Quelles implications des politiques maritimes pour l’assurance en Tunisie ?

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🏫 Université d'Aix-Marseille - Faculté de Droit et de Science Politique - Centre de droit maritime et des transports
📅 Mémoire de fin de cycle en vue de l'obtention du diplôme de Master II Professionnel - 2015-2016
🎓 Auteur·trice·s
Rafik BOUSSELMI
Rafik BOUSSELMI

Les implications des politiques maritimes révèlent des lacunes surprenantes dans les contrats d’assurance maritime tunisiens, souvent inspirés du modèle français. Cette étude critique propose des solutions innovantes pour unifier et moderniser ces contrats, tout en soulignant l’importance d’une traduction arabe des polices.


Section 5:

Formalités essentielles en cas de sinistre

L’annexe est souvent imprimée au verso des certificats au voyage et des aliments des polices d’abonnement. L’annexe figure aussi dans le contrat d’abonnement. Ce document essentiel comprend deux parties, un rappel des mesures à entreprendre et un rappel des pièces à constituer.

  1. Les mesures à entreprendre : Ce volet se réfère aux dispositions des articles 16 et 18 des CG intitulés respectivement « Mesures conservatoires, sauvetage et recours » et « Constatations contradictoires ».

Le réceptionnaire de la marchandise doit prendre les réserves à l’encontre de tous les tiers responsables des dommages (transporteur maritime, aérien ou terrestre, acconier, transitaire, etc…) et ce, par lettre recommandée. L’exigence de l’usage de la lettre recommandée est très contraignant, elle figure aussi bien dans les imprimés des assureurs français que dans celles des entreprises tunisiennes. Cependant en pratique, l’usage de la LR n’est pas fréquent et les entreprises utilisent ou bien le fax ou bien le dépôt contre décharge.

Le réceptionnaire doit aussi prendre toute mesure susceptible d’éviter l’aggravation des dommages et doit faire constater les dommages par un Commissaire d’Avaries désigné dans la police d’Assurance dans les délais impartis, c’est à dire :

En cas de dommages apparents, avant l’enlèvement de la marchandise et dans un délai de 30 jours à partir de l’arrivée du navire au Port.

En cas de dommages non apparents, au plus tard 5 jours après l’enlèvement de la marchandise.

Les parties à convoquer pour assister au constat sont : Le transporteur – L’acconier.

Ces exigences de délai ont été fixées par le CCMT.

L’annexe du marché français qui prévoit le même délai pour les dégâts apparents, prévoit un délai plus court pour les dégâts non apparents. Les délais du marché français sont adaptés aux délais de la Convention de Bruxelles.

Cependant, suivant les dispositions de la Convention de Hambourg de 1978 ratifiée par la Tunisie par la loi 33 du 28 mai 1980 et entrée en vigueur en 1992 et qui priment sur les dispositions du CCMT les délais sont plus longs.

Pour les dégâts apparents, le destinataire doit donner par écrit au transporteur un avis de perte ou de dommage spécifiant la nature générale de cette perte ou de ce dommage au plus tard le premier jour ouvrable suivant le jour où les marchandises lui ont été remises. Pour les dommages non apparents le délai est de quinze jours. Les annexes des assureurs tunisiens ne sont pas identiques. Pour les dégâts apparents aucun assureur n’adopte la solution souple de la Convention de Hambourg et appliquent les dispositions du CCMT.

Après avoir énoncé que l’assuré doit formuler des réserves conformément à l’article 159 du CCMT, certaines compagnies utilisent les termes « au plus vite » ou

« d’urgence » « immédiatement », ces formulations sont imprécise et sujette à conflits et contrastent avec la disposition légale.

La formule la plus adéquate est celle de la loi, « avant enlèvement » est le terme utilisé.

Le marché français prévoit l’envoi des réserves par lettre recommandée « au moment de la livraison ». Il ya lieu de noter que la formulation du marché français manque en pratique de clarté. En effet on se demande comment un envoi recommandé se fait-il au moment de la livraison ?

Pour les dégâts non apparents, la plupart des assureurs du marché tunisien prévoient le délai de cinq jours. Seule une compagnie86 prévoit le délai de quinze jours.

86 LA CARTE

Cependant, certaines compagnies, règlent des sinistres même lorsque le délai pour les dégâts non apparents excède les cinq jours sous prétexte qu’il s’agit de règlement commercial.

Pour le marché français le délai est de trois jours.

  1. Le dossier sinistre à constituer : Pour fixer sa prime d’assurance, l’assureur se base sur les déclarations de l’assuré et ce n’est qu’a l’occasion d’une déclaration de sinistre que l’assureur vérifie l’exactitude des déclarations.

L’assureur conditionne l’indemnisation sur la présentation d’au moins cinq justificatifs.

  1. Justification de l’assurance : Cette pièce est primordiale, l’article intitulé

« paiement de l’indemnité » exige que l’indemnisation est faite « contre remise de l’original de la police ou de l’avenant d’application, ou après mention du paiement sur ses documents ».

Cette exigence est justifiée par le fait que plusieurs personnes peuvent formuler une demande d’indemnisation et que l’assureur ne peut accepter comme interlocuteur que celui qui détient l’original du contrat.

Cependant, la seule possession de ce document ne lui ouvre pas automatiquement le droit à indemnisation, l’assureur doit vérifier la réalisation d’autres conditions pour le règlement (supra.134). Seulement, il est considéré à priori comme interlocuteur légitime.

  1. Justification de l’objet et de la valeur assurée : Contrairement à un usage répondu par les compagnies d’assurance, la production de l’original de la facture commerciale n’est pas une exigence absolue car la valeur réelle peut être aussi déterminée par les cours fixés à destination à la date d’arrivée (voir supra.125).

En plus de la facture commerciale, l’assuré, doit présenter les factures justifiant la valeur assurée.

  1. Justification du transport : La réalité du transport est souvent prouvée par un Titre de transport original (connaissement, lettre de transport aérien ou

lettre de voiture). Parfois des assureurs exigent le connaissement et refusent d’indemniser sur la base d’un document de transport non négociable.

En général, l’assurance transport maritime étant une assurance remboursement de dommages et exercice du recours, le document de transport nécessaire à présenter pour toute demande de remboursement doit établir :

La réalité et le commencement du transport couvert, l’identification de la marchandise et la qualité pour agir contre le tiers responsable.

Tous les titres de transport87, à condition d’êtres des titres nominatifs (non à ordre en blanc), répondent aux exigences de l’assurance et sont suffisants pour une demande de remboursement.

Cependant, certains assureurs refusent d’indemniser sur la base d’une LTM88 et exigent un Connaissement arguant que les tribunaux exigent un document négociable.

Tous les tribunaux acceptent tous les titres de transport à conditions qu’ils soient en copies originales. Il y a lieu de préciser que le Comité maritime international89 avait décidé qu’il convenait de décourager la pratique du connaissement négociable lorsqu’un document de ce type n’était pas indispensable.

Or, il paraît que les opérations entre deux négociants qui n’utilisent pas le crédit documentaire comme mode de payement et qui ont convenus que la marchandise ne sera pas transmissible, ne nécessitent pas l’usage du connaissement. Un assureur qui exiger dans ce cas la production exclusive du connaissement serait un non sens.

Par ailleurs, l’article 6 des CG Intitulé « Transport sans titre de transport » est la preuve que les rédacteurs des polices n’exigent pas un document particulier, seule est exigée la preuve de la réalité du transport.

L’étude des fonctions des titres de transport et du connaissement en particulier peut expliquer la raison de l’exigence de l’original.

87 LTA-Connaissement-B/L-CMR-Seawaybill…………

88 Lettre de transport Maritime

89 Depuis le colloque de Venise de 1983

  1. Fonctions des titres de transport ? : Le reçu de la marchandise et la preuve du transport sont les deux fonctions communes a tous les titres de transport (Connaissement – B/L – LTA – Sea way Bill – CMR – LTA …) :

Cependant, le connaissement à une fonction spécifique : C’est un Titre représentatif de la marchandise. En plus des deux fonctions citées, le connaissement est un titre représentatif de la marchandise, le transporteur ne doit livrer la marchandise qu’au titulaire du connaissement original, nul autre n’est en droit d’en exiger la livraison.

Par cette fonction spécifique, on assimile le connaissement au titre cambiaire qui sert à faciliter et sécuriser le négoce international :

-mise en gage de la marchandise

-sécurité pour la banque qui finance l’opération de négoce

-possibilité de vendre la marchandise

Or, pour l’assurance, la négociabilité, n’est pas une exigence technique90 justifiée.

  1. Différence entre original et « ORIGINAL » en filigrane ? : Un document original est un document émis par celui qui le délivre. Le connaissement ORIGINAL91 n’est pas seulement un document émis par celui qui le délivre c’est aussi un document négociable. On ne retrouve cette indication que sur les connaissements ou les documents voisins (BL-FBL). L’indication « ORIGINAL » en filigrane, ne figure ni sur les CMR ni sur les LTA ou LTM car ils ne sont pas des titres négociables, bien qu’ils sont des titres de transport.
  2. Que faire alors en cas de rejet ? : Expliquer à l’assureur les fonctions du connaissement, et lui préciser que la différence de nature entre le connaissement et les autres titres ne concerne qu’une donnée propre au négoce et non à l’assurance.

Même si les tribunaux exigent le connaissement, le besoin d’assurance pour un commerçant n’est il pas, d’éviter les incertitudes de la justice. Si non à quoi sert de souscrire une assurance pour un risque inexistant.

90 Condition d’aléa par exemple

91 En filigrane

  1. Justification de la conservation du recours (les réserves) : Pour prétendre à l’indemnisation, le destinataire doit donner par écrit au transporteur un avis de perte ou de dommage dans les délais.

Le destinataire est dispensé de cette formalité dans deux cas :

Au cas où l’état des marchandises a fait l’objet d’une inspection contradictoire au moment de la remise au destinataire et au cas où la preuve du dommage est rapportée.

  1. Justification du dommage (le certificat d’avaries) : La preuve du dommage est faite par le commissaire d’avaries qui a pour missions générales :
  • de rechercher les causes du sinistre et d’établir sa matérialité ;
  • de déterminer la nature et l’étendue des dommages ;
  • d’estimer et/ou d’évaluer le dommage ;
  • d’établir un rapport sur l’ensemble des constatations. En outre, le commissaire d’avaries est habilité :
  • à recommander des mesures conservatoires dans l’intérêt des propriétaires de la cargaison et de l’assureur ;
  • à entreprendre toutes actions visant à la prévention des dommages causés aux marchandises.

Le commissaire d’avaries agréé est désigné conformément aux conditions fixées au contrat de nomination. Le commissaire d’avaries a droit à des honoraires fixés par le barème ou selon le prix pratiqué sur le marché.

Section 6 :

Annexe Convention spéciale Risques de Guerre

  1. Exclusion légale : Les risques exceptionnels sont légalement exclus de la garantie de l’assureur et ce conformément à l’article 309 du CCMT. Cette exclusion n’est pas absolue, il s’agit d’une élimination à titre de précaution car, ces risques exceptionnels ou non ordinaires sont d’une extrême gravité et sont couverts en

complément de la garantie risques ordinaires. C’est pour cette raison que les risques exceptionnels sont présentés sous forme de convention spéciale jointe aux CG des risques ordinaires.

  1. Les risques de guerre et assimilés : sont des couvertures à caractère exceptionnel qui dans beaucoup de cas posent un problème d’assurabilité tant au

niveau de l’assurance directe que de la réassurance. Ces difficultés sont dues à

l’importance des sinistres que peuvent générer ces couvertures en termes d’intensité confronté à un nombre de souscription réduit.

Les assureurs proposent deux contrats : un contrat de type « Garantie Waterborne » et un autre pour couvrir les marchandises sur terre.

L’annexe « Waterborne » du 1er octobre 2008, couvre les marchandises transportées à bord du navire mais cet annexe ou convention spéciale n’a d’effet que s’il compléte un contrat d’assurance couvrant les risques ordinaires et couvrant les mêmes intérêts pour le même voyage.

L’annexe « Garantie étendue » du 1er octobre 2008 couvre le voyage de « magasin à magasin ».Ces conventions Spéciales ont pour objet de garantir les facultés assurées contre les dommages et pertes matériels, ainsi que les pertes de poids ou de quantités résultant de :

  1. Guerre civile ou étrangère, hostilités, représailles, torpilles, mines et tous autres engins de guerre et , généralement, de tous accidents et fortunes de guerre ainsi que d’actes de sabotage ou de terrorisme ayant un caractère politique ou se rattachant à la guerre ;
  2. captures, prises, arrêts, saisies, contraintes, molestations ou détentions par tous gouvernements et autorités quelconques ;
  3. émeutes, mouvements populaires, grèves, lockout et autres faits analogues ;
  4. piraterie ayant un caractère politique ou se rattachant à la guerre.

Parfois, les assureurs accordent la couverture « Risques de Guerre » sans annexer les conditions spécifiques à cette garanti.

  1. Offres de couverture : Les risques exceptionnels sont couverts par des entités spécialisées, au vu de l’importance des risques et la nature des sinistres très intenses. Parmi les leaders du marché mondial on cite le GAREX qui est un réassureur français mais aussi AWRIS92 . Ces entreprises peuvent émettre des polices Risques de Guerre basées sur les clauses du marché de Londres, sur les imprimés français mais aussi sur la plupart des clauses marché existantes

92 Arab War Risk Insurance

permettant une adaptation parfaite entre les CG des risques ordinaires et les polices Risques de Guerre.

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86 LA CARTE

90 Condition d’aléa par exemple

91 En filigrane

92 Arab War Risk Insurance


Questions Fréquemment Posées

Quelles sont les mesures à entreprendre en cas de sinistre maritime en Tunisie?

Le réceptionnaire de la marchandise doit prendre des réserves à l’encontre de tous les tiers responsables des dommages et faire constater les dommages par un Commissaire d’Avaries dans les délais impartis.

Quels sont les délais pour signaler les dommages apparents et non apparents?

Pour les dommages apparents, le destinataire doit donner un avis au transporteur au plus tard le premier jour ouvrable suivant la livraison. Pour les dommages non apparents, le délai est de quinze jours.

Comment les assureurs tunisiens traitent-ils les réserves en cas de sinistre?

Certaines compagnies utilisent des termes imprécis comme ‘au plus vite’ ou ‘d’urgence’, tandis que la formule la plus adéquate est ‘avant enlèvement’ selon la loi.

Quelle est la différence entre les délais d’assurance maritime en Tunisie et en France?

Les délais du marché français pour les dégâts apparents sont plus courts que ceux prévus par la Convention de Hambourg, qui priment sur les dispositions du CCMT en Tunisie.

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