Les défis des contrats maritimes tunisiens révèlent des faiblesses inattendues dans leur élaboration, souvent improvisée par les compagnies d’assurance. Cette étude critique propose des solutions innovantes, essentielles pour transformer le paysage de l’assurance maritime en Tunisie et au Maghreb.
Section 2 :
Clauses improvisées des compagnies
Il arrive à un technicien confronté à une difficulté d’élaborer une clause pour adapter son contrat aux conditions de souscription que lui impose le guide line de sa compagnie. Ces clauses qui ne sont pas des clauses « marché », sont inscrites dans les contrats de manière improvisée aux risques et périls de la « Compagnie » du rédacteur.
Nous donnerons quelques exemples.
- Clause Recours pour compte : Pour fidéliser les clients, et alléger les inconvénients des rejets contractuels, certaines compagnies exercent le recours pour compte de leurs assurés souvent en utilisant un cadre juridique incohérents. On retrouve des compagnies, qui pour exercer le recours pour compte, font signés à leurs clients des actes de subrogation. Cette pratique n’est pas légale, la subrogation suppose le payement, qui, dans ce cas fait défaut. Cependant, à moins que l’autorité de tutelle s’en aperçoive lors d’un contrôle ou que les tiers responsables soulèvent cette anomalie dans leur défense, cette pratique illégale continuera. Comme conseiller de l’assuré je pourrai arguer que la signature d’un acte de subrogation vaut reconnaissance du droit à indemnisation et demanderai le règlement de mon client.
Constatant que la pratique de l’acte de subrogation étant non régulière, une compagnie TAKAFUL95 a mis en place une solution.
Par le moyen de deux clauses, elle confirme son droit d’exercer le recours pour compte par le biais du mandat. Les clauses paraissent parfaites, pourtant, elles ne sont pas exemptes de reproches. Les clauses sont ainsi rédigées :
RECOURS POUR COMPTE DU FONDS ET RECOURS POUR LE COMPTE DU PARTICIPANT
Conformément à l’article 27 des CG, « L’Opérateur qui a payé l’indemnité de couverture est subrogé dans les droits et actions du participant contre toutes personnes responsables dans les conditions de l’article 21 du Code des Assurances ».
Le Participant96 donne mandat à L’Opérateur pour exercer ses droits et actions pour les sommes non couvertes par le contrat.
L’Opérateur dispose d’une totale liberté pour conclure les transactions aux conditions qu’il juge adéquates. Cependant, il prend à sa charge les frais de gestion, les honoraires d’avocat et les autres frais nécessités par le recours.
95 ZITOUNA TAKAFUL
96 C’est l’Assuré dans les contrats TAKAFUL
Le recours encaissé est utilisé prioritairement pour le remboursement du montant de l’indemnité, ensuite pour couvrir les frais engagés. Puis, le montant restant revient au Participant.
RECOURS POUR COMPTE DU PARTICIPANT
Le Participant donne mandat à L’Opérateur pour exercer ses droits et actions pour les sommes non couvertes par le contrat.
L’Opérateur dispose d’une totale liberté pour conclure les transactions aux conditions qu’il juge adéquates et prend à sa charge les frais de gestion, les honoraires d’avocat et les autres frais nécessités pour le recours.
Le recours encaissé est utilisé prioritairement pour le remboursement du montant de l’indemnité, ensuite pour couvrir les frais engagés. Le montant restant revient au Participant.
On peut reprocher au mandat le fait que l’exercice du recours pour compte ne rentre pas dans les prérogatives d’une compagnie d’assurance qui n’est habilité qu’à pratiquer les opérations d’assurance.
Par ailleurs, je dirai que les polices modernes consacrent la théorie du mandat en donnant la possibilité à l’assureur pour «prendre, provoquer ou requérir toutes mesures conservatoires, …………. sans qu’on puisse opposer aux assureurs d’avoir
……………. reconnu le principe de leur responsabilité » avant d’avoir indemnisé l’assuré et avant toute subrogation.
Or, on reproche à cette interprétation d’être limitée aux mesures conservatoires et non aux recours, en plus cette théorie du mandat devient incompatible du moment où l’assureur rejette par écrit le sinistre.
- Clause Contrat abonnement à deux options : Il arrive qu’un assuré demande de souscrire à la fois les options « Tous risques » et « FAP Sauf » dans un seul contrat. L’aléa d’assurance serait en partie absent du moment où l’assuré a huit jours selon l’article 32 des CG pour déclarer l’aliment, il lui sera plausible de ne déclarer en « Tous risques » que les expéditions qui comportent des avaries.
Une solution pour maintenir l’aléa est de lier le délai de déclaration de la garantie large à la date d’arrivée du navire, en effet, le choix de l’option « Tous risques » doit être faite au plus tard la veille de la date d’arrivée. Après cette date, la déclaration sera considérée faite en « FAP Sauf ».
- Clause Surplus TAKAFUL : C’est une clause utilisée par les compagnies TAKAFUL dans le but de clarifier le fonctionnement du fond des Participants.
Le surplus du « Fonds Takaful Général » est utilisé :
- prioritairement pour le remboursement du Quardh Hassan le cas échéant,
- ensuite pour le renforcement de l’équilibre financier du « Fonds Takaful » par la constitution d’une provision pour risques
- enfin lorsque les provisions dépassent 100% des contributions relatives à l’année comptable nette d’annulations, l’Assemblée Générale étudie la manière d’allouer le reste du surplus soit sous la forme d’une réduction appliquée au montant de la contribution Takaful soit le distribuer en nature aux participants selon la décision du Conseil d’Administration.
- Clause Marchandises diverses : C’est une clause importante qui doit être insérer dans les contrats des transitaires, pour cerner le risque des assureurs et réserver la couverture de certaines catégories tel le vrac à la couverture au cas par cas.
- Clause Risques de guerre : Lorsque les Risques de Guerres sont couverts ou lorsqu’ils sont ajoutés par avenant, les compagnies utilisent des imprimés différents et anciens (voir annexe 17 Fig 1&2).
Souvent, ils omettent de joindre l’annexe « Convention Spéciales Risques de Guerre » et se limitent à l’insertion de la clause (voir Annexe 17 fig 3&4) : «Pour la garantie Risques de guerre, elle incluse les risques de guerre civile ou étrangère, hostilités et représailles, actes de sabotage ou de terrorisme, émeute, mouvements populaires, grèves …… » . Cela à des conséquences graves pour l’assureur qui ne peu pas bénéficier des limitations propres aux risques de guerre et se sont les conditions souples des risques ordinaires qui seront applicables au risque de voir la réclamation rejetée par les réassureurs.
- Clause de Participation aux Bénéfices : c’est une récompense accordé à l’assuré, il est attribué une participation aux bénéfices relative à la période.
On enregistre dans le crédit l’ensemble des primes nettes de l’exercice. Au débit sont enregistrés, les frais généraux estimés souvent à 30% de la prime nette, les sinistres réglés, les sinistres à régler et le recours du solde débiteur des exercices antérieures.
Un taux de ristourne est appliqué au solde final.
Lorsque le solde est créditeur, la taxe doit être déduite, des frais d’avenant peuvent aussi être déduits.
Pour ce qui concerne la relation entre assureur et courtier, il y a lieu de remarquer qu’il y a des entreprises qui appliquent à tort une décommissions sur la rémunération du courtier malgré que cette dernière a été déduite en totalité au titre de frais généraux.
- Clause Assurance en devises : En principe, les entreprises du marché tunisien répugnent le règlement en monnaie étrangère au motif que ce type de règlement est strictement interdit par la loi. Or cette dernière loin de contenir une interdiction autorise ce genre de règlement.
En effet, l’article 1er de la loi n°76-18 du 21 janvier 1976, portant refonte et codification de la législation des changes et du commerce extérieur régissant les relations entre la Tunisie et les pays étrangers autorise librement les transferts relatifs aux paiements à destination de l’étranger au titre des opérations certaines courantes. Le décret n°77-608 du 27 juillet 1977, fixant les conditions d’application de la loi de 1976 sus-indiquée, énumère les payements concernant le contrat d’assurance comme opérations courantes.
- Clause Marchandises usagers : Cette clause qui déroge aux dispositions du dernier paragraphe de l’article 8 des Conditions Générales, étend la garantie aux dommages et pertes matériels subis par le bien usagé désigné aux Conditions Particulières.
Il résulte de cette extension, qu’en cas de dommages matériels la valeur assurée qui doit être justifiée, ne peut excéder la plus élevée des sommes déterminées comme il est indiqué ci-après :
- Dommage partiel : l’indemnité incombant à l’assureur est limitée au montant des réparations, déduction faite de la vétusté du bien déterminée à dires d’expert.
- Dommage total : par la valeur de remplacement par un bien d’âge, d’état et de rendement identiques.
Outre les exclusions visées à l’article 7 des Conditions Générales, sont exclus les préjudices résultant de :
- Rayures, éraflures, bosselures ;
- Usure ou utilisation des biens assurés.
- Clause Marchandises prohibées : Dans les contrats « Tiers chargeurs » des entreprises TAKAFUL une clause exclue les marchandises non conformes à la charia islamique et qui sont : Les produits alcooliques consommables, les cigarettes et la viande de porc.
- Clause Droits de douanes : Cette clause est très importante, le taux préférentiel qu’elle propose, peut inciter l’assuré à déclarer la valeur engendrée par les droits de douane à acquitter au lieu de destination.
Cette couverture, n’ayant pas le même taux du risque ordinaire, se fait généralement de manière séparée de celle de la marchandise. Cette couverture spéciale est consentie, par contre, aux mêmes conditions que la couverture de la marchandise, la responsabilité de l’Opérateur n’étant encourue que si elle l’est pour la marchandise et si les droits de douane, malgré les dommages ou pertes dont a souffert la marchandise, ont dû être acquittés intégralement ou n’ont bénéficié que d’une réduction proportionnellement inférieure à l’importance des dommages et pertes.
L’Opérateur réglera alors dans la proportion où sa responsabilité est engagée pour la marchandise, mais sous déduction de l’abattement qui aura pu être consenti par la douane. Le taux de prime pour cette couverture est fixé en général à 50% de celui de la marchandise.
Aucune ristourne de contribution ou de contribution supplémentaire ne sera consentie pour perte de la marchandise avant son arrivée au point où devrait avoir lieu le dédouanement.
- Clause Date de commencement du risque : Lorsque l’assuré demande pour les besoins du contrôle douanier, l’inscription d’un effet rétroactif, l’assureur peut lui
accorder cette possibilité par une clause daté du jour de la déclaration et qui rappelle que la déclaration est faite « sous réserves des dispositions de l’article 23 des Conditions Générales : PRÉSOMPTION DE CONNAISSANCE IMMÉDIATE DES NOUVELLES CONCERNANT LES OBJETS COUVERTS ».
- Clause Port à port sans séjour : Cette clause est insérer lorsque l’assureur refuse d’accorder une garantie au-delà du déchargement, dans les cas où le risque devient très grave.
La clause déroge aux paragraphes 1&2 de l’article 24 des Conditions Générales du contrat d’assurance des marchandises transportées par voie maritime, la couverture commence au moment où les facultés couvertes quittent la terre pour être embarquées au port maritime de chargement et finit au moment où elles touchent terre au port maritime de déchargement.
Par dérogation à ce qui est indiqué dans l’annexe « FORMALITES ESSENTIELLES A REMPLIR EN CAS DE SINISTRE » la couverture ne concerne que les dégâts apparents mentionnés sur l’état de litige. Pour les dégâts non apparents, le participant doit apporter la preuve que le dommage est survenu lors du trajet maritime (de port à port).
- Clause Chargements et déchargements : Par dérogation à l’article 24 des Conditions Générales du contrat d’assurance des marchandises transportées par voie maritime, la couverture commence au moment où les facultés couvertes sont déplacées dans les magasins au point extrême de départ du voyage couvert pour être immédiatement chargées sur le véhicule de transport et cesse au moment de leur déchargement du véhicule de transport, lors de leur mise à terre dans les magasins du destinataire, de ses représentants ou ayants-droit au lieu de destination dudit voyage. Sont considérés comme magasins du destinataire, de ses représentants ou ayants-droit, tout endroit, leur appartenant ou non, où ils font déposer les facultés à leur arrivée.
- Clause Honoraires du Commissaire aux avaries : Par dérogation au dernier paragraphe de l’article 18 des Conditions Générales, les frais et honoraires de l’expert et du Commissaire d’Avaries visés à l’article 12 des présentes Conditions Générales
sont pris en charge par l’opérateur à la condition que les dommages et pertes constatés proviennent en tout ou en partie d’un risque couvert.
- Clause Contribution minimale : La contribution est calculée au(x) taux indiqué(s)appliqué(s) sur la valeur couverte de la marchandise avec une contribution nette minimale par avis d’aliment majorée des frais et des taxes en vigueur.
Cette clause nous paraît injustifiée car elle majore la prime nette qui est le produit de la valeur assurée et le taux du risque par un montant, aussi modeste soit-il, demeure injustifié techniquement.
CONCLUSION
Les protagonistes du commerce international ont besoin d’un droit uniforme. Si les organes de l’ONU se sont chargés d’édicter ce droit pour le transport, ils n’ont pu à ce jour réaliser une convention mondiale de l’assurance transport de marchandises.
La situation étant telle que les protagonistes doivent aujourd’hui se limiter à l’utilisation des polices connues.
Les polices locales à l’image des CG du marché Tunisien sont multiples, peu accessibles car non publiées, elles n’ont pas fait leurs preuves dans le contentieux des contrats des assurances et demeurent pour cette raison statiques. Conçues en modèles volumineux non adéquat avec les normes de la liasse du transport et du crédit documentaire, elles sont incomplètes, mal rédigées et exigent l’annexion de plusieurs documents accessoires. L’expérience a montré en Tunisie comme ailleurs, que le mimétisme est sources d’anomalies et les polices mondialement connues doivent êtres reprises à la lettre.
En attendant la mise en place d’une réglementation internationale en matière d’assurance, les fédérations du marché Maghrébin doivent s’unir autour d’une même police et établir un imprimé commun.
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96 C’est l’Assuré dans les contrats TAKAFUL ↑
Questions Fréquemment Posées
Quelles sont les faiblesses des contrats d’assurance maritime en Tunisie?
Les faiblesses des contrats d’assurance maritime tunisiens incluent des clauses improvisées qui ne respectent pas les normes du marché et des pratiques illégales comme l’utilisation de la subrogation sans paiement préalable.
Comment certaines compagnies d’assurance gèrent-elles le recours pour compte?
Certaines compagnies exercent le recours pour compte de leurs assurés en utilisant des actes de subrogation, ce qui est souvent illégal, mais continue tant que l’autorité de tutelle ne le remarque pas.
Quelle solution a été mise en place par la compagnie TAKAFUL concernant le recours pour compte?
La compagnie TAKAFUL a mis en place deux clauses qui lui permettent d’exercer le recours pour compte par le biais d’un mandat, bien que ces clauses ne soient pas exemptes de reproches.