Quelles sont les perspectives futures pour la gestion foncière en Haïti ?

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🏫 Université d'État d'Haïti - Faculté de Droit, des Sciences Économiques et de Gestion du Cap-Haïtien - Section Juridique
📅 Mémoire de fin de cycle en vue de l'obtention du diplôme de Licence - 2012-2016
🎓 Auteur·trice·s
Youlmine DUVERNA
Youlmine DUVERNA

Les perspectives futures de gestion foncière en Haïti révèlent des défis juridiques surprenants qui entravent l’efficacité des régulations. Cette recherche met en lumière des solutions innovantes, essentielles pour transformer la gestion des terres et protéger les droits de propriété dans un contexte complexe.


Description des limites relatives à la législation nationale

Dans le cadre de cette étude pour mieux exposer le rapport de causalité générant l’inefficacité de la gestion des terres en Haïti, il est important de décrire et cerner les limites de la législation nationale.

Et pour cela, il nous convient d’interroger les dispositions de la législation nationale, soit, le droit civil, le droit rural et le droit agraire, le droit coutumier et le droit de l’environnement.

Les limites à l’application du Droit Civil

Le droit civil appelé aussi le Droit Commun régit, en tant que branche de droit privé régissant particulièrement les rapports entre un individu et un autre, et tous les rapports qui unissent les personnes et les biens130.

En ce qui concerne la gestion des terres, il est concerné au premier chef par la réglementation de l’état des personnes, celle de la propriété immobilière et celle de la conservation foncière.

Ainsi, on peut regrouper en deux grandes catégories les effets du Code Civil sur la gestion des terres : ceux qui dérivent de la loi elle-même (les problèmes d’efficience) et ceux qui découlent de l’application de la loi (les problèmes d’efficacité).

Les problèmes d’efficience les plus pertinents concernent le mode d’acquisition de la propriété immobilière et son mode de transmission.

Bien que le Code Civil dispose que l’enregistrement des transactions foncières et des titres doit être effectué, dans la plus part des cas, ni les transactions portant sur les acquisitions foncières ni les changements de propriétaires à la suite d’héritage ne sont, respectés131.

Un tiers des parcelles rurales d’Haïti ne sont pas enregistrées et 19% ont seulement le reçu d’acquisition du terrain comme preuve de propriété132.

La succession et l’usucapion sont deux problèmes qui s’opposent à la gestion des terres ; le premier étant à l’origine du morcellement des exploitations, le second étant identifié comme l’une des sources de l’insécurité foncière.

Et quant à l’usucapion, il convient de mentionner qu’il a été, dans l’histoire foncière d’Haïti, le principal mode d’acquisition de la propriété en milieu rural et qu’à cause de cela, l’absence de titres de propriété est la règle au sein de la paysannerie133.

Et aussi, les problèmes d’efficacité, les plus pertinents se retrouvent au niveau des capacités opérationnelles liées à l’application des règles du Code Civil (tenure foncière et conservation des archives)134.

Ces règles ne sont pas à jour pour répondre efficacement aux besoins de la société actuelle, et aux réalités conflictuelles générées par les mutations foncières et la hausse de l’insécurité foncière.

Dans une société où l’informel domine, le droit coutumier est mal connu et n’est point exploité, qu’il s’agisse de la coutume 135praeter legem ou 136secundum legem.

La pertinence de cette législation figée, si importante soit-elle, laisse beaucoup à désirer en ce qui concerne notamment la tenure de la terre, les droits successoraux et la concordance avec les principes de la gestion des terres.

Les limites à l’application du Droit Rural et du Droit Agraire

Un code rural promulgué en 1826 par le président BOYER, deux autres ont été promulgués encore : celui du président Boyer tendait d’établir en même temps un cordon puissant autour du monde paysan137.

Actuellement, la loi en vigueur dans le domaine foncier se retrouve principalement dans le Code Rural de 1962.

Celui-ci a repris les articles de la Constitution consacrant la fonction sociale de la propriété de la terre, interdit la vente à réméré au sein du monde rural, mais n’a pas réussi à promouvoir l’agriculture conversationniste et la gestion des terres (Loi No. IV, art 1 à 30)138.

Ce Code Rural manquait de vision et d’audace, et il ne s’est pas attaqué au problème du droit successoral et de l’intégrité des exploitations agricoles.

Il a laissé de côté le problème de remembrement des propriétés et de la gestion effective des terres domaniales.

Il s’est détourné de l’épineuse question posée par l’absence de cadastre et les faiblesses de la conservation foncière.

Le droit agraire haïtien plonge ses racines dans le droit colonial, la Constitution de 1801 et la première Constitution haïtienne de 1805, laquelle dans son article 12 proclame que « toute propriété qui aura ci-devant a appartenu à un blanc français est incontestablement et de droit confisqué au profit de l’État »139.

C’est pourquoi l’État haïtien s’est retrouvé à la tête d’un stock foncier représentant les 2/3 des terres cultivées et que, faute de l’avoir bien géré, l’usucapion est devenu le principal moyen d’acquisition de la propriété avec toutes les conséquences défavorables qu’elle représente pour la gestion des terres140.

Par ailleurs, il est à noter que l’ineffectivité dans l’agriculture étant trop persistante par manque d’attachement au secteur agricole, car seulement 7.5% du budget national est alloué au secteur agricole et l’apport du secteur agricole au PIB a chuté de 24% en 2016141.

Outre la taille restreinte des parcelles et la pression sur les terres agricoles, la tenure foncière en Haïti est caractérisée par l’absence de formalisation.

Ainsi, l’inefficacité est d’autant plus persistantes dans la résolution des problèmes fonciers, dans la refonte des structures foncières nationales, la mis en œuvre d’une réforme agraire, la participation à la conception de la politique nationale relative aux questions agraires et la mise en œuvre de la politique nationale en matière foncière.

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130Https://www.justifit.fr/b/guides/droit-civil/zoom-sur-le-droit-civil/, page consultée le 06/02/23 à 11hr35 PM.

131 Titre V à VII Code Civil haïtien.

132 Https://agriculture.gouv.ht/view/01/IMG/pdf/annexe_11.pdf, Op. Cit.

133 Ibid.

134 Le Moniteur, journal officiel de la République d ‘Haïti, Décret portant sur la Gestion de l’Environnement et Régulation de la conduite Citoyen et Citoyenne pour un Développement Durable, 161 ème Année. No.11, Jeudi 26 Janvier 2006, p 9,10.

135 Coutume qui s’applique en absence de solution légale, remédiant à une lacune et complétant ainsi la loi.

136 Coutume qui s’applique en vertu de la loi.

137Https://classiques.uqac.ca/comtemporains/hurbon_laennec/barbare._imaginaire/barbare_imaginaire.doc , page consultée le 07/02/23 à 11hr35 PM.

138 Constitution haïtienne de 1805, Loi No. IV, art 1 à 30.

139 Constitution haïtienne de 1805, Art.12.

140 Analyse du cadre légal et Institutionnel relatifs à la Gestion Durables des Terres, Op Cit, p30.


Questions Fréquemment Posées

Quelles sont les limites de la législation foncière en Haïti ?

Les limites de la législation foncière en Haïti incluent des problèmes d’efficience liés à l’acquisition et à la transmission de la propriété, ainsi que des problèmes d’efficacité concernant les capacités opérationnelles liées à l’application des règles du Code Civil.

Comment le droit civil affecte-t-il la gestion des terres en Haïti ?

Le droit civil affecte la gestion des terres en régissant l’état des personnes, la propriété immobilière et la conservation foncière, mais son application est souvent inefficace, avec un tiers des parcelles rurales non enregistrées.

Pourquoi la législation foncière haïtienne est-elle considérée comme inefficace ?

La législation foncière haïtienne est considérée comme inefficace en raison de la faiblesse des trois pouvoirs de l’État, de l’absence de mise à jour des règles pour répondre aux besoins actuels, et de l’informalité qui domine le système foncier.

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