Les réseaux professionnels femmes comptables jouent un rôle crucial dans la surmontée des obstacles rencontrés par les femmes dans la profession d’expert-comptable en Tunisie. Cet article propose des mesures concrètes pour favoriser leur intégration et leur réussite tout en préservant leur identité féminine.
Chapitre 2 : Mesures portant sur la vie professionnelle
Si l’augmentation du nombre de femmes dans la profession comptable passe par une volonté des femmes de se donner les moyens de réussir leur carrière professionnelle, il dépend également de la volonté des cabinets d’intégrer les femmes au sein de leurs équipes dirigeantes.
Dans ce chapitre nous essaierons de donner aux consœurs des clés de réussite pour leur carrière professionnelle sans renoncer à leur féminité, et ce, par le développement de compétences relationnelles (section1) et par une meilleure organisation et gestion du cabinet (Section 2).
Section 1 : Développement de compétences relationnelles
Comme nous l’avons déjà montré dans la revue de littérature les obstacles informels relèvent soit des réseaux informels de socialisation masculins (Crompton, 1987) ou du manque des mentors pour les femmes (Scandura & Viator, 1994). Selon (Crompton, 1987 ; Roberts & Coutts, 1992), Ceci conduit à affirmer que même si les femmes ont acquis des qualifications formelles, par exemple les qualifications académiques similaires aux hommes, elles ne pourront quand même pas dépasser un certain niveau hiérarchique car elles n’ont pas acquis les qualifications organisationnelles nécessaires.
C’est pour cette raison qu’il est nécessaire de développer des compétences relationnelles pour surmonter ces obstacles informels en intégrant des réseaux (Sous section1) et en suivant une démarche de mentorat (Sous section 2).
Il est à souligner que l’analyse de l’enquête1, menée auprès des experts-comptables et stagiaires, montrent que les répondants accordent une importance particulière sur la nécessité développer des compétences relationnelles pour surmonter les obstacles rencontrés par les femmes. (Soit 97% des femmes et 87% des hommes).
Sous section 1 : L’intégration à des réseaux
Selon Borgi (2007) les nouveaux diplômés ne peuvent réussir dans le libéral qu’après avoir réussi à développer un réseau efficace. En effet, les réseaux relationnels professionnels constituent le capital humain externe de l’expert-comptable, lui permettant d’avoir les informations pertinentes en temps opportun et de conclure des affaires de qualité dans un marché caractérisé par une offre de service de plus en plus abondante.
En effet, selon l’analyse des réponses de notre questionnaire2, les hommes ayant participés à notre enquête sont plus nombreux que les femmes à utiliser l’intégration des réseaux comme moyen pour développer des compétences relationnelles (soit 60% des hommes contre 49% des femmes.
Importance et nécessité des réseaux
Avant de traiter de l’importance des réseaux relationnels, il convient de les définir.
- Définition de réseau
Le réseau est selon Bourdieu ni un donné naturel, ni « social », mais il est le produit d’un travail d’instauration et d’entretien qui est nécessaire pour la production et la reproduction de ces liaisons dont le but est de permettre l’obtention de profits matériels ou symboliques (Bourdieu, 1980)3
« Les réseaux sont à la fois la route et le véhicule de la montée en puissance des femmes » Avivah Wittenberg-Cox4 (Women’s forum)
Les professionnels d’exception sont ceux qui ont soigneusement choisi les membres de leur réseau relationnel. En fait, « chaque membre du réseau représente une source de connaissance ou d’expertise immédiatement accessible » (Goleman, 1999, p 248).
Le réseau est donc une dimension, une logique et non pas un objet. Il fonctionne en échangeant sans cesse compétences et informations dans un aller et retour efficace.
Dujardin (P.)5 avance quatre critères pour préciser la définition du réseau relationnel :
- L’artificialité : il y a réseau si les relations sont voulues, construites et non simplement subies.
- Le degré de formalisation de la relation (entraide, mobilisation, arbitrage, etc.).
- Le degré de dépendance ou d’autonomie des unités articulées : De quelle liberté d’action jouissent les individus qui y sont pris ?
- La procédure de création du réseau : est-il parti de rien ou de quelque chose et de quoi ?
- Raison du réseautage
Le rapport de l’OCDE consacré à l’entreprenariat féminin souligne qu’appartenir à un réseau renforce la confiance en soi.6
L’étude intitulée « Comment resautent les femmes? » basée sur une enquête réalisée auprès de 310 personnes cadres supérieures menant une carrière internationale et effectuée par EuropeanPWN en 20087, montre qu’une femme cadre d’envergure internationale crée principalement son propre réseau pour deux raisons :
- raisons sociales/personnelles (pour rencontrer de nouvelles personnes (78%), pour son développement personnel (64%)),
- raisons professionnelles (pour développer ses activités (74%), rencontrer des nouveaux clients ou des clients potentiels (66%)).
Selon EuropeanPWN, cette fracture entre social/professionnel est la même dans tous les pays. Elle disparaît cependant pour les femmes interrogées non salariées (professions libérales, chefs d’entreprises, indépendantes), dont les priorités s’équilibrent parfaitement entre raisons sociales/personnelles et raisons professionnelles. Le graphique n° 9 ci-contre illustre la situation.
Graphique n° 9 : Les raisons du réseautage8
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1 Voir question 26 de l’annexe 7. ↑
2 Voir question 27 en annexe 7. ↑
3 Bourdieu, P , Le capital social, Actes de la recherche en sciences sociales, vol. 31, janvier, 1980, pp. 2-3. ↑
4 Avivah Wittenberg-Cox, fondatrice du réseau EuropeanPWN et de l’agence 21st, coauteur avec Alison Maitland du livre « Womenomics ». ↑
5 Dujardin (P.), « Du groupe au réseau », CNRS, page 25. ↑
6 OCDE, L’entreprenariat féminin : questions et actions à mener.. Istanbul, juin 2004. ↑
7 EuropeanPWN, 2008. ↑
8 Source : EuropeanPWN, 2008. ↑