L’image de la femme en Algérie est profondément explorée à travers l’œuvre de Mohammed Dib, notamment dans ‘La Grande maison’ et ‘Un Été africain’. Cette étude met en lumière la représentation de la femme algérienne et son évolution dans l’imaginaire collectif et la réalité sociale.
Cette étude explore l’image de la femme dans l’œuvre de Mohammed Dib, en se concentrant sur les romans ‘La Grande maison’ et ‘Un Été africain’. Elle analyse la représentation de la femme algérienne dans l’imaginaire collectif et la réalité sociale, en examinant son statut et son évolution.
Université Kasdi Merbah – Ouargla
Faculté des lettres et sciences humaines
Département des langues étrangères
École doctorale algéro-française de français
Antenne de l’université Kasdi Merbah-Ouargla
Magister
Spécialité : Français
Option : Sciences des textes littéraires
Mémoire
Imaginaire collectif et symbolique de l’être : L’image de la femme dans l’œuvre dibienne Un exemple d’étude : La Grande maison et Un Été africain
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Aicha Khedrane
Dirigé par: Pr. Foudil Dahou & Pr. Marie-Agnès Thirard & Pr. Abdelouahab Dakhia & Pr. Salah Khennour
Année universitaire : 2010 – 2011
Résumé
La problématique de la distinction entre l’être féminin et l’être masculin n’a cessé d’être soulevée dans les différents modes d’expression humaine. Elle était et reste encore une habitude assez répandue dans l’histoire, où l’être féminin est souvent soumis à des représentations fautives et dégradantes enracinées dans les imaginaires et les cultures dites populaire et collective de toutes les sociétés.
Et dans la mesure où elle est souvent le miroir de la société, la littérature s’engage pour donner une image authentique de cet être féminin à travers sa représentation dans les différents écrits littéraires (poésie, théâtre, conte, roman…etc.).
C’est dans cette optique que s’effectue notre étude qui traite de ce sujet : Imaginaire collectif et symbolique de l’être : L’image de la femme dans l’œuvre dibienne. Un exemple d’étude : La Grande maison et Un Été africain. Cette étude s’agit d’une tentative de définition du statut de l’être féminin dans l’imaginaire collectif et dans le réel vécu de la société algérienne, puis l’étude de l’adaptation de cet être au sein de l’écriture romanesque, et cela à travers l’étude de l’image de la femme dans deux œuvres dibiennes La Grande maison, et Un Été africain.
En fait, la femme algérienne occupe une place considérable dans l’écriture dibienne. Tout au long de ses œuvres littéraires, Dib peint plusieurs images de cette femme (mère, veuve, épouse, militante…etc.) et défend sa valeur et son identité en refusant farouchement toute sorte de dépersonnalisation, de dépression ou de soumission. De ce fait, l’objectif de ce travail est de répondre aux interrogations suivantes : Comment l’écrivain exprime-t-il le réel à travers l’image de la femme algérienne ?
A-t-il réussi à refléter le réel et la réalité de la femme algérienne à l’époque ? Les deux œuvres éditées reflètent-elles la même réalité de la femme ? L’écrivain a-t-il marqué un processus de changement dans le statut de la femme ou non ? L’ensemble de ces interrogations nous guide vers la problématique suivante : Entre être et devenir ?
Quelle(s) images de la femme algérienne DIB incarne-t-il dans son œuvre romanesque ?
À vrai dire, une descente dans les profondeurs de la société algérienne à travers les deux romans nous procure un tableau d’une société dans toute sa totalité, par son imaginaire, ses traditions et ses mœurs pour révéler tant de réalités sur une féminité qu’était de toutes les Algériennes à l’époque de la colonisation.
ﻣﻠﺨﺺ
ﻟﻄﺎﻟﻤﺎ ﻛﺎﻧﺖ إﺷﻜﺎﻟﯿﺔ اﻟﺘﻔﺮﻗﺔ ﺑﯿﻦ اﻷﻧﺜﻰ و اﻟﺬﻛﺮ ﻣﺤﻞ ﻧﻘﺎش ﻓﻲ ﻛﻞ أﺷﻜﺎل اﻟﺘﻌﺒﯿﺮ اﻹﻧﺴﺎﻧﻲ. ﻓﻠﻘﺪ ﻛﺎﻧﺖ و ﻻ ﺗﺰال ﻣﻨﺘﺸﺮة ﻣﻨﺬ اﻟﻘﺪﯾﻢ، ﺣﯿﺚ ﺗﺨﻀﻊ اﻷﻧﺜﻰ ﻟﺘﻤﺜﯿﻼت ﺧﺎﻃﺌﺔ و ﻣﮭﯿﻨﺔ ﻣﺘﺠﺬرة ﻓﻲ اﻟﻤﻌﺘﻘﺪات و اﻟﺜﻘﺎﻓﺎت اﻟﺸﻌﺒﯿﺔ ﻟﻜﻞ اﻟﻤﺠﺘﻤﻌﺎت. و ﺑﻤﺎ اﻧﮫ ﻏﺎﻟﺒﺎ اﻟﻤﺮآة اﻟﻌﺎﻛﺴﺔ ﻟﻠﻤﺠﺘﻤﻊ، ﻓﻘﺪ اﻟﺘﺰم اﻷدب ﺑﺈﻋﻄﺎء ﺻﻮرة واﻗﻌﯿﺔ ﻟﮭﺬا اﻟﻜﺎﺋﻦ اﻷﻧﺜﻮي و ھﺬا ﻣﻦ ﺧﻼل ﺗﺠﺴﯿﺪه ﻓﻲ ﻣﺨﺘﻠﻒ اﻟﻜﺘﺎﺑﺎت اﻷدﺑﯿﺔ )ﺷﻌﺮ، ﻣﺴﺮح، ﺣﻜﺎﯾﺔ، رواﯾﺔ.(
ﻣﻦ ھﺬا اﻟﻤﻨﻈﻮر، ﯾﺘﻨﺎول ھﺬا اﻟﺒﺤﺚ ﻣﻮﺿﻮع: اﻟﺨﯿﺎل اﻟﺠﻤﺎﻋﻲ واﻟﺮﻣﺰي)اﻟﻤﻌﺘﻘﺪات، اﻟﻌﺮف( ﻟﻠﻜﺎﺋﻦ. ﺻﻮرة اﻟﻤﺮأة ﻓﻲ ﻛﺘﺎﺑﺔ ﻣﺤﻤﺪ دﯾﺐ، ﻣﺜﺎل اﻟﺪراﺳﺔ: اﻟﺪار اﻟﻜﺒﯿﺮة، ﺻﯿﻒ إﻓﺮﯾﻘﻲ. وھﺬه اﻟﺪراﺳﺔ ﻣﺎھﻲ إﻻ ﻣﺤﺎوﻟﺔ ﻟﻠﺘﻌﺮﯾﻒ ﺑﻤﻜﺎﻧﺔ اﻟﻤﺮأة اﻟﺠﺰاﺋﺮﯾﺔ داﺧﻞ اﻟﺨﯿﺎل اﻟﺠﻤﺎﻋﻲ واﻟﻮاﻗﻊ اﻟﻤﻌﺎش ﻟﻠﻤﺠﺘﻤﻊ اﻟﺠﺰاﺋﺮي ، و ﻣﻦ ﺛﻢ دراﺳﺔ ﻟﺘﺠﺴﯿﺪھﺎ ﻓﻲ اﻟﻜﺘﺎﺑﺔ اﻟﺮواﺋﯿﺔ و ھﺬا ﻣﻦ ﺧﻼل دراﺳﺔ ﺻﻮرة اﻟﻤﺮأة ﻓﻲ ﻛﺘﺎﺑﺔ ﻣﺤﻤﺪ دﯾﺐ و ﻗﺪ ارﺗﺄﯾﻨﺎ اﺧﺘﯿﺎر اﻟﺮواﯾﺘﯿﻦ اﻟﺪار اﻟﻜﺒﯿﺮة و ﺻﯿﻒ إﻓﺮﯾﻘﻲ.
ﻣﻤﺎ ﻻ ﺷﻚ ﻓﯿﮫ أن اﻟﻤﺮأة اﻟﺠﺰاﺋﺮﯾﺔ ﺗﺤﺘﻞ ﻣﻜﺎﻧﺔ ﻣﻤﯿﺰة ﻓﻲ ﻛﺘﺎﺑﺔ ﻣﺤﻤﺪ دﯾﺐ. ﻓﻄﯿﻠﺔ ﻛﺘﺎﺑﺎﺗﮫ اﻷدﺑﯿﺔ رﺳﻢ ﻟﻨﺎ دﯾﺐ ﻋﺪة ﺻﻮر ﻟﮭﺬه اﻟﻤﺮأة )اﻷم، اﻟﺰوﺟﺔ، اﻷرﻣﻠﺔ، اﻟﻤﻨﺎﺿﻠﺔ…اﻟﺦ( و داﻓﻊ ﻋﻦ ھﻮﯾﺘﮭﺎ و ﻗﯿﻤﺘﮭﺎ راﻓﻀﺎ ﻛﻞ أﺷﻜﺎل اﻟﺨﻀﻮع و اﻟﺨﻨﻮع اﻟﺘﻲ ﺗﺤﻂ ﻣﻦ ﻗﯿﻤﺘﮭﺎ. ﻣﻦ ھﻨﺎ ﻛﺎن اﻟﮭﺪف ﻣﻦ ھﺬه اﻟﺪراﺳﺔ ھﻮ اﻹﺟﺎﺑﺔ ﻋﻦ اﻟﺘﺴﺎؤﻻت اﻟﺘﺎﻟﯿﺔ: ﻛﯿﻒ ﺻﻮر ﻟﻨﺎ دﯾﺐ اﻟﻮاﻗﻊ اﻟﻤﻌﺎش ﻣﻦ ﺧﻼل ﺻﻮر)ة( اﻟﻤﺮأة اﻟﺠﺰاﺋﺮﯾﺔ ؟ ھﻞ ﻧﺠﺢ دﯾﺐ ﻓﻲ أن ﯾﻌﻜﺲ ﻟﻨﺎ ﺣﻘﯿﻘﺔ اﻟﻮاﻗﻊ اﻟﻤﻌﺎش ﻟﻠﻤﺮأة ﻓﻲ ذﻟﻚ اﻟﻌﺼﺮ؟ ھﻞ ﺗﻌﻜﺲ اﻟﺮواﯾﺘﺎن ﻧﻔﺲ اﻟﺼﻮر)ة( و اﻟﻮاﻗﻊ ؟ و ھﻞ ﺻﻮر ﻟﻨﺎ اﻟﻜﺎﺗﺐ ﺗﻄﻮر ﻓﻲ ﻣﺴﺎر وﺿﻌﯿﺔ اﻟﻤﺮأة ؟ ﻛﻞ ھﺬه اﻟﺘﺴﺎؤﻻت ﺗﻘﻮدﻧﺎ ﻟﻺﺷﻜﺎﻟﯿﺔ اﻟﻤﻌﺎﻟﺠﺔ ﺿﻤﻦ ھﺬه اﻟﺪراﺳﺔ و اﻟﻤﺘﻤﺜﻠﺔ ﻓﻲ: ﺑﯿﻦ اﻟﻜﯿﻨﻮﻧﺔ و اﻟﻤﺼﯿﺮ؟ ﻣﺎ ھﻲ ﺻﻮر)ة( اﻟﻤﺮأة اﻟﺘﻲ ﯾﺠﺴﺪھﺎ دﯾﺐ ﻓﻲ ﻋﻤﻠﮫ اﻟﺮواﺋﻲ؟
إن اﻟﻐﻮص ﻓﻲ أﻋﻤﺎق اﻟﻤﺠﺘﻤﻊ اﻟﺠﺰاﺋﺮي ﻣﻦ ﺧﻼل ھﺎﺗﯿﻦ اﻟﺮواﯾﺘﯿﻦ ﻗ—ﺪم ﻟﻨﺎ ﻟﻮﺣﺔ ﻓﻨﯿﺔ ﻋﻦ ﻣﺠﺘﻤﻊ ﺑﺄﻛﻤﻠﮫ ، ﺑﻤﻌﺘﻘﺪاﺗﮫ، ﻋﺎداﺗﮫ، ﺗﻘﺎﻟﯿﺪه و أﺧﻼﻗﮫ ﻟﯿﻌﻜﺲ ﻟﻨﺎ اﻟﻌﺪﯾﺪ ﻣﻦ اﻟﺤﻘﺎﺋﻖ ﻋﻦ أﻧﺜﻮﯾﺔ ﻛﺎﻧﺖ ﻟﻜﻞ اﻟﺠﺰاﺋﺮﯾﺎت ﻓﻲ ﻋﺼﺮ ﻋﺎث ﻓﯿﮫ اﻹﺳﺘﻌﻤﺎر.
Abstract
The problematic of the distinction between being female and being male has ceased to be raised in the various modes of human expression. It was and remains a widespread habit in history, where the feminine is often subjected to degrading and faulty performances rooted in fantasy and popular culture and collective say in all societies.
Moreover, since it is often a mirror of society, literature agrees to give a true image of that being feminine through its representation in the literary (poetry, drama, story, novel…etc.).
From this angle, our study is done to deal with this topic: Collective imaginary and symbolic of being: The image of women in the work dibienne. A study example: The Big house and African Summer. This study is an attempt to define the status of the feminine in the collective imagination and the real experiences of Algerian society, and the study of adaptation of this being in writing romantic, and that through the study of the image of woman in two works dibiennes The Big House, and African Summer.
In fact, the Algerian woman occupies an important place in the writing dibienne. Throughout his literary works, Dib painted several pictures of this woman (mother, widow, wife, activist … etc.) and defends its value and identity fiercely denying any kind of depersonalization, depression or submission. Therefore, the objective of this work is to answer the following questions: How does the writer expresse it through the real image of the Algerian woman?
Has he managed to reflect the real and the reality of Algerian women at that time? Are both works published to reflect the same reality of the woman? Does the writer scored a process of change in the status of women or he does not? All of these questions lead us to the following problematic: Between being and becoming?
What image(s) of Algerian women does DIB embodies in his novels?
Indeed, a descent into the depths of Algerian society through both novels gives us a picture of a society in all its entirety, by his imagination, its traditions and customs and reflects many facts about femininity that was of all the Algerians women at the time of colonization.
Table des matières
Introduction………………………………………………………………… 01
Partie I
L’être : De l’imaginaire collectif au réel vécu
Chapitre 01
De l’imaginaire collectif
I.1.1- Définition de l’imaginaire. 11
I.1.1.1- L’imaginaire individuel. 12
I.1.1.2- L’imaginaire collectif. 12
I.1.2- L’imaginaire collectif algérien. 13
I.1.3- Problématique de l’être. 15
I.1.4.1- Valeur de l’être dans l’imaginaire algérien. 16
I.1.4.1-Image / valeur de l’être masculin dans l’imaginaire algérien. 16
I.1.4.1.1- Image / valeur de l’être féminin dans l’imaginaire algérien. 17
I.1.4.1.1-L’image de la femme dans l’Islam.
Chapitre 02
Le réel vécu de la femme algérienne
I.2.1- Le statut traditionnel de la femme algérienne (l’éternelle mineure). 26
I.2.1.1– la femme gardienne de la maison. 26
I.2.1.2 – la femme gardienne de la tradition et de la mémoire. 27
I.2.2- Vers la majorité : Le statut moderne de la femme algérienne. 30
I.2.2.1- La femme et la révolution nationale. 30
I.2.2.2- Le statut de la femme de l’indépendance à nos jours. 33
I.2.2.3- La Question du code de la famille 34
I.2.2.3.1– le statut de la femme entre la tradition et la modernité. 36
Partie II
La femme dans l’incarnation romanesque
L’image de la femme dans l’œuvre dibienne.
Chapitre 01
Etude séparée de la représentation de la femme.
II.1.1- L’image de la femme dans le roman maghrébin d’expression française.
II.1.2- L’image de la femme dans le roman algérien d’expression arabe. 46
42
Chapitre 02
L’image de la femme dans l’œuvre dibienne.
II.2.1- Biographie de l’auteur. 51
II.2.2 – L’œuvre de l’écrivain. 52
II.2.3 – Bibliographie de l’auteur. 53
II.2.4- Le thème de la femme dans l’écriture dibienne. 56
Table des matières
C
Chapitre 03
Etude de l’image de la femme dans La Grande Maison et Un Eté africain.
II.3.1- Présentation du corpus. 62
II.3.1.1- Résumé de l’œuvre La Grande maison. 64
II.3.1.1-Résumé de l’œuvre Un Été africain. 65
II.3.2- Présentation des personnages féminins dans La Grande maison. 66
II.3.3- Présentation des personnages féminins dans Un Été africain. 72
II.3.4- Les images de la femme traditionnelle. 78
II.3.4.1-L’image de la mère. 78
II.3.4.1.1- Image de la mère dure. 79
II.3.4.1.2- Image de la mère tendre. 81
II.3.4.2- L’image de la femme gardienne de la maison. 83
II.3.4.3- L’image de la jeune fille opprimée. 85
II.3.4.4- L’image de la femme ignorante. 87
II.3.4.5-L’image de la femme épouse. 88
II.3.4.6 -L’image de la femme répudiée. 91
II.3.4.7-L’image de la femme veuve. 93
II.3.5- Évolution ou Révolution : La femme en marche vers la majorité. 94
II.3.5.1- L’image de la femme travailleuse. 94
II.3.5.2- Zakya : L’image de l’instruite militante. 95
II.3.6- Symbolique du personnage féminin : L’image de la mère patrie. 98
Conclusion………………………………………………………………… 101
Introduction
L’être humain est avant tout « un donné brut »1 qui cherche à se personnifier par son intégration communautaire. Autrement dit, cette matière première reçoit sa valeur et sa signification par son interaction avec autrui. À cet égard, M. Aziz Lahbabi écrit dans son ouvrage intitulé De L’être à la personne :
L’être n’est humain que sur la base de ses dimensions de l’état civil qui détermine son « ici », son «maintenant», ses «avec» relationnels et ses qualités différentielles (sexe…)2
De ce fait, l’être ne peut construire les dimensions de son identité humaine, que s’il établit des relations avec l’autre. Ainsi, l’être humain est essentiellement défini par son appartenance à un groupe social partageant le même imaginaire collectif ; lequel facteur identitaire est conçu par Florence Guist- prairies en tant que :
Ensemble des éléments qui, dans un groupe donné, s’organisent en unité significative pour le groupe, à son insu. Celui-ci n’épuise pas les significations imaginaires du groupe, encore moins celles des individus, mais il se présente comme un principe d’ordonnancement, une force liante, déterminant les volontés d’agir [ainsi que], les conduites professionnelles.3
Cet être sociable aspire, avec ses semblables, à être un acteur puissant, un responsable et un porte- parole dans sa société ; c’est un agent de circulation de la sensibilité du groupe. Il témoigne peu ou prou fidèlement de l’ordre établi ainsi que de l’harmonie comportementale de la société à laquelle il appartient ; d’où l’éloge du profond enracinement et de l’adhésion interindividuelle biaisés par les représentations collectives.
En fait, la problématique de l’être n’a cessé d’être soulevée dans les différents modes d’expression humaine. Du fait que la distinction entre l’être féminin et l’être masculin était et demeure encore une habitude assez répandue dans l’histoire, depuis la nuit des temps, où l’être féminin est le plus souvent soumis à des représentations fautives et dégradantes enracinées dans les cultures dites populaire et collective de toutes les sociétés. C’est ce qu’affirme Mohamed MESLEM dans son ouvrage intitulé La Femme : La Valeur mystifiée :
Historiquement on constate que l’union durable entre l’homme et la femme n’existait pratiquement pas, car le croisement brutal ou ce qu’on peut appeler « promiscuité » constituait la règle ; un contexte où la femme était la propriété de la tribu, du clan ou du groupe. Elle ne possédait, vis-à-vis des hommes, ni le droit de choisir, ni le droit
1 Mohamed Aziz LAHBABI, De L’être à la personne, Alger, SNED, 1985, p.7.
2 Ibid., p.10.
3 Florence GUIST-DESPARALLES, L’imaginaire Collectif, Paris, Erès, 2003
Cité in http://perso.orange.fr/jacques.nimier/livre_imaginaire_collectif.htm.
Introduction
3
de vouloir. Elle était disposée comme n’importe quelle marchandise dont l’homme pouvait librement se servir1.
L’ensemble de ces représentations bascule du positif au péjoratif, de la valorisation à la dévalorisation de la femme sous forme de préjugés, de stéréotypes qui déprécient, et excluent les femmes en référence à leur sexe.
Et dans la mesure où elle est souvent le miroir de la société qui reflète ses valeurs, traditions, coutumes et culture, la littérature s’engage pour donner une image authentique de cet être humain à travers sa représentation dans les différents écrits littéraires (roman, poésie, théâtre, conte…etc.). Pourtant, le modèle qui reste le plus originel par lequel les écrivains ont bien traité la notion de l’être humain et surtout l’être féminin est le roman.
C’est dans cette optique que s’effectue notre étude qui traite de ce sujet : Imaginaire collectif et symbolique de l’être : L’image de la femme dans l’œuvre dibienne. Un exemple d’étude : La Grande maison et Un Été africain.
En fait, le choix de l’être féminin et de son adaptation romanesque semble un révélateur du fond de la société car comme le précise M. Mimouni :
Par delà les sensibilités, c’est la différence des regards et des mises en situation, qui éclaire l’ambiguïté des enjeux sociaux, dont la femme se révèle l’épicentre. Convoquée sur le terrain de la tradition en tant que composante de la reconquête de l’identité culturelle, elle est en même temps perçue comme facteur de transformation, comme baromètre mesurant le degré de blocage ou de libération de nos sociétés, située au cœur de la problématique de la tradition et de la modernité, elle en cristallise les conflits et les déchirements, les espoirs aussi2.
La lecture attentive de cette citation, nous montre le conflit que vit la femme en tant que captive de traditions, et en tant que quêteuse d’un statut valorisant à l’ère de la mondialisation. Elle se présente ainsi comme le miroir qui reflète l’image de la progression ou la régression des sociétés.
En outre, les visions du monde d’hier se confrontent à celles d’aujourd’hui, où la femme cherche à réaliser ses rêves féministes, notamment ceux d’une revendication de l’égalité entre les sexes. Aujourd’hui, l’idéologie féministe renvoie à un modèle d’auto émancipation qui consiste à redéfinir le rôle et à accroître les droits des femmes dans la société.
Elle met en lumière le statut d’infériorité de la femme que la société maintient et fait appel à la lutte pour la revendication collective de l’égalité des sexes. Elle dissipe les stéréotypes sexistes qui encouragent à représenter les femmes en tant que groupe dont les membres sont indifférenciés. En fait, notre propos ne s’inscrit pas dans une optique de contestation des valeurs ou des idéologies sous-jacentes à la structure sociale algérienne; moins encore
1 Mohamed MESLEM, La Femme : La Valeur mystifiée, Alger, Dar Kortoba, 2006, p.9.
2 M.MIMOUNI, La Femme maghrébine : Baromètres de blocage ou de libération, les 2 écrans, Alger, n : 30,1982.
dans celle d’une discussion de la légitimité des nouvelles tendances féminines; mais il s’agit d’une tentative de définition de la place de l’être féminin dans l’imaginaire collectif et dans le réel vécu de la société algérienne, puis l’étude de l’adaptation de cet être au sein de l’écriture romanesque, et cela à travers l’étude de l’image de la femme dans deux œuvres dibiennes La Grande maison , et Un Été africain.
De même, l’intérêt pour l’étude de l’image de la femme s’explique par le fait que cette dernière a considérablement évolué au cours des années dans le champ romanesque de différentes littératures, et nous avons opté pour l’étudier dans l’œuvre dibienne parce qu’elle occupe une place privilégiée au sein de celle-ci.
En fait, au moment où plusieurs écrivains s’expérimentaient à dessiner des facettes honteuses de la femme algérienne en la représentant comme « la ville habitée par des chiens »1 ou comme « la prostituée obsédée par l’inceste »2, vient Mohamed Dib pour allumer l’étincelle qui va éclairer la voie/voix de la femme algérienne, et pour défendre sa valeur et son identité en refusant farouchement toute sorte de dépersonnalisation, de dépression et de soumission.
DIB traduit- à travers l’incarnation de différentes images de la femme algérienne (mère, veuve, épouse, travailleuse…etc.), et depuis son premier roman La Grande maison en 1952, et jusqu’à son dernier Laëzza en 2006- les malheurs et les douleurs de cette femme causés par l’injustice des représentations et des clichées qui lui sont réservés par la société, au lieu de l’estimer à sa valeur et de lui reconnaître une place valorisante dans la vie sociale.
Dans cette perspective, R. RAISSI écrit : « l’écriture dibienne se donne ainsi comme attachée aux sources profondes et aux valeurs sûres et séculaires de l’Algérie. »3 . Parce qu’elle est de véritable description du réel algérien avec tous ses aspects religieux, traditionnel, politique…etc. une écriture qui se nourrit de valeurs et mœurs algériennes rigides ; qui refuse toute assimilation, toute aliénation dans la culture de l’autre, et ne veut être qu’une image vivante du réel algérien vécu.
Pourtant les questions qui s’imposent d’emblée sont : comment l’écrivain exprime-t-il le réel à travers l’image de la femme algérienne ? A-t-il réussi à refléter le réel et la réalité de la femme algérienne à l’époque ? Est-ce que ces différents personnages féminins ont su donner une voix/voie à toutes les femmes privées de parole ? Comment chacune d’elles va-t-elle tenter le faire ? Les deux œuvres éditées reflètent-elles la même réalité de la femme ? L’écrivain a-t-il</