Quelles sont les perspectives futures du français chez les étudiants subsahariens en 2024 ?

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🏫 Université Frères Mentouri Constantine 1 - Faculté des Lettres et des Langues - Département de Lettres et Langue Française
📅 Mémoire de fin de cycle en vue de l'obtention du diplôme de Master - 2020/2021
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Les perspectives futures du français révèlent une utilisation croissante de cette langue parmi les étudiants subsahariens, souvent perçue comme essentielle dans un environnement multiculturel. Cette recherche met en lumière des dynamiques linguistiques surprenantes, avec des implications significatives pour l’enseignement et la communication interculturelle.


L’alternance codique

Les langues alternées

En partant de la définition proposée par GUMPERZ selon laquelle : « l’alternance codique est la juxtaposition à l’intérieur d’un même échange verbal de passages ou le discours appartient à deux systèmes ou sous-systèmes grammaticaux différents »30, nous avons relevé lors de l’analyse des données recueillies la présence des alternances suivantes :

L’alternance français/anglais

L’alternance codique français/anglais est la forme la plus fréquente dans notre corpus, cela s’explique par le fait que plus de 90% de nos enquêtés par questionnaire sont issus des pays francophones et anglophone (cela s’applique à la communauté subsaharienne en général en Algérie). À titre indicatif nous donnons les exemples suivants :

Extrait de l’enregistrement N°1 :

I1: euh [i want to make brown euh brown] (de l’anglais) marron marron foncé mais ça (ne) a pas marché j’ai fait plusieurs fois avec beaucoup de produits mais c’est toujours noir dommage <

I2: le noir c’est bien

I1: c’est bien non euh Côte d’Ivoire les gens de la Côte d’Ivoire /./ je peux dire que presque tous /../ la population font ça /…/ elle font ça avec les cheveux marron comme ça /./ et c’est bien [i think it’s cool] (je pense que c’est bien) (de l’anglais) /…/ mais ça (ne) marche pas pour moi < /

Extrait de l’enregistrement N°2 :

I2: (rire) /…/ tu tu étudies ça à mentouri ou bien ici /../

I1: mentouri [ but at el khroub ] ( mais à el khroub) /…/ [ you know khroub ] (tu connais khroub) (de l’anglais) /./ khroub (de l’arabe algérien)

30GUMPERZ J-J, 1989, Engager la conversation, Paris, Editions de Minuit. P.57.

I2: oui

I1: oui c’est là-bas /./ dans l’institut /…/ \ Oh [tchalé] (du twin) /./ [ is not easy

](c’est pas facile) oh /./ [ is xxx /../ xxx] (de l’anglais)

I1: des /../ comme [ pimple /../ razor spot /../ ] (boutons bouton de razoir) (de l’anglais)

Extrait de l’enregistrement N°3 :

I1: mais tu veux / tu veux que ça soit comme comme [which style] (de l’anglais) (Quel modèle)

I2: tu vas ici là en haut la tu (ne) vas pas toucher

I1: umhum

I2: tu vas juste ici boule zéro boule euh toi tu sais comment faire non >

I1: oh [okay like / ] (de l’anglais) (D’accord comme)

Nous remarquons dans les exemples cités ci-dessus que l’interactant numéro un I1 qui d’ailleurs est anglophone (ghanéen), fait souvent recours à la langue anglaise pour interagir et se faire comprendre par son interlocuteur I2, qui lui est francophone (nigérien). Dans ce cas il s’agit d’une alternance d’incompétence, parce qu’on remarque I1 utilise l’anglais dans un échange qui au début se tient en français pour compenser ses carences dans cette langue.

L’alternance français/arabe

Cette forme d’alternance est moins fréquente dans notre corpus et est attestée chez nos enquêtés tchadiens. Ces derniers ont généralement pour langue maternelle l’arabe.

À titre d’exemples nous pouvons citer : Extrait de l’enregistrement N°4 :

I1: [ wallay ] (du zarma ou songhaï) j’ai presque fini même /./ je dois déposer ça le dix-sept (toux)

I2: xxx

I3: [ almé gaye ] (de l’arabe tchadien) ( il y’a de l’eau)

I4: [ almé gaye xxx mala xxx ] (de l’arabe tchadien) (y’a de l’eau xxx pourquoi xxx)

/../ hein pardon

I1: tu veux prier

À partir de cet exemple, nous pouvons déduire que nos enquêter pour interagir avec leurs compatriotes utilisent généralement les langues qu’ils en commun, soit leur langue maternelle ou soit une de leurs langues nationales, il s’agit ici de l’alternance de compétence. C’est le cas dans l’exemple ci-dessus, extrait de l’enregistrement N°4, lors d’un échange entre un nigérien, un congolais et deux tchadiens. Nous avons constaté que pendant cet échange l’un des deux tchadien s’est adressé à l’autre en arabe tchadien, qui d’ailleurs est leur langue maternelle à tous les deux (I3 et I4).

Nous pouvons aussi souligner l’alternance arabe algérien, par exemple dans les extraits suivants :

Extrait de l’enregistrement N°7 :

I2: elle passe tout son temps à somnoler (rire) /./ même interro /./ en interro elle a somnolé

I1, I2 et I3 : (rire)

I1: [ wallah ] > (de l’arabe algérien )

I2: [ wallah ] < (rire) /../ pour te dire que son cas est vraiment xxx >

Extrait de l’enregistrement N°8 :

I1: médicale /../ donc Ramah /./ toi tu dois partir sur le terrain le /

I2: le vingt-neuf

I1: eh :::: /../ vous allez partir dans quelle [wilaya] (de l’arabe algérien) donc

I2: je (ne) sais pas /./ ils ne nous ΄ ont pas dit /

L’alternance français/autres langues

Nous avons également relevé dans notre corpus l’alternance du français avec d’autres langues. Notamment quelques langues nationales des communautés subsahariennes. C’est par exemple le cas de l’alternance français/zarma ou songhaï, langues généralement parlées au Niger et au Mali et dont l’une est une variété de l’autre.

Extrait de l’enregistrement N°7 :

I1: (rire) [ lallé ] (vraiment) (du songhai et zarma) ça craint vraiment /./ ça craint grave >

Nous remarquons dans cet extrait l’utilisation de l’adverbe « lallé » qui littéralement veut dire vraiment.

À celle-ci s’ajoute l’alternance français/haoussa, le haoussa qui est une langue généralement parlée au Niger, au Nigéria, au Cameroun, au Tchad…

Comme exemple nous pouvons citer entre autres les extraits ci-dessous : Extrait de l’enregistrement N°6 :

I3: ah Mousto le nigérien c’est ton pro / euh c’est ton /

I2: oui c’est mon promo

I3: vous faites la même chose I2: oui on fait la même chose I1 et I3: mmm

I1: [wayo ] (pour exprimer de la compassion) < (du haoussa) /../ moi je suis ici /

Dans cet nous relevons l’usage de l’expression « wayo » qui est généralement utilisée dans la langue haoussa pour exprimer sa compassion à l’égard de quelque chose.

Extrait de l’enregistrement N°8 :

I2: xxx j’étais / j’étais partie à la quincaillerie /./ j’ai dit au monsieur je veux un mar- teau /./ ΄ y’a une / tu vas faire quoi avec le marteau > /../ je l’ai bien regardé après il m’a parlé doucement < [ wallahi ] (du haoussa) < xxx

L’emploie dans cet extrait de l’expression « wallahi » qui sert de serment et qui signifie littéralement : au nom de Dieu, je le jure.

Les types de l’alternance

L’alternance interphrastique

L’alternance interphrastique se produit généralement entre deux phrases à l’intérieur des productions d’un même locuteur. Ce type d’alternance est fréquent dans notre corpus même si il ne nous a pas du tout été facile de le dégager. Nous pouvons donner à titre d’exemple les extraits suivants :

Extrait de l’enregistrement N°1 :

I1: euh [i want to make brown euh brown] (de l’anglais) marron marron foncé mais ça (ne) a pas marché j’ai fait plusieurs fois avec beaucoup de produits mais c’est toujours noir dommage <

I1: c’est bien non euh Côte d’Ivoire les gens de la Côte d’Ivoire /./ je peux dire que presque tous /../ la population font ça /…/ elle font ça avec les cheveux marron comme ça /./ et c’est bien [i think it’s cool] (je pense que c’est bien) (de l’anglais) /…/ mais ça (ne) marche pas pour moi < /

Nous observons dans les deux exemples précédents que l’interactant I1 effectue souvent un va-et-vient entre le français et l’anglais. Celui-ci commence en effet ses énoncés en français et les termine en anglais ou quelquefois le contraire.

L’alternance intraphrastique

Ce type d’alternance renvoi à l’alternance réalisée au sein d’une même phrase. L’alternance intraphrastique se manifeste généralement dans notre corpus par l’insertion d’un mot ou groupe de mots en anglais, en arabe dialectal (algérien ou tchadien) à l’intérieur d’une phrase construite en français. Par exemple dans les extraits suivants :

Extrait de l’enregistrement N°2 :

I1: normalement si c’est pas si c’est pas tranchant ça va te faire mal /./ et si il y’aura des xxx comment on appelle ça /./ des /./ [ rashes ] (rougeurs) /./ he (de l’anglais)

I2: ce quoi [rashes] (de l’anglais) encore

I1: je (ne) sais pas comment /

I2: les poils

I1: des /../ comme [pimple /../ razor spot /../ ] (boutons provoqués par le rasoir) (de l’anglais)

Extrait de l’enregistrement N°3 :

I1: mais tu veux / tu veux que ça soit comme comme [which style] (quel modèle) (de l’anglais)

Dans cet extrait, nous remarquons que I1 (anglophone) termine ses phrase en anglais qui sont initialement en français afin de dire quelques mots dont il n’arrive pas a trouvé en langue française.

Extrait de l’enregistrement N°4 :

I2: xxx

I3: [ almé gaye ] ( y’a de l’eau) (de l’arabe tchadien)

I4: [ almé gaye xxx mala xxx ] (oui y’a de l’eau xxx pourquoi xxx) (de l’arabe tchadien) /../ hein pardon

I1: tu veux prier

Dans cet extrait ci-dessus, nous remarquons qu’I4 commence quant à lui sa phrase en arabe (tchadien) pour la terminer en français dans un échange en langue française.

L’alternance extraphrastique

L’alternance extraphrastique comme son nom l’indique est attestée à l’extérieur de la phrase monolingue. C’est le type d’alternance le moins fréquent dans notre corpus, voir même quasi inexistant. Nous pouvons citer comme exemple :

Extrait de l’enregistrement N°7 :

I2: elle passe tout son temps à somnoler (rire) /./ même interro /./ en interro elle a somnolé

I1, I2 et I3 : (rire)

I1: [ wallah ] > (au nom de Dieu ou je le jure par Allah) (de l’arabe algérien )

I2: [ wallah ] < (rire) /../ pour te dire que son cas est vraiment xxx >

Nous pouvons relever dans cet exemple, l’emploie de « wallah » qui sert de serment et qui signifie littéralement : au nom de Dieu, je le jure.

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30 GUMPERZ J-J, 1989, Engager la conversation, Paris, Editions de Minuit. P.57.


Questions Fréquemment Posées

Qu’est-ce que l’alternance codique chez les étudiants subsahariens?

L’alternance codique est la juxtaposition à l’intérieur d’un même échange verbal de passages où le discours appartient à deux systèmes ou sous-systèmes grammaticaux différents.

Pourquoi l’alternance français/anglais est-elle fréquente parmi les étudiants subsahariens?

L’alternance français/anglais est la forme la plus fréquente car plus de 90% des enquêtés sont issus des pays francophones et anglophones.

Comment les étudiants tchadiens utilisent-ils l’alternance de langue?

Les étudiants tchadiens utilisent généralement l’arabe, leur langue maternelle, pour interagir avec leurs compatriotes, ce qui constitue une alternance de compétence.

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