Comment surmonter les défis de la communication interculturelle au Congo ?

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🏫 Institut Facultaire des Sciences de l'Information et de la Communication - Département du 3ème Cycle
📅 Mémoire de fin de cycle en vue de l'obtention du diplôme de Diplôme d'Etudes Approfondies (DEA) - 2014
🎓 Auteur·trice·s
PATA KIANTWADI David
PATA KIANTWADI David

Les défis de la communication interculturelle révèlent des mécanismes de défense insoupçonnés dans le contexte congolais. Cette recherche innovante, alliant psychologie interculturelle et méthodologies mixtes, offre des perspectives cruciales pour comprendre les dynamiques socioculturelles en jeu.


      1. Communication généralisée processuelle

La deuxième composante de la communication interculturelle après la communication interpersonnelle est la communication généralisée processuelle. Il s’agit ici de traiter tour à tour des notions et éléments de cette forme de communication.

        1. Notions de la communication généralisée

La communication est une activité qui ne se limite pas seulement aux paroles, aux écrits et aux paralangages. Les actions, les conduites et toutes les « non-communications » des acteurs sociaux y sont intégrées. Il s’agit donc là d’une nouvelle forme de communication qu’Alex Mucchielli et Claire Noy114 appellent « communication généralisée ».

D’après ces deux auteurs, la communication généralisée est donc l’expression d’un acteur social (conduite, parole, construction, suite d’actions, non-communication, non-action, …), qui peut être « lue », c’est-à-dire qui peut prendre un sens du point de vue de cet acteur (ou d’un autre acteur), en rapport avec le problème de la situation telle qu’il apparaît à l’acteur (dont on veut privilégier l’interprétation).

La communication généralisée est un processus communicationnel de contextualisation. Car, en tant que processus (et elle est toujours processus), elle intervient pour modifier les éléments pertinents constitutifs des contextes de la situation. C’est en intervenant sur les différents contextes que les acteurs vont transformer les contextes et vont donc participer à la construction du sens de leurs échanges puisque, par définition, ce sens surgit d’une mise en contexte des phénomènes communicationnels.

Cette considération théorique sur la communication généralisée a un sous-bassement scientifique avec les points de vue de (s) :

  • membres du Collège invisible115 quand ils postulent que la recherche sur la communication entre les hommes ne commence qu’à partir du moment où est posée la question suivante : parmi les milliers de comportements corporellement possibles, quels sont ceux retenus par la culture pour constituer des ensembles significatifs ?
  • Paul Watzlawick, Janet Beavin et Don D. Jackson116 pour lesquels la communication est l’ensemble du système comportemental, c’est-à-dire toute utilisation des codes du comportement. Ceci confirme l’un des axiomes fondamentaux du Collège invisible : on ne peut pas ne pas communiquer ;

114MUCCHIELLI, A. et NOY, C., op.cit, pp. 117, 132-137.

115WINKIN, Y. (dir.), op.cit, p. 23.

116WATZLAWICK, P. et alii, op.cit, p.45.

  • Jürgen Habermas117 lorsqu’il parle de l’agir communicationnel, dont la communication généralisée recouvre l’activité orientée vers le succès et l’activité orientée vers l’intercompréhension ;
  • Harold Garfinkel118 quand il cherche à découvrir dans les activités quotidiennes, un arrière-plan qui influence les scènes. Cet arrière-plan est constitué d’attentes diverses, de codes de communication, de normes comportementales implicites que le membre de la société utilise comme schèmes d’interprétation pour comprendre les apparences réelles en tant qu’apparences d’événements familiers, bien que chaque événement familier soit en fait singulier.

Ceci étant dit, la communication généralisée processuelle est donc une conduite expressive d’un acteur social placé dans une situation-problème à partir de laquelle il transforme les contextes de cette dernière. Cette transformation, c’est ce qu’on appelle en d’autre mot « contextualisation », c’est-à-dire le processus par lequel on construit les sens ou significations selon les contextes dans lesquels on est placé. Dans cette perspective, les

« mécanismes de défense socioculturelle » constituent une des formes de communication généralisée processuelle, parce qu’ils sont des conduites construites par des acteurs pour protéger leurs identités culturelles.

        1. Eléments de la communication généralisée

A la lumière de ce qui vient être dit au paragraphe précédent, il sied de préciser qu’il existe plusieurs éléments de la communication généralisée. En ce qui nous concerne, nous examinons ici l’attitude, le code linguistique, le langage corporel et le rituel d’interaction.

  1. Attitude

On appelle « attitude », « l’état mental et neurophysiologique déterminé par l’expérience et qui exerce une influence dynamique sur l’individu en le préparant à agir d’une manière particulière à un certain nombre d’objets ou d’événements »119. D’après cette définition, l’attitude est cause des comportements. C’est une variable latente (cachée ou inconsciente), ce qui d’ailleurs la distingue de l’opinion qui est sa manifestation explicite.

Pour Milton Rokeach120, l’attitude est une «organisation des croyances relativement durables autour d’un objet ou d’une situation, susceptible d’orienter la réponse du sujet dans une direction privilégiée». C’est aussi une prédisposition vis-à-vis d’un objet, puisqu’elle est une organisation de croyances. Cette définition a l’avantage de mettre en relief les fondements psychosociologiques de cette notion.

Cependant, l’influence respective de ces différentes attitudes sur le comportement social peut varier selon les individus et les cultures. Dans un cas, l’objet peut activer des prédispositions à répondre de manière plus puissante que la situation et expliquer davantage le comportement social ; dans un autre cas, la situation peut activer des prédispositions à répondre de manière plus forte que l’objet et rendre compte davantage du comportement social. L’attitude en tant que prédisposition à répondre est, ainsi, déterminée par un objet et une situation. Mais l’influence de celle-ci et de celui-là sur les prédispositions n’a pas nécessairement la même intensité. En d’autres mots, le même objet dans différentes situations ou contextes n’activera pas forcément les mêmes prédispositions à répondre.

Et, l’attitude s’exprime plus ou moins ouvertement à travers différents indicateurs très variables : la parole, le ton de la voix, le geste, les actes, mais aussi par l’absence de gestes et d’actes.

De manière générale, les attitudes répondent à trois fonctions, à savoir121 :

  • une fonction cognitive correspondant au fait que les attitudes organisent les perceptions ;
  • une fonction énergétique ou fonction tonique : les attitudes déterminent la nature et l’intensité des motivations ;
  • une fonction régulatrice : les attitudes visent à unifier les opinions d’individu, elles génèrent et gèrent la cohésion interne des opinions et des comportements, et sont en ce sens proches des représentations. Elles constituent des filtres interprétatifs de la réalité.

Dans la communication interindividuelle en situation d’interculturalité, les attitudes interviennent de manière décisive : elles sont un élément déterminant du climat, elles jouent un rôle très important dans la qualité de la relation qui s’instaure entre les acteurs. Et, l’attitude adoptée par chaque acteur détermine directement la nature dans la relation, elle détermine la qualité et la nature de ce qui va être exprimé.

Dans cette situation, tout individu peut être amené à développer cinq grands types d’attitudes qui déterminent un certain type de relation avec les autres. Il s’agit de 122 :

Attitude d’interprétation, telle est l’attitude qui consiste à formuler, à verbaliser à l’autre les raisons cachées qui sous-tendent ce qu’il vient de dire ou de faire ;

121ABRIC, J.-C., op.cit, pp. 24-25

122Ibid, pp. 25-35.

  • Attitude d’évaluation, elle consiste à formuler un jugement positif ou négatif par rapport à ce que l’autre exprime ou à ce que l’autre fait ;
  • Attitude d’aide (soutien ou conseil), elle consiste à « proposer à l’autre, compte tenu de ce qu’il a exprimé, des solutions ou des éléments de solutions. C’est donc une attitude qui, a priori, manifeste un intérêt pour l’autre ;
  • Attitude de questionnement (enquête ou investigation), elle consiste à permettre à l’autre de s’exprimer, à lui poser des questions. Elle vise à rechercher un complément d’information : soit de l’information sur les faits (enquête), soit une opinion sur les informations (sondage) ou soit une précision sur les sentiments vécus (exploration) ;
  • Attitude de compréhension ou suggestion, elle consiste à manifester à l’autre que l’on s’intéresse à ce qu’il dit et qu’on l’écoute pour essayer de le comprendre et non pas de le juger. Elle consiste à proposer à l’autre un moyen, une solution au problème ou à le renvoyer à une information complémentaire, à une personne compétente.

Enfin, les attitudes ont un lien étroit avec les croyances collectives et font partie des facteurs qui alimentent les préjugés et les stéréotypes, éléments qui font, dans la plupart de cas, obstacle à la communication interhumaine.

________________________

114 MUCCHIELLI, A. et NOY, C., op.cit, pp. 117, 132-137.

115 WINKIN, Y. (dir.), op.cit, p. 23.

116 WATZLAWICK, P. et alii, op.cit, p.45.

117 HABERMAS, J., op.cit, pp. 1-332.

118 GARFINKEL, H., « Le socle routinier des activités ordinaires », in Recherches en ethnométhodologie, PUF, 2007, p 101.

119 ALLPORT, G.W., “Attitudes”, in Handbook of social psychology, Montréal, Clark University Press, 1935, pp. 788-884.

120 ROKEACH, M. cité par RICHARD, M. et alii, op.cit, pp. 24-26.

121 ABRIC, J.-C., op.cit, pp. 24-25.

122 Ibid, pp. 25-35.


Questions Fréquemment Posées

Qu’est-ce que la communication généralisée processuelle?

La communication généralisée processuelle est une conduite expressive d’un acteur social placée dans une situation-problème, à partir de laquelle il transforme les contextes de cette dernière.

Quels sont les éléments de la communication généralisée?

Il existe plusieurs éléments de la communication généralisée, qui incluent les actions, les conduites et toutes les ‘non-communications’ des acteurs sociaux.

Comment les mécanismes de défense socioculturelle influencent-ils la communication interculturelle?

Les mécanismes de défense socioculturelle constituent une forme de communication généralisée processuelle, car ils sont des conduites construites par des acteurs pour protéger leurs identités culturelles.

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