La lixiviation de l’oxyde de zinc par des acides organiques a été étudiée pour optimiser la récupération du ZnO à partir de catalyseurs ZnO/Al2O3. Cette approche hydrométallurgique, utilisant des lixiviants naturels, vise à réduire l’impact environnemental tout en améliorant l’efficacité des processus de recyclage.
Chapitre V
Etude de la lixiviation de l’oxyde de zinc par les acides organiques
Introduction
Les métaux jouent un rôle important dans le développement industriel, ils sont soit extraits de la croûte terrestre soit recyclés après usage. De nouvelles voies pour le recyclage des métaux sont continuellement étudiées non seulement pour abaisser les coûts, mais aussi pour prévenir la pollution de l’environnement. Le zinc est l’un des métaux les plus couramment utilisés dans l’industrie sous forme oxyde, sulfure ou chlorure.
L’oxyde de zinc est utilisé dans les pneus en caoutchouc, dans les peintures sous forme de pigment blanc, dans l’émail de céramique, comme base opaque en cosmétique et en catalyse [1-4]. À l’heure actuelle, environ 70% du zinc produit provient de minerais extraits et 30% de recyclage. La méthode hydrométallurgique est la plus largement utilisée pour traiter et recycler le zinc [5-10] utilisant des acides minéraux tels que HCl, H2SO4 et HNO3.
L’acide sulfurique est préféré aux autres acides comme lixiviant à cause de sa faible corrosivité et son faible coût [11-16]. Cependant, cet acide fort peut dissoudre les impuretés indésirables donnant lieu à des post-traitements généralement coûteux. Les acides organiques ne sont pas habituellement utilisés comme agents de lixiviation en raison de leur faible efficacité de dissolution comparés aux acides minéraux, cependant leur éco-compatibilités les rend intéressants du point de vue environnemental.
Ces dernières années, la recherche scientifique s’oriente de plus en plus vers l’utilisation des acides organiques pour l’extraction des métaux sous des conditions modérées. Tzeferis et Leonardou [17] ont étudié la dissolution du nickel et du fer à partir de minerais par des acides minéraux et organiques. Ils ont trouvé que parmi les acides organiques utilisés (acétique, citrique et oxalique), c’est l’acide citrique qui a été le plus efficace pour l’extraction du nickel et qu’il était même meilleur que l’acide sulfurique pour les réactions de longue durée.
Marafi et Stanislaus [18] ont étudié la récupération des métaux précieux (Mo, V, Ni) du catalyseur d’hydrotraitement épuisé par l’utilisation de deux acides, un acide inorganique (acide sulfurique) et un acide organique (acide citrique). L’acide citrique a été plus efficace que l’acide sulfurique. Il semble aussi d’après la littérature que dans le cas de composés carbonés, l’utilisation des acides minéraux peut conduire à la formation de CO2 assez rapidement et constituer un danger dans les réacteurs [19].
Dans les traitements hydrométallurgiques, la possibilité de récupérer les métaux ou les oxydes métalliques dépend de leurs réactivités chimiques. Lorsque le métal ou l’oxyde traité est connu pour être facilement soluble alors il semble plus approprié d’utiliser un lixiviant moins puissant et plus respectueux de l’environnement car c’est un produit naturel.
C’est le cas des acides organiques testés dans ce travail. En effet, les acides organiques de faible poids moléculaire, tels que l’acide citrique, malique, acétique, lactique et l’acide oxalique sont présents naturellement dans les aliments et les sols. Ces composés sont libérés par les racines des plantes dans la rhizosphère et qui, grâce à des réactions de chélation, permettent la dissolution de minéraux présents dans le sol facilitant ainsi leur absorption par les plantes.
Ces acides sont également formés au cours de la digestion anaérobie des déchets organiques et peuvent de la même manière accroître la mobilité des contaminants métalliques présents dans les sols [20].
Dans ce travail la faisabilité de l’utilisation de quatre acides organiques en tant que lixiviants dans la dissolution de deux oxydes métalliques (ZnO et CdO) a été étudiée. Ces acides sont : l’acide citrique C6H8O7, acétique C2H4O2, ascorbique C6H8O6 et lactique C3H6O3. Ces acides ont été choisis à cause de leur disponibilité et leur large utilisation dans l’industrie agro- alimentaire mais aussi à cause de leur faible coût de fabrication.
Cette faisabilité se traduira en termes de temps de lixiviation (qui ne doit pas être très long) et d’efficacité de lixiviation (une lixiviation totale en un temps cours est le but recherché). Pour cela différentes conditions opératoires telles que la concentration des acides, la vitesse d’agitation, et la température ont été testées afin d’optimiser les rendements de lixiviation.
Dans ce chapitre la première partie sera consacrée au comportement de l’oxyde de zinc (ZnO) seul, ensuite supporté par l’alumine (α-Al2O3) dans le but d’étudier l’effet du support, s’il existe, sur la dissolution du ZnO. La cinétique de dissolution a été examinée par l’utilisation du modèle cinétique développé dans le chapitre précédent.
Matériels et produits chimiques utilisés
Le dispositif expérimental utilisé pour la réalisation de cette étude au niveau du laboratoire est représenté sur la figure V.1. Ce dispositif est composé comme suit :
- Bain marie
- Thermoplongeur modèle « TECTRON BIO »
- Agitateur magnétique modèle « JANKE&KUNKEL »
- Ballon de 250mL
- Réfrigérant à boule
[10_img_1]
Source : URL
[10_img_2]
Source : URL
3
4
1
5
2
Fig. V.1. Dispositif expérimental utilisé pour la dissolution de l’oxyde de zinc.
1-Thermoplongeur, 2-plaque d’agitation magnétique, 3-Réfrigérant, 4-Réacteur en verre, 5- Bain marie.
L’analyse de la surface du solide préparé a été réalisée par un microscope électronique à balayage « MEB (JEOL, Model JEOL-5410) et par DRX (Siemens D-500 powder X-ray diffractometer). L’acide citrique monohydrate (99,5%, Riedel de Haën), l’acide lactique L(+) (90%, Riedel de Haën), l’acide acétique (100%, Riedel de Haën), et l’acide ascorbique L(-) (99%, Sigma Aldrich) ont été utilisés tels quels. Les sels NaCl (99,5%, Biochem), Na2SO4 (99%, Sigma-Aldrich) et NaNO3 (99%, Fluka) ont été utilisés pour étudier l’effet des anions sur la dissolution. L’eau distillée a été utilisée pour préparer les solutions aqueuses.
Préparation de l’oxyde de zinc seul (ZnO) et supporté (ZnO/Al2O3)
L’oxyde seul ZnO et l’oxyde supporté ZnO/Al2O3 ont été préparés au laboratoire. L’oxyde de zinc ZnO a été préparé en calcinant une quantité de nitrate de zinc (Zn(NO3)2.3H2O, 98%, Fluka) imbibée avec un peu d’eau distillée dans un four à moufle jusqu’à 500°C avec une vitesse de chauffage de 100°/h. Le produit obtenu est une poudre de couleur blanc jaunâtre.
L’oxyde de zinc supporté 5%ZnO/Al2O3 a été préparé en utilisant la méthode d’imprégnation humide dans laquelle une quantité du précurseur (Zn(NO3)2.3H2O, 98%, Fluka) correspondant à la préparation de 5% ZnO/Al2O3 (mole/mole) a été intimement mélangée avec le support (Al2O3, type alpha).
Ensuite une quantité d’eau distillée est ajoutée afin de dissoudre le précurseur du zinc sur le support. Le mélange a été calciné dans un four à moufle à 500°C avec la même vitesse de chauffage. Le produit obtenu est une poudre de couleur blanche. Les deux solides ont été caractérisés par DRX et par microscopie électronique.
300
Al2O3
Al2O3
Al2O3
Al2O3
Al2O3
Al2O3
Al2O3
Al2O3
ZnO ZnO
Al2O3
ZnO
250
200
Intensité
150
100
50
0
10 20
30 40 50 60 70
2 theta
(a)
[10_img_3]
Source : URL
100µm
(b)
Fig. V.2. Spectre de diffraction des rayons X (a) et microscopie électronique à balayage (b) de l’oxyde de zinc supporté ZnO/Al2O3
800
ZnO
700
600
500
400
Intensité
300
200
100
0
10 20 30 40 50 60 70 80 90
2 theta
(a)
[10_img_4]
Source : URL
100µm
(b)
Fig. V.3. Spectre de diffraction des rayons X (a) et microscopie électronique à balayage (b) du ZnO
Dans le cas de l’oxyde supporté, le spectre DRX montre des pics appartenant à l’alumine de type alpha (2θ = 25,5 – 35 – 38°) et des pics de faible intensité appartenant à l’oxyde de zinc (Fig.V.2). La mesure de la surface spécifique du catalyseur n’a pas donné de résultat vu la grande cristallinité du support.
En effet, l’alumine de type alpha est obtenue après calcination du nitrate ou de l’hydroxyde d’aluminium à haute température (1200 °C) ce qui génère une très faible porosité de l’oxyde obtenu et par conséquent une très faible surface spécifique. La microscopie électronique montre des particules d’environ 60-80 microns de dimension. L’analyse par DRX de l’oxyde seul montre les pics correspondant au ZnO (2θ = 31,5 – 34,1 – 36°). Cette forme est appelée la zincite. L’image MEB du ZnO montre la formation de cônes à plusieurs facettes formant des agglomérats de quelques 300µm de dimensions.
[10_img_5]
Source : URL
Fig. V.4. Photos des deux solides pulvérulents préparés. A gauche le ZnO, à droite le ZnO/Al2O3
Titrage du zinc par complexation
La détermination de la concentration du Zn2+ dans la solution après attaque acide de l’oxyde de zinc est réalisée par dosage complexiométrique. Cette méthode utilise le sel dissodique éthylène diamine tetracétique comme complexant, nommé aussi Titriplex III. Ce dernier, lorsqu’il met dans une solution contenant des ions bivalents, ce complexant se lie par substitution pour former des complexes stables de type chélates.
La procédure du dosage s’effectue comme suit : on ajoute à 1 ml de la solution à analyser 1mL d’un tampon ammoniacal 10, plus une pincée du Noir Eriochrome T (NET); un indicateur coloré préparé par trituration avec le chlorure de sodium. L’addition de l’indicateur à la solution donne une coloration violette indiquant la présence des ions Zn2+.
Une fois le Titriplex III ajouté, il commence par complexer les ions de zinc libres et finit par arracher les ions déjà complexés par le NET. L’indicateur donne alors à la solution une coloration bleue [21]. On note le volume du Titriplex III utilisé. Les dosages sont répétés au minimum 3 fois et la moyenne des valeurs est calculée.
Mise en solution des solides
Dans une première étude, nous allons présenter les résultats de la dissolution du ZnO seul par les quatre acides organiques afin de tester leur efficacité. Le meilleur acide sera par la suite utilisé pour la dissolution du ZnO supporté par l’alumine afin d’étudier l’effet du support.