Cet article révèle les implications politiques des changements climatiques sur l’insécurité des nomades de la commune rurale de Gargando. Comment la raréfaction des ressources naturelles exacerbe-t-elle les conflits entre nomades et agriculteurs ? Découvrez des solutions durables face à cette crise croissante.
Chapitre 5 : Conséquences du phénomène
- Aperçu sur les impacts des changements climatiques sur les secteurs clés
Le Mali, à l’instar des pays sahéliens, a toujours subi la variabilité climatique se traduisant par une alternance de périodes sèches et humides.
Les périodes sèches se caractérisent, sur le plan pluviométrique, par une faiblesse des précipitations par rapport à la normale 1961-1990. Le phénomène qui en résulte est la sécheresse dont les effets néfastes sont, entre autres, l’insuffisance des ressources en eau, la destruction des ressources forestières, l’assèchement précoces des mares et lacs, la diminution des ressources halieutiques, la dégradation de l’écosystème.
Les secteurs économiques importants dont l’agriculture sont vulnérables à la sensibilité courante du climat, avec des impacts économiques énormes. Cette vulnérabilité est aggravée par des défis de développement existants comme pauvreté endémique, avec accès limité au capital, y compris des marchés, infrastructures et technologies ; dégradation d’écosystèmes ; et désastres et conflits complexes.
- Le changement du climat se traduit par la réduction de la durée de la période de végétation.
- De fortes valeurs de l’évapotranspiration potentielle (ETP) en raison des températures élevées, des humidités relatives faibles et des vents forts,
- La persistance des sécheresses à partir des années 1970 entraînant des déficits pluviométriques assez importants et une évolution des isohyètes vers le sud, ce qui fait que la migration est devenue de plus en plus une stratégie face à ces nouvelles conditions climatiques et environnementales précaires.
- Une répartition aléatoire et inéquitable de la pluviosité en début de la saison des pluies. La pluviométrie moyenne annuelle est très variable du Nord au Sud.
- Un rayonnement très fort durant toute l’année avec des températures moyennes peu différenciées.
- Une augmentation des températures du Sud-Ouest vers le Nord-Est avec des maximales relevées au cours de l’année pouvant atteindre ou dépasser les 45°C tandis que les minimales sont rarement en dessous de 10°C.
- Une décroissance régulière de la quantité de pluie, et une grande variation spatio-temporelle.
- Des lignes de grain caractéristiques du Sahel axées du Nord au Sud sur une distance de 500 à 750 Km s’accompagnant souvent de vents forts et de pluies abondantes parfois catastrophiques.
D’après le dernier rapport du GIEC (IPCC, 2007), Les impacts de la variabilité et des changements climatiques sur les écosystèmes de la région sahélienne sont sans équivoque. Les secteurs les plus touchés sont l’agriculture, l’élevage et les ressources en eau. Selon ce rapport, il faut s’attendre en Afrique de l’Ouest à des conditions climatiques de plus en plus difficiles (sécheresses, températures plus élevées…) et à une baisse de la disponibilité des ressources en eau. Dans cette zone sahélienne, le processus de changement climatique se traduira surtout par une augmentation de la fréquence des épisodes de sécheresse.
Les formations naturelles ont subi de profondes modifications, dues essentiellement à l’aridité du climat, aux sécheresses successives et surtout aux activités humaines. Leur dégradation s’est accentuée avec l’accroissement de la population urbaine qui engendre une demande plus élevée des villes en bois énergie.
Les enjeux sur le secteur agro-pastoral sont donc importants pour les pays sahéliens car la population agricole atteint 50 à 80% de la population totale selon les pays, contribue entre 25 et 30% de leur PIB et la consommation (OCDE/CSAO, 2008) de céréales contribue pour une part allant de 80 à 85% des besoins caloriques de la population. Face à ces enjeux, il devient important d’anticiper la réaction des agriculteurs dans un contexte de changement climatique.
Impacts des CC sur l’agriculture
L’Afrique a été décrite en tant que grand retardataire du monde dans le progrès technologique dans le secteur de l’agriculture (Sachs et autres, 2004).
L’impact du changement climatique sur les réserves alimentaires mondiales est l’un des effets les plus préoccupants du phénomène. Le pire des scénarios imaginés prévoit la baisse drastique de la production des céréales dans la région sahélienne de l’Afrique.
L’accroissement des températures et la variabilité des pluies représentent une menace sérieuse pour le développement agricole17 du globe, mais plus fortement encore des pays du Sahel et risque de compromettre les efforts déployés par ces pays pour atteindre la sécurité alimentaire. Des études récentes du CILSS/Agrhymet (Sarr et al. 2007, AGRHYMET, 2009) ont montré que les rendements des cultures comme le mil/sorgho baisseraient de plus 10 % dans le cas d’une augmentation des températures de + 2°C.
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17 L’étude de l’impact est réalisée par le Dr. Benoît SARR, et le Dr. Seydou TRAORE, tous deux du Centre Régional AGRHYMET pour la revue mensuelle qualifiée d’édition spéciale.
D’ici à 2020, selon M. Ehrhart, les changements climatiques auront contribué au stress hydrique, à la détérioration des terres, à la diminution du rendement des cultures et à l’accroissement du risque d’incendies de forêt, ce qui provoquera une diminution de 50 pour cent de la productivité agricole. Cela se traduira, a-t-il ajouté, par des pénuries graves de vivres et d’eau, et les populations touchées subiront de fortes pressions qui les inciteront à migrer.
Les changements climatiques seront susceptibles de réduire la durée de la période de végétation avec comme conséquence la baisse de la production agricole.
Les réductions projetées du rendement dans quelques pays pourraient être plus de 50% d’ici 2020, et les revenus nets de récolte pourraient tomber près de 90% à l’horizon 2100, les petits exploitants étant les plus affectés. Ceci compromettrait la sécurité alimentaire dans le continent.
Avec les CC, les rendements de l’agriculture pluviale ont pu être réduits de jusqu’à 50%. Concernant la production agricole, y compris l’accès à la nourriture, on projette que des pays africains parmi lesquels ceux de l’Afrique de l’Ouest seront sévèrement compromis par la variabilité et le changement de climat.
Pour le secteur de l’agriculture, la longueur des périodes de végétation et le potentiel de rendement sont prévus de diminuer, en particulier dans les régions semi-arides et arides. Ceci va compromettre la sécurité alimentaire et aggraver la malnutrition dans le continent.
On projette que des approvisionnements alimentaires locaux sont négativement affectés par les ressources halieutiques décroissantes dans de grands lacs dus à l’augmentation des températures de l’eau de montée, qui peuvent être aggravées par des pêches excessives continues. Le coût d’adaptation pourrait s’élever au moins à 5-10% du produit intérieur brut (PIB).
Les nouvelles études confirment que l’Afrique est l’un des continents les plus vulnérables à la variabilité de climat et au changement en raison des efforts de multiple et de la basse capacité adaptative. Les niveaux faibles de l’innovation technologique et du développement d’infrastructures dans le résultat de l’Afrique dans extraction des ressources naturelles pour les agréments essentiels tels que l’eau propre, la nourriture, le transport, l’énergie et l’abri (Sokona et Denton, 2001). De telles activités dégradent l’environnement et composez la vulnérabilité à une gamme des efforts, incluant effort climat-connexe.
A ces effets physiologiques négatifs sur le potentiel de production agricole, s’ajoutent d’autres facteurs également liés au changement climatique comme la dégradation de la qualité des sols consécutive à la déforestation, le déboisement, l’érosion, la salinisation des terres côtières, des eaux souterraines et de surface du fait de l’élévation du niveau marin et la pollution de l’eau.
Le prélèvement de bois à des fins énergétiques estimé à plus de 7 millions de tonnes /an amplifie davantage la perte de la diversité biologique. L’exploitation pour des fins artisanales et industrielles de certaines espèces entraîne des perturbations dans la dynamique des peuplements.
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Aussi, l’élévation de la température est favorable à l’augmentation du taux de fécondité et de croissance des ennemis des cultures et à l’extension de leurs aires géographiques. En conséquence, on peut s’attendre à une extension des zones arides et semi-arides, une réduction des surfaces propres à l’agriculture et du potentiel de production agricole rendant ainsi difficile l’accès à la nourriture dans toute la zone sahélienne.
Impacts des changements sur le pastoralisme
La baisse des précipitations dans les régions sahéliennes reconnue comme zones de pastoralismes par excellence entraîne à la fois un problème 18 de sous-production fourragère et un manque d’eau pour l’abreuvement du bétail. Aussi les impacts négatifs sur la dynamique spatiotemporelle des mares, perturbent les axes de transhumance, les sites de campement des éleveurs et l’équilibre des écosystèmes.
Cette situation entraîne une transhumance assez importante caractérisée par un déplacement massif du bétail vers les zones plus humides. Tous ces facteurs concourent à exacerber les conflits entre exploitants agricoles et éleveurs. Par ailleurs, ce nouvel environnement climatique serait favorable à la recrudescence de maladies animales climato-sensibles.
Les sécheresses fréquentes, plus que tout autre facteur, ont contribué à fragiliser davantage les écosystèmes, les rendant plus vulnérables à la moindre perturbation et accélèrent le rythme de dégradation des ressources biologiques.
Les déficits hydriques qui en ont résulté, ont entraîné une réduction de la production primaire, une modification de la structure du couvert végétal et une réduction massive de la faune sauvage et du cheptel.
Des raids de bétail meurtriers ont toujours périodiquement été menés entre groupes d’éleveurs transhumants pour l’accès aux pâturages ou aux points d’eau stratégiques ; certains affrontement pouvant faire jusqu’à une dizaine de morts. Bien que directement liés aux pratiques pastorales et aux conséquences des changements climatiques qui engendrent un climat de plus en plus hostile, ils sont souvent traités en termes identitaires voire instrumentalisés par quelques leaders politiques au sein de débats nationaux fortement marqués par l’ethnicité.
Avant que les conditions ne deviennent difficiles à cause des changements climatiques ces dernières décennies, les pasteurs nouaient des alliances avec les autorités traditionnelles des agriculteurs pour s’approvisionner en céréales et faciliter leurs transhumances et ceci n’est plus possible à cause de la rareté des ressources naturelles.
Cependant, tandis que les agriculteurs ouvrent davantage de fronts de colonisation sur les espaces pastoraux et capitalisent plus dans l’élevage, les pasteurs diversifient leur économie en s’impliquant désormais dans l’agriculture. Cette intégration modifie les termes des échanges socio-économiques, constitue par endroit une contrainte majeure à la mobilité animale, et est à l’origine d’une compétition relativement inédite entre agro-pasteurs et agriculteurs.
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18 Voir le bulletin mensuel (octobre 2010) du centre regional selon par Issa GARBA, expert en pastoralisme, Centre Régional AGRHYMET.
Les changements climatiques ont engendré des nouveaux types de conflits, sur lesquels les institutions traditionnelles n’ont aucune prise, apparaissent avec plus d’intensité.
Ces dernières années, le Nord Mali a connu une crise sans précédent et face aux crises sécuritaires, les pasteurs modifient soudainement leurs parcours vers des couloirs qu’ils connaissent peu, dans lesquels ils ne disposent pas de réseaux sociaux ou d’alliances négociées avec les communautés résidentes, multipliant les risques d’affrontements.
Les CC accentuent la concentration des cheptels et la pression sur les ressources.
Ce dialogue de sourd qui existe entre éleveurs et agriculteurs exacerbe les tensions déjà vives à cause des disputes des terres arables qui sont de plus en plus limitées à cause des changements climatiques sans précédents.
En 2017, des tensions entre les pasteurs de village de Gargando et les agriculteurs de la lac Horo ont éclaté, à cause de la descente des pasteurs de la commune rurale de Gargando plus au Sud dans le horo (suite à une mauvaise pluviométrie) à la recherche de pâturages.
Les changements climatiques avec leur de conséquences ont poussé les pasteurs à s’armer pour protéger leur bétail qui sont pris constamment pour cibles par des voleurs. Cette militarisation des transhumances contribue à l’escalade de la violence, ou du moins renforce le sentiment d’insécurité et l’instabilité dans des zones déjà fragiles. De grands troupeaux sont désormais escortés par des professionnels, lourdement armés, équipés de technologies modernes de communication, qui font fi des codes pastoraux traditionnels et des accords établis localement, et menacent les agriculteurs comme ce
fut le cas très récemment au Faty où les éleveurs armés ont contraint sous la puissance de leurs armes à paître leurs animaux de force dans les champs et ce qui conduisit les antagonistes à un affrontement sanglant.
La récente diffusion d’armes à feu parmi les transhumants fait craindre le trafic d’armes, la banalisation de leur location aux criminels et rebelles, et augmente encore la demande chez les pasteurs. Poussés par l’insécurité, ils ont tendance à s’orienter vers certaines zones grises et espaces frontaliers enclavés, vastes territoires longtemps marginalisés, caractérisés par de faibles densités de population et où les États exercent un contrôle extrêmement faible.
Les pasteurs armés sont difficiles à distinguer des groupes armés, et leurs interactions présumées avec les groupes rebelles les désignent comme protagonistes actifs des conflits.
Cependant, il faut analyser l’adaptabilité s institutions traditionnelles, qui (compte-tenu des changements de climatiques, de la pression démographique et du rythme de renouvellement générationnel des populations de pasteurs) doivent pouvoir répondre aux aspirations des nouvelles générations d’éleveurs, en termes de gouvernance, de services et de représentativité, pour retrouver une légitimité fondée sur de nouvelles compétences et sur leur capacité à dialoguer avec les administrations.
Questions Fréquemment Posées
Quels sont les impacts des changements climatiques sur l’agriculture à Gargando?
L’impact du changement climatique sur l’agriculture se traduit par une réduction de la durée de la période de végétation, une forte évapotranspiration, et une variabilité de la pluviométrie, rendant l’agriculture vulnérable.
Comment les changements climatiques exacerbent-ils les conflits entre nomades et agriculteurs?
Les conflits entre nomades et agriculteurs sont exacerbés par la raréfaction des ressources naturelles due aux changements climatiques, entraînant une compétition accrue pour l’eau et les terres.
Quelles sont les conséquences socio-économiques des changements climatiques dans la région sahélienne?
Les conséquences socio-économiques incluent la pauvreté endémique, l’accès limité au capital, la dégradation des écosystèmes, et des impacts économiques énormes sur les secteurs vulnérables comme l’agriculture et l’élevage.