Le travail des enfants en Haïti touche des milliers d’enfants, souvent réduits à des tâches domestiques sans rémunération. Cette étude révèle des réalités troublantes et met en lumière les origines historiques de cette pratique, essentielle pour comprendre son impact sur le bien-être des enfants.
CHAPITRE 1 – LA PROBLÉMATIQUE DE RECHERCHE
Le présent chapitre vise à présenter la problématique de notre recherche. Nous y définirons, en premier lieu, les différents concepts reliés à la pratique du travail des enfants. Nous ferons ensuite, un bref aperçu des conventions internationales en ce qui concerne ce sujet. Enfin, nous présenterons les caractéristiques du travail des enfants domestiques en Haïti telles qu’elles apparaissent dans la littérature spécialisée, ce qui nous permettra d’introduire notre question de recherche.
Contextualisation de la domesticité
Durant les années 90 on a vu apparaître un intérêt grandissant pour la problématique du travail des enfants. Un rapport sur les droits de l’homme parue en 1999 en ce qui concerne le travail des enfants, a permis de constater que le travail des enfants ne s’effectuait pas seulement dans les industries et dans la fabrication de produits manufacturés, mais que ce genre de travail était de plus en plus présent dans la sphère domestique.
Le travail des enfants est souvent associé à la servitude et l’esclavage (Black & Blagbrough, 1999). De plus, et avec le rôle grandissant des médias et des réseaux sociaux, nous sommes de plus en plus conscients de la réalité du travail des enfants. Or nous constatons est que malgré tous les efforts qui sont mis en place pour contrer ce fléau, comme par exemple la convention internationale du droit de l’enfant, un bon nombre d’enfants à travers le monde continue à être affectés par ce type de travail (Black & Blagbrough, 1999).
Dans ses efforts pour éradiquer le travail infantile dans le monde, le bureau international du travail (BIT) a mis sur pied le projet pour l’élimination du travail infantile domestique dont le but est d’agir de manière urgente dans la recherche de solutions à un problème qui affecte un nombre grandissant d’enfants (Black & Blagbrough, 1999).
Au début des années 2000, l’OIT estime qu’entre 250 et 300 millions d’enfants dans le monde sont victimes de ce phénomène. La situation serait directement reliée à la pauvreté de certains groupes de la population (Black & Blagbrough, 1999).
Le travail des enfants
Le travail des enfants comme domestiques n’est pas une pratique récente ; cette réalité a été pratiquée tout au long de l’histoire de l’humanité, et a atteint son apogée au cours de la révolution industrielle. À son début des enfants travaillaient dans des usines surpeuplées et sales (Basu,1999). Les enfants travaillaient de longues heures et aucune norme de sécurité n’était mise en place. Leurs petites tailles leur permettaient d’accomplir des tâches dans les usines ou des mines qui seraient difficiles pour un adulte. Les enfants qui travaillent n’avaient pas l’opportunité d’aller à l’école, ce qui créait un cycle de pauvreté difficile à briser (Basu, 1999).
L’OIT, définit le travail des enfants de manière à mettre en avant ses aspects négatifs et comme étant un travail qui prive les enfants de leur enfance, de leur potentiel, de leur dignité et contribue à la nuisance de leur développement physique et mental (Anderson & al., 1990). L’OIT et UNICEF considèrent que le travail effectué par un enfant au domicile d’un tiers ou d’un employeur constitue du travail domestique des enfants.
La Convention 138 de l’OIT mentionne que l’âge minimum pour travailler devrait être le même que l’âge de la fin de la scolarité obligatoire soit 15 ans (Anderson & al., 1990). En vertu de l’article 341 du Code du travail de l’OIT, l’âge minimum auquel les enfants peuvent travailler comme domestique est de douze ans.
L’article 341 n’est donc pas conforme aux normes de l’OIT (Anderson & al., 1990). Bastien (1985), constate que les enfants qui travaillent vont généralement commencer vers l’âge de six ans. Les tâches qu’ils sont amenés à effectuer seront de servir les adultes et travailler dans la maison. Les tâches à effectuer vont s’alourdir au fur et à mesure que l’enfant vieillit, et cela conformément aux principes de la division sexuelle du travail.
L’auteur constate un changement dans les relations parents-enfants lorsque ceux-ci sont assez grands pour travailler à la maison. À ce stade, le parent est plus sévère envers l’enfant et a recours au châtiment corporel comme punition. Bastien constate qu’il s’agit d’un changement brusque qui peut être traumatisant (1985). Malgré le fait que les observations initiales de Bastien remontent aux années 50, son travail montre que ce schéma est toujours valide, et cela malgré certains changements (François, 2009).
Il y a toujours des changements dans les attentes des parents envers les enfants à partir de l’âge de six ans, car selon les parents et plus particulièrement dans le cas des parents paysans, les enfants devraient faire beaucoup plus de travail pour contribuer à la charge familiale. À l’heure actuelle, les enfants âgés de 6 à 10 ans sont recrutés pour être placés à l’extérieur comme c’est le cas des restavèk.
Cette tranche d’âge correspond à l’âge à laquelle les enfants fréquenteront l’école primaire. C’est donc l’une des raisons qui fait en sorte que les enfants seront placés à l’extérieur de leur foyer, car les parents ont un désir que leurs enfants puissent avoir accès à l’éducation (François, 2009). C’est le cas notamment en Haïti où des familles de la campagne essayent de placer leurs enfants dans la ville dans l’espour qu’ils puissent fréquenter l’école.
Le travail des enfants en Haïti
Les conditions économiques en Haïti placent les enfants dans une situation précaire, et fragile à l’exploitation. Il est dans la coutume du pays que les enfants commencent à servir leurs parents ainsi que d’autres adultes dès l’âge de six ans. Les familles haïtiennes considèrent que c’est un moyen de contribuer dans la famille (Howell, 2012). Un rapport de Lessler (2010), sur la traite des personnes indique que les enfants haïtiens traversent fréquemment la frontière haïtienne- dominicaine illégalement en compagnie d’adultes qui se font passer pour leurs parents afin d’être admis dans un réseau organisé de service domestique ou de trafic sexuel (Lessler, 2010).
En Haïti les enfants travaillent également dans des fermes où ils peuvent être exposés à des pesticides, des outils tranchants, des conditions difficiles et de longues heures de travail (Saad-Lessler, 2010). En 2007, Macro International, un organisme de développement social du gouvernement américain, a mené une enquête sur le secteur agricole auprès des ménages dans l’un des villages d’Haïti. Cette enquête a révélé que les enfants constituent un quart des travailleurs agricoles du pays (Saad- Lessler, 2010). Ces enfants ont contribué à la culture de pistaches, de fèves, de manioc, du riz et de canne à sucre (Saad-Lessler, 2010).
Des preuves suggèrent que le tremblement de terre de 2010 (Clouet, 2013), qui a entrainé le déplacement de milliers de personnes à probablement contribuer à l’augmentation de restavèk et d’enfants de rues. Les enfants de rue effectuent des tâches telles que laver les vitres de voitures, vendre des petits objets ou mendier. Ils sont exposés à divers risques tels que les conditions météorologiques extrêmes, les accidents de voiture et la vulnérabilité aux gangs de rues ou de la prostitution. Une grande partie des enfants de rues étaient d’anciens restavèk qui ont fui leurs bourreaux (Clouet, 2013).
En cas d’Haïti, on constate que l’esclavage et ses mauvais traitements ont encore des impacts dans la société actuelle. Aristide (2003) explique que les fondements des problématiques liés au mauvais traitement des enfants ont débuté lors de la période coloniale esclavagiste, période dans la laquelle les enfants haïtiens n’étaient pas protégés des sévices de l’administration française.
La colonie était divisée entre trois catégories soit : les blancs, les affranchis et les esclaves créoles. Les esclaves créoles étaient nés dans un système d’esclavagiste et étaient soit des noirs et des mulâtres (métissés) ainsi que les bossales (nés en Afrique). La situation des enfants nés sous le système esclavagiste ne diffère en rien du sort des adultes.
En effet, et durant cette période le code 60 a été créé ; ce code statue que « les enfants qui naîtront des mariages entre esclaves seront esclaves et appartiendront aux maîtres des femmes esclaves et non à ceux de leurs maris […] » (Aristide, 2003) et rend donc transmissible le statut d’esclave et y inclut des enfants qui vont essentiellement faire un travail domestique.
Questions Fréquemment Posées
Qu’est-ce que la pratique du restavèk en Haïti?
La pratique du restavèk en Haïti consiste à placer des enfants comme domestiques dans des familles aisées par des parents en situation de pauvreté.
Quels sont les impacts du travail des enfants sur leur bien-être?
Le travail des enfants prive les enfants de leur enfance, de leur potentiel, de leur dignité et contribue à la nuisance de leur développement physique et mental.
Quelle est l’origine historique du travail des enfants en Haïti?
L’origine historique du travail des enfants en Haïti est liée au passé esclavagiste du pays, et cette tradition persiste malgré les dénonciations des organisations de défense des droits humains.