Les implications politiques de la photographie révèlent comment des images, souvent perçues comme neutres, façonnent notre compréhension des événements historiques. Cette étude sur la photographie documentaire durant l’occupation américaine d’Haïti met en lumière des représentations sociopolitiques qui transcendent leur simple fonction documentaire.
La photographie documentaire
La photographie documentaire est un genre photographique qui est apparue entre 1920 et 1930. Dès qu’on parle de ce genre photographique, il peut y avoir une sorte de transversalité avec de genres comme le reportage ou photojournalisme, de photographie sociale Chez les premiers grands photographes documentaires, certainement chez Man Ray la photographie est un art de la révélation du réel, et c’est en agissant de manière visible sur les étapes techniques de ce processus que le photographe fait œuvre artistique en s’appropriant du monde70.
La puissance d’expression de cet art est exprimée par la photographie de Capa montrant un républicain, pendant la guerre d’Espagne, fauché par une balle71.
L’instantanéité ouvre à la photographie deux voies, qui se retrouvent toute dans l’œuvre de Capa72 : le reportage, où elle est un miroir du monde visible, et l’émerveillement, fut-il horrifié, devant l’éphémère.
En outre, nous pensons ici aux grands reportages de Cartier – Bresson et à ceux de son agence Magnum, aux terribles images de la guerre du Vietnam, du Biafra, aux reportages à caractère poétique de Boubat.
Une bonne photographie de reportage ou photographie de presse doit donner la synthèse de tous les éléments essentiels d’un évènement73.
Les grands reporters photographes sont considérés pour certains comme les aventuriers de notre temps. Le dernier aspect lui permet non seulement de créer des scènes improbables, mais aussi de devenir un compagnon presque forcé d’un autre art, celui de la performance, pris dans la contradiction en sa vocation à ne pas durer et celle de tout art de se donner à voir.
L’instantanéité photographique s’impose alors comme le moyen par lequel l’artiste résout la contradiction entre sa volonté d’éphémère et celle de garder le moment éternel. A ce titre, la photographie en a un pouvoir dès son invention de pérenniser l’instant. D’où on l’a attribué un pouvoir inné.
Par conséquent, ce pouvoir qu’elle a d’enregistrer fidèlement la réalité la confère un grand rôle à jouer pour la mémoire collective de la période de l’occupation états-unienne d’Haïti (1915 – 1920).
La photographie documentaire peut avoir plusieurs statuts, par exemple elle a un statut d’aide-mémoire74.
En outre, elle présente une vision du passé qui est due à ses conditions de production que de réception. Au cas où la photographie documentaire ne peut être acceptée comme témoin servile du passé, notre préoccupation est sa valeur historique et surtout l’incidence que la représentation des codes vestimentaires pourrait avoir sur l’image des mouvements populaires75 en Haïti durant le quinquennal de l’occupation.
Ces préoccupations vont nous permettre de déboucher sur d’autres voies, les auteurs qui traitent de l’aspect factice de la photographie dite documentaire particulièrement et qui remettent en cause son statut d’aide-mémoire, ainsi que les auteurs qui essaient de démontrer ce qu’elle documente vraiment.
La quatrième phase des analyses de cas repose sur ces recherches, le photographique plutôt comme « enregistrements » du passé. Selon l’objet de notre étude, s’inscrivant de cette perspective, la signification du signe photographique est attribuée au choix du photographe particulièrement qu’à la condition des Marines, des gendarmes, des vigilants, des cacos qu’il présente.
Originalités de la photographie documentaire
La photographie documentaire semble cacher et manipuler la réalité comme tout autre genre photographique. Les termes intéressants sur ce point ne sont autres que « document » et « documentaire » qui renvoient au renseignement, à la preuve, au témoignage, d’autre part la quête de la vérité et sa transmission.
Disons qu’une chose est « documentée », cela renvoie à sa légitimité, officielle et objective. En ce sens, la photographie adopte ces mêmes considérations76.
La photographie documentaire met l’accent sur l’enregistrement de ce qui se présente à la vue ayant pour but de conserver le continuum referenciel avec soin.
La photographie documentaire s’intéresse essentiellement au sujet. Ce style devrait être objectif mais la réaction du photographe en face d’une situation donne inévitablement une direction à sa démarche. On peut voir aussi la photographie humaniste.
Aux origines de la photographie, le style documentaire est chargé d’apporter des informations historiques sur le sujet photographié. Certains photographes ont très vite conscience du rôle de la photographie dans la société, notamment Jacob Riis qui a joué un rôle important dans la rénovation des logements insalubres aux USA en 1890.
Dès la fin des années 1930, la photographie documentaire va évoluer vers une vocation sensibilisatrice et sociale, déterminée à mettre en action un contemporain à agir sur son époque. Elle va montrer les choses qui doivent être corrigées77.
Comme Lewis Hine l’a si bien dit : «Si je pouvais raconter l’histoire avec des mots, je n’aurais pas besoin de trimbaler un appareil photographique78.» Le document photographique est omniprésent. Grâce à lui, nous dépassons le simple hommage à un individu pour aborder une représentation de la société79.
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70 (Michel FRIZOT et all. 1994, p 681) ↑
71 (Michel FRIZOT et all. 1994, p 682) ↑
72 Robert Capa (1913-1954) est un photographe américain d’origine hongroise. Célèbre pour ses photographies de guerre, Robert Capa est également l’un des fondateurs de l’agence Magnum. ↑
73 (« Dictionnaire Encyclopédique Quillet . Grollier » 1968, p 5206) ↑
75 On essaie de définir le concept de « mouvement populaire » ou « mobilisation populaire » dans le cadre conceptuel du travail. Terme développé par Michel Hector dans son texte Crises et mouvements populaires en Haïti. Selon Michel Hector, la mobilisation populaire se réfère aux types d’action collective, réalisée de façon violente ou pacifique par des ensembles importants de citoyens ou d’aspirant – citoyens, lesquels, dans leur grande majorité, proviennent de secteurs défavorisés et/ou subalternes de la population et visent à exprimer en commun leurs griefs, leur mécontentement et matérialiser leurs vœux ↑
77 http://www.lyc-pascal.ac-aix-marseille.fr/spip/IMG/pdf/DOCUMENTAIRE_SOCIAL.pdf ↑
78 « À propos de la photographie », Marcel Blouin Ciel variable , n° 9, 1989, p. 20-21. http://id.erudit.org/iderudit/21790ac ↑
79 (Michel FRIZOT et all. 1994) ↑
Questions Fréquemment Posées
Qu’est-ce que la photographie documentaire?
La photographie documentaire est un genre photographique qui est apparue entre 1920 et 1930, et qui agit comme un art de la révélation du réel.
Comment la photographie documentaire influence-t-elle la mémoire collective de l’occupation états-unienne d’Haïti?
La photographie documentaire a un pouvoir d’enregistrer fidèlement la réalité, lui conférant un grand rôle à jouer pour la mémoire collective de la période de l’occupation états-unienne d’Haïti (1915 – 1920).
Quelle est l’importance des codes vestimentaires dans la photographie documentaire en Haïti?
L’incidence que la représentation des codes vestimentaires pourrait avoir sur l’image des mouvements populaires en Haïti durant le quinquennal de l’occupation est une préoccupation majeure de l’étude.