La culture organisationnelle et identité sont intrinsèquement liées à la fidélisation des collaborateurs, comme le démontre cette étude sur la Gestion des Ressources Humaines à la Caisse des Dépôts. L’analyse confronte des dispositifs spécifiques aux résultats d’une enquête empirique, enrichissant la compréhension des dynamiques organisationnelles.
Culture, image et identité organisationnelle
3.4
Dans cette dernière section, nous verrons que les notions de culture et d’image sont associées à celle d’identité organisationnelle. Draelants (2006) a effectué une recherche intéressante au sujet de l’identité des établissements scolaires, dont je vais m’en inspirer en partie pour évoquer l’existence d’un lien entre ces notions.
De leur côté, Albert and Whetten (1985) définissent l’identité organisationnelle comme étant « les représentations partagées par les membres d’une organisation à propos des traits considérés comme centraux et relativement durables, qui distinguent l’organisation d’autres organisations. »
Quant à Hatch and Schultz (2002), ils considèrent que le processus de construction identitaire découle de l’articulation de trois notions : image, culture et identité organisationnelle. Ces derniers s’inspirent de la théorie sociale du soi (self) développée par (Mead, 2006)1. Selon cet auteur, l’identité ou le « soi » se construit à travers de multiples relations sociales dans lesquelles le collaborateur est impliqué. Il distingue alors le “je’’ du “moi’’ pour évoquer la construction de la conscience de soi.
En reprenant la théorie sociale de Mead, Draelants(2006) souligne que le “je’’ est la réponse de l’organisme aux attitudes des autres tandis que le “moi’’ est l’ensemble organisé des attitudes des autres que l’on assume soi. Il rajoute que « le “je”, dans sa relation au “moi”, réagit donc à la situation sociale qui est partie prenante de l’expérience des individus. C’est la réponse de l’individu à l’attitude que les autres lui adressent quand il adopte lui-même une attitude à leur égard. » En partant de cette distinction, certains auteurs trouvent des ressemblances dans les notions de culture et d’image organisationnelles.
La notion de culture se définit comme l’« ensemble des croyances, des valeurs et des attitudes d’une entreprise, et comment celles-ci influencent le comportement des employés. »2 L’image organisationnelle fait plutôt référence à la réputation d’une entreprise. Elle est ainsi considérée comme étant une sorte de croyance que les membres ont de leur organisation d’une part, et d’autre part de la perception qu’ont des personnes extérieures vis-à-vis de celle-ci. Pour illustrer l’articulation de ces notions avec celle d’identité, je vais présenter ci-dessus le modèle
de la dynamique identitaire organisationnelle adapté de Hatch et Schultz et traduit par Draelants :
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Figure 6 : Modèle de la dynamique identitaire organisationnelle
L’identité attribuée correspond à l’image qu’ont les personnes externes à l’organisation de celle-ci. Cette image se reflète alors sur la manière dont les collaborateurs en interne se perçoivent. L’image externe déteint alors sur la culture organisationnelle d’une organisation. Draelants rajoute que « selon Hatch et Schultz, tout décalage entre l’image qu’une organisation a d’elle-même et celles que les autres lui renvoient est susceptible de provoquer une réaction au sein de l’organisation qui aura soit tendance à faire évoluer son image, soit tendance à modifier sa culture organisationnelle pour la faire correspondre avec l’image externe. »
- En interne, l’identité organisationnelle se construit également en fonction de la perception qu’ont les collaborateurs envers leur organisation. L’image externe reflétée à travers l’identité des collaborateurs en interne est « incrustée dans les compréhensions culturelles internes. »
- L’identité narrative correspond à la manière qu’ont les collaborateurs d’exprimer leur identité. D’après Draleants « les individus, mais aussi les communautés ou groupes, se constituent dans leur identité à travers leurs propres récits qui deviennent pour les uns comme pour les autres leur histoire effective. »
- Enfin, l’identité exprimée en interne projette à l’externe l’image de l’organisation. L’auteur souligne que l’enjeu est de taille pour les personnes en charge de communiquer et de représenter l’organisation à l’externe.
J’en conclus donc que l’identité organisationnelle peut être perçue de deux façon dans la littérature. La première est individuelle, c’est-à-dire propre à la manière dont un collaborateur distingue son organisation. La deuxième est indépendante des perceptions individuelles des membres de celle-ci mais peut résider dans un collectif à travers des politiques, des règles et procédures ainsi que dans différents autres symboles et lieux de stockage de la « mémoire organisationnelle. »
Je remarque également que les acteurs d’une organisation n’ont pas le même pouvoir sur l’identité organisationnelle. Certains responsables (RH, directeurs, managers) se retrouvent, de par leurs fonctions et positions, en première ligne avec l’extérieur. Ces derniers sont en liaison directe avec les collaborateurs et doivent maintenir « une bonne image » de l’organisation.
L’entretien de l’image de l’organisation constitue donc un enjeu de taille pour le service des Ressources Humaines qui détient la gestion administrative du personnel et s’expose directement avec l’extérieur en tant que représentant de l’organisation. D’abord, l’image véhiculée passe par des canaux de communication interne et externe. Ensuite, l’objectif est d’adapter les stratégies RH aux changements organisationnels en veillant à la réputation de l’organisation. Enfin, à travers ses diverses missions, la fonction RH d’une entreprise est de préserver la construction identitaire et culturelle de son organisation.
Synthèse de l’Analyse de la littérature
A travers l’examen de la littérature, nous avons pu définir le rôle de la gestion des Ressources Humaines en termes de fidélisation des collaborateurs. La stratégie de fidélisation des Ressources Humaines représente bien un enjeu majeur pour les organisations.
Pour cette raison, en partant du principe que les pratiques de la GRH répondent aux besoins des collaborateurs, ces derniers trouvent alors l’équilibre recherché au sein de l’organisation.
L’accord établi entre besoins de l’employeur et attentes des salariés vise à retenir les talents et conserver les compétences au sein de l’organisation. En appui des Ressources Humaines, le manager joue aussi un rôle primordial dans la fidélisation des collaborateurs. Il assure le rôle d’intermédiaire entre la direction et les employés et contribue ainsi à la fidélisation des collaborateurs.
Le concept de fidélité à l’égard de son entreprise est défini comme une attitude qui amène un collaborateur à vouloir rester dans son organisation sans s’intéresser aux offres d’emploi externes. Il apparaît clairement que les pratiques des Ressources Humaines influencent les variables psychologiques liées à l’implication des collaborateurs. Lorsque ces derniers sont satisfaits, ils se montrent plus fidèles à l’égard de leur organisation.
De même, il apparaît que la réputation d’une organisation la rend attractive. Nous avons voulu étudier le lien entre la fidélisation des collaborateurs et les missions des Ressources Humaines associées à la gestion de l’image de marque employeur. A travers l’attractivité de l’organisation, le collaborateur est amené à développer des attitudes de fidélité dans sa logique d’emploi. En effet, promouvoir l’image de l’entreprise influence l’identification organisationnelle des collaborateurs. En dernier lieu, pour fidéliser, la gestion des ressources humaines doit être habile et cohérente avec l’image globale de l’organisation.
Dans la seconde partie de mon mémoire, je vais mener une enquête terrain au sein de l’institution publique « la Caisse des Dépôts et Consignations » afin de vérifier les hypothèses suivantes :
Hypothèse 1 : Pour fidéliser ses collaborateurs, la GRH apporte des solutions aux attentes des salariés.
Hypothèse 2 : L’implication des managers dans la GRH garantit la fidélisation des collaborateurs.
Hypothèse 3 : Les valeurs de l’organisation sont un appui pour la GRH dans son rôle de fidélisation des collaborateurs.
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1 MEAD George Herbert, L’Esprit, le soi, la société, Presses universitaires de France, coll. « Le lien social », Paris, 2006, 428p. [Traduction de CEFAÏ Daniel et QUERE Louis]. ↑
2 https://www.bdc.ca/fr/articles-outils/boite-outils-entrepreneur/gabarits-documents-guides-affaires/glossaire/culture-organisationnelle [consulté le 22/08/2021] ↑