Le cadre théorique des emballages révèle des disparités surprenantes entre les systèmes de gestion des déchets en Europe. Cette étude met en lumière l’impact des directives européennes et la responsabilité des producteurs, offrant des perspectives essentielles pour comprendre les enjeux environnementaux contemporains.
II. Présentation générale des systèmes
Objectif : expliciter les deux directives européennes sur la gestion des emballages qui constituent la base même sur laquelle reposent les systèmes étudiés ; décrire brièvement les transpostions en droit nationaux et les systèmes mis en place
A. Les lois européennes
La directive 75/442/CEE du 15 juillet 1975 encadre la gestion globale des déchets, et donc des déchets d’emballages. Cependant en 1994 une directive spécialement dédiée aux emballages et déchets d’emballages a été instaurée. C’est ce texte (modifié en 2004) que nous commenterons ici.
1. Directive 94/62/CE du 20 décembre 1994
Objet
Dès le début des années 90, certains pays (Allemagne, France) ont pris des mesures réglementaires concernant les emballages, afin de favoriser leur recyclage. Constatant ces développements, l’Union Européenne s’est vue poussée à élaborer une directive, dans le but d’harmoniser les mesures nationales concernant la gestion des emballages et déchets d’emballages.
Concernant les mesures environnementales, la directive établit la hiérarchie suivante :
– La priorité est à la prévention, c’est-à-dire, au sens de la directive, qu’il faut à la fois réduire la quantité d’emballages mais également réduire la nocivité des substances utilisées dans la fabrication des emballages
– Vient ensuite la réutilisation d’emballages, c’est-à-dire lorsque l’emballage est
« rempli à nouveau ou réutilisé pour un usage identique à celui pour lequel il a été conçu »
– Puis le recyclage et autres formes de valorisation des déchets d’emballages, où :
o Recyclage : retraitement dans un processus de production, inclut le recyclage organique, mais exclut la valorisation énergétique ;
o Recyclage organique : compostage ou biométhanisation, mais pas enfouissement en décharge;
o Valorisation énergétique : utilisation comme moyen de production d’énergie, par incinération, mais avec récupération de la chaleur ;
1 Voir bibliographie pour référence complète des textes
o Valorisation : recyclage, récupération de métaux, valorisation énergétique
Néanmoins, le texte n’a pas pour seul objet de donner des directives environnementales. En effet, il s’agit d’assurer la protection de l’environnement au travers de toute l’Europe, mais tout en conservant la libre circulation dans marché intérieur. Cette double volonté crée quelque peu l’ambiguïté dans la mesure où les ambitions écologiques se heurtent parfois aux principes de libre concurrence et circulation à l’intérieur de la communauté. A titre d’exemple, on peut citer le système de réutilisation des emballages, qui, d’une certaine manière, favorise le marché national, voire local et peut être vu comme une mesure protectionniste.
Périmètre d’application
La directive s’applique « à tous les emballages mis sur le marché dans la communauté et à tous les déchets d’emballages ».
Le texte s’attache à définir l’emballage, de la manière suivante :
Emballage : « tout produit constitué de matériaux de toute nature, destiné à contenir et à protéger des marchandises données, allant des matières premières aux produits finis, à permettre leur manutention et leur acheminement du producteur au consommateur ou à l’utilisateur, et à assurer leur présentation. Tous les articles à jeter utilisés aux mêmes fins doivent être considérés comme des emballages »
Selon le texte, on distingue trois niveaux d’emballages :
o Emballage de vente ou emballage primaire : conçu de manière à constituer au point de vente une unité de vente.
o Emballage groupé ou emballage secondaire : conçu de manière à constituer au point de vente un groupe d’un certain nombre d’unités de vente, vendu tel quel servant seulement à garnir les présentoirs au point de vente ; peut être enlevé du produit sans en modifier les caractéristiques.
o Emballage de transport ou emballage tertiaire : conçu de manière à faciliter la manutention et le transport. L’emballage de transport ne comprend pas les conteneurs de transport routier, ferroviaire, maritime et aérien.
Ces définitions d’emballages ou de niveaux d’emballages sont assez ambiguës, et le deviendront encore plus par transposition en droit national, comme on le verra plus tard.
Concernant les acteurs économiques impliqués, la directive laisse en revanche le soin à chaque Etat membre de déterminer qui sont les responsables des emballages et déchets d’emballages, et de quelle manière ils doivent être impliqués (Article 7).
Objectifs
Des objectifs chiffrés concernant le recyclage et la valorisation ont ainsi été fixés aux Etats membres ; des objectifs globaux ainsi que des objectifs par matériaux. A noter qu’en raison de leur situation particulière, certains pays bénéficient de délais supplémentaires, notamment le Portugal du fait de son faible niveau de consommation.
Le tableau ci-dessous résume ainsi les objectifs :
Recyclage verre | 15% minimum | |
Recyclage métaux | 15% minimum | |
Recyclage papier-carton | 15% minimum | |
Recyclage plastique | 15% minimum | |
Recyclage bois | 15% minimum | |
Valorisation totale | 50% à 65% | |
Recyclage total | 25% à 45% | |
Date d’atteinte des objectifs | Portugal | 2005 |
Autres pays | 2001 |
Tableau 1 : objectifs de recyclage, directive 1994
Ces objectifs concernent l’ensemble des emballages, c’est-à-dire la quantité totale de matériau recyclé (par quelque système que ce soit) divisé par le gisement d’emballages mis sur le marché dans le pays. Il n’y a pas de distinction emballages ménagers/industriels.
On peut s’étonner du fait que la directive n’ait pas prévu d’objectifs quantifiés concernant la prévention, qui constitue pourtant sa première priorité ; ou encore concernant la réutilisation. La concentration en métaux lourds est toutefois réglementée par l’Article 11.
Mise en œuvre
Globalement, la directive laisse une grande liberté aux Etats membres quant à la manière d’atteindre les objectifs de recyclage et valorisation :
« Les Etats membres prennent les mesures pour que soient instaurés des systèmes assurant :
– La reprise et/ou la collecte des emballages utilisés et/ou des déchets d’emballages provenant du consommateur, de tout autre utilisateur final ou du flux de déchets en vue de les diriger vers les solutions de gestion des déchets les plus appropriées
– La réutilisation ou la valorisation, y compris le recyclage, des emballages et/ou des déchets d’emballages collectés ».
La directive prévoit un délai de deux ans aux pays membre pour mettre en application le contenu du texte.
2. Directive 2004/12/CE du 11 février 2004
Objet
10 ans après la première directive, la deuxième voit le jour, venant modifier et ainsi supplanter la précédente. Les principaux sujets abordés sont : la précision de la définition de la notion d’emballage, le renforcement de la prévention, l’établissement de nouveaux objectifs chiffrés de recyclage et valorisation, une réaffirmation de la libre concurrence.
Pour redéfinir l’emballage, la directive précise certains critères de détermination et fournit une liste d’exemple. Ainsi n’est pas un emballage un article qui disparait avec la consommation du produit (un sachet de thé par exemple), est un emballage un article conçu pour être rempli au point de vente (sac de caisse).
Objectifs
La directive de 2004 définit les nouveaux objectifs de valorisation et recyclage :
Recyclage verre | 60% minimum | |
Recyclage métaux | 50% minimum | |
Recyclage papier-carton | 60% minimum | |
Recyclage plastique | 22.5% minimum | |
Recyclage bois | 15% minimum | |
Valorisation totale | 60% | |
Recyclage total | entre 55% minimum et 80% maximum | |
Date atteinte des objectifs | France, Allemagne, Belgique, Espagne | 2008 |
Portugal | 2011 | |
Tchéquie | 2012 |
Tableau 2 : objectifs de recyclage, directive 2004
On constate que ce sont surtout les objectifs individuels par matériau qui ont subi une augmentation considérable, à l’exception du bois.
L’objectif global de recyclage a quant à lui plus que doublé, mais pas l’objectif de valorisation ; le but étant de favoriser le recyclage plus que la valorisation énergétique par exemple.
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2 Définition donnée par l’article 62 de la loi sur les nouvelles régulations économiques (NRE) du 15 mai 2001. ↑
3 Auchan Les 4 Temps, La Défense. ↑
Questions Fréquemment Posées
Quelle est la directive européenne sur la gestion des emballages?
La directive 94/62/CE du 20 décembre 1994 est dédiée à la gestion des emballages et déchets d’emballages, visant à harmoniser les mesures nationales.
Quels sont les objectifs de la directive 94/62/CE?
La directive établit une hiérarchie des mesures environnementales, priorisant la prévention, suivie de la réutilisation, puis du recyclage et d’autres formes de valorisation des déchets d’emballages.
À qui s’applique la directive sur les emballages en Europe?
La directive s’applique à tous les emballages mis sur le marché dans la communauté et à tous les déchets d’emballages.