Comment l’analyse comparative transforme le jugement comptable ?

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🏫 Université de Sfax pour le Sud - Faculté des Sciences Economiques et de Gestion de Sfax - Commission d'Expertise Comptable
📅 Mémoire de fin de cycle en vue de l'obtention du diplôme de diplôme d'expertise comptable - 2002/2003
🎓 Auteur·trice·s
Karim AMOUS
Karim AMOUS

L’analyse comparative du jugement comptable révèle que la psychologie cognitive joue un rôle crucial dans le processus décisionnel des experts-comptables. Cette découverte remet en question les normes traditionnelles et propose des solutions innovantes pour améliorer la qualité du jugement professionnel.


Section 2 : Analyse diachronique du jugement professionnel

Cette analyse nous permettra d’analyser, d’une part, l’apport de la psychologie cognitive dans la compréhension du processus du jugement professionnel, et d’autre part, les étapes du processus du jugement professionnel.

Sous section 1 : L’apport de la psychologie cognitive dans la compréhension du processus du jugement professionnel

L’analyse menée à la section précédente a permis de mettre en évidence l’importance de ce qu’on a appelé les structures cognitives dans le processus d’apprentissage de l’expert-comptable. L’apport de la psychologie cognitive, dont un des fondements consiste à s’interroger sur la manière dont l’homme apprend, raisonne, juge et résout les problèmes, paraît intéressant pour comprendre le processus de prise de décision dont relève le jugement professionnel.

§1. Les activités mentales comme système de traitement de l’information

La psychologie cognitive pose comme postulat que les activités mentales peuvent être assimilées à des modèles de traitement de l’information. BELKAOUI distingue trois phases[45] :

–      Le point de départ des activités mentales est la perception par l’homme de son environnement et des informations s’y rattachant. Dans le cas du jugement, cette phase consiste à déterminer les questions cruciales, c’est-à-dire définir correctement la problématique et de procéder à la collecte des informations nécessaires.

–      L’homme utilise ensuite ses facultés mentales pour donner un sens aux éléments qu’il a pu recueillir de cette perception : c’est le phénomène de représentation. Les représentations sont déterminées en fonction de la problématique dégagée et des informations recueillies; elles s’inscrivent donc toujours dans un contexte précis et en fonction d’un objet précis. En l’occurrence, il va s’agir, pour l’expert-comptable, de déterminer les solutions possibles au problème posé.

–       Les activités mentales permettent enfin à l’homme de prendre des décisions : il s’agit du comportement induit de la représentation. On distingue le comportement externe qu’est l’action du comportement interne qui est constitué d’informations mémorisées par l’homme qui viennent enrichir les structures cognitives issues de l’apprentissage. Dans notre cas, l’expert-comptable va procéder à la résolution de son problème en évaluant la solution qu’il juge la plus adéquate et en formulant sa conclusion.

§2. Le fonctionnement cognitif

Tout au long de la réalisation séquentielle de ce processus, l’homme procède à la régulation et au contrôle de son activité[46].

La régulation va consister à sélectionner les différentes tâches à effectuer et à les ordonner dans le temps. Ce choix est effectué tant au niveau du processus de construction des représentations qu’à celui de l’élaboration de la prise de décision.

Quant au contrôle, il joue un double rôle : en amont de la mise en place du système de représentation, il permet de planifier l’ensemble des tâches à effectuer afin d’aboutir à une solution. En aval, il assure la réalisation du résultat. A cet égard, l’activité de contrôle peut être la source d’une nouvelle orientation de l’activité par la mise en cause du système de représentation ou par la formulation de nouveaux objectifs.

Sous section 2 : Les différentes étapes du processus du jugement professionnel

Qu’il soit analysé d’un point de vue diachronique ou synchronique, le processus de prise de décision doit être décomposé en plusieurs étapes. Ces étapes se présentent comme suit[47] :

–          La description du problème posé ;

–          La collecte de la documentation ;

–          L’identification des solutions possibles ;

–          L’évaluation des solutions ;

–          La formulation des conclusions.

§1. La description du problème posé

La description du problème posé consiste à dégager une problématique. La détermination de la problématique qui se pose constitue une opération non courante, qui va donc faire appel à un jugement qui sera complexe du fait de la nature du problème. Il conviendra donc de tenir compte du niveau de l’intervenant choisi, pour traiter ce type de problème.

On peut distinguer plusieurs tâches à accomplir lors de la réalisation de cette phase. En fonction de la complexité du problème, l’expert-comptable doit accomplir le nombre nécessaire de tâches pour étayer son opinion ou sa décision. Quelles que soient les difficultés que comporte cette étape, elle comprend généralement :

–          L’obtention des données ;

–          Des investigations complémentaires ; et,

–          L’œil critique.

1) Obtention des données

Il s’agit d’obtenir les données internes et externes à la société nécessaires à la bonne compréhension du problème à traiter.

2) Investigations complémentaires

L’expert-comptable pourra estimer nécessaire de mener des investigations complémentaires concernant :

–          La survenance d’événement similaire : s’il n’arrive pas à extraire de sa mémoire le traitement qu’il convient de donner par analogie à une situation similaire ou présentant de nombreuses ressemblances, il consultera d’autres professionnels pour prendre connaissance et évaluer la démarche suivie. Il enrichira sa base de représentation.

–          Les objectifs cachés du client : l’expert cherchera alors à savoir si les objectifs poursuivis sont autres que ceux que la régularité, la sincérité et l’image fidèle.

3) L’œil critique

L’expert-comptable ayant collecté un nombre important de données, doit garder un œil critique par rapport au travail fourni. Il sera particulièrement attentif au piège de la confirmation qui consiste à accorder une plus grande importance aux éléments qui confirment son jugement plutôt qu’aux éléments qui l’infirment. D’autre part, il fera preuve de scepticisme professionnel pour les informations reçues.

§2. La collecte de la documentation

La collecte de la documentation doit permettre à l’expert-comptable d’affiner cette problématique. Cette étape comprend généralement l’examen des normes et de la doctrine et éventuellement la consultation[48]. Le premier réflexe de l’expert-comptable quand il doit traiter un problème est de se dire : que disent les normes à ce sujet? Au-delà des normes à l’aspect forcément généraliste, il convient de balayer l’ensemble de la doctrine professionnelle. S’il s’agit d’un secteur d’activité très spécialisé, il peut s’avérer nécessaire de consulter la documentation professionnelle relative à ce type de métiers pour approfondir ses connaissances. L’utilisation de bases de données et le recours à l’Internet sont de nature à rendre cette étape plus rapide et plus riche.

§3. L’identification des solutions possibles

Pour parvenir à une décision, il faut inventorier les solutions possibles. Selon l’ICCA, « si la certitude est souhaitable, il faut bien reconnaître que, souvent, une question de comptabilité ou de vérification peut se résoudre de diverses façons »[49]. Le professionnel devrait donc éviter de retenir la première solution valable, mais continuer sa recherche jusqu’à ce que la possibilité de solutions de rechange additionnelles soit réduite au minimum. Cette étape consiste donc à envisager toutes les solutions possibles sans exclusion.

§4. L’évaluation des solutions

Cette étape consiste à évaluer les avantages et les inconvénients de chacune des solutions possibles afin d’éliminer les solutions erronées. Selon l’ICCA, le professionnel doit choisir la solution la plus appropriée en prenant du recul et en tenant compte des personnes qu’elle touchera et des conséquences qui en découleront. Il faut donc prévoir les questions que pourraient soulever les clients, les tiers et les autres professionnels. Il ne faut pas négliger la nature fondamentale de la situation en gardant à l’esprit la primauté du fond sur la forme. Enfin, la consultation des pairs peut être utile[50].

1) Prise en compte de l’attente des utilisateurs financiers

Les normes professionnelles font un lien entre la notion de l’importance relative et l’utilisateur des états financiers. L’expert-comptable devra prendre en compte l’importance accordée à la signification du problème par les lecteurs en fonction du contexte de la mission pour évaluer quelle semble être la meilleure solution.

2) Primauté du fond sur la forme

Cette convention comptable doit être prise en compte lorsque l’on porte un jugement de praticien sur la dérogation à un principe comptable généralement admis ayant trait à l’obtention d’une image plus fidèle des comptes à la réalité.

3) Consultation d’un expert

Cette démarche est à distinguer des investigations complémentaires consistant à consulter un confrère pour orienter la démarche relative à la phase de collecte de l’information. Il s’agit à ce stade du processus, de consulter un expert-comptable ou autre spécialiste du domaine relatif au problème soulevé et non un généraliste.

§5. La formulation des conclusions

Après avoir effectué les étapes précédentes, le professionnel doit formuler des conclusions qui permettent de résoudre le problème posé. Selon l’ICCA, la formulation des conclusions peut comporter les étapes suivantes[51] :

–          Revue des données et hypothèses prises en compte;

–          Résoudre effectivement le problème;

–          Faire valoir son point de vue;

–          Obtenir un consensus.

1) Revue des données et hypothèses prises en compte

L’expert-comptable doit s’assurer de la cohérence de son jugement car, comme nous l’avons vu, la vérité repose sur la non-contradiction d’un système de jugement. Il est essentiel pour respecter cette contrainte, que le fonctionnement cognitif décrit ci-dessus ait fonctionné correctement. Les hypothèses et données retenues doivent avoir été passées sous contrôle et évaluées afin de démontrer que la solution retenue est la meilleure. En outre, la justesse d’un raisonnement nécessite non seulement qu’il soit bâti par un ensemble cohérent d’hypothèses mais aussi par l’exactitude des données de départ.

2) Résoudre effectivement le problème

Il est nécessaire que dans la formulation de sa conclusion, l’expert-comptable résolve le problème qui lui a été soumis dans toute sa complexité. Plus ce problème est ardu, plus la rédaction de la conclusion prendra du temps car l’expert-comptable ne pourra négliger aucun aspect tout en restant synthétique pour que sa solution soit facilement accessible.

3) Faire valoir son point de vue

Afin de faire valoir son point de vue, il convient, après s’être donné les moyens d’avoir suffisamment confiance en soi, de mettre en place un argumentaire pertinent et une communication adaptée : il s’agit de convaincre de la justesse de son analyse. Il sera d’autant plus facile de le faire si l’expert-comptable fait preuve de suffisamment de pédagogie pour faire ressortir l’adéquation de sa solution face à la complexité du problème soulevé.

4) Obtenir un consensus

Lors de la confrontation des points de vue, l’expert-comptable ne cherchera donc pas à imposer sa solution à tout prix mais il recherchera un consensus aboutissant à une solution jugée acceptable.

________________________

45 BELKAOUI.

46 Référence à compléter.

47 Référence à compléter.

48 Référence à compléter.

49 ICCA.

50 Référence à compléter.

51 ICCA.


Questions Fréquemment Posées

Quelles sont les étapes du processus de jugement professionnel de l’expert-comptable?

Les étapes du processus de jugement professionnel comprennent la description du problème posé, la collecte de la documentation, l’identification des solutions possibles, l’évaluation des solutions et la formulation des conclusions.

Comment la psychologie cognitive influence-t-elle le jugement professionnel des experts-comptables?

La psychologie cognitive aide à comprendre le processus de prise de décision en mettant en évidence les structures cognitives et en analysant comment l’homme apprend, raisonne, juge et résout des problèmes.

Pourquoi est-il important de décrire correctement le problème posé dans le jugement professionnel?

La description du problème posé est essentielle car elle constitue une opération non courante qui fait appel à un jugement complet, permettant de dégager une problématique précise.

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