Comment l’analyse de cas redéfinit l’autogestion en 2023 ?

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🏫 Université Haute Bretagne
📅 Mémoire de fin de cycle en vue de l'obtention du diplôme de Master - 2005-2006
🎓 Auteur·trice·s
Suzy Canivenc
Suzy Canivenc

L’analyse de cas d’autogestion révèle que, malgré son déclin depuis les années 80, ce modèle organisationnel est plus pertinent que jamais. En réintégrant des principes tels que la participation et la démocratie, cette recherche transforme notre compréhension des nouvelles formes d’organisation face aux défis contemporains.


Caractéristiques essentielles d’une organisation autogérée : les principes organisationnels clés :

Une organisation autogérée repose donc sur un partage égalitaire du pouvoir décisionnel et organisationnel entre tous ses membres. Mais comment mettre en œuvre cette forme d’organisation « sans hiérarchie » ?

Pour ce faire, l’organisation autogérée va tout d’abord s’appuyer sur une « socialisation » (c’est-à-dire un partage égalitaire entre tous les membres de l’organisation) des moyens

23 CASTORIADIS, Cornélius. Autogestion et hiérarchie. Editions grain de sable. En ligne sur : http:// infokiosques.net/article.php3?id_article=247

24 Encyclopædia Universalis, 1998

25 Cf. annexe 2 : « généalogie de l’idée autogestionnaire » : Le XIXème siècle : L’anarchisme (p 86)

26 FAY, Victor. L’autogestion, une utopie réaliste. Editions Syllepse, 1986

27 Dictionnaire encyclopédique Quillet.

28 CASTORIDIS, Cornélius. Op. Cit.

29 TIXIER, Jacques. Socialisme, démocratie, autogestion. Revue La pensée n°321, Janvier mars 2000

30 LE MOIGNE, Jean-Louis et CARRE, Daniel. Auto organisation de l’entreprise, 50 propositions pour l’autogestion. Les Editions d’Organisation, 1977

matériels de production. Parallèlement, elle va également s’appuyer sur une « socialisation » du pouvoir grâce à la socialisation des moyens d’information, de communication et de formation, à l’origine d’une mutualisation et d’un partage total des connaissances.

1. La socialisation des moyens de production :

Comme nous le montre la brève présentation que nous avons fait de l’autogestion, celle-ci est avant tout la réappropriation de la décision par ceux qui auront à exécuter et mettre en oeuvre cette décision. En ce sens, l’autogestion souhaite réaliser le vieil adage anarchiste qui consiste à réconcilier intelligence et action.

Pourtant, pour beaucoup, l’autogestion se limite à la simple socialisation des moyens de production (c’est-à-dire l’appropriation des moyens matériels de travail par les travailleurs eux-mêmes). L’autogestion consiste alors à « transformer les moyens de production, la terre et le capital, aujourd’hui essentiellement moyen d’asservissement et d’exploitation du travail, en simples instruments d’un travail libre et associé ». La propriété privée des moyens de production est ainsi présentée comme « la clé de voûte d’un système où la dépossession des travailleurs est indissociable de leur exploitation et de leur domination ».

Ce thème est en effet prépondérant chez Marx et Proudhon, ainsi que chez beaucoup d’intellectuels ayant participé à l’élaboration de l’idée autogestionnaire. Mais contrairement au marxisme, l’autogestion « ne vise pas simplement à remplacer les propriétaires capitalistes par telle ou telle collectivité »31. Ainsi, « l’autorité-propriété, droit d’user et d’abuser qui définit l’entreprise capitaliste, doit faire place à la propriété sociale des moyens de production, qui n’est ni propriété privée, ni propriété d’Etat »32.

« L’autogestion se présente d’abord comme une déstructuration de la propriété comme institution sociale »33 « remplacée par l’usage des moyens de production au bénéfice d’une collectivité de travail qui devient libre et responsable de la mise en valeur sociale du capital initial »34. Elle souhaite ainsi « éclater » et

« redistribuer » les différents droits bourgeois qui fondent la propriété privée :

– l’usus : le droit d’user de la chose

31 ROSANVALLON, Pierre. L’âge de l’autogestion. Edition du Seuil, 1976

32 Encyclopédie Universalis.

33 ROSANVALLON, Pierre. Op. Cit. (1976).

34 Encyclopédie Universalis.

– le fructus : le droit d’en percevoir les revenus

– l’abusus : le droit d’en disposer et de l’aliéner (au sens juridique).

Dans une organisation autogérée, « ces trois attributs de la propriété éclatent ainsi entre différents centres de décision »35.

Ainsi, le thème même de la déstructuration de la propriété privée renvoie à des problématiques bien plus larges que celles purement juridiques et économiques d’une appropriation des moyens matériels de production, et « si l’expropriation est un préalable, elle ne doit pas faire perdre de vue que la question centrale est celle du mode d’appropriation par les travailleurs et la société de leurs conditions de vie et de travail ».

Cette simplification semble liée au terme « autogestion » lui-même, que Henri Arvon estime, à juste titre, « mal approprié »36.

Ce n’est pas le préfixe « auto » qui est ici en cause (au contraire, ce terme traduit bien l’idée d’autonomie et de responsabilisation), mais la racine même du mot : le terme « gestion ». Cette notion est en effet « grevée de rationalité économique » et limite ce concept organisationnel à cette seule dimension matérielle, et par là même le dénature.

Ainsi, pour Henri Arvon, les termes anglo-saxons « self-government » et « self management » semblent beaucoup plus adéquats pour désigner ce modèle d’organisation particulier en élargissant son domaine d’application de la simple dimension économique à sa dimension politique. En effet, « les termes anglo-saxons situent la notion d’autogestion dans l’ampleur humaine (…) combinant des aspects à la fois politiques et économiques »37. Le premier terme, self-government, renvoie à la « volonté du citoyen de participer activement au fonctionnement de la démocratie en supprimant la distance qui le sépare du pouvoir », le second, self management, consiste à « transférer le pouvoir décisionnel entre les mains de tous les membres d’une entreprise ».

En se replaçant sur le terrain politique, l’idée d’autogestion acquiert ainsi un contenu beaucoup plus large en proposant de « créer un autre sens de mot politique : à savoir la prise en main, sans intermédiaires et à tous les niveaux, de toutes les affaires par tous les hommes »38. C’est par cet ancrage politique même que l’autogestion se distingue de « la participation, [du] contrôle ouvrier et [des] coopératives [qui] ne concernent guère que la production et l’économie »39 .

35 Encyclopédie Universalis.

36 ARVON, Henri. L’autogestion. PUF, Que sais-je, 1980

37 ARVON, Henri. Op. Cit. (1980).

38 GUILLERM, Alain et BOURDET, Yvon. L’autogestion. Editions Seghers, 1975.

39 GUILLERM, Alain et BOURDET, Yvon. Clefs pour l’autogestion. Editions Seghers, 1977

________________________

2 Définition donnée par l’article 62 de la loi sur les nouvelles régulations économiques (NRE) du 15 mai 2001.

3 Auchan Les 4 Temps, La Défense.

24 Encyclopædia Universalis, 1998.

25 Cf. annexe 2 : « généalogie de l’idée autogestionnaire » : Le XIXème siècle : L’anarchisme (p 86).

26 FAY, Victor. L’autogestion, une utopie réaliste. Editions Syllepse, 1986.

27 Dictionnaire encyclopédique Quillet.

28 CASTORIDIS, Cornélius. Op. Cit.

29 TIXIER, Jacques. Socialisme, démocratie, autogestion. Revue La pensée n°321, Janvier mars 2000.

30 LE MOIGNE, Jean-Louis et CARRE, Daniel. Auto organisation de l’entreprise, 50 propositions pour l’autogestion. Les Editions d’Organisation, 1977.

31 ROSANVALLON, Pierre. L’âge de l’autogestion. Edition du Seuil, 1976.

32 Encyclopédie Universalis.

33 ROSANVALLON, Pierre. Op. Cit. (1976).

34 Encyclopédie Universalis.

35 Encyclopédie Universalis.

36 ARVON, Henri. L’autogestion. PUF, Que sais-je, 1980.

37 ARVON, Henri. Op. Cit. (1980).

38 GUILLERM, Alain et BOURDET, Yvon. L’autogestion. Editions Seghers, 1975.

39 GUILLERM, Alain et BOURDET, Yvon. Clefs pour l’autogestion. Editions Seghers, 1977.


Questions Fréquemment Posées

Quelles sont les caractéristiques essentielles d’une organisation autogérée ?

Une organisation autogérée repose sur un partage égalitaire du pouvoir décisionnel et organisationnel entre tous ses membres.

Comment l’autogestion transforme-t-elle les moyens de production ?

L’autogestion consiste à transformer les moyens de production, la terre et le capital, en simples instruments d’un travail libre et associé.

Quels sont les trois attributs de la propriété dans une organisation autogérée ?

Les trois attributs de la propriété sont l’usus (droit d’user de la chose), le fructus (droit d’en percevoir les revenus) et l’abusus (droit d’en disposer et de l’aliéner).

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