telle reconnaissance internationale est un acquis, mais elle peut rester à l’état de vœux pieux, si elle ne se traduit pas dans le concret, notamment par la reconnaissance du droit de tous à l’accès à des soins de qualité (Alternatives

10 Brève étude sur la République Démocratique du Congo réalisée par KFW et l’Institut fédéral allemand des Sciences de la terre et des matières premières (BGR), Les ressources naturelles en République Démocratique du Congo-Un potentiel de développement ?, avril 2007, p.60

11 On peut énumérer de façon non exhaustive les plus pertinents : Protocole de 2014 relatif à la Convention sur le travail forcé, 1930, Genève, 103e Session CIT (11 juin 2014) ; Convention (n°170) sur les produits chimiques, 1990, Genève, 77e Session CIT (25 juin 1990) ; Convention (n°174) sur la prévention des accidents industriels majeurs, 1993, Genève, 80e session CIT (22 juin 1993) ; Convention (n°87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, San Francisco, 31e session CIT (9 juillet 1948) ; Convention (n°176) sur la sécurité et la santé dans les mines, 1995, Genève, 82e Session CIT (22 juin 1995)

12 Charte africaine article 15 : « Toute personne a le droit de travailler dans des conditions équitables et satisfaisantes et de percevoir un salaire égal pour un travail égal »

Sud, 2004). Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels note que les Etats doivent prendre des mesures « … visant » « l’amélioration de tous les aspects de l’hygiène du milieu et de l’hygiène industrielle » de prévention contre les accidents du travail et les maladies professionnelles. Ils doivent également assurer un approvisionnement suffisant en eau salubre et potable et en moyens d’assainissement élémentaires, et prendre des mesures visant à empêcher ou réduire l’exposition de la population à certains dangers tels que radiation ou produits chimiques toxiques et autres facteurs environnementaux nocifs ayant une incidence directe sur la santé des individus13.

Tels que nous l’avons constaté lors de nos recherches, le droit à la santé est loin d’être garanti dans les sites miniers du Territoire de Walungu.

– Droit à un environnement sain

Conformément à la Charte des Nations Unies et aux principes du droit international, « les Etats ont le droit souverain d’exploiter leurs propres ressources selon leur politique d’environnement ».

A côté de ce droit, ils ont le devoir de faire en sorte que les activités exercées dans les limites de leur juridiction ou sous leur contrôle ne causent pas de dommage à l’environnement dans d’autres Etats ou dans des régions ne relevant d’aucune juridiction nationale. Ce principe 21 de la déclaration de Stockholm invite les Etats à établir des règles tendant à la gestion et à la protection de l’environnement.

Cette préoccupation qui était d’abord celle des écologistes deviendra celle du monde entier et aboutira à l’universalisation des règles en rapport avec la protection de l’environnement. Cette universalisation affecte sensiblement l’indépendance des Etats, reconnue par le principe de la souveraineté des Etats. En effet, les écologistes ont d’abord pensé que pour que la protection de l’environnement soit efficace, il fallait que l’environnement ait le droit d’ester en justice.

C’est alors que l’environnement qui était d’abord objet deviendra sujet et enfin, patrimoine commun de l’humanité (Houtart, 2013).

La création des agglomérations, l’exploitation minière, l’exploitation agricole, forestière, la chasse avec des armes modernes, la pêche industrielle qui sont les faits de la colonisation vont sensiblement détruire l’environnement.

Pour réduire les effets de ces nouvelles activités sur l’environnement, les autorités de la RDC ont mis sur pied une série de lois dont l’application effective dans les sites miniers du territoire de Walungu pose encore d’énormes difficultés.

13 Comité des droits économiques, sociaux et culturels, Observation générale 14, para.2b de l’article 12 relatif au droit à un environnement naturel et professionnel sain

– Droit à l’alimentation

La nourriture est importante pour assurer non seulement une subsistance physique de base, mais aussi le développement maximal des capacités physiques et mentales de l’individu (Centre Carter, 2012). Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels précise que « ce droit est réalisé lorsque chaque homme, chaque femme, chaque enfant, seul ou en communauté avec d’autres, a physiquement et économiquement accès à tout moment à une nourriture suffisante ou aux moyens de se la procurer (CDESC).

Dans le cadre du présent travail, il se dégage qu’il y a un impact sur le droit à l’alimentation en cas d’exploitation des ressources naturelles non renouvelables, la disponibilité et l’accessibilité à la nourriture14 dans les sites miniers du territoire de Walungu posant un réel problème.

La délocalisation des villages et des habitations est souvent accompagnée de l’expropriation des champs et des terres arables. Il ressort des résultats du présent travail que le développement ou la découverte de la mine dans le territoire de Walungu a conduit à la perte des moyens de subsistance des populations tel le cas du site minier de Mukungwe.

– Le Droit à l’éducation

Alors que l’article 43 de la Constitution de la RDC dispose que toute personne a droit à l’éducation scolaire et qu’il est pourvu par l’enseignement national (Article 43 de la Constitution de la RDC), il existe encore, suite au non encadrement des parents (ou du moins pour certaines familles dans le souci de se procurer une grande main d’œuvre) et des pouvoirs publics, des enfants qui vont chercher leur mieux être dans les sites miniers du Territoire de Walungu, ce qui viole non seulement l’article 17 de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples qui dispose que toute personne a droit à l’éducation mais aussi l’article 13 de la Constitution du 18 février 2006, qui dispose qu’aucun Congolais ne peut, en matière d’éducation et d’accès aux fonctions publiques ni en aucune autre matière, faire l’objet d’une mesure discriminatoire, qu’elle résulte de la loi ou d’un acte de l’exécutif, en raison de sa religion, de son origine familiale, de sa condition sociale, de sa résidence, de ses opinions ou de ses convictions politiques, de son appartenance à une race, à une ethnie, à une tribu, à une

14 Cela signifie l’accessibilité physique et économique, le prix de la nourriture ne devrait pas être un fardeau pour le revenu de la personne ni entraver la réalisation d’autres droits. L’accessibilité physique signifie que toute personne devrait avoir accès à la nourriture, en particulier les membres des groupes vulnérables comme les enfants, les handicapés et les personnes âgées.

minorité culturelle ou linguistique. Notons que le non-respect des droits fondamentaux qui garantissent à chaque citoyen le droit à un niveau de vie suffisant et le droit au développement par le gouvernement entraîne comme conséquence majeure, la pauvreté qui est la raison même pour laquelle les enfants sont envoyés et/ou se rendent dans les sites miniers artisanaux.

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10 Brève étude sur la République Démocratique du Congo réalisée par KFW et l’Institut fédéral allemand des Sciences de la terre et des matières premières (BGR), Les ressources naturelles en République Démocratique du Congo-Un potentiel de développement ?, avril 2007, p.60

11 On peut énumérer de façon non exhaustive les plus pertinents : Protocole de 2014 relatif à la Convention sur le travail forcé, 1930, Genève, 103e Session CIT (11 juin 2014) ; Convention (n°170) sur les produits chimiques, 1990, Genève, 77e Session CIT (25 juin 1990) ; Convention (n°174) sur la prévention des accidents industriels majeurs, 1993, Genève, 80e session CIT (22 juin 1993) ; Convention (n°87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, San Francisco, 31e session CIT (9 juillet 1948) ; Convention (n°176) sur la sécurité et la santé dans les mines, 1995, Genève, 82e Session CIT (22 juin 1995)

12 Charte africaine article 15 : « Toute personne a le droit de travailler dans des conditions équitables et satisfaisantes et de percevoir un salaire égal pour un travail égal »

13 Comité des droits économiques, sociaux et culturels, Observation générale 14, para.2b de l’article 12 relatif au droit à un environnement naturel et professionnel sain

14 Cela signifie l’accessibilité physique et économique, le prix de la nourriture ne devrait pas être un fardeau pour le revenu de la personne ni entraver la réalisation d’autres droits. L’accessibilité physique signifie que toute personne devrait avoir accès à la nourriture, en particulier les membres des groupes vulnérables comme les enfants, les handicapés et les personnes âgées.


Questions Fréquemment Posées

Quelles sont les violations des droits humains liées à l’exploitation minière en RDC?

Les violations des droits humains comprennent de mauvaises conditions de travail, le travail des enfants, le travail forcé et des accidents fréquents dus au manque de sécurité.

Comment la loi minière de 2018 protège-t-elle l’environnement en RDC?

La loi minière de 2018 met en place des mécanismes de protection environnementale, notamment à travers le plan de gestion environnementale et sociale (PGES) et l’étude d’impact environnemental et social (EIES).

Quels sont les impacts socioéconomiques de l’exploitation minière dans le territoire de Walungu?

L’exploitation minière engendre des expulsions forcées de populations, la réduction des terres arables, la contamination des sols et la déforestation.

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