Les stratégies de mise en œuvre de la supervision pédagogique sont souvent entravées par des défis majeurs, comme le manque de ressources. Cette recherche révèle des perceptions cruciales des acteurs scolaires à Kalabancoro, offrant des pistes pour renforcer la qualité de l’enseignement dans cette commune rurale.
Les facteurs qui entravent le bon déroulement de la supervision pédagogique
Parlant des facteurs qui peuvent entraver le bon déroulement de la supervision pédagogique, nous signalons ici qu’il ne s’agit pas de percevoir la supervision pédagogique comme étant seulement le sauveur du système éducatif ou encore moins l’activité qui permettrait la résolution ferme de l’ensemble des problèmes éducatifs sans demander aucun effort. Au-delà de son importance dans l’amélioration de la qualité de l’enseignement/apprentissage, il faut aussi noter que certains facteurs ou obstacles peuvent entraver son efficacité.
Nous nous attarderons, ici, aux obstacles essentiels à sa constitution et à son application. C’est-à-dire qu’il sera question, par exemple, des modèles de supervision, de la qualité des ressources humaines, du manque de ressources (humaines et matérielles) des conditions nécessaires à son bon fonctionnement. Car la littérature nous indique que ces obstacles varient
15PAUL KOUAME (2012). Les pratiques de la supervision pédagogique de l’EPS dans l’enseignement primaire : Cas des I.E.P de Dabou et de Zuenoula. Mémoire de fin d’étude, Ecole Normale Supérieure d’Education Physique et Sportive Abidjan, Côte d’Ivoire. P 79
d’un pays à un autre selon le modèle de supervision et les ressources humaines et matérielles mises à cet effet.
Pour cela, April, D. (2019) dans sa thèse de doctorat intitulé : Supervision pédagogique en contexte de gestion axée sur les résultats : pratiques de membres de la direction d’établissement d’enseignement accompagnés en communauté d’apprentissage, nous aborde les obstacles liés au modèle de supervision. Selon l’auteur, la perception de la supervision comme un moyen de contrôle et d’évaluation par le personnel enseignant peut constituer une atteinte à la réussite de ses objectifs à savoir l’accompagnement des enseignants dans leurs pratiques professionnelles.
Ainsi, s’inspirant des travaux de (Lapointe et Brassard, 2018 ; Zepeda, 2007), l’auteur affirme que le fait de concevoir la supervision comme une forme d’évaluation chez les enseignants aurait pour conséquence de briser le lien de confiance entre le superviseur et le supervisé, ce qui entraîne une démobilisation des supervisés. Il poursuit qu’un équilibre doit être atteint entre l’aide à apporter au supervisé et le contrôle à exercer par le superviseur. Enfin, selon Lafortune, (2008), des malentendus quant à la visée de la supervision peuvent même aller jusqu’au refus d’enseignants d’être supervisés (cité dans April, D 2019).
Pour faire face à ces malentendus, l’auteur envisage dans son ouvrage un certain nombre de paramètres pouvant permettre un processus de supervision pédagogique efficace et d’atteindre son but ultime dans l’accompagnement du personnel enseignant. Pour cela, il retient les travaux de (Buttram et Farley-Ripple, 2016 ; Kruse, Seashore Louis et Bryk, 1994 ; Owens, 2001) que l’établissement d’un climat de confiance entre les membres de l’équipe-école contribue à l’instauration de meilleures pratiques pédagogiques des enseignants et à des niveaux élevés de performance chez les élèves.
À cet effet, la « réconciliation » des enseignants avec la supervision pédagogique apparaît étroitement liée aux bénéfices que ces derniers pourront retirer de cette démarche d’accompagnement, mais surtout à la relation de confiance que les enseignants entretiennent avec leur superviseur. Enfin, Van Maele, Forsyth et Van Houtte, 2014) soutiennent que l’établissement d’un climat de confiance en supervision pédagogique mérite une attention continue des chercheurs et des praticiens en raison de son rôle dans l’atteinte de l’équité et de l’excellence (cité dans Daniel April, 2019).
Présentant les difficultés liées à la supervision pédagogique, LAVOIE, F., (2011) souligne que : « le principal obstacle rencontré lors de la réalisation du processus de supervision pédagogique et qui nuit à l’atteinte de son but premier, qui est l’amélioration du personnel enseignant, est l’existence d’un rapport de force entre le superviseur et le supervisé ». Évidemment, tout bon superviseur tentera de restreindre à son maximum ce
rapport en utilisant différentes stratégies et techniques pédagogiques. Malgré tout, l’auteur poursuit en affirmant que : pour être efficace, le processus de supervision pédagogique doit être réalisé dans un climat de collégialité et que ce n’est pas chose aisée en raison de la tension, souvent palpable, entre le superviseur et le supervisé, on peut donc affirmer qu’il s’agit d’une limite plutôt importante et inhérente à sa constitution.
Il affirme ainsi qu’afin d’obtenir de bons résultats, le processus de supervision pédagogique doit être effectué dans un contexte de collégialité entre les différents acteurs. C’est-à-dire que le superviseur ne doit rien imposer à la personne qui est supervisée. Les décisions importantes doivent aussi être prises d’un commun accord. Cependant, l’auteur préconise qu’en pratique, il arrive fréquemment qu’un climat différent soit créé.
Dans ce cas, selon lui, il ne s’agit plus d’une relation dite de « coatching » mais plutôt de « maître à élève »; ce qui ne permet pas d’obtenir les résultats espérés. L’auteur conclut en affirmant que dès que le superviseur dépasse le stade de guide et se place comme étant le maître du supervisé, qu’il ne peut y avoir de supervision pédagogique digne de ce nom.
Outre les travaux de LAVOIE, F., (2011), KEBIECHE, A(2017) dans son mémoire de maîtrise, à l’Université de Sherbrooke intitulé : « La supervision pédagogique et ses multiples regards au sein des écoles primaires québécoises » présente quelques obstacles à l’application du processus de supervision pédagogique dans un contexte Québécois.
Dans cet ouvrage, l’analyse des données de l’auteur lui a permis de mettre en lumière quelques écueils affleurant le concept de supervision pédagogique. Il a ainsi classé ces derniers selon leur fréquence d’apparition dans les différents discours analysés dont les principaux sont entre autres : la conception erronée ou le manque de compréhension du concept de supervision pédagogique ; le manque d’ouverture ; l’absence du lien de confiance ; la crainte de jugement ; la non-reconnaissance du leadership pédagogique de la « direction d’établissement » ; l’absence de mécanisme volontaire de formation ; la peur de sortir du cadre de confort : routine professionnelle ; l’absence du partage et du travail collaboratif.
De plus, les résultats de son étude ont affirmé que les « directions d’établissement» rencontrées ne disposent pas d’un grand nombre d’outils de gestion des activités éducatives. C’est pourquoi, il nous semble important de le souligner de nouveau que ces ressources concernent principalement leur disponibilité et le manque de temps découlant de l’excès de leurs tâches administratives, la stabilité du personnel enseignant, les ressources humaines telles que les conseillères et conseillers pédagogiques ainsi que les professionnels de l’éducation et les fonds mobilisés pour l’école. Enfin et sur les questions d’ordre pratique, l’auteur note qu’il est nécessaire de relever que, bien que le rythme du travail des « directions
d’établissement » interrogées soit mouvementé et que leur calendrier demeure très chargé, nous continuons à croire qu’une meilleure communication, claire et précise basée sur la confiance et le respect mutuels ainsi que sur l’ouverture d’esprit faciliterait certainement, une utilisation efficace du processus de supervision pédagogique au sein des écoles pour favoriser la réussite de tous les élèves.
L’auteur poursuit son argumentaire sur ce point en affirmant que le processus de supervision pédagogique est prometteur mais qu’il nécessite une attention particulière dans son application; d’où l’importance d’une formation exigeante pour des superviseurs chevronnés.
Sur le même sujet, il évoque que quand la supervision pédagogique est perçue, comme un système de contrôle, elle est automatiquement rejetée par la majorité des enseignants ; et que cette perception négative de l’intervention pédagogique semble être liée à la façon de concevoir son efficacité. Par conséquent, dit-il la réconciliation du personnel enseignant avec la supervision pédagogique dépendra de la relation de confiance entre le superviseur et le supervisé ainsi que sur les avantages professionnels qu’ils en retireront. À ce titre, une question demeure et nous préoccupe dans le cadre de cette étude à savoir comment amener l’ensemble des acteurs de l’éducation à avoir une opinion positive de la supervision pédagogique ?
Pour répondre à cette interrogation, l’auteur préconise quelques conditions qui facilitent l’instauration du processus de supervision pédagogique. Parmi ces conditions, il estime que la condition la plus essentielle à l’installation de la confiance au sein d’une équipe est l’ouverture aux idées des autres sans que l’on soit pour autant obligé de renoncer facilement à nos propres opinions face à quelques individus désirant prôner leur point de vue coûte que coûte.
Cela dit, être ouvert aux idées des autres et chercher à comprendre leur point de vue signifie systématiquement selon l’auteur se placer d’emblée dans une posture de respect et d’écoute active. C’est aussi l’occasion de réfléchir à ce qu’ils disent et veulent véhiculer. C’est le moment de s’ouvrir à la différence où il faut s’armer de courage et d’humilité pour se défaire d’une certaine étroitesse d’esprit qui freine considérablement l’objectivation de notre questionnement.
Il ajoute que l’établissement d’une communauté d’apprentissage professionnelle (un lieu de partage et de soutien des enseignants) et un leadership soutenu des directeurs d’établissement sont des conditions d’instauration du processus de supervision pédagogique.
Voyons maintenant dans ce même ordre d’idée, LACHAINE, C. (2018), dans son mémoire de maîtrise sur « Les manifestations du leadership transformationnel par des
conseillers pédagogiques ». Dans cette étude, l’auteur souligne quelques conditions et exigences de réussite d’une supervision de qualité.
S’inspirant des études de LAFORTUNE, 2008, il souligne que « le conseiller pédagogique qui agit en tant qu’agent de changement doit d’abord établir une cohérence entre les théories et les stratégies proposées, ainsi qu’avec la réalité de la salle de classe; par ailleurs, il doit être capable de guider, d’inspirer et de susciter l’engagement des enseignants qu’il accompagne ». c’est pourquoi, l’auteur mentionne que n’importe qui ne peut prétendre assurer la fonction du superviseur, cela s’apprend et requiert des compétences.
Il ajoute que l’autorité du leader transformationnel, jugée démocratique, est tout d’abord basée sur la compétence, le dévouement, l’authenticité et la capacité de transcender sa vision pour ainsi influencer le comportement des enseignants qu’il accompagne, ce qui s’apparente aux aptitudes mentionnées précédemment à propos du conseiller pédagogique dans son rôle d’agent de changement (Avolio, 2011; Bass, 1998; Gendron et Lafortune, 2009), cité dans LACHAINE, C.,( 2018).
S’agissant des compétences requises pour la fonction de superviseur pédagogique comme évoqué précédemment, nous empruntons quelques points de vues de Boutet et al., 2002 sur la question dans son ouvrage intitulé : les enjeux de la supervision pédagogique des stages16.
Dans cet ouvrage, l’auteur souligne que dans la supervision pédagogique, la patience revêt une grande importance afin de ne pas anéantir la confiance en soi du supervisé. Qu’en agissant trop rapidement, le superviseur court le risque de rater son travail. Pour cela, l’auteur affirme qu’une bonne maîtrise en relation d’aide est nettement bénéfique pour la réussite de la supervision pédagogique puisque celle-ci est elle-même une forme de relation d’aide.
L’auteur ne manque pas l’occasion de mentionner également que le superviseur doit être un leader puisqu’il a la responsabilité de planifier et de contrôler le travail des enseignants. Il poursuit tout en affirmant que pour bien faire son travail de contrôle et de planification, le superviseur doit être en mesure de motiver, de former et de conseiller ses supervisés. Et pour remplir ces différents rôles, il doit acquérir (c’est-à-dire le superviseur) certaines compétences
: disposer d’une expertise technique, être en mesure de bien comprendre le comportement humain, avoir du leadership, et posséder de bonnes habiletés conceptuelles et organisationnelles.
16Boutet, Marc and Nadia Rousseau. Les enjeux de la supervision pédagogique des stages. Presse de l’Université du Québec, 2002. https://muse.jhu.edu/book/20335 ; DOI : 10.1353/book.20335
Dans cette même perspective, Fortin, 1984. (cité dans Boutet et al., 2002, p.16) propose quatre conditions essentielles pour assurer une supervision efficace.
Premièrement, le superviseur doit absolument avoir une connaissance approfondie de la profession de la personne supervisée puisqu’il devra à la fois intervenir de manière professionnelle auprès de cette personne et corriger ses erreurs.
Deuxièmement, le superviseur doit maîtriser le programme enseigné par le supervisé. Cette maîtrise est essentielle pour diverses raisons : elle a une incidence directe sur la qualité de ses interventions, elle lui permet d’apprécier les compétences déjà acquises par le supervisé et, finalement, elle lui permet de voir le chemin qui reste à parcourir avant d’en arriver au résultat escompté.
Troisièmement, on doit prendre pour acquis que les personnes n’apprennent pas toutes au même rythme et que les difficultés d’apprentissage diffèrent d’une personne à l’autre. De ce point de vue, le superviseur doit donc être en mesure de composer avec ces réalités dans l’exercice de ses fonctions. Et à cet égard, il doit absolument maîtriser les processus d’apprentissage et être capable de se mettre dans la peau du supervisé confronté à des difficultés dans l’accomplissement de ses gestes professionnels pour parvenir à l’aider efficacement à surmonter ces difficultés.
Quatrièmement, il importe de préserver un bon climat de confiance dans la relation avec le supervisé. C’est ce climat qui pourra permettre à ce dernier de croire qu’une amélioration dans son apprentissage est possible et, par le fait même, de surmonter les difficultés rencontrées dans l’acte d’enseigner. Le superviseur a le devoir d’aider le supervisé à développer une bonne confiance en soi. À cette fin, le superviseur doit être capable d’entrer en relation pour gérer efficacement la charge émotionnelle du supervisé qui sera pratiquement mis à nu par la découverte du chemin qu’il lui reste à parcourir pour arriver à acquérir les compétences relatives à sa profession.
Finalement, l’accompagnement du développement professionnel du personnel enseignant apparaît avec force comme une nécessité ces dernières années. Il implique une démarche axée sur la personne enseignante qui s’inscrit dans un processus de changement et qui préconise la mise en place d’un espace de réflexivité qui l’invite à revoir et à renouveler sa mission en tant que praticienne réfléchie.
La personne qui accompagne n’apporte pas de solution toutefois, son expertise réside plutôt dans l’art de poser les bonnes questions qui vont permettre à la personne accompagnée de trouver son chemin. Par ailleurs, la mesure d’aide est la constante qui distingue la supervision pédagogique. Ainsi, le rôle contrôlant qui se greffait à cette intervention éducative devrait laisser place tranquillement à un caractère aidant et
formateur qui est fortement privilégié en théorie. En somme, plusieurs points semblent unir l’accompagnement du développement professionnel du personnel enseignant et la supervision pédagogique, entre autres : la mesure d’aide, la confiance, l’ouverture d’esprit, la dimension communicationnelle ainsi que notre objectif premier qui est l’amélioration des apprentissages de tous les élèves (KEBIECHE, A (2017). C’est pourquoi, il apparait plus qu’utile de considérer, la supervision pédagogique comme étant une composante d’une éducation de qualité.
À la suite de cette présentation d’études, de thèses, de mémoires et de revues, il est maintenant clair que la supervision pédagogique influence la réussite scolaire en contribuant à l’amélioration des techniques d’enseignement des enseignants, d’où son importance. Nous sommes maintenant en mesure d’affirmer qu’à l’égard de tout ce que nous venons de voir à travers les écrits recensés, nous comprenons maintenant que la supervision pédagogique contribue fortement au développement professionnel du personnel enseignant ; mais qu’elle répond aussi à des exigences pour l’atteinte de
son but ultime qu’est l’amélioration de la qualité des enseignements/apprentissages. Certes, le lien entre la supervision pédagogique et le développement professionnel des enseignants dans l’amélioration de la qualité de l’enseignement a été démontré depuis de nombreuses années et par différents auteurs comme nous venons de le découvrir.
Cependant, l’examen de ces écrits dans le domaine montre qu’il existe peu de connaissances sur l’avis des enseignants sur la question et de leur relation interpersonnelle avec les superviseurs permettant de mieux comprendre comment l’accompagnement se déroule. En outre, lorsque nous analysons les écrits antérieurs à notre disposition et l’effort fourni au moment de la recension des écrits sur la question, nous constatons qu’il y a une faible production scientifique sur la question dans un contexte malien.
Pour cela, le présent travail consistera d’aborder les différents aspects de la supervision pédagogique et son efficacité à travers les perceptions de ses différents acteurs (DCAP, CP, Directeur d’écoles, Enseignants…) dans un contexte malien tout en faisant ressortir les difficultés auxquelles ils se trouvent parfois confrontés dans les pratiques de supervision pédagogique. Il sera aussi question du mode de recrutement et de la formation continue des acteurs chargés de la supervision pédagogique afin de voir s’il y a une relation entre ce que vivent actuellement les chargés de supervision et leurs formations initiales et continues en lien avec la supervision pédagogique.
Questions Fréquemment Posées
Quels sont les obstacles à la supervision pédagogique dans la commune de Kalabancoro?
Les obstacles à la supervision pédagogique incluent le manque de conseillers pédagogiques, de ressources humaines et matérielles, ainsi que des malentendus sur la visée de la supervision.
Pourquoi la confiance est-elle importante dans la supervision pédagogique?
La confiance entre le superviseur et le supervisé est essentielle car elle contribue à l’instauration de meilleures pratiques pédagogiques et à des niveaux élevés de performance chez les élèves.
Comment améliorer la supervision pédagogique selon l’article?
Pour améliorer la supervision pédagogique, il est proposé d’établir un climat de confiance et de clarifier les bénéfices que les enseignants peuvent retirer de cette démarche d’accompagnement.