Les défis et solutions d’adaptation du Colonel Chabert révèlent des transformations inattendues dans la représentation des personnages. Cette étude met en lumière comment les choix d’Yves Angelo redéfinissent l’œuvre de Balzac, offrant des perspectives nouvelles sur l’intertextualité et la réception cinématographique.
L’enquête de Derville et la transaction
Dans cette partie Angelo a opéré nombre de changements que ce soit sur le cadre spatial ou temporel, par exemple l’image de la femme (la comtesse Ferraud) voleuse des fortunes que le réalisateur a incorporé au film passe légèrement sous prétexte que ce sont des avances offertes par l’empereur. Cependant la préoccupation de Derville pour vérifier si le revenant est vraiment Chabert, reste-la même dans les deux représentations.
Le réalisateur procède à un autre changement significatif, En effet la masure de Vergnaud est remplacée par une sorte de camp d’entrainement pour les orphelins désirant devenir soldats, tenu par Boutin, ancien camarade de Chabert.
Nous constatons que les scènes des Ferraud ajoutées au film résument et remplacent à la fois la réflexion que Derville a faite sur ce couple pendant le trajet jusqu’à leur demeure.
Dans chaque film, nous trouvons des scènes plus importantes que d’autres, qui ont un impact considérable sur le dénouement de l’histoire, prenons comme exemple la rencontre de Derville avec la comtesse où malgré le conflit et la tension immense de leur dialogue les deux acteurs gardent toujours un aspect de politesse respective.
Contrairement à l’image décrite par Balzac ou il parle de l’état sentimentale de la comtesse et les ruses d’une femme, le réalisateur transforme la comtesse en une autre victime de la restauration, peut être car le film est plus moderne et donc a plus de recul par rapport aux événements historiques auxquels l’intrigue fait référence.
On peut également expliquer les flash-backs qui nous mettent au sein de la bataille par la ressemblance de ces scènes avec l’état d’esprit bouleversé du colonel et sa relation toujours conflictuelle avec son passé.
Revenant au présent, le comte Ferraud parait encore une fois face à son épouse, il porte deux pistolets, mais n’en prend qu’un seul, ce que symbolise le conflit entre lui et son épouse.
Passant à l’affrontement le plus intéressant au film ou la scène jouée surpasse par excellence la description balzacienne, en prenant les dialogues souples de Balzac mais accompagnés par la colère de Depardieu qui brutalise la comtesse verbalement en indiquant les marques secrètes de son corps pour prouver son identité.
La comtesse Ferraud : manipulatrice ou victime
En lisant le roman, les stratagèmes et les ruses de la comtesse nous semblent évidents, par contre en regardant le film, ses hypocrisies se montrent moins explicites, elle parait plus sincère, plus tendre, afin de pouvoir manipuler Chabert, nous voyons aussi que le rôle de ses enfants (qui servent à attendrir Chabert) est plus évident dans le roman que dans le film.
Les deux œuvres partagent la même conclusion « le dégout de l’humanité », Derville dans le film reste proche de Chabert et va même le venger en causant le divorce des Ferraud, nous pouvons penser que c’est une fin morale pour les méchants à cause de leurs jeux hypocrites.
Chabert finit à l’asile indifférent envers ses vengeances.
Contrairement au film, Balzac laisse le dernier mot à Derville qui fait une sorte de constat sur l’atrocité de sa société, le film préfère conclure avec une scène semblable à celle du début, ou Chabert déclare avec une voix off « un silence de mort » en employant la musique, le réalisateur souhaite faire parler et ne pas se taire, car le premier signifie l’existence donc la vie, tandis que le second signifie la mort.
Conclusion générale
L’art est l’aliment des esprits, sous toutes ses formes, il a été et continue d’être, un lien entre les cultures universelles, la littérature et le cinéma sont deux modes d’expression artistique différentes ; c’est dans le champ d’intertextualité s’inscrit l’adaptation cinématographique ou les deux arts sont relativement liés, l’un inspire de l’autre, en expliquant cette relation Noureddine Afaya, éminent intellectuel du royaume, et proche des médias et du monde de l’image, a mis l’accent dans son intervention sur les divergences entre les deux monde, celui du roman et celui de l’image.
Selon lui «la grande différence entre les deux mondes se trouve au niveau des formes de narration. Le cinéma se base sur l’image, sur la succession d’images réelles agencées pour créer une réalité alternative soit la vision du réalisateur.38
Au terme de cette recherche qui a été consacrée pour l’étude de l’adaptation cinématographique du Colonel Chabert d’Honoré De Balzac, par le réalisateur Yves Angelo, en 1994, il nous semble convenable d’évoquer les deux récits romanesque et filmique.
Nous avons affirmé autour de l’étude de l’adaptation cinématographique la problématique suivante : Comment la version cinématographique de l’œuvre de Balzac intitulé Le Colonel Chabert nous met dans une communication avec une lecture personnelle de l’œuvre par le réalisateur français Yves Angelo ?
Dans le but de comprendre l’originalité du récit dans le domaine littéraire et son transcodage dans le domaine visuel, nous avons fait imposer les divergences entre le roman et le film (analyse comparative).
Nous avons également évoqué la fidélité du réalisateur à l’œuvre littéraire à travers les maintiens, et l’infidélité à travers les modifications (ajouts et suppression) en suivant une méthode comparative.
De ce que précède nous constatons que, les modifications que le réalisateur a faits sont justifiées : d’une part, il garde certains éléments du roman afin d’être fidèle, et a été obligé de supprimer ou d’ajouter certain détails, car il ne peut pas transposer tout un roman dans un film, d’autre part cette transposition est selon une lecture personnelle et une vision propre du réalisateur.
A la lumière de ce qu’on a présenté, nous constatons que les contraintes techniques, financières et culturelles ont obligé Yves Angelo a fait plein de changements pour réaliser l’image finale de cette adaptation.
Alors, nous avons arrivé à la conclusion après une recherche appliquée au commencement sur le cadre théorique dans lequel nous avons défini quelques concepts tel que : littérature, cinéma, adaptation, puis nous avons fait une analyse comparative afin de détecter les modifications faites par le réalisateur, en suivant une méthode comparative, nous finissons par l’interprétation des changements, en basant sur la théorie de réception selon Hans Robert Jauss. En le considérant comme un lecteur et interpréteur, Yves Agelo a contribué de construire un autre sens du roman.
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38http://albayane.press.ma/litterature-cinema-relation.html (consulté le 16/11/2019) ↑
Questions Fréquemment Posées
Quels changements significatifs Yves Angelo a-t-il apportés dans l’adaptation du Colonel Chabert ?
Yves Angelo a opéré plusieurs changements, notamment en remplaçant la masure de Vergnaud par un camp d’entraînement pour orphelins et en modifiant la représentation de la comtesse Ferraud, qui apparaît plus comme une victime de la restauration.
Comment la comtesse Ferraud est-elle perçue différemment dans le film par rapport au roman ?
Dans le roman, les stratagèmes de la comtesse sont évidents, tandis que dans le film, elle apparaît plus sincère et tendre, ce qui lui permet de manipuler Chabert plus efficacement.
Quelle est la conclusion partagée entre le film et le roman du Colonel Chabert ?
Les deux œuvres partagent la même conclusion, qui est le dégoût de l’humanité, mais le film conclut avec une scène où Chabert déclare ‘un silence de mort’, tandis que Balzac laisse le dernier mot à Derville.