Les stratégies d’implémentation des MDD révèlent une adaptation surprenante face à la montée du hard-discount. Cette recherche met en lumière les défis cruciaux auxquels sont confrontés les distributeurs, tout en proposant des solutions innovantes pour préserver leur position sur le marché français.
C. Les nouveaux comportements de consommation
1) Evolution des dépenses des ménages
Commençons tout d’abord par étudier l’évolution de la consommation alimentaire des ménages au cours de ces dix dernières années.
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Graphique 4 : Consommation alimentaire des ménages en volume
La consommation alimentaire des ménages en volume a baissé pour la deuxième année consécutive en 2009, signe des arbitrages menés par les ménages en termes de gamme et de produits.
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Graphique 5 : Consommation alimentaire des ménages en valeur
Après huit ans de hausse, la consommation alimentaire des ménages en valeur a diminué en 2009. Elle s’est élevée à environ 176 milliards d’euros et a gagné 25,8%.
Ces évolutions à la baisse, tant en volume qu’en valeur, peuvent s’expliquer par des consommateurs de plus en plus adeptes de la consommation maligne. En effet, le contexte économique difficile du moment provoque depuis plusieurs années, un rapatriement du consommateur vers les marques de distributeurs, ceci, au détriment des marques nationales.
Ce n’était pas le cas avant. Aujourd’hui, les français modèrent leurs dépenses, bien souvent au détriment des dépenses alimentaires. De même, ils intensifient leur consommation en marques de distributeurs, qui comme on l’a vu, sont moins chères que les marques nationales. Ce comportement de consommation est assez récent.
Par ailleurs, la fréquentation des magasins hard-discount s’est fortement intensifiée ces dernières années, engendrant un panier moyen inférieur au panier moyen d’une surface de vente traditionnelle.
De fait, ceci peut également expliquer la chute des dépenses alimentaires en valeur des ménages.
2) Evolution des habitudes de consommation
Les habitudes des consommateurs évoluent sans cesse et de plus en plus. Il existe une forte corrélation entre le marché et les habitudes des consommateurs. Si le marché change, cela engendre soit, un accueil favorable des consommateurs qui apprécient cette évolution, soit une aversion au changement et donc un boycott du produit ou de la gamme de produits.
A l’inverse, si se sont les habitudes des consommateurs qui changent, le marché et les industriels seront contraints de modifier leur stratégie et de s’adapter pour espérer maintenir leurs parts de marché.
Depuis une quinzaine d’années, on observe principalement une volonté du consommateur d’acheter au plus vite, et donc souvent, au plus près de chez lui. En effet, la fréquentation d’un hypermarché bondé le samedi après-midi est désormais de moins en moins envisageable pour lui, comme cela pouvait l’être il y a encore quelques temps.
Le consommateur veut faire vite afin d’occuper son week-end à autre chose qu’aux tâches ménagères. En 2009, une étude SIMM TNS Media Intelligence montre que « 80% des sondés déclarent vouloir faire leurs courses dans leur quartier, soit 10% de plus qu’en 2002 »17.
Ces évolutions ont entraîné la multiplication des commerces de proximité tels que les Dailymonop’, Franprix ou encore Carrefour City.
En parallèle, le hard-discount répondant tout à fait à ces nouvelles tendances, on assiste ces derniers temps, à un large déploiement des enseignes telles que Netto et Dia. Selon Bernard BRESSON « ces trois dernières années, le hard-discount a fait preuve du plus fort dynamisme avec une progression de 20% en moyenne en nombre de magasins »18.
Pour ce qui est des marques de distributeurs, le consommateur de marques de distributeurs d’aujourd’hui n’est pas le même que celui des années 1980. Un certain nombre de facteurs ont suscité ces changements et ces nouveaux comportements.
17 Point de Vente, L ’ esso r d e la pro ximité pro fite au hard -discount, 19 octobre 2009.
18 Point de Vente, L ’ esso r d e la pro ximité pro fite au hard -discount, 19 octobre 2009.
3) Les causes du changement
D’après Pascale HEBEL, Directrice du département Consommation au Crédoc : « en
matière d’alimentation, les choses ont beaucoup évolué », explique-t-elle. Elle affirme que « la consommation diffère selon l’âge. Le budget alimentaire s’est beaucoup réduit ces dernières années. Cela s’explique par une baisse du pouvoir d’achat au désavantage de l’alimentaire. On remarque aussi un retour au terroir, à l’artisanal. De plus en plus, le mode de vie détermine le mode alimentaire. »19
Ces bouleversements dans les habitudes de consommation résultent de facteurs variés tels que les contraintes économiques, l’urbanisation, la répartition du temps travail/loisir, public/privé, le développement du travail féminin, les nouveaux processus de fabrication des produits alimentaires, le développement de la grande distribution, etc. Autant de facteurs menant à des schémas nutritionnels moins traditionnels.
Par exemple, la mise en place des 35 heures à partir de l’année 2000, permet l’accès à plus de loisirs et à des activités annexes. Le consommateur cuisine moins et a davantage de temps, soit d’argent à dépenser pour d’autres activités. Dès lors, le poste alimentaire du budget des ménages diminue.
Les consommateurs passent moins de temps chez eux et privilégient des plats préparés, simples, rapides. De même, l’époque où les femmes restaient au foyer et prenaient le temps de cuisiner est révolu. Aujourd’hui, les femmes sont actives et à la recherche du gain de temps maximal, ce qui les pousse vers les magasins de proximité.
Globalement, on constate une diminution du nombre de plats, du temps consacré à la préparation, une irrégularité des horaires de repas, une augmentation des plateaux repas, un développement des plats exotiques et des produits transformés. Les générations plus jeunes ont un goût affirmé pour une alimentation orientée vers une recherche d’innovation.
Des formes hybrides de consommation se sont aussi développées comme le grignotage et les substituts de repas. De même, le snacking et la vente à emporter se démarquent comme les nouveaux modes alimentaires auxquels les marques de distributeurs doivent s’adapter.
19 Extrait d’un entretien de Rungis International avec le département Consommation au Crédoc, sur les modes alimentaires des Français et les nouveaux comportements.
Par ailleurs, les habitudes des consommateurs peuvent également être dictées par la zone de chalandise dans laquelle ils vivent, où dans laquelle se situe le magasin. En effet, plus le magasin sera situé dans une zone de chalandise où la population est aisée, plus le magasin offrira des produits premium. A l’inverse, plus le magasin sera situé dans une zone de chalandise où le pouvoir d’achat est faible, plus l’enseigne proposera des produits et des espaces discount.
Le consommateur d’aujourd’hui est un consommateur qualifié de « zappeur », à la recherche des meilleures opportunités qui s’offrent à lui. Ces opportunités ne sont pas que pécuniaires. En effet, l’achat d’un consommateur peut être impulsé par une situation, un lieu, un moment, une ambiance, un éclairage ou encore un contexte d’achat le mettant dans des dispositions telles que l’objet de l’achat devient une opportunité à saisir immédiatement.
L’environnement dans lequel se situe le futur acheteur a donc une influence son acte d’achat ; qui sort parfois de toute raison. Ce phénomène relève bien souvent du marketing situationnel, qui étudie les conditions dans lesquelles les consommateurs seront les plus à même de dépenser leur argent.
De plus, il y a certaines périodes de l’année comme noël, le nouvel an, où les consommateurs refusent de se restreindre. De même, une personne au revenue modeste ne s’empêchera pas de se faire plaisir occasionnellement par un produit de luxe.
D’un côté, le consommateur actuel sait être très raisonnable, calculateur et réfléchi sur certains achats basiques, lorsqu’à l’inverse il est capable de dépenser une somme certaine pour un objet dont il ne se servira peut être jamais, mais pour lequel il a été soumis à une pulsion d’achat.
Les modes alimentaires sont donc de moins en moins dictés par les coutumes traditionnelles, mais de plus en plus par d’une part la praticité, la simplicité et les coûts réduits, ou d’autre part la séduction, l’impulsion, l’innovation et l’originalité. Les enseignes ainsi que les industriels doivent donc s’adapter sans cesse à ces nouvelles pratiques alimentaires.
L’aspect bon rapport qualité/prix recherché par les consommateurs sur le poste alimentaire, permet d’instaurer un climat favorable à l’immersion des MDD dans les habitudes alimentaires des français. Les enseignes alimentaires font en sorte d’être au plus près de ces nouveaux comportements.
D. Les nouveaux concurrents des MDD
Lorsque les marques de distributeurs se sont développées, elles sont au fur et à mesure, apparues comme une menace pour les marques nationales. Les consommateurs, alors fidèles aux grandes marques de par l’image de qualité et de fiabilité qu’elles représentent, ont progressivement changé d’avis au profit des marques de distributeurs.
Après évolution et diversification, ces dernières représentent aujourd’hui une réelle concurrence pour les marques nationales. Cependant, leur crédibilité est davantage en péril ; elles doivent tenir leurs promesses de qualité supérieure, à un prix inférieur.
Désormais, les grands industriels de l’alimentaire ne sont plus les principaux concurrents à faire de l’ombre aux MDD. Les premiers prix et le hard discount gagnent de plus en plus de parts de marché et s’attaquent aux mêmes cibles client que les marques de distributeurs.
1) Les premiers prix
Les marques premiers prix se définissent comme « les marques apposée sur des produits dont le prix est le plus bas comparativement à tous les autres produits de la catégorie référencés par de distributeur. La plupart du temps, la marque premier prix est signalée en linéaire à l’aide d’un stop rayon ou de tout autre outil de publicité sur le lieu de vente »20.
Lorsque les premières marques de distributeurs apparurent, elles furent bien souvent assimilées à des produits d’« entrée de gamme » puisqu’ils se présentaient sans marque apparente. C’est alors que les enseignes ont décidé de développer des « marques d’enseignes » engageant leur propre image.
20 Définition extraite de l’Encyclopédie du Marketing, Jean-Marc LEHU, Editions d’Organisation, 2004
Pour pallier à la baisse du pouvoir d’achat, la grande distribution propose des produits premiers prix. L’objectif pour les enseignes est que les marques de distributeurs deviennent un produit de substitution entre marques nationales trop chères et marques premiers prix sans qualité. Elles ont un rôle de faire-valoir par rapport aux marques de distributeurs pour ainsi favoriser leur achat.
2) Les produits hard-discount
Le circuit de distribution hard discount est le concurrent le plus redoutable des marques de distributeurs. Les nouvelles tendances de consommation liées principalement à la situation de crise et de récession du pouvoir d’achat font que le consommateur porte de moins en moins son attention sur la marque du produit mais de plus en plus sur le prix.
Dans ce domaine, les produits des hard-discounters défient toute concurrence. Nous développerons plus précisément la situation entre marques de distributeurs et produits hard discount dans la troisième partie.
Le marché des marques de distributeurs connaît une croissance continue qu’elle doit notamment à une perpétuelle adaptation de ses produits aux nouveaux modes de consommation. En effet, les enseignes font de gros efforts en matière de recherche et développement, et élaborent des produits en accord avec la demande du moment, soit des produits premiers prix ou des marques de distributeurs plus exotiques.
Face à un marché en constante évolution, les marques de distributeurs sont contraintes de mettre en place de nouvelles stratégies pour se prémunir non seulement des fortes innovations des marques nationales, mais également de la montée en puissance du hard- discount.
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17 Wikipédia, dernière modification le 15 mai 2009. ↑
18 Point de Vente, L ’ esso r d e la pro ximité pro fite au hard -discount, 19 octobre 2009. ↑
20 Définition extraite de l’Encyclopédie du Marketing, Jean-Marc LEHU, Editions d’Organisation, 2004. ↑
Questions Fréquemment Posées
Quelles sont les évolutions des dépenses alimentaires des ménages en France ?
La consommation alimentaire des ménages en volume a baissé pour la deuxième année consécutive en 2009, et la consommation alimentaire en valeur a également diminué, s’élevant à environ 176 milliards d’euros.
Comment les habitudes de consommation des Français ont-elles changé ?
Les consommateurs souhaitent acheter au plus vite et près de chez eux, ce qui a entraîné la multiplication des commerces de proximité et une forte fréquentation des magasins hard-discount.
Quels facteurs ont contribué au changement des comportements d’achat ?
Les consommateurs se tournent de plus en plus vers les marques de distributeurs, influencés par un contexte économique difficile et une volonté de modérer leurs dépenses alimentaires.