Cette étude révèle comment l’analyse pragmatique du discours politique du ministre algérien sur France 24 et RFI dévoile des stratégies discursives cachées. Quelles implications cela a-t-il pour la compréhension des interactions politiques contemporaines ?
1. Analyse pragmatique
Le mot pragmatique en étymologie « pragma » un terme d’origine grec, signifie : action. La pragmatique est une théorie linguistique qui étudie le langage en référence aux interlocuteurs et à la situation du discours, elle attribue une importance majeure aux rôles des utilisateurs du langage dans l’étude de ce dernier et au contexte qui le conditionne. Cette approche affirme qu’en effectuant un acte de langage, l’énoncé doit contenir une capacité d’agir sur l’environnement.
2.1 Définition de l’approche pragmatique
La pragmatique en linguistique est une approche analytique du discours qui vise à concevoir les échanges verbaux et interpréter la production langagière qui dépasse, selon cette approche, les limites d’une simple locution et la considère comme une action qui peut influencer l’interlocuteur à réaliser une réaction ou effectuer un comportement, changer une attitude, une croyance, une valeur.
L’interprétation de l’énoncé est une attitude pragmatique qui consiste à attribuer des informations contextuelles qui véhiculent une signification afin d’obtenir une meilleure compréhension du sens de l’énoncé, pour dégager l’interprétation d’un énoncé, il ne suffit pas de formuler l’énoncé conformément à une paraphrase qui comporte le même sens mais une stratégie compatible au raisonnement logique selon un ensemble de principes pragmatiques qui étudient le langage en référence aux interlocuteurs, au conditions de production et à la situation d’énonciation.
Les compétences culturelles et encyclopédiques dont dispose l’allocutaire lui permet de construire le sens de cette séquence, il fait appel aux savoirs et aux informations mémorisés sur les événements qui ont une relation avec l’énoncé en question et qui encadrent les thématiques abordés dans le discours.
Pour bien assimiler le sens inclut dans le discours, on doit impérativement faire usage de l’interprétation logique de l’énoncé par rapport au monde réel.
La pragmatique du discours est fondée sur des évidences ou axiomes, on cite les trois essentiels ; Premièrement, le discours est un ensemble d’énoncés liés dans un enchainement logique, raisonné et non-arbitraire ce qui lui donne une forme cohérente pour pouvoir analyser le sens des énoncés. Deuxièmement, le fait d’interpréter un discours c’est une intervention qui se résume à déceler l’intention du locuteur qui est traduite par une production langagière informative.
Et enfin, pour acquiescer à l’intention totale du locuteur cela dépend de l’accès à une suite de significations appuyées sur l’interprétation et l’explication de ses énoncés.
Cette approche décrit les éléments discursifs comme : la structure de la phrase, l’organisation logique des énoncés, la cohérence et la cohésion, l’intérêt du discours dans une situation de communication et prend en considération plusieurs variables décisives et fondées qui sont le locuteur, l’interlocuteur, le contexte, …
Pour étudier le langage en intégrant le rôle de ses utilisateurs afin de dégager le sens en interprétant les implicites, les présuppositions, les sous-entendus, les implications, les conventions, …
1.1 La théorie des actes de langage
Dans les années cinquante à soixante-dix, une nouvelle théorie dans le domaine de la linguistique a vu le jour grâce aux travaux de plusieurs philosophes mathématiciens. Le philosophe britannique de l’école d’Oxford, John Lang Shaw Austin a toujours été considéré comme le père fondateur de cette théorie, il a publié ses travaux dans son ouvrage célèbre « how to do things with words » traduit en français « quand dire, c’est faire » paru en 1962.
Quelques années après, cette théorie a été revue et modifiée par le philosophe américain Jean Searle auteur du livre « les actes de langage » publié en anglais en 1969. Searle a repris l’idée d’Austin qui considère l’énoncé produit est doté d’une force illocutoire qui accomplie une action et change la situation des interlocuteurs. Tous les deux ont développé une théorie, qui s’intéresse au langage ordinaire, leur observation principale est que le langage n’est pas seulement utilisé pour décrire le réel mais aussi pour exécuter une action sur le réel.
Austin a contribué à souligner que l’utilisation du langage dans notre vie quotidienne est de faire et d’affirmer quelque chose. Il a suggéré que toute parole et tout discours est une action avec des mots et des signes, il considère que la fonction du langage n’est pas essentiellement de décrire le monde mais aussi d’accomplir des actions, ce qui a ouvert la voie à la pragmatique comme discipline en instaurant la théorie des actes de langage.
D’après le dictionnaire de l’analyse du discours : J. L. Austin et J. Searle avaient suggéré qu’ « une théorie du langage est une partie d’une théorie de l’action »et que celle-ci se définit en fonction de sa finalité, jouant un rôle de régulation dans un cadre intersubjectif.
Les philosophes anciens supposaient que le rôle de l’affirmation est de décrire un état de fait, autrement dit ; qu’il n’y avait que des « énoncés constatifs », l’énoncé est constatif lorsqu’il n’a comme fonction que décrire le réel, par exemple : « les européens habitent en Europe », mais Austin a montré par la suite qu’il y a d’autres catégories pour classer les énoncés et qu’il y a des énoncés qui sont eux même l’acte qu’ils prononcent, il les nomme ainsi « les performatifs ». L’énoncé est performatif lorsqu’il a comme fonction non pas uniquement de décrire une chose mais aussi de faire une chose. Il existe deux types de performatifs ; les explicites et les implicites.
Prenant un exemple pour clarifier le concept ; si un propriétaire d’une entreprise désigne un simple employé pour lui confier la fonction d’un gérant, il suffit qu’il prononce l’expression « je vous désigne gérant de cette société », cette phrase fait changer le statut de l’employé à qui revient cette mission. En produisant cet énoncé, le propriétaire accomplit l’acte de faire passer l’employé en question de l’état d’un simple employé à celui d’un gérant. Mais s’il prononce l’expression avec d’autres moyens par exemple : « vous êtes dès aujourd’hui le gérant de cette société » implicitement, l’expression a le même effet de la désignation.
Donc, prononcer cette phrase c’est accomplir un acte, mais cet acte-là doit remplir certaines conditions pour qu’il soit effectif, ces conditions assurent le succès de l’acte, appelées par Austin « les conditions de félicité » qu’on va expliquer plus dans ce qui suit.
1.2 Les conditions de succès ou de félicité
Pour l’exemple ci-dessus, le locuteur doit jouir de ses droits de propriétaire de l’entreprise, le destinataire désire le poste de gérant, le lieu doit être le siège de l’entreprise ou un lieu conventionnel approprié. Ainsi, le même énoncé prononcé par une personne qui a perdu la propriété de son entreprise pour une raison ou pour une autre, ou si cette phrase est dite entre amis pour plaisanter, perdrait le sens initial de la nomination et l’action ne serait pas accomplie.
C’est ainsi que l’opposition constative et performative a été établie, c’est la version originale de la théorie des actes de langage ; les énoncés constatifs se conforment aux conditions de vérité, les énoncés performatifs se conforment aux conditions de succès ou de félicité.
Pour distinguer entre les énoncés performatifs et les énoncés constatifs on doit effectuer la distinction entre les conditions de félicité et les conditions de vérité. Mais cette notion a été critiquée et Austin a constaté que les énoncés constatifs peuvent être en réalité des énoncés performatifs implicitement, par exemple l’énoncé : « je t’offre un cadeau le jour de ton anniversaire » est une promesse implicite même si le verbe promettre n’est pas employé explicitement et ne figure pas dans la phrase, et donc l’énoncé ne peut être classé dans la catégorie des constatifs mais plutôt dans la catégorie des performatifs.
Donc, les constatifs sont des actes de langages qui sont soumis à des conditions de succès comme les performatifs mais qu’ils sont implicites. Ils peuvent être comparés à leur correspondant performatif explicite ce qui détruit la distinction entre constatifs et performatifs et l’opposition entre les deux n’est pas clairement définie comme elle apparait au début.
Après cette confusion, Austin a opté pour une nouvelle classification qui divise les actes de langage en trois catégories.