Impact des relations conflictuelles sur les violences des mineurs en milieu judiciarisé

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🏫 Institut National De Formation En Travail Social - École Des Cadres Supérieurs En Travail Social
📅 Mémoire de fin de cycle en vue de l'obtention du diplôme de Diplôme d’Etat d’Inspecteur d’Education Spécialisée - Juin 2018
🎓 Auteur·trice·s
ILBOUDO Wendelassida
ILBOUDO Wendelassida

Les relations conflictuelles chez les mineurs constituent un facteur déterminant des violences vécues en milieu judiciarisé, comme le révèle l’étude des pensionnaires de la Maison d’Arrêt et de Correction de Ouagadougou et du centre de Laye. L’analyse des données met en lumière les faiblesses organisationnelles et les dynamiques interpersonnelles.


Vérification de la deuxième hypothèse secondaire qui stipule que : « les relations interpersonnelles conflictuelles expliquent les violences vécues par les mineurs en milieu judiciarisé ».

Les réponses de nos interviewés lors des questionnaires et entretiens auprès des mineurs, du personnel des deux structures, ont servi à confirmer cette hypothèse. Dans cette partie, nous avons procédé à l’interprétation des données par indicateur de violences.

De prime abord, il est indiqué que les relations interpersonnelles conflictuelles entre mineurs en milieu judiciarisé engendrent des violences à coup sûr. A cet égard, le tableau n°12 renseigne que 60% des mineurs enquêtés estiment que les relations entre mineurs sont mauvaises dans les deux structures. De surcroît, l’avis de certains agents résume en substance que : «la gestion de l’angoisse consécutive au séjour en institution judiciarisé pousse les jeunes sans doute à vouloir s’affirmer en défiant les autres par des dénigrements et des injures. Ainsi, ils considèrent important la mise en avant de leur situation personnelle ».

Ces mauvaises relations mettent en relief un certain nombre de causes dont les injures, les railleries et le désespoir. Ces causes sont répertoriées dans la figure n°9. Partant de ces relations interpersonnelles conflictuelles évoquées et leurs causes, il est évident que celles-ci produisent et entretiennent au sein des pensionnaires des deux structures des violences, toute chose qui, à n’en pas douter, hypothèque dangereusement la protection des mineurs.

Sur un tout autre terrain, les relations interpersonnelles entre mineurs et personnel des structures sont avérées quelque fois violentes. Ce fait est approuvé par des responsables de service et les agents de la MACO et soutenu par l’appréciation des pensionnaires au tableau n°13. Mais, l’avis du chef de sécurité du centre de Laye est tout autre. Sa conviction quant à l’existence d’un climat apaisé entre mineurs et personnel ne saurait prospérer et suscite quelque peu même des controverses.

A cet endroit, il ressort de nos observations directes faites au centre de laye le 23 février à 8heures 06 minutes qu’un mineur a été contraint, par un agent de la sécurité, au pilori puis quelques 30 minutes plus tard, ce même mineur est passé « pieds au mur » et cela a duré environ 30 minutes avant de se mettre à genoux jusqu’au coup de 9h30 minutes. Ces pratiques de la sécurité dudit centre sont des sévices corporels qui sont proscrits dans le règlement intérieur des établissements judiciarisés. Ainsi, tout porte à croire que c’est une pratique courante qui ne saurait contribuer à l’apaisement dans ce milieu.

De plus, on remarque l’existence des bandes rivales au sein des pensionnaires des deux(02) structures. En réalités, comme nous l’indique la figure n°8, les bandes rivales, pointées du doigt par 68% des pensionnaires sont très déterminantes dans le passage à l’acte des membres du gang de façon collective. Dans ce contexte, le chef de sécurité de la MACO nous a confié qu’« ils arrivent souvent à des complicités, à des refus de dénonciation des transgressions des règles et à des révoltes en groupes, toute chose qui occasionne les rivalités et conduisent à des conflits intergroupes et même à des tentatives d’évasion au sein du milieu judiciarisé ». Dans ces structures, il est certain que des bandes existent et il est évident qu’elles soient à l’origine de certains types de violences à la MACO tout comme au centre de Laye.

Relations conflictuelles chez les mineurs en milieu judiciarisé

Au titre des typologies de violences dont sont victimes les mineurs, les récits de vie sont éloquents. Le récit de vie n° 4 ci-dessus mentionnés que D.M, jeune garçon de 16 ans, condamné pour viol à la MACO nous a confié le 22 mars 2018 ces mots : « Je suis auteur de plusieurs violences sexuelles sur d’autres mineurs. À ce jour, j’ai déjà fait cinq (05) victimes parmi mes codétenus(…) ».

Ce témoignage révèle la réalité des violences sexuelles entre mineurs à la MACO. Ce mineur avoue avoir violé cinq autres de ses co-pensionnaires à la MACO. Il poursuit en disant que c’est à la suite des plaintes de ses victimes qu’il fait cet aveu pour bénéficier de l’indulgence de l’administration pénitentiaire.

Au regard de ces révélations, ces violences commises par un mineur sur d’autres mineurs à la MACO sont inquiétantes car elles marqueront à coup sûr des stigmates dans le corps et dans le psychisme de ces adolescents qui cherchent toujours à se construire. Ces types de violences interpersonnelles corroborent l’un des résultats de OUEDRAOGO E., (2007)1 dans son étude se rapportant à la MACO.

En effet, celle-ci avait trouvé les mêmes types de violences sexuelles comme les sodomies chez les détenus de la Maison d’Arrêt et de Correction Ouagadougou.

Le centre de Laye, quant à lui, s’inscrit dans un autre registre de violences. A travers le récit de vie n°3, V.T, une jeune fille mineure de 17ans, placée au centre de laye raconte : « […] Ici, la vie entre les jeunes filles est infernale. Beaucoup de calomnies, de jalousies, d’injures et de querelles. Si tu veux riposter, on te prend et la sanction est grande ». L’auteure de ce récit n°3 témoigne que le contexte des jeunes filles audit centre n’est pas du tout apaisé. En effet, elle cite les calomnies, les jalousies, les railleries et les querelles comme violences monnaie courante qu’elle qualifie d’infernales dans ledit centre.

Cette révélation se confirme avec les données du tableau n°11 qui placent les violences psychologiques en deuxième position de celles qui sévissent audit centre. Ces éléments concordants soutiennent que des violences d’ordre psychologique sont subies par des mineurs à Laye. Cette conclusion corrobore également un des résultats de SANKARA K. (2010)2 dans son mémoire de fin de cycle se rapportant au centre de laye et qui révèle que les souffrances psychologiques peuvent engendrer des dangers incommensurables pour le devenir des pensionnaires.

Aussi, convient-il d’affirmer qu’au regard des données objectives disponibles, la deuxième hypothèse secondaire de la recherche qui présume que «les relations interpersonnelles conflictuelles expliquent les violences vécues par les mineurs en MJ » est confirmée.

En résumé, nous venons de démontrer que les deux hypothèses secondaires sont confirmées et tirons la conclusion que l’hypothèse principale qui postule que : « les faiblesses du mode organisationnel ainsi que les relations interpersonnelles conflictuelles expliquent les violences vécues par les mineurs en milieu judiciarisé » est également confirmée.

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1 Op. cit 12 p 67-71.

2 Op. cit 14.

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