Les contrats d’assurance maritime tunisiens révèlent des faiblesses insoupçonnées, remettant en question leur efficacité face aux modèles français. Cette étude propose une solution innovante pour un contrat national, tout en soulignant l’urgence d’une traduction arabe des polices, essentielle pour le secteur maritime.
- Les polices anciennes : A partir de 1629 la police dénommée « Formulaire de la Police d’Asseurance suivant le Guidon » commence à prendre la forme d’un modèle de contrat type applicable dans le port de Rouen.
Dans le port de Marseille, existe la police de Marseille du 24 mars 1866.
En 1668, Colbert initie la Chambre générale des assurances à Paris pour tout ce qui concerne le transport maritime.
Mais c’est le modèle du 1er mai 1876 qui commence à prendre une allure semblable aux polices contemporaines. Composé de vingt articles, on distingue déjà les risques ordinaires des risques de guerre. La police couvre « tous dommages et pertes qui arrivent aux choses assurées par tempête, naufrage, échouement, abordage, relâches forcées, changements forcés de route, de voyage et de navire, jet, feu, pillage, piraterie et baraterie, et généralement par tous accidents, et fortune de mer ».
12 Annexe N°16
Dans la même période, apparaissent deux polices, la police sur Vapeur déposée au greffe du tribunal de commerce le 22 décembre 1882, un modèle identique à la police de 1876 et la police du 1er janvier 1888, qui fut remplacée par celles du 15 novembre 1919 modifiée le 06 juillet 1922, et celle du 1er octobre 1928 modifiée le 23 juin 1937 et le 10 février 1938.
Les critiques faites aux anciennes polices concernent le fait qu’ils ont été souvent l’œuvre des assureurs et qu’ils ne sont destinés qu’a couvrir le tronçon maritime du voyage.
- Les polices classiques : Nous les nommons ainsi dans notre mémoire, car à notre avis ils signent le début du modèle contemporain. Il s’agit de la police du 17 août 1944 modifiée le 1er janvier 1947 et celle du 10 août 1968 modifiée le 14
septembre 1970 et le 01 décembre 1978.
Ces nouvelles polices, à l’inverse des précédentes, ne sont plus l’œuvre unilatérale des assureurs, mais le résultat des négociations engagées entre les représentants des assureurs, des assurés et des courtiers.
Ce qui caractérise ces polices c’est quelles couvrent un régime unique d’assurances qui garantit l’intégralité du transport de « bout en bout » (warehouse to warehouse, door to door) et permet aux opérateurs d’avoir en face un seul et unique assureur sur tout le trajet.
Ces polices sont composées de onze chapitres dont un intitulé inchangé depuis l’imprimé de 1944 jusqu’à l’imprimé de 1978 et de 3713 à 3814 articles dont dix chapitres applicables indifféremment aux polices d’abonnement ou aux polices au voyage.
On reproche à ses polices leur manque de clarté, d’abord sur le fond, ils annoncent en premier lieu, dans l’imprimé une formule « Tous risques » qui s’avère dans les articles15 qui suivent moins étendue qu’elle y parait et de contenir, en second lieu,
13 Police de 1944 modifiée en 1947 et en 1960
14 Depuis 1968
15 Le vol est exclu sauf stipulation contraire
une franchise16 automatique de 5% relativement élevée. Sur la forme, les divers paragraphes sur les obligations des parties sont dispersés dans divers chapitres.
A partir de 1983, les rédacteurs des imprimés ont tenus compte de ses critiques dans l’élaboration du nouveau projet.
- Les polices modernes : Se sont les imprimés du 30 juin 1983 modifié le 16 février 1990 et le 22 octobre 1998 et le 1er juillet 2002 et l’imprimé du 01
septembre 2009.
Le marché français a veillé, au terme de travaux prolongés et approfondis, à moderniser les polices classiques, avec l’intention déclarée – et réalisée – de ne pas modifier la quasi-totalité des règles qui avaient fait leurs preuves et qui donnaient satisfaction, mais en faisant la toilette de ce texte, d’une façon plus moderne et plus lisible.
La tâche des auteurs a sans doute été facilitée par l’existence d’une jurisprudence qui avait été abondante et qui, au fur et à mesure de la succession des modifications, devient de moins en moins nombreuse : les litiges – sauf sur les questions de fait – sont en effet rares grâce à l’existence – et à la pérennité – de textes stables et d’une jurisprudence claire et qui donne satisfaction.
Ces nouvelles versions sont composées de six chapitres au lieu de onze dans les versions précédentes et de 33 articles au lieu de 38.
A côté des systèmes de renommée internationale, existent multiples systèmes nationaux. Le système Tunisien en est un et fera l’objet de notre démonstration.
- Le système national : Le régime du contrat d’assurance maritime à l’instar des régimes des pays en voie de développement a connu divers changements pour s’adapter et répondre aux besoins des demandeurs d’assurance. L’évolution est plus liée au contexte politique que technique. Nous retraçons ci-après une chronologie de cette évolution.
- Jusqu’à 1956 : A La veille de l’indépendance, le marché tunisien des assurances était marqué par la prédominance des sociétés étrangères principalement européennes qui pratiquaient sous forme d’agences étroitement
16 Article 22
liées à leurs sièges en Europe et qui se disputent une clientèle étrangère. La première compagnie qui s’installera en Tunisie en 1874 est une représentation de l’agence française Phénix-vie qui consacrera la naissance officielle de l’assurance en Tunisie.
On relevait l’existence de représentants de huit sociétés étrangères qui proposent le même schéma de l’assurance transport pratiqué en France.
Les assurances maritimes étaient exclus du champ d’application du décret beylical du 16 mai 1931, rendant applicable en Tunisie la loi française de 1930 sur les assurances qui d’après son article 1er exclue les assurances maritimes.
Les opérations d’assurances proposées aux citoyens, sont celles pratiquées suivant le même schéma que les opérations françaises avec l’introduction, dans les branches autres que le transport de facultés, de certaines modifications pour tenir compte des réalités locales. Les contrats de transport maritime de facultés sont, quant à eux, exclusivement régis par les polices françaises.
Le marché utilise à cette époque les polices françaises en vigueur, la dernière en date était celle du 17 août 1944 avec ses modifications des années 1947-1949 et 1960.
Les mesures prises depuis l’indépendance ont eu pour effet de limiter considérablement la prédominance étrangère devant la progression des intérêts nationaux afin de créer un marché national des assurances développé.
- A partir de 1956 : Cette période débute le 06 décembre 1958 avec la création de la première compagnie nationale d’assurances et de réassurances, STAR17.
Trois autres compagnies existait déjà, la CAISSE MUTUELLE AGRICOLE actuellement CTAMA (1912), le LLOYD TUNISIEN (1945) et l’ASTREE (1949) mais étaient
détenues par des étrangers et allaient devenir quelques années plus-tard des entreprises nationales. Ces compagnies qui souscrivaient des contrats d’assurances transport de facultés continuaient à utiliser exclusivement l’imprimé de la police française du 17 août 1944 modifiée à plusieurs reprises. La gestion qui était
17 Société Tunisienne d’Assurances et de Réassurances
confiée à des français et à des jeunes tunisiens diplômés de l’enseignement secondaire, copiait ce qui se passait sur le marché français. Durant cette période l’assurance transport est caractérisée par des résultats instables et le besoin de techniciens en assurances se fait sentir.
- A partir de 1962 : L’année est marquée par la promulgation du CCMT, depuis cette date, l’assurance transport est désormais régie par une loi spécifique, plus précisément, le livre VI du code.
Le Code traite du transport maritime et se sont les articles 297 à 365 qui définissent la forme et l’objet du contrat d’assurance maritime. L’article 297 définit le champ d’application des assurances maritimes, « Les dispositions du présent livre ont pour objet de définir et de préciser les droits et les obligations des parties concourant aux conventions d’assurances, pour le cas uniquement ou il serait nécessaire de suppléer aux lacunes, ambiguïtés ou obscurités de celles-ci ou de celles auxquelles les parties se seront référées ».
Le même article souligne que « les parties sont libres, sous réserves des restrictions et interdictions édictées par le présent code de régler leurs conventions d’assurances comme elles l’entendent, notamment en se référant à toutes les lois étrangères à toutes conventions types ou en créant de nouvelles ».
Il s’avère donc que la majorité des dispositions du CCMT revêtent un caractère supplétif dans le but de contourner l’application de lois internes foncièrement différentes des normes internationales, et d’éviter les conflits stériles entre les parties contractantes en plus d’assurer la sécurité et la transparence des échanges maritimes commerciaux mondiaux.
Une première vague de création d’entreprises d’assurances se réalise au cours des années soixante avec l’apparition de la CTAMA (1961) de la mutuelle MAE (1963) et de la COMAR (1969). L’ossature de ces compagnies est la plus part du temps constituée par les cadres formés à la STAR qui sont à cette époque très sollicités par les nouvelles compagnies. L’année 1967 voit la création de l’Institut Africain des Assurances créée sous l’égide de la STAR afin de répondre aux besoins en cadres en Afrique en général et en Tunisie en particulier. Les responsables de la branche transport avec ceux de la réassurance sont souvent envoyés se forger dans les compagnies françaises dans le cadre de stages professionnels.
- A partir de 1968 : Dés la mise sur le marché français de la police du 10 août 1968, les compagnies tunisiennes l’ont immédiatement mise en application, le
nouveau texte se veut plus lisible avec une formulation moderne où les 37 articles forment un tout cohérent et adapté à la réalité de l’Assurance et du Transport de la fin des années soixante dix. Les modifications qui ont suivis en 1970 et 1978 ont été aussitôt appliquées.
Le marché de l’assurance transport resta cependant très faible malgré l’amélioration de l’économie du pays qui commence à se développer ce qui incita les pouvoirs publics à réagir. La réaction est réalisée par l’adoption de l’obligation d’assurance (infra 30).
- A partir de 1992 : Il a fallu attendre l’année 1992 pour voir le secteur des Assurances se doter d’un document juridique unifié régissant l’activité (le Code des assurances).
Dans l’esprit des initiateurs de cet effort de codification, le Code des Assurances est appelé à intégrer, au fur et à mesure de leurs réactualisations et leurs modifications, tous les textes réglementant les diverses branches de l’assurance (Assurance automobile, voire assurances maritimes…).
Bizarrement, Le code ne contient aucune disposition relative au transport maritime, il n’abroge pas expressément les dispositions du CCMT ce qui implique que les dispositions de ce dernier demeurent en vigueur à ce jour et aucune refonte n’a été faite contrairement à ce qu’a prévu le docteur Othmen Ben Fadhel18.
Par conséquent, est née une coexistence difficile entre d’une part, les règles prudentielles des contrats d’assurances fixées par les dispositions impératives du CAT et d’autre part, les dispositions libérales du CCMT.
14 .Plan : Au lieu d’être la résultante des règles et des pratiques internationales19, l’ensemble contractuel de l’assurance transport maritime de facultés en Tunisie est le sosie du modèle français toiletté, de manière très critique, par les règles et les pratiques locales. Dans un premier temps nous
18 Cour de droit maritime Faculté de droit et des sciences politiques de Tunis, Année universitaire 1992-1993.
19 Nous considérons la police française comme modèle international et non universel.
étudierons l’impact de ce toilettage sur les Contions Générales (Première partie) puis sur les documents voisins (Deuxième partie).
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17 Société Tunisienne d’Assurances et de Réassurances ↑
18 Cour de droit maritime Faculté de droit et des sciences politiques de Tunis, Année universitaire 1992-1993. ↑
19 Nous considérons la police française comme modèle international et non universel. ↑
Questions Fréquemment Posées
Quels sont les principaux types de polices d’assurance maritime en Tunisie?
Les principaux types de polices d’assurance maritime en Tunisie incluent les polices anciennes, classiques et modernes.
Quelles sont les critiques des anciennes polices d’assurance maritime?
Les critiques faites aux anciennes polices concernent le fait qu’elles ont été souvent l’œuvre des assureurs et qu’elles ne sont destinées qu’à couvrir le tronçon maritime du voyage.
Comment les polices classiques diffèrent-elles des anciennes polices?
Les polices classiques, à l’inverse des anciennes, ne sont plus l’œuvre unilatérale des assureurs, mais le résultat des négociations entre les représentants des assureurs, des assurés et des courtiers.