Comment l’approche méthodologique redéfinit l’autogestion ?

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🏫 Université Haute Bretagne
📅 Mémoire de fin de cycle en vue de l'obtention du diplôme de Master - 2005-2006
🎓 Auteur·trice·s
Suzy Canivenc
Suzy Canivenc

L’approche méthodologique de l’autogestion révèle un paradoxe fascinant : bien que ce concept soit souvent considéré comme obsolète, ses principes de participation et de responsabilisation demeurent cruciaux dans les débats contemporains sur les formes organisationnelles. Cette recherche promet de redéfinir notre compréhension de l’autogestion dans un contexte moderne.


Université Haute Bretagne

MASTER 2

Etudes et Recherches en Sciences de l’Information et de la Communication

Mémoire de fin d’étude

Approche méthodologique de l'autogestion : étude essentielle

La réactualisation de l’idée autogestionnaire dans le contexte du débat sur le renouvellement des formes organisationnelles1

Présenté par : Suzy Canivenc

Directeur de mémoire : Christian Le Moënne & Codirecteur de mémoire : Catherine Loneux

Année universitaire

2005-2006

Introduction :

Mise en perspective :

      1. Constats de départ : l’autogestion, une thématique oubliée/occultée

L’autogestion peut, à première vue, apparaître comme une idée désuète pour plusieurs raisons :

Une idée ancienne :

L’autogestion est loin d’être une idée nouvelle. Nathalie Ferreira situe ainsi la naissance de l’idée autogestionnaire « au cœur du XIX° siècle, essentiellement en France, dans le vaste mouvement social né en réaction à la Révolution Industrielle et au mode de production qui lui est inhérent »2. Nous montrerons d’ailleurs dans les annexes de ce mémoire que cette idée est encore plus ancienne que ne le pense cette auteure.

Un débat oublié :

Cette idée peut d’autant plus apparaître comme démodée qu’elle est totalement absente des débats politiques ou managériaux depuis une vingtaine d’années.

L’idée autogestionnaire a en effet été l’objet d’un débat politique enflammé dans le contexte libertaire des années 70 en France. Dans ce contexte, cette thématique a été fortement idéologisée en devenant l’apanage des partis de gauche, soucieux de coller aux revendications exprimées lors des événements de mai 68. Dans les années 80, le thème autogestionnaire est apparu comme une idée de plus en plus utopique incapable de faire face à l’amplification de la crise économique. Le débat pris donc fin au milieu des années 80 et le thème autogestionnaire est depuis tombé dans l’indifférence générale.

Ainsi, « après avoir connu la marginalité puis le succès dans les années 70, l’autogestion comme mot a vécu ensuite la phase de banalisation qui accompagne le succès et prépare la décadence puis l’oubli »3.

Un terme flou et idéologisé :

Aujourd’hui, lorsque ce thème est évoqué, il ne peut se défaire de cette référence à l’anarchisme du XIX° siècle (mouvance politique qui n’a jamais eu la faveur de la majorité et

2 FERREIRA, Nathalie. Economie sociale et autogestion, Entre utopie et réalité. L’Harmattan, 2004

3 CEPEDE, Frédéric. L’autogestion dans la propagande socialiste, 1968-1980. In L’autogestion, la dernière utopie ?, Sous la direction de Frank Georgi, publication de la Sorbonne, 2003

qui est toujours apparu comme un mouvement radical et violent) ou à l’époque libertaire des années 70 portée par des « jeunes » aveuglés d’idéologies idéalistes et irréalistes. Ainsi,

« l’autogestion oscillerait entre l’utopie et l’inefficacité »4. Au mieux, elle apparaît comme un doux rêve d’utopistes immatures, au pire comme une menace pour l’ordre social.

Comme en fait état l’Encyclopédie Universalis, « le clair-obscur idéologique offert par l’autogestion en tant que concept et le refus de considérer les résultats effectifs de sa concrétisation, ou l’ignorance manifestée envers ses ratés, ont été propices à bien des équivoques (…) Le concept lui-même semble s’être discrédité à la faveur de son opacité et à cause de ses échecs ; même ses succès anciens apparents semblent remis en cause ».

      1. Une idée occultée mais encore présente :

Le débat sur l’autogestion est donc aujourd’hui complètement occulté. On constate alors un dénie total du thème et des expériences autogestionnaires.

Les rares discours qui « osent » encore traiter des expériences autogestionnaires les présentent souvent comme des expérimentations éphémères qui aboutissent nécessairement à des échecs. Or, il existe encore de nos jours des organisations, et plus particulièrement des entreprises, qui se revendiquent du modèle autogestionnaire et qui tentent d’en mettre en œuvre les principes. Ainsi, malgré l’occultation du terme d’ « autogestion », nous pouvons aujourd’hui constater l’existence d’entreprises autogérées viables et qui semblent pérennes.

Si l’autogestion est absente des discours, elle n’est pas absente des pratiques.

Hypothèse :

      1. Hypothèse : la réactualisation de l’idée autogestionnaire :

Mais si le terme semble avoir disparu, les idées et le modèle organisationnel dont cette expression est porteuse semblent toujours, voire de plus en plus, d’actualité.

Ainsi, pour Frédéric Cépède « l’autogestion comme source de vitalité souterraine, comme attente d’une démocratie toujours plus radicale et participative reste, elle, féconde et rien n’interdit de penser que le mot puisse connaître dès lors une nouvelle jeunesse dans un avenir plus ou moins proche »5. De même, pour Patrick Vivret, « l’autogestion n’est pas morte et sa prospérité peut se lire aujourd’hui dans les mouvements contemporains en faveur d’une autre mondialisation essayant

4 FERREIRA, Nathalie. Economie sociale et autogestion, Entre utopie et réalité. L’Harmattan, 2004

5 CEPEDE, Frédéric. L’autogestion dans la propagande socialiste, 1968-1980. In L’autogestion, la dernière utopie ? Sous la direction de Frank Georgi, publication de la Sorbonne, 2003

d’articuler les échelles de la démocratie, du local au global, nécessitant un haut niveau d’auto régulation »6.

L’idée autogestionnaire semble ainsi resurgir au travers de l’émergence de nouveaux vocables :

« participation », « intéressement », « autonomisation » et « responsabilisation » dans le monde des entreprise, « décentralisation » et « démocratie participative » suite à la faillite de l’Etat providence, de nouvelles formes de responsabilisation civique avec l’ « éco citoyenneté »…

Au-delà des discours de sens commun, les réflexions actuellement menées sur les nouveaux modèles organisationnels suite à la faillite du taylorisme semblent réactualiser cette forme organisationnelle particulière.

En effet, si comme le soutient Nathalie Ferreira (citée précédemment), l’idée autogestionnaire émerge en réaction au mode de production inhérent à l’ère industrielle, il est légitime qu’elle ressurgisse à une époque où ce modèle industriel, poussé à son paroxysme, entre en crise et où la société cherche de nouveaux modèles d’organisation de la production « postindustriels ».

      1. La nécessité de faire de l’idée autogestionnaire un véritable concept organisationnel :

Il apparaît ainsi comme pertinent de réintégrer le modèle autogestionnaire dans le débat qui se tient actuellement sur le renouvellement des formes organisationnelles et de s’interroger sur son statut au sein de ce débat : le modèle organisationnel autogestionnaire est-il un modèle définitivement démodé ou au contraire encore, voire peut être de plus en plus, d’actualité dans le contexte du renouvellement des formes organisationnelles?

Mais intégrer le modèle autogestionnaire au sein de cette réflexion scientifique nécessite, au préalable, de démontrer que ce modèle est un véritable concept organisationnel. En effet, le flou idéologique qui entoure ce terme rend difficile sa prise en considération d’un point de vue scientifique.

Cette imprécision du terme, empêchant sa prise en considération d’un point de vue scientifique, est entretenue par la littéraire sur le sujet. En effet, malgré l’importance du nombre d’ouvrages consacrés à l’autogestion, peu offre une analyse théorique suffisante de ce qui pourrait pourtant apparaître comme un véritable « concept organisationnel ». En effet, ces textes se réduisent souvent à la présentation des courants politiques fondateurs de l’autogestion (l’anarchisme, le communisme, l’anarchosyndicalisme, les guildes socialistes…)

6 Cité par Frank Georgi : Les rocardiens : pour une culture politique autogestionnaire. In L’autogestion, la dernière utopie ? Sous la direction de Frank Georgi, publication de la Sorbonne, 2003

puis des différentes expérimentations autogestionnaires dans de grandes organisations politiques (la Yougoslavie de Tito étant l’exemple le plus souvent cité). Ces écrits se réduisent donc à une restitution historique sans mise en perspective théorique organisationnelle susceptible d’intéresser les entreprises contemporaines. La vision théorique s’arrête généralement à celle développée par les fondateurs de cette idée au XIX° et au début du XX° siècle, et la vision pratique s’intéresse largement à l’autogestion comme mode d’organisation politico social.

Le seul exemple d’autogestion entrepreneuriale cité est celui de LIP, alors que cette entreprise n’expérimenta l’autogestion que comme modèle organisationnel transitionnel dans l’attente d’un nouveau dirigeant. Ces écrits entretiennent ainsi l’idée d’un modèle ancien, idéologiquement ancré dans les utopies libertaires de la gauche et voué à n’être qu’éphémère. Ainsi, face à la « polysémie du terme et [au] flou du contenu » Frank Géorgi constate la

« nécessité d’un ancrage plus concret », une « quête de légitimité [qui doit] combiner inscription dans une histoire longue et affirmation du caractère scientifique et moderne de l’autogestion ». Telle sera l’ambition de ce mémoire qui s’attachera donc à faire de l’autogestion un véritable concept organisationnel en rappelant sa genèse puis en dégageant un idéal type. Il s’agira ensuite de démontrer que cet idéal type entretient de nombreuses similitudes avec les nouvelles théories organisationnelles et plus globalement avec la nouvelle « image »7 de l’organisation actuellement en émergence.


Questions Fréquemment Posées

Qu’est-ce que l’autogestion et pourquoi est-elle considérée comme une idée désuète ?

L’autogestion est loin d’être une idée nouvelle, née au XIX° siècle en France en réaction à la Révolution Industrielle. Elle est considérée comme désuète car elle a été absente des débats politiques ou managériaux depuis une vingtaine d’années.

Pourquoi le débat sur l’autogestion est-il occulté aujourd’hui ?

Le débat sur l’autogestion est aujourd’hui complètement occulté, avec un déni total du thème et des expériences autogestionnaires, souvent présentées comme des échecs inévitables.

Quels principes de l’autogestion restent d’actualité dans les organisations contemporaines ?

Les principes de l’autogestion, tels que la participation, la responsabilisation et la démocratie participative, restent d’actualité et sont intégrés dans certaines organisations qui tentent d’appliquer ces concepts.

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