Comment les écoles coraniques influencent-elles l’insertion des talibés ?

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🏫 Université Aube Nouvelle
📅 Mémoire de fin de cycle en vue de l'obtention du diplôme de Licence professionnelle - Mai 2021
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Les écoles coraniques et insertion des talibés au Burkina Faso révèlent un paradoxe saisissant : malgré leur rôle traditionnel, elles peinent à offrir des solutions durables pour l’insertion socioéconomique. Cette étude met en lumière les initiatives du GTENF, essentielles pour transformer la vie des jeunes en situation précaire.


Les écoles coraniques d’aujourd’hui sont-elles une réponse à l’insertion des talibés

Graphique 6: Les écoles coraniques d’aujourd’hui sont-elles une réponse à l’insertion des talibés

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33%

Oui Non

67%

Source : données de notre étude, novembre 2019

Autrefois, le daara était une école située dans la communauté ou dans un village voisin. Les familles pouvaient aider financièrement le marabout, en échange de l’éducation religieuse pour leurs enfants. Ainsi, les daaras ont d’abord été à la charge de la population locale et responsable devant elle. Leur proximité permettait aussi aux familles et aux talibés de rester en contact étroit, les enfants pouvant rentrer chez eux pour manger, se laver ou nettoyer leurs vêtements.

Les talibés n’allaient mendier que pour apprendre l’humilité et non pour ramener tous les jours de l’argent à leur marabout. Mais au fil du temps, le système des daaras a changé lorsque les marabouts ont migré vers les principales villes. Là, loin des familles des talibés, les marabouts ont perdu tous leurs soutiens.

De plus en plus, ils ont envoyé leurs élèves mendier afin de récolter des fonds pour soutenir les daaras.

Aujourd’hui avec la modernisation, la question qui se pose est de savoir si les écoles coraniques d’aujourd’hui sont-elles une réponse à l’insertion des talibés ?

Les écoles coraniques ne permettent pas une insertion dans le tissu formel tels la fonction publique et le privé. En effet, les curricula des deux enseignements sont très distincts. Il n’y a aucune passerelle entre ces deux enseignements pouvant favoriser l’insertion des talibés à la fin de leur de formation dans un daara.

Au regard de l’analyse posée fort est de reconnaitre que nous devons concilier les écoles coraniques à celles modernes afin de trouver un juste milieu et permettre une connaissance harmonisée pour une meilleure insertion après leur formation. Pourquoi ne pas fusionner ces écoles ?

Les maîtres coraniques devraient les faire faire des activités manuelles (telles que la menuiserie la maçonnerie) afin qu’ils puissent mieux s’intégrer au monde socioprofessionnel. Ils ne proposent pas d’activités pouvant rendre les talibés autonomes après l’école coranique. Cependant, il faudrait que les maîtres mettent en place des stratégies qui orientent les talibés vers l’apprentissage des métiers.

Les maîtres coraniques malgré leur bonne fois à perpétuer la culture islamique en enseignant ces jeunes, ne sont à mesure d’assurer leur prise en charge de qualité ; cette situation est due au faible soutien des familles, des ONG/Associations et de l’État pour garantir le respect des droits de ces enfants/jeunes. À la sortie de cette formation dans les écoles beaucoup sont les maîtres qui n’effectuent pas un suivi rigoureux de l’insertion de ces jeunes d’où le fait qu’ils soient livrés à eux-mêmes après leur formation coranique et chacun doit livrer bataille pour mener sa vie et tous les moyens sont bons…

« À la place des maîtres coraniques qui servaient de boussoles sociales, nous sommes face à des formateurs sans formation (…) simplement mus par des considérations bassement matérielles, qui prennent en otage les enfants (…) et n’hésitent pas à porter atteinte à leur intégrité morale et physique », a disait Ciré Ly, président de l’organisation Action de solidarité islamique au Sénégal.

Somme toute, certains pensent que l’école coranique est une période d’initiation obligatoire. D’autres voient que l’école moderne est la plus bénéfique. La modernisation de l’école coranique vers celle moderne doit passer par : un apprentissage focalisé sur l’apprenant ; une formation basée sur le développement du potentiel des élèves ; l’apprentissage respecte les tranches d’âges et les niveaux intellectuels des apprenants ; le respect des différences entre les apprenants ; le respect échangé entre l’enseignant et ses apprenants (absence de la violence et du châtiment) ; et l’usage de nouvelles technologies. Cela permettra aux élèves à la sortie de cette école de mieux s’insérer dans le monde professionnel.

I.11. Quelles sont les stratégies qu’on pourrait mettre en place, en partenariat avec les écoles coraniques et les associations pour favoriser l’insertion des talibés ?

De façon générale, nous pouvons recenser les propositions suivantes :

  • Une formation franco-arabe (jouissant d’une équivalence du système éducatif burkinabè) qui leur permettrait l’accès à la fonction publique ;
  • Une organisation unique au niveau supérieur qui jouirait d’une voix unique et plus responsable ;
  • Un partenariat avec les autres cultes et ministères et associations du Burkina Faso ;
  • Il faut d’abord faire un recensement général des talibés pour connaître leurs nombres exacts ;
  • Les répartir dans des centres de formations professionnelles selon leur consentement. Les former et les accompagner à leur sortie pour une meilleure installation ;
  • Mettre en place un cadre d’échange entre les écoles coraniques, les associations et l’État ;
  • Mettre à la disposition des écoles coraniques des ressources humaines compétentes dans la formation aux métiers ;
  • Prévoir la création des cantines dans les écoles coraniques ;
  • Encourager le système de parrainage des talibés excellents (la culture d’excellence dans les écoles coraniques) ;
  • Prévoir des Bourses d’études afin de prendre en charge les talibés les plus vulnérables ;
  • Le financement de l’État ;
  • La création des jardins maraichers pour la démonstration des cours et aussi leurs alimentations ;
  • Une stratégie de réforme des contenus de formation alliant éducation religieuse et professionnelle pouvant préparer les apprenants à la vie active ;
  • Inculquer les aptitudes dès le jeune âge à cet effet ;
  • Une stratégie d’éveil de conscience des parents et des adultes encadreurs de ces écoles
  • L’État doit nous aider à mutualiser les connaissances de l’école coranique et celle classique pour permettre aux jeunes formés de tous intégrer la fonction publique comme droit de citoyenneté ;
  • Comme je le disais tantôt le ministère en charge de l’enseignement et les associations qui militent pour la cause des foyers coraniques doivent s’unir pour en compte notre curricula

tout en l’adaptant à celle de l’école française pour permettre à ces jeunes de s’insérer aussi à la fonction publique.

Analyse de la situation de mendicité et des talibés

« La solidarité africaine est légendaire. C’est pourquoi les âmes sensibles ne peuvent rester indifférentes face à un enfant, à une personne âgée ou à une personne handicapée bref à une personne en difficulté qui leur tend la main. La mendicité est un fléau social qui prend de l’ampleur dans nos villes. Mais face à ces diverses formes, on ne sait plus devant quel mendiant il faut manifester sa solidarité. » a déclaré Roger W. Nana.

Le Burkina Faso, État laïque, permet la pratique des différents cultes religieux. Les Burkinabè expriment une certaine tolérance vis-à-vis des talibés, eux-mêmes étant une population cible à qui l’on adresse quotidiennement des sacrifices de tous genres. Cependant, avec la présente de la situation d’insécurité née d’un amalgame entre musulmans et l’islam radical, il y a lieu de contrôler ces talibés, histoire de limiter les préjugés à leur égard d’une part et d’autre part de responsabiliser leurs maîtres.

Cette situation est très déplorable, malgré les nombreuses politiques de prise en charge des enfants talibés et personnes vulnérables, le phénomène ne fait qu’augmenter. Les rues des grandes villes sont bondées d’enfants talibés qui abordent les passants dans la circulation pour mendier. C’est une situation dangereuse, car ils s’exposent à des accidents de la circulation et à des agressions de personnes mal intentionnées.

Aujourd’hui, la mendicité n’est plus liée aux talibés dans nos villes, nous rencontrons également une multitude de formes de cette mendicité qui a pour conséquence les déplacements internes. Plus d’un million de personnes ont été déplacées à l’intérieur du pays en raison du regain de violence au Burkina Faso, d’après les conclusions du Conseil National de Secours d’urgence et de Réhabilitation (CONASUR) du pays dans un rapport d’août 2020. Il faudrait aussi noter selon UNOCHA que :

 la situation humanitaire au Burkina Faso continue d’être préoccupante, dans un contexte marqué par la lutte contre la COVID-19 ;

 2,9 millions de personnes ont besoin d’assistance humanitaire ;

 Plus de 1 049 797 personnes sont déplacées à l’intérieur du pays, réparti dans 257 communes (novembre 2020) ;

 selon l’aperçu des besoins humanitaires, 948 000 personnes ont besoin de protection et 1,5 million de personnes dépendent de l’aide humanitaire en matière de santé ;

 2 512 écoles sont fermées, privant ainsi plus de 350 000 enfants d’éducation32.

Que cela soit pour les talibés, les femmes, les enfants et les personnes âgées, ils sont exposés à plusieurs situations de vulnérabilités, notamment la malnutrition, la faim, la mendicité, l’exploitation économique, mauvais état sanitaire et hygiénique, les pires formes de travail, la traite et le trafic, faible d’affection et attention des tuteurs, etc.

La mendicité et la situation des talibés sont intimement liées. Certaines religions les trouvent éducatifs. De nos jours, certaines forment de mendicité ne sont explicables que par la nécessité de survie (veufs/veuves, orphelins/orphelines, handicap, etc.), souvent par la paresse ou des manifestations psychiques (les caractériels par exemple). Quelle que soit l’explication du phénomène, il y a quatre constats à faire :

 la solidarité s’effrite avec l’esprit de famille nucléaire ;

 l’exploitation de l’homme par l’homme prend une forme pernicieuse avec certains  »enseignants » religieux ;

 l’autorité s’exprime moins avec les principes de liberté et de droits humains ; l’insécurité dans le pays, d’où les déplacements forcés.

Le revers de tout cela, c’est l’implosion de la société et ce sont aussi les déviances qui couronnent le phénomène. Il faut donc impérativement agir sur les quatre constats que nous venons de faire.

Mendier pendant la formation dans les daaras ou foyers coraniques est une façon d’éduquer, de transmettre le savoir religieux. Mais sur le plan pratique, des insuffisances en existent du fait que ce phénomène s’est converti plus ou moins en mendicité. Or l’islam lui-même condamne la mendicité.

32 https://burkinafaso.savethechildren.net/news/journ%C3%A9e-mondiale-de-l%E2%80%99aide-humanitaire-apportons-aux- enfants-du-burkina-faso-l%E2%80%99aide-dont-ils


Questions Fréquemment Posées

Comment les écoles coraniques influencent-elles l’insertion des talibés ?

Les écoles coraniques ne permettent pas une insertion dans le tissu formel tels la fonction publique et le privé, car leurs curricula sont très distincts de ceux de l’éducation moderne.

Pourquoi les écoles coraniques ne favorisent-elles pas l’autonomie des talibés ?

Les maîtres coraniques ne proposent pas d’activités pouvant rendre les talibés autonomes après l’école coranique et ne mettent pas en place des stratégies orientant les talibés vers l’apprentissage des métiers.

Quelle est la solution proposée pour améliorer l’insertion des talibés ?

Il est proposé de concilier les écoles coraniques avec les écoles modernes pour permettre une connaissance harmonisée et d’inclure des activités manuelles pour mieux intégrer les talibés au monde socioprofessionnel.

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