Quelles implications politiques pour la communication interculturelle au Congo en 2023 ?

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🏫 Institut Facultaire des Sciences de l'Information et de la Communication - Département du 3ème Cycle
📅 Mémoire de fin de cycle en vue de l'obtention du diplôme de Diplôme d'Etudes Approfondies (DEA) - 2014
🎓 Auteur·trice·s
PATA KIANTWADI David
PATA KIANTWADI David

Les implications politiques de la communication congolaise révèlent des mécanismes de défense insoupçonnés au sein des interactions interculturelles. Cette étude novatrice, alliant psychologie et communication, offre des perspectives cruciales pour comprendre les dynamiques socioculturelles en République Démocratique du Congo.


Chapitre V : ANALYSE DES MECANISMES PSYCHIQUES DE BASE ET SITUATIONNELS A TRAVERS LES COMMUNICATIONS GENERALISEES ET CONTEXTUELLES

Notre cinquième chapitre présente et analyse les données empiriques de l’étude. Il convient de préciser qu’il est essentiellement qualitatif. Cette analyse a été faite grâce à la

« technique d’analyse de contenu » inspirée de la méthode de contextualisation situationnelle panoramique d’Alex Mucchielli et Clair Noy (2005). Il s’agit ici d’examiner les éléments communicationnels des mécanismes psychiques de base et situationnels. Chaque analyse se fait par trois étapes : d’abord, la description de cas en fonction des réactions des enquêtés par rapport à la thématique développée, ensuite, l’identification des éléments communicationnels pertinents (généralisés et contextuels) dans les discours des sujets à l’aide du tableau panoramique, enfin, la conclusion partielle en termes de constats.

Section 1 :

Analyse qualitative des éléments communicationnels des mécanismes psychiques de base

Cette première section traite de cinq mécanismes psychiques de base, à savoir : la projection par assimilation de la pensée, le déplacement, l’interprétation subjective, la perception et mémoire sélectives ainsi que la formation réactionnelle.

    1. Communications généralisées et contextualités situationnelles de la projection par assimilation de la pensée
      1. Description de cas

Pour comprendre la manière dont les acteurs sociaux congolais produisent la

« projection par assimilation de la pensée » dans un contexte multiculturel, les sujets enquêtés ont été appelés à tour de rôle à discuter autour du thème ci-après « Il y a certaines provinces qui vous sont plus proches que d’autres quant à la culture et au mode de vie ». Les données recueillies de ces échanges peuvent être résumées comme suit433 :

        • Bandundu : Très souvent, nous nous sentons très proches des Kasaïens du fait de notre rapprochement géographique et social (cohabitation). Mais aussi, nous avons beaucoup de points de ressemblance au niveau culturel (musique, danse, art culinaire). Lorsque nous les accueillons chez nous, nous leur parlons de nos activités et leur montrons

comment se comporter, comment cultiver le champ. Malgré cela, ils sont toujours considérés comme tout étranger et un jour ils finiront par rentrer chez eux, d’où le proverbe en kikongo « mvututu na makala » se traduisant en français « les autochtones sont des braises et les étrangers de la poussière ». Quand bien même leurs femmes seraient sérieuses et propres ; mais pour nous, elles sont sales et assimilées aux prostituées.

        • Bas-Congo : Très souvent, nous nous sentons très proches de ressortissants de Bandundu puisque nous avons certaines ressemblances du point de vue linguistique et nous avons aussi une cohabitation facile. En revanche, notre cohabitation avec les originaires de deux Kasaï et de l’Equateur est toujours difficile. Parmi les raisons avancées à ce sujet, les Bakongo sont naturellement secondaires dans leurs réactions (réservés), les Equatoriens sont primaires, c’est-à-dire ils sont spontanés dans leurs réactions, et les Kasaïens sont des orgueilleux.
        • Equateur : Quelquefois, nous nous sentons proches du Bandundu du fait que nous exerçons des activités similaires (la pêche, l’agriculture). Par contre, très souvent, nous sommes plus proches de la Province Orientale par rapport à notre mode de vie (dot, cérémonies maritales, fêtes, enterrement).
        • Kasaï Occidental : Il ne nous arrive jamais de nous sentir très proches des Katangais puisqu’ils nous avaient chassés de chez eux. En revanche, nous nous sentons très proches des Kasaïens de l’Oriental parce que ce sont sont nos frères, nous avons la même origine et des traits communs sur les plans linguistique, ethnique et culturel.
        • Kasaï Oriental : Il nous arrive souvent de nous sentir plus proches du Kasaï Occidental et du Sud-Kivu avec précisément les Barega par rapport à notre mode de vie et notre régime alimentaire.
        • Katanga : Souvent, nous nous sentons très proches des ressortissants de la Province Orientale, du Sud-Kivu, du Nord-Kivu et du Kasaï Oriental. Le rapprochement avec les trois premiers groupes est dû à notre appartenance commune linguistique (Swahili). Nous le sommes avec ce dernier grâce aux Balubakat. Malgré ce rapprochement, nous sommes un peuple civilisé et supérieurs à eux.
        • Kinshasa : Très souvent, nous nous sentons très à l’aise et attirés lorsque nous sommes avec les originaires du Bandundu, du Bas-Congo et du Katanga puisqu’ils nous ressemblent du point de vue culturel. Ils sont donc appelés des « batimba ou bayebela» qui se traduit en français par« personnes branchées ou sensibilisées aux habitudes ou normes des Kinois ». Malgré cela, nous les considérons très souvent comme des

personnes limitées, ignorantes et peu cultivées. C’est pourquoi nous devons leur apprendre beaucoup. Lors des échanges, nous avons tendance à leur dire « Villageois soyez calme et écoutez ce qu’on vous dit, car vous devez apprendre ».

        • Maniema : Très souvent, nous nous sentons plus proches des originaires du Sud-Kivu, du Nord-Kivu et de la Province Orientale parce qu’ils partagent les mêmes valeurs que nous et nous parlons la même langue, le « Swahili ». Mais nous sommes distants des autres, comme par exemple les Kasaïens qui sont jugés brutaux.
        • Nord-Kivu : Souvent, nous prenons beaucoup de temps avant de réagir devant un problème, ce qui n’est pas le cas chez les Kasaïens. Ces derniers sont spontanés dans leurs réactions.
        • Province Orientale : Très souvent, nous acceptons les patrimoines culturels d’autres provinces puisque nous accueillons dignement les étrangers chez nous, surtout les Bangala qui sont d’ailleurs appelés nos « oncles » (l’expression : kwetu tuna ka libishaka bantu, c’est-à-dire chez nous on est accueillant). On accueille les étrangers par un verre d’eau et leur fait visiter les différents milieux de la ville ou village où l’on se trouve. Malgré cela, nous gardons notre identité. Ceci est traduit dans les adages comme

« muyira ni murira, c’est-à-dire Nande restera toujours Nande » et « maniema hakuloke boyi, se traduisant en français : « de maniema ne sortira jamais un esclave »).

        • Sud-Kivu : Très souvent, nous nous sentons très différents des autres par la langue, le Swahili. Notre Swahili est différent de celui parlé par les Katangais et Kivutiens du Nord. Quant à notre mode de vie, naturellement nous sommes auto-suffisants et égocentriques.

Il convient de signaler que ces données sont analysées en termes d’éléments communicationnels (généralisés et contextuels) dans le paragraphe qui suit en fonction de

« tableau panoramique de dépouillement » (voir le tableau n°08) et de la « grille d’analyse » (voir tableau n°09).

      1. Analyse des éléments communicationnels (généralisés et contextuels)

Il s’agit ici de dégager les éléments de la communication généralisée et de la contextualité situationnelle à partir des discours (réactions) des sujets enquêtés décrits ci-haut. Le tableau panoramique n°17 résume les éléments de cette analyse.

Tableau n°17 : Tableau panoramique de la projection par assimilation

Tableau panoramique de la projection par assimilation
Paramètre/CritèresDescription/Valeur
Provinces pratiquant la projection par assimilationBandundu, Bas-Congo, Kasaï Occidental, Kasaï Oriental, Kinshasa, Maniema, Nord-Kivu, Province Orientale et Sud-Kivu (82 %)
Provinces ne pratiquant pas ce mécanismeEquateur et Province Orientale (18 %)

Il se dégage du tableau n°17 que :

  • neuf provinces pratiquent la « projection par assimilation de la pensée » (soit 82 %). Il s’agit de : Bandundu, Bas-Congo, Kasaï Occidental, Kasaï Oriental, Kinshasa, Maniema, Nord- Kivu, Province Orientale et Sud-Kivu. D’après les discours analysés, ces provinces véhiculent des valeurs négatives à l’égard des autres culturels, notamment le sentiment de rejet des autres, la méfiance, la tendance égocentrique. Certaines ont même manifesté des tendances tribales (ou l’altruisme) ;
  • deux provinces ne pratiquent pas ce mécanisme (soit 18 %), il s’agit de l’Equateur et la Province Orientale. Elles développent des valeurs positives à l’égard d’autres culturels comme le sentiment d’acceptation des autres culturels, la confiance et la tendance grégaire.

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433 Source non spécifiée.


Questions Fréquemment Posées

Quels sont les mécanismes psychiques de base identifiés dans la communication interculturelle au Congo?

Cette première section traite de cinq mécanismes psychiques de base, à savoir : la projection par assimilation de la pensée, le déplacement, l’interprétation subjective, la perception et mémoire sélectives ainsi que la formation réactionnelle.

Comment les acteurs sociaux congolais perçoivent-ils la proximité culturelle entre provinces?

Les sujets enquêtés ont discuté de la proximité culturelle, par exemple, les habitants de Bandundu se sentent proches des Kasaïens en raison de la cohabitation et des ressemblances culturelles, malgré des perceptions d’étrangeté.

Quelle méthode a été utilisée pour analyser les données de l’étude sur la communication interculturelle?

L’analyse a été faite grâce à la ‘technique d’analyse de contenu’ inspirée de la méthode de contextualisation situationnelle panoramique d’Alex Mucchielli et Clair Noy.

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