Les compétences professionnelles en expertise comptable sont souvent mal comprises. Cette recherche révèle que les compétences comportementales, bien plus que les diplômes, sont essentielles pour réussir dans l’exercice libéral, transformant ainsi notre compréhension du professionnalisme dans ce domaine.
Sous-section 2 : Les exigences du professionnalisme
Le professionnalisme est exigeant en termes de compétence professionnelle. Cette compétence est définie par Troadec (T.) comme étant « le corrélat de toute activité efficace menée avec succès » 147.
Il ajoute que la gestion de la reconnaissance des compétences devient ainsi une problématique majeure pour les entreprises.
De son côté, la grille de compétences des candidats à la profession d’expert-comptable avance qu’« une compétence s’entend de la capacité de l’expert-comptable de réaliser une tâche particulière tout en appliquant ou en mettant à contribution les valeurs et compétences fondamentales caractéristiques d’un expert-comptable, selon le niveau de maîtrise jugé approprié par la profession ».
Il s’agit, en somme et surtout, d’un savoir agir et d’un savoir se comporter qui doivent être reconnus pour être validés 148.
§1. Les composantes de la compétence professionnelle
La notion de compétence professionnelle recouvre à la fois une quantité importante de connaissances et les habiletés et attitudes nécessaires pour analyser, synthétiser et appliquer ces connaissances de façon efficace.
Dans ce sens, le guide de production d’une analyse de métier ou de profession affirme que : « La compétence constitue l’intégration fonctionnelle des savoirs liés à l’exercice d’un métier ou d’une profession » 149.
Le référentiel des métiers types et compétences des professionnels de l’information (ADBS, Paris 1998) énumère ces ressources comme étant principalement des :
- Savoirs : ensemble structuré de connaissances, principalement acquises en formation ;
- Savoir-faire : maîtrise de méthodes et des outils assurant la réussite d’une activité définie ;
- Aptitudes : dispositions naturelles ou acquises induisant un comportement.
146 Voir l’analyse des questions 8.1 et 8.2 en annexe.
147 Rapporté in « Ethique et compétences comptables », page 18.
148 Yaïch (A.), « Les éléments de la compétence comptable », La Lettre comptable n° 4 de l’année 2006.
149 Société québécoise de développement de la main-d’œuvre, Guide de production d’une analyse de métier ou de profession. Québec, gouvernement du Québec, 1993, p. 2-2 – 206.
On distingue quatre éléments de la compétence comptable 150 :
- Les savoirs : il s’agit de savoirs théoriques acquis par la voie des études, de la formation continue et de la lecture de la documentation professionnelle et générale.
- Le savoir-faire : défini par Peretti (1999) comme correspondant à l’acquisition d’habilités par l’expérience, les acquis d’expérience sont acquis par l’ancienneté, l’intensité des apprentissages pratiques (assiduité, degré de conscience, attachement au travail bien fait et degré de difficultés et de complexité des problèmes rencontrés), la variété des postes occupés et le grade.
- Les aptitudes comportementales (savoir être) : qui concernent les aptitudes et l’intelligence émotionnelle du comptable ou l’inné comme l’acquis interfèrent.
- L’aptitude à résoudre les problèmes (problem solving ability) : Cette aptitude qui reflète le degré d’efficacité, de professionnalisme et de sagesse du comptable élève l’expert-comptable au plus haut degré de la considération professionnelle. Plus on s’élève dans la hiérarchie, plus l’aptitude à résoudre les problèmes devient cruciale.
§2. Acquisition et maintien de la compétence professionnelle
Aux termes du paragraphe 3.2 du code d’éthique de l’IFAC, la compétence professionnelle procède, notamment, de deux phases :
- L’acquisition de la compétence professionnelle ; et
- Le maintien de la compétence professionnelle.
- Acquisition de la compétence professionnelle
L’acquisition de la base de connaissances des professionnels comptables est indispensable à la réussite. Les connaissances englobent l’environnement économique, juridique et commercial dans lequel les entreprises et les autres organisations exercent leurs activités, et d’autres qui portent, notamment, sur les principes comptables généralement admis ainsi que sur la législation fiscale et qui sont directement liées à une ou à plusieurs compétences.
Les professionnels acquièrent ces connaissances tout au long du processus d’admission à la profession, dans le cadre des programmes universitaires, sanctionnés par des examens dans des disciplines professionnelles et des stages professionnels, et aussi à partir d’autres sources, notamment la lecture, les séminaires de formation et la
150 Bescos (P-L.), « Les déterminants des compétences de la fonction gestion – finance », rapporté in, La lettre comptable n° 4 de l’année 2006.
consultation d’autres professionnels qui peuvent leur fournir de l’information et des conseils 151.
Dans ce sens, les experts-comptables interrogés confirment cette idée en affirmant que les études universitaires ne contribuent que partiellement dans le développement du professionnalisme des nouveaux diplômés et que les savoirs acquis lors du cursus universitaire doivent être développés, principalement, par l’encadrement et les actions de formation 152.
L’acquisition de la compétence professionnelle n’est pas une fin en soi. L’environnement professionnel est caractérisé par une forte mouvance. Les connaissances changent continuellement.
Mettre à jour ses connaissances s’avère nécessaire pour maintenir son niveau de compétence.
- Maintien de la compétence professionnelle
Le maintien de la compétence professionnelle implique de se tenir en permanence au courant des évolutions de la profession, notamment des normes nationales et internationales pertinentes en matière comptable, d’audit, de nouvelles technologies de l’information et de la communication ainsi que les autres réglementations et exigences législatives.
L’expert-comptable doit adopter un programme de contrôle qualité des services rendus qui soit cohérent avec les recommandations nationales et internationales adéquates. Il est tenu de démontrer qu’il possède un niveau déterminé de maîtrise des compétences professionnelles.
§3. Le niveau de maîtrise des compétences
Le niveau de maîtrise est défini comme étant « le degré d’expertise qu’un expert-comptable est censé démontrer à l’égard d’une compétence donnée. Trois niveaux de maîtrise distincts et d’une complexité croissante sont identifiés, à savoir comprendre, détecter et réaliser » 153.
151 Les rôles respectifs des études et de la formation continue dans l’acquisition des savoirs correspondent à deux contenus : des acquisitions de base pour les études et des mises à jour pour la formation continue. Quant à la lecture de la documentation, elle constitue un facteur d’efficacité aussi bien pour les études que pour la formation continue et représente une nouvelle aptitude fondamentale des comptables, celle de leur capacité à apprendre tout au long de la vie que certains élèvent déjà au rang d’un nouveau savoir : le savoir évoluer.
152 Voir l’analyse des questions 8.3, 8.4 et 8.5 en annexe.
153 La Grille de compétences des candidats à la profession de CA, Publié en vue de l’EFU de 2007, page 13.
- Comprendre
Être capable de décrire avec précision la tâche ou le rôle correspondant à la compétence en cause, les indicateurs de performance possibles, l’importance de cette compétence et les contextes dans lesquels elle est susceptible de devoir être mise à contribution ou d’être appliquée. Autrement dit, l’expert-comptable possède le niveau de maîtrise
« comprendre » lorsqu’il est capable d’expliquer, de résumer, de représenter, d’interpréter et de paraphraser, entre autres, les compétences professionnelles et les connaissances sous-jacentes requises associées à cette compétence, et d’en donner des exemples.
- Détecter
Démontrer, sans y être amené par d’autres, que l’on comprend la tâche en cause et que l’on possède les compétences professionnelles requises, notamment pour effectuer des analyses quantitatives et qualitatives de base, sans nécessairement être capable de mener à bien le travail sans soutien ou supervision adéquats. Ce niveau de maîtrise englobe le niveau « comprendre ».
- Réaliser
Mener à bien tous les éléments d’une tâche donnée. Le niveau de maîtrise « réaliser » est démontré lorsque le problème est identifié clairement et analysé en profondeur ou lorsqu’une situation est évaluée et que des recommandations utiles sont formulées ou mises en œuvre. Ce niveau de maîtrise englobe les niveaux « détecter » et
« comprendre ».
Sous-section 3 : Intégration du professionnalisme dans la culture du cabinet
C’est en raison de son impact sur le comportement des individus, qui s’érige en déterminant clé de performance pour l’entreprise, que la culture d’entreprise s’est imposée comme une solution aux défis posés aux entreprises dans une économie de marché caractérisée par son ouverture sur le monde, un accroissement de la concurrence et une accélération sans précédent de l’innovation et des hautes technologies 154.
La culture du cabinet peut être définie comme étant un système qui traduit une expérience existentielle personnelle et un savoir collectif constitué 155.
154 Yaïch (A.), « Culture d’entreprise », La RCF n° 60, 2003, page 17.
155 E. Morin, rapporté in, op.cit
Chaque collaborateur apporte avec lui dans le cabinet ses propriétés socioculturelles, une histoire qui lui est propre et son habitus.
D’autre part, trois modèles d’exercice de la profession comptable peuvent être envisagés. Ainsi, l’impact de la culture sur la performance du cabinet justifie-t-il le développement d’une culture basée sur un modèle d’exercice professionnel garantissant la valorisation du cabinet aux yeux des clients.
§1. L’impact de la culture du cabinet sur la performance
La culture du cabinet a un impact sur les performances si elle affecte concrètement le comportement professionnel collectif des collaborateurs, leur fidélité et leur loyauté envers le cabinet qui les emploie 156.
La diversité des cadres de références apportés par les collaborateurs, influençant leurs actions individuelles, rend obligatoire le développement d’une culture d’exercice professionnel au sein du cabinet. Cette culture permet d’unifier les références qui gouvernent l’action collective au sein du cabinet.
Toutefois, la stratégie adoptée dans le développement de la culture du cabinet, donnant lieu à un modèle d’exercice professionnel, influence la performance globale, soit vers le meilleur, soit vers le pire.
§2. Les modèles d’exercice professionnel comptable
Trois stratégies possibles donnant lieu aux trois modèles d’exercice professionnel comptable ont été envisagés par la lettre comptable n° 3 de l’année 2006 :
- Le modèle du client : Ce modèle consiste à choisir une stratégie fondée sur la logique du client où la qualité est dictée par le client, ce qui laisse encourir le risque de réputation d’expert-comptable maniable.
- Le modèle de responsabilité : Il consiste à choisir une stratégie fondée sur une logique de responsabilité. Dans ce modèle, la qualité, c’est ce qui satisfait le client sans compromettre l’expert-comptable, ni engager sa responsabilité, ce qui est des fois impossible.
- Le modèle de professionnalisme : Le modèle de professionnalisme consiste à choisir une stratégie fondée sur une logique de professionnalisme relevant d’une vision d’économie de la qualité. La qualité, dans ce modèle, est à la fois l’excellence professionnelle et le moteur de progrès et d’amélioration continue mobilisant tous les acteurs.
156 Yaïch (A.), op.cit, page 18.
§3. Le modèle à adopter
Le modèle de professionnalisme est le modèle d’exercice professionnel comptable le plus approprié à la nature de la profession comptable.
Toutefois, l’analyse de l’enquête menée auprès des experts-comptables montre que leurs positions, quant au modèle d’exercice professionnel à adopter, sont partagées entre le modèle de responsabilité et le modèle du professionnalisme. Ceci peut, probablement, s’expliquer par la nature de la demande prédominante sur le marché et la méconnaissance des avantages du modèle du professionnalisme.
De même, l’analyse des statistiques montre un consensus quant à la non adoption du modèle du client 157. Peut-on, pour autant, conclure que ce modèle n’est adopté par aucun professionnel en pratique ?
Aussi, doit-on introduire le développement de la compétence professionnelle des membres du cabinet dans notre réflexion stratégique d’une part et instaurer un système de contrôle et d’évaluation interne des compétences techniques et comportementales au sein du cabinet afin de détecter et corriger toute insuffisance au moment opportun.
De même, on doit souligner la relation dialectique entre le professionnalisme et le jugement professionnel, dans la mesure où :
- L’habileté à travers l’exercice du jugement professionnel est une caractéristique fondamentale du professionnalisme
- Le professionnalisme constitue une des qualités personnelles requises pour l’exercice d’un bon jugement professionnel.
________________________
146 Voir l’analyse des questions 8.1 et 8.2 en annexe. ↑
147 Rapporté in « Ethique et compétences comptables », page 18. ↑
148 Yaïch (A.), « Les éléments de la compétence comptable », La Lettre comptable n° 4 de l’année 2006. ↑
149 Société québécoise de développement de la main-d’œuvre, Guide de production d’une analyse de métier ou de profession. Québec, gouvernement du Québec, 1993, p. 2-2 – 206. ↑
150 Bescos (P-L.), « Les déterminants des compétences de la fonction gestion – finance », rapporté in, La lettre comptable n° 4 de l’année 2006. ↑
151 Les rôles respectifs des études et de la formation continue dans l’acquisition des savoirs correspondent à deux contenus : des acquisitions de base pour les études et des mises à jour pour la formation continue. Quant à la lecture de la documentation, elle constitue un facteur d’efficacité aussi bien pour les études que pour la formation continue et représente une nouvelle aptitude fondamentale des comptables, celle de leur capacité à apprendre tout au long de la vie que certains élèvent déjà au rang d’un nouveau savoir : le savoir évoluer. ↑
152 Voir l’analyse des questions 8.3, 8.4 et 8.5 en annexe. ↑
153 La Grille de compétences des candidats à la profession de CA, Publié en vue de l’EFU de 2007, page 13. ↑
154 Yaïch (A.), « Culture d’entreprise », La RCF n° 60, 2003, page 17. ↑
155 E. Morin, rapporté in, op.cit ↑
156 Yaïch (A.), op.cit, page 18. ↑
157 Peut-on, pour autant, conclure que ce modèle n’est adopté par aucun professionnel en pratique ? ↑
Questions Fréquemment Posées
Quelles sont les compétences professionnelles essentielles en expertise comptable?
Les compétences professionnelles en expertise comptable incluent des compétences comportementales, techniques et en gestion des risques.
Comment acquérir et maintenir la compétence professionnelle en comptabilité?
L’acquisition de la compétence professionnelle passe par l’acquisition de connaissances et le maintien de ces compétences est essentiel pour réussir dans la profession.
Pourquoi les compétences comportementales sont-elles importantes pour un expert-comptable?
Les compétences comportementales sont considérées comme un vecteur de réussite globale et un facteur d’excellence, souvent plus importants que les diplômes dans la réussite professionnelle.