Comment l’innovation transforme la gestion foncière en Haïti (2010-2020) ?

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🏫 Université d'État d'Haïti - Faculté de Droit, des Sciences Économiques et de Gestion du Cap-Haïtien - Section Juridique
📅 Mémoire de fin de cycle en vue de l'obtention du diplôme de Licenciée - 2012-2016
🎓 Auteur·trice·s
Youlmine DUVERNA
Youlmine DUVERNA

L’innovation dans la gestion foncière en Haïti révèle une réalité troublante : la faiblesse des trois pouvoirs de l’État entrave l’exercice des droits fonciers. Cette recherche met en lumière des solutions normatives essentielles pour surmonter les défis juridiques et institutionnels, avec des implications cruciales pour l’avenir du pays.


Recommandations et propositions pour le renforcement des mécanismes fonciers

Les résultats de cette recherche nous ont permis de confirmer que la faiblesse des trois pouvoirs de l’État haïtien est à l’origine de l’inefficacité enregistrée dans l’exercice des droits en Haïti, et spécialement de 2010 à 2020. Toutefois, notre analyse des résultats a particulièrement pointé du doigt la fragilité de l’appareil judiciaire dans sa fonction de contrôle de la conformité des ordres et des sujets de Droit.

Aussi nos recommandations et propositions pour le renforcement des mécanismes qui tendent vers l’effectivité des droits et la structuration des institutions foncières s’orienteront vers des pistes intégrées. Et dans un contexte comme celui-ci marqué par la défaillance de l’État, la loi ou encore les normes doivent à nouveau occuper une place de choix dans la vie des citoyens de la République, pour cela l’État doit tout faire pour se renforcer, garantir les droits à tous, et du même coup combattre l’arbitraire, l’impunité et la corruption.

L’effectivité des normes juridiques

L’instauration d’un système juridique sans faille est une condition cruciale dans la mise en place d’un système de garantie des droits de propriété foncière dans lequel les normes occupent une place de choix dans la vie des citoyens. En ce sens, l’effectivité d’une norme repose, dès lors, soit sur la conformité des comportements suivis par ses destinataires ou par les autorités chargées de sa mise en œuvre, soit sur la sanction prononcée contre ceux qui ne respectent pas la règle247.

Ainsi, le respect, la sanction et l’accès à la justice concourt à l’effectivité d’une norme juridique dans toute société qui prône le respect des principes de l’État de droit.

L’effectivité des normes juridiques haïtienne est une nécessité dans toute politique de régulation foncière durable et ne peut se faire sans la cohérence de l’ordre juridique et la sanction de la norme. En général, cela implique la mise en place des mécanismes efficaces permettant de faire respecter scrupuleusement les droits économiques, politiques, sociaux et culturels des citoyens ; aussi de mettre en place un système de régulation permettant de faire respecter les droits des citoyens (assurer le droit à un procès équitable et à des recours effectif).

En ce sens, pour mieux gérer les terres, il faut considérer les failles existantes dans les institutions de régulation foncière et les failles retrouvées dans les normes existantes, tout en considérant les retombées positives que peuvent générer l’adaptation des lois foncières dans toute politique de gestion efficace.

Dans le cadre de ce travail, en vue de mieux cerner l’étendue de la question foncière en général et de la gestion des terres en particulier, nous exposerons les constats les plus marquants, pour arriver à comprendre les grands enjeux en matière de gestion des terres en Haïti. Ainsi, nous ferons des propositions sur l’effectivité de la gestion domaniale et sur l’efficacité des lois foncières tout en mettant un accent particulier sur les modes de gestion, les droits qui en découlent et ferons aussi des propositions pour la modernisation effectif du régime foncier haïtien.

L’effectivité de la gestion domaniale et foncière

La Constitution de 1987 distingue deux formes de propriété : la propriété privée et la propriété publique, cette dernière se différencient entre domaine public et domaine privé de l’État. En principe, le droit de propriété ne peut concerner aucune composante du domaine public. La terre représente traditionnellement le principal moyen de production agricole en Haïti. Or, Georges Anglade affirme que : « Les deux plus importants propriétaires terriens du pays sont l’État et l’Église Catholiques»248.

Et l’État haïtien étant assez faible s’est retrouvé à la tête d’un stock foncier qui représente les 2/3 des terres cultivées et que, faute de l’avoir bien gérer, 249l’usucapion est devenu le principal moyen d’acquisition de la propriété. Et l’Institutut Haïtien de Statistique et d’Informatique (L’IHSI), dans une étude menée pour montrer la non possession des terres par les paysans avance : « En général, environ la moitié des propriétés (47%) a été reçue en héritage, approximativement divisée de manière égale entre des héritiers séparément ou ensemble.

En second lieu, vient la possession des parcelles (25%), suivi des modalités les moins fréquentés, soit le Métayage (10%) et le fermage (6%)».Alors que selon l’article 674 du Code Civil haïtien « Nul ne peut être contraint à demeurer dans l’indivision » 250.Ceci laisse comprendre que le partage d’un bien successoral est l’un des droits les plus entiers que détient tout héritier, alors que ce partage entraine l’augmentation des cas de morcellement et de mutation foncière.

Ainsi, cette prérogative encourage le partage, entraine la formation de lots et le morcellement des terres. Aujourd’hui, les statuts juridiques des terres sont de trois types en Haïti : le domaine privé de l’État, mal connu, qui est évalué à 10% de la surface du pays ; le domaine public (routes, bords de mer et de rivières, etc.), la propriété privée validée par des titres fonciers251.

Vu l’étendue de ces contraintes, une sécurisation effective des parcelles achetées en bonne et due forme peut être considérée comme la démarche la plus souhaitable. Et cela pourra permettre de régulariser les démarches d’acquisitions légales et réduire les complexes (en matière d’achats de biens fonciers) et les disparités en termes du coût de l’établissement d’un nouveau titre (transcription) et à surpasser les honoraires exorbitants, les pots-de-vins et la surtaxe dans le foncier252.

Entre autres, le Code Civil et le Code Rural encadrent les modalités et les procédures d’accès, les modalités de création et de répartition, les règles pour la division de la propriété et sa transmission en héritage. Le Code Rural de 1962 n’ayant pas été mis à jour (entre autres, pour refléter le cadre légal créé par la Constitution de 1987), cela représente un obstacle majeur pour l’effectivité des droits foncier. Et résoudre ce problème en révisant l’ensemble des textes de ce code pour qu’il puisse refléter le cadre constitutionnel et s’harmoniser aux avancées actuelles des sciences juridiques serait bénéfique pour l’effectivité des droits et l’efficacité des droits fonciers253.

Et résoudre ce problème en révisant l’ensemble des textes de ce code pour qu’il puisse refléter le cadre légal et s’harmoniser aux avancées actuelles des sciences juridiques serait bénéfique pour l’effectivité des droits et l’efficacité de la gestion des terres en Haïti. Il faut procéder à l’identification des composantes du patrimoine foncier dont dispose l’État haïtien ainsi que déployer des moyens appropriés pour assurer sa gestion.

Aussi, il faut réorganiser les méthodes et les procédures appliquées pour la gestion du domaine public, comme celles qui sont relatives à la gestion du patrimoine immobilier, aux cessions immobilières et mobilières, aux procédures de réalisation d’expertise foncière et au contrôle des opérations immobilières, etc. Outres, on ne peut rendre effectif le Droit domanial sans le renforcement des institutions étatiques, et particulièrement sans rendre à l’appareil judiciaire sa fonction essentielle, de garant du bien-être institutionnel et social.

Ainsi, le renforcement des institutions de gestion permettra de surpasser les obstacles et contraintes et permettra de régulariser la gestion domaniale en Haïti, garantir la jouissance des droits de propriétés et réduire considérablement les disparités foncières.

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247 Https://www.cairn.infos/revue-droit-et-societe1-2011-3-page-715.htm, page consultée le 15 /06/22 à 3hr30PM.

248 SOUKAR Michel, Haïti: Histoire, Politique, Société, Tabarre, Haïti, Imprimerie Fleur-yo, 2009, p103.

249 Usucapion : manière d’acquérir une chose ou un droit réel principal par possession ininterrompue.

250 IHSI, Enquête sur les conditions de vie en Haïti, ECVH 2001, Vol. II, p140.

251 Https://copenhagenconsensus.com/sites/default/files/haiti_priorise_land_records_french.pdf, page consultée le 13/03/22 à 10hr25AM.

252 PIERRE Bernard, La numérisation des registres de propriétés foncières en Haïti, Copenhagen Consensus Center, Haïti priorise, Avril 2017, p4.


Questions Fréquemment Posées

Quelles sont les principales causes de l’inefficacité de la gestion des terres en Haïti?

La faiblesse des trois pouvoirs de l’État haïtien est à l’origine de l’inefficacité enregistrée dans l’exercice des droits en Haïti.

Pourquoi l’effectivité des normes juridiques est-elle cruciale pour la gestion foncière en Haïti?

L’effectivité des normes juridiques haïtiennes est une nécessité dans toute politique de régulation foncière durable et implique la mise en place de mécanismes efficaces pour respecter les droits des citoyens.

Comment l’État haïtien peut-il améliorer la gestion foncière?

L’État doit se renforcer, garantir les droits à tous, et combattre l’arbitraire, l’impunité et la corruption tout en adaptant les lois foncières.

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