Analyse de cas : Diligences essentielles du commissaire aux comptes en Tunisie

Pour citer ce mémoire et accéder à toutes ses pages
🏫 Université 7 Novembre de Carthage - Institut des Hautes Etudes Commerciales - Commission d'Expertise Comptable de l'IHEC
📅 Mémoire de fin de cycle en vue de l'obtention du diplôme de Diplôme d'Expertise Comptable - 2003
🎓 Auteur·trice·s
Mohamed AMOUS
Mohamed AMOUS

L’analyse de cas sur la certification révèle que 70 % des commissaires aux comptes sous-estiment les risques liés aux prospectus d’information financière. Cette étude critique propose des procédures de vérification adaptées, transformant notre compréhension des responsabilités dans le contexte tunisien et au-delà.


Section 2 :

Les diligences à mettre en œuvre sur les informations de nature financière et comptable fournies dans le Prospectus

La nature et l’étendue des travaux à effectuer par le commissaire aux comptes varient en fonction de la nature des informations comptables et financières présentées (informations historiques, pro forma ou prévisionnelles) et de l’importance des diligences préalables mises en œuvre sur les comptes et informations présentés dans le prospectus par lui-même ou par un confrère (prédécesseur ou auditeur contractuel).

Les informations historiques de nature comptable et financière

Comme annoncé dans la première partie de ce mémoire43, les informations et comptes historiques présentés dans le prospectus peuvent prendre plusieurs formes : des états financiers individuels ou consolidés, annuels ou intermédiaires, entiers ou résumés; des informations extraites des comptes; des informations issues des données de base de la comptabilité pour une période couverte ou non par des comptes.

Etats financiers audités

S’agissant de comptes individuels et, le cas échéant, de comptes consolidés ou intermédiaires, ayant déjà fait l’objet d’un rapport du commissaire aux comptes actuel, dans le cadre de sa mission générale ou d’une intervention définie par convention, celui-ci vérifie la correcte retranscription des états financiers dans le prospectus.

En pratique, cette diligence correspond à un simple pointage desdits états financiers, poste par poste et note par note, avec les états financiers de la même période annexés au rapport de vérification (audit ou examen limité) du commissaire aux comptes.

Face à une multitude des versions du prospectus, le commissaire aux comptes doit faire preuve de beaucoup de vigilance et de rigueur dans l’exercice de ce travail, particulièrement lorsqu’il s’agit de la première et de la dernière version servant de base au bon à tirer.

La conservation de ces deux versions dans le dossier général est à notre avis recommandée pour servir comme élément de preuve.

Etats financiers audités par un deuxième auditeur

Lorsque les derniers comptes présentés ont fait l’objet d’une vérification par l’ancien commissaire aux comptes (prédécesseur) ou un auditeur contractuel, le commissaire aux comptes actuel prend connaissance de son rapport et examine, s’il l’estime nécessaire, ses dossiers de travail afin de s’assurer que les diligences effectuées correspondent au moins à celles prévues dans le cadre d’un examen limité44.

Dans le même ordre d’idées, la norme canadienne stipule que le commissaire aux comptes actuel peut demander au premier vérificateur de lire le prospectus (ou la partie pertinente du prospectus) et de confirmer que, à la suite de son travail, il n’a aucune raison de croire que le prospectus contient des informations fausses ou trompeuses à l’égard des états financiers qu’il a audités.

En outre, lorsque les états financiers figurant dans le prospectus ont été vérifiés par un prédécesseur, l’opinion de ce dernier sur les états financiers est incluse dans le prospectus et l’inclusion de son rapport doit faire l’objet de son consentement.

Etats financiers résumés issus d’états financiers audités

Si elle l’estime utile dans le cadre de sa communication financière dans le prospectus ou autres supports, la société assistée de ses conseillers, peut décider de présenter des comptes résumés issus d’états financiers audités en effectuant certains regroupements parfois dans le bilan et le compte de résultat et souvent en réduisant l’annexe à certains extraits.

Confronté à cette situation, le commissaire aux comptes apprécie notamment si les regroupements effectués et, le cas échéant, les extraits de l’annexe, n’ont pas pour effet d’occulter certaines informations significatives de nature à avoir une incidence sur le jugement des investisseurs potentiels.

A cet égard, il veille en particulier à ce que les notes annexes, auxquelles il est fait renvoi dans un paragraphe d’observations du rapport d’audit des comptes de base, soient correctement reprises.

D’une façon plus générale, et sans qu’il soit explicitement précisé dans les normes, le commissaire aux comptes doit tout d’abord chercher à comprendre les motivations de la société et de ses conseillers pour présenter des comptes résumés et doit apprécier les raisons en toute objectivité.

Etats financiers non-audités

Par référence à la même norme « CNCC 6-801 », lorsque les derniers états financiers présentés dans le prospectus n’ont pas fait l’objet de vérification par l’ancien commissaire aux comptes ou un auditeur contractuel, le commissaire aux comptes actuel apprécie, compte tenu du décalage de son intervention dans le temps, la nature de l’assurance qu’il est en mesure d’obtenir.

En fonction de cette appréciation et de la nature de l’assurance souhaitée par l’émetteur, le commissaire aux comptes effectue un audit ou un examen limité de ces comptes.

Pour sa part, le C.M.F. exige parmi les documents constitutifs du dossier remis pour l’obtention du visa, des états financiers dûment certifiés et accompagnés par les rapports du commissaire aux comptes des trois derniers exercices.

Il en découle que ce dernier doit informer son client (l’émetteur) de la nécessité d’étendre les diligences convenues pour couvrir l’audit des états financiers des exercices non vérifiés.

Toutefois, si la société réussit dans l’obtention d’une dérogation du C.M.F.45 et que le prospectus comporte enfin des états financiers non vérifiés, le commissaire aux comptes doit s’assurer que ceux- ci portent bien en évidence une mention indiquant qu’ils ne sont pas vérifiés.

De même, lorsque le prospectus comporte des états financiers intermédiaires non vérifiés, le commissaire aux comptes met en œuvre des procédés d’examen limité reposant principalement sur des questions, des analyses et des discussions et se conforme aux normes professionnelles applicables en la matière46.

Informations extraites des comptes

Concernant les informations issues de comptes vérifiés, ayant fait l’objet d’un rapport, « le commissaire aux comptes vérifie la concordance de ces informations avec les comptes »47.

Comme déjà présenté dans la première partie de ce mémoire48, ces extraits d’informations peuvent être présentés avec ou sans traitement.

Lorsqu’elles ne sont pas traitées, le travail du commissaire aux comptes s’arrête à un simple pointage avec les comptes correspondants ayant fait l’objet d’un rapport.

Dans le cas contraire, le commissaire aux comptes est appelé à prendre connaissance des formules de calcul utilisées, vérifier leur cohérence par rapport aux commentaires, pointer les données utilisées dans la formule de calcul et enfin contrôler l’exactitude des calculs arithmétiques.

Informations issues des données de base de la comptabilité

Les travaux et procédés à mettre en œuvre sur ce type d’informations varient selon qu’elles sont relatives à une période couverte ou non par des états financiers vérifiés.

Pour une période couverte par des états financiers vérifiés

Dans ce cas, « le commissaire aux comptes vérifie la concordance desdites informations avec les données de base de la comptabilité. Il apprécie la sincérité de ces informations au regard de leur cohérence d’ensemble, de leur vraisemblance et de leur pertinence »49. Ces notions méritent quelques précisions:

  • La vraisemblance des informations s’apprécie au regard de critères habituels prédéterminés ou par cohérence avec d’autres informations,
  • La pertinence des informations présentées s’apprécie par rapport au contexte dans lequel elles sont utilisées et à la façon dont elles sont présentées. La sélection de l’information autant que son exhaustivité ont une importance particulière pour le commissaire aux comptes,
  • La cohérence des informations peut se décliner selon deux axes : la cohérence interne des informations présentées mais également la cohérence par rapport aux informations disponibles par ailleurs.

De la même façon, le commissaire aux comptes s’acquitte de ses responsabilités à l’égard de ces renseignements financiers en déterminant s’ils sont conformes aux états financiers et à son dossier de vérification.

Il peut également effectuer des calculs de contrôle (tester la formule, vérification arithmétique…) et faire des comparaisons avec les registres comptables.

Pour une période non-couverte par des états financiers

S’agissant d’informations isolées relatives à une période dont les comptes n’ont pas fait l’objet d’un rapport, le commissaire aux comptes vérifie :

  • qu’elles sont issues d’un système comptable et de contrôle interne vérifiable,
  • et qu’elles peuvent être rapprochées des données de base de la comptabilité.

Il en apprécie la sincérité au regard de leur cohérence d’ensemble, de leur vraisemblance et de leur pertinence.

Ce type d’informations figure généralement sous la rubrique des renseignements concernant l’évolution récente de la société.50 Or, l’article 22 du règlement du C.M.F. relatif à l’APE prévoit que « lorsque l’offre au public est faite par l’émetteur, les commissaires aux comptes de celui-ci attestent que ces données ont été vérifiées par leurs soins et doivent donner une opinion concernant l’évolution récente de la société ».

A notre avis, cette disposition devrait être interprétée au sens strict, dans la mesure où il faut considérer ce type d’informations comme des informations de nature comptable et financière, faisant ainsi partie intégrante du champ de responsabilité du commissaire aux comptes, et ne doivent en aucun cas être interprétées comme des informations nécessitant un avis à part entière.

________________________

43 Chapitre 3, § 4.4.1.

44 La communication entre les deux auditeurs doit être menée à la lumière de la norme internationale de l’IFAC – ISA 600 « Utilisation des travaux d’un autre auditeur »

45 La décision du C.M.F. est souveraine.

46 Norme de l’IFAC – ISA 910 « Missions d’examen limité d’états financiers ».

47 Selon les commentaires de la norme française CNCC 6-801″contrôle des prospectus soumis au contrôle de la COB »

48 Troisième Chapitre, § 4.4.1, c)

49


Questions Fréquemment Posées

Quelles sont les diligences essentielles du commissaire aux comptes en Tunisie?

Les diligences à mettre en œuvre varient en fonction de la nature des informations comptables et financières présentées, incluant des états financiers audités, des comptes résumés, et l’examen des rapports des commissaires aux comptes précédents.

Comment le commissaire aux comptes vérifie-t-il les états financiers dans un prospectus?

Le commissaire aux comptes vérifie la correcte retranscription des états financiers dans le prospectus par un simple pointage desdits états financiers, poste par poste et note par note.

Que doit faire le commissaire aux comptes si les états financiers ont été vérifiés par un prédécesseur?

Le commissaire aux comptes actuel doit prendre connaissance du rapport de l’ancien commissaire et examiner ses dossiers de travail pour s’assurer que les diligences effectuées correspondent aux exigences d’un examen limité.

Rechercher
Télécharger ce mémoire en ligne PDF (gratuit)

Laisser un commentaire

Votre adresse courriel ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Scroll to Top