L’analyse des comportements en expertise comptable révèle que les compétences comportementales sont souvent plus déterminantes que les diplômes pour réussir. Cette recherche met en lumière l’importance cruciale de ces qualités humaines dans la gestion des conflits et l’atteinte de l’excellence professionnelle.
Sous-section 2. Contrôle des comportements des collaborateurs et gestion des conflits comportementaux
Le contrôle des comportements des collaborateurs permet de s’assurer du respect de la politique ainsi que des valeurs et exigences du cabinet.
Ce contrôle doit être intégré dans les activités quotidiennes de l’expert-comptable afin de prévenir les conflits comportementaux et d’envisager les actions correctrices à temps.
§1. Le contrôle quotidien des comportements des collaborateurs
Le contrôle des comportements des collaborateurs est justifié par l’impact desdits comportements sur :
- La performance du cabinet ;
- La réputation du cabinet à l’égard des clients, dans la mesure où les collaborateurs sont considérés comme les représentants de l’expert-comptable chez ses clients.
Le contrôle des comportements doit être intégré dans les activités quotidiennes de l’expert-comptable. Il se base, généralement sur la simple observation et aussi sur le feed-back externe (remarques des clients) ou interne (observations des chefs de missions et ceux des collègues).
Ce contrôle permet à l’expert-comptable de distinguer les collaborateurs méritant des promotions de ceux nécessitant d’être encadrés afin de développer leurs comportements ou licenciés s’ils risquent d’affecter négativement l’environnement général du cabinet et sa réputation.
§2. Les conflits comportementaux
Le collaborateur est, en principe, dans l’obligation de respecter des règles comportementales imposées aussi bien par la loi que par le cabinet. Ce n’est donc pas un choix pour lui.
Toutefois, certains collaborateurs peuvent refuser de complaire. Des conflits comportementaux peuvent naître quand il y a disparité entre les valeurs personnelles et les exigences professionnelles ayant pour incidence, soit l’abaissement des performances des collaborateurs, soit un déficit comportemental.
§3. La résolution des conflits comportementaux
La résolution des conflits comportementaux chez les collaborateurs nécessite l’adoption d’une démarche méthodologique et la mobilisation de certaines compétences comportementales.
La démarche de résolution des conflits est constituée des trois étapes suivantes :
- Faire preuve, d’abord, d’une volonté pour trouver des solutions et aider le collaborateur, plutôt que se lancer dans une escalade agressive. En effet, l’expert-comptable est tenu de discuter avec son collaborateur afin d’exposer son point de vue, en termes neutres, et cerner les sources du conflit.
- Essayer, ensuite, de trouver, en coordination avec le collaborateur, les solutions adéquates et de planifier leur mise en œuvre.
- Contrôler, enfin, l’évolution des comportements du collaborateur.
Dans le cas où le collaborateur fait preuve de comportements déloyaux ou d’une résistance injustifiée, l’expert-comptable est appelé à envisager l’éventualité de la rupture.
Cette démarche peut paraître simple. Néanmoins, sa mise en œuvre de façon adroite exige la mobilisation de certaines compétences comportementales, notamment, la conscience de soi, la maîtrise de soi, la confiance en soi et l’empathie262.
Sous-section 3. La formation aux compétences comportementales
Après avoir répondu à la question de savoir si on peut éduquer aux comportements, cette sous-section s’intéressera à l’amélioration de la compétence comportementale des collaborateurs et du processus d’apprentissage personnel.
§1. Peut-on former aux bons comportements ?
Stone et al. définissent les compétences comportementales comme étant les aptitudes à améliorer la productivité et à construire des relations de travail avec les autres. Ces compétences étaient acquises par l’observation des réactions des autres, des mentors et des supérieurs hiérarchiques. Aujourd’hui, ce savoir-être fait l’objet aussi d’éducation
262 Cette empathie ne signifie pas que l’on sympathise avec les exigences du collaborateur. Par contre, rejeter toute empathie pour défendre une ligne dure conduit à des positions tranchées et à des impasses.
universitaire263 et de formation continue. Il concerne la gestion de soi-même, la gestion des autres et la gestion de sa carrière264.
Yaïch (A.), affirme que « l’on devrait plutôt se poser la question doit-on éduquer aux comportements ? Ou plutôt peut-on se passer d’éduquer aux comportements ?»265.
Dans ce sens, les participants à l’enquête confirment cette obligation de veiller au développement des comportements des collaborateurs266.
Les professionnels comptables sont appelés à planifier la participation à des programmes de formation aux comportements professionnels pour tous les membres du cabinet.
§2. L’amélioration des compétences comportementales
L’amélioration des comportements nécessite que l’on prenne conscience des mauvais comportements267 et de les effacer afin de laisser la place à l’instauration de bons comportements. En effet, la qualité des comportements éprouvés par une personne dépend, principalement, de sa connaissance et de la rigueur avec laquelle elle observe les comportements qu’elle est tenue d’éviter, « d’où l’importance de connaître et de conserver à l’esprit les conséquences liées aux comportements dépréciants »268.
Toutefois, l’amélioration des comportements n’est pas aussi facile que l’on croit. En effet, la difficulté n’est pas, comme l’affirmait Keynes (J-M.), tant d’admettre les idées nouvelles mais bien d’échapper aux idées anciennes269. En effet, désapprendre s’avère toujours plus difficile qu’apprendre.
De ce fait, toute action d’amélioration, bien que possible, nécessite beaucoup de volonté et de persévérance270.
263 La majorité des institutions universitaires, dans les pays développés, ont déjà intégré depuis des années l’éducation aux comportements professionnels dans leurs programmes. En Tunisie, l’Ecole Supérieure de Commerce de Sfax, fut la première à introduire cette matière dans l’éducation des étudiants de la filière sciences comptable en 2005 suivie en 2006 par l’Institut des Hautes Etudes Commerciales de Sfax.
264 Yaïch (A.), « L’intelligence comportementale comptable », page 6.
265 Op.cit
266 Voir l’analyse de la question 13.4 en annexe.
267 Les principaux comportements dépréciants dans la profession comptable sont, le mépris, la médisance, être prétentieux et orgueilleux, la surestimation de ses qualités ou la sous-estimation de ses défauts et limites, l’agressivité et la manipulation, la sous-estimation de soi, l’oisiveté au travail, l’opportunisme, le sans égard aux frustrations de l’autre, le harcèlement, la curiosité déplacée, la chicane, la non chalence, la lâcheté, l’incapacité apprise, l’irresponsabilité, la culture d’excuses et le mensonge.
268 Yaïch (A.), « L’intelligence comportementale comptable », page 26.
269 Op.cit, page 7.
270 Op.cit, page 6.
L’intelligence dicte que l’on doit profiter de l’expérience des autres pour l’identification des bons et mauvais comportements. Cela se construit par l’observation, la participation à des séminaires, la lecture, la participation aux réunions,…
Savoir apprendre de l’expérience d’autrui permet d’économiser du temps et d’éviter de refaire les erreurs déjà cataloguées271. Un proverbe arabe enseigne que « celui qui expérimente ce qui l’est déjà est bête » ou » ﻣﺨّﺮب ﻋﻘﻠﻮ اﻟﻤﺠّﺮب ﻳﺠّﺮب اﻟّﻠﻲ « .
§3. Le processus d’apprentissage personnel
S’il revient aux collaborateurs d’améliorer leurs comportements, il demeure que la responsabilité de l’expert-comptable est de les assister à mettre en œuvre le processus d’apprentissage personnel.
Ce processus, comme le décrit Boyatzis (R.)272, est composé de cinq étapes (qualifiées de découvertes personnelles) à savoir :
- La première étape : La détermination de l’objectif de l’amélioration (qui je veux être ?) ;
- La deuxième étape : La conscience de soi (qui je suis ? Quels sont mes points forts et mes faiblesses ?) ;
- La troisième étape : La détermination du programme d’apprentissage (comment puis-je capitaliser mes points forts tout en réduisant mes faiblesses ?) ;
- La quatrième étape : Mettre en pratique les nouveaux comportements jusqu’à les maîtriser parfaitement.
- La cinquième étape : Développer des relations de soutien et de confiance qui rendent le changement possible.
271 La sagesse chinoise dit bien que s’il est intelligent d’apprendre de son expérience, il est encore plus intelligent d’apprendre de l’expérience des autres.
272 Goleman (D.), Boyatzis (R.) & McKee (A.), op.cit, page 144.
Le schéma suivant décrit le processus d’apprentissage personnel :
- Mon moi idéal : Qui je veux être ?
- Pratiquer les nouveaux
comportements jusqu’à les maîtriser parfaitement
- Développer des relations de soutien et de confiance qui rendent le
changement possible
- Mon moi réel : Qui suis-je ?
Mes aptitudes : Là où se recouvrent mon moi idéal et mon moi réel
- Mon programme
d’apprentissage
Mes manques : Là où mon moi idéal et mon moi réel diffèrent
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Source : R. Boyatzis, « L’intelligence émotionnelle au travail », 2005, page 145
Définir la politique générale du cabinet, réussir les recrutements et contrôler les comportements des collaborateurs, identifier et résoudre les conflits comportementaux et planifier des actions de formation sont un ensemble d’actions qui permettent de développer un modèle comportemental basé, non seulement sur l’esprit du devoir professionnel mais aussi sur l’esprit du travail collectif exigé par le nouvel environnement dans lequel s’exerce la profession comptable.
Questions Fréquemment Posées
Quelles sont les compétences nécessaires pour réussir en expertise comptable ?
Les compétences nécessaires pour réussir en expertise comptable incluent des compétences comportementales, techniques et en gestion des risques.
Comment résoudre les conflits comportementaux chez les collaborateurs ?
La résolution des conflits comportementaux nécessite une démarche méthodologique en trois étapes : discuter avec le collaborateur, trouver des solutions adéquates et contrôler l’évolution des comportements.
Peut-on former aux compétences comportementales en expertise comptable ?
Oui, les compétences comportementales peuvent être améliorées par l’éducation et l’observation des réactions des autres, ainsi que par des formations spécifiques.