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🏫 Université Frères Mentouri Constantine 1 - Faculté des Lettres et des Langues - Département des Lettres et Langue Française
📅 Mémoire de fin de cycle en vue de l'obtention du diplôme de Master - 2021/2022
🎓 Auteur·trice·s
El Hadef El Okki Amine
El Hadef El Okki Amine

L’usage du latin en presse numérique est analysé à travers une étude comparative des locutions latines dans la presse francophone algérienne, française et québécoise. Cet article met en lumière leur rôle culturel et enrichissant dans le discours journalistique contemporain.


Éléments théoriques

Introduction

Notre étude en traitant de l’usage des locutions latines dans les journaux électroniques francophones, aborde la relation unissant la langue française et son homologue latine, la phraséologie et la presse numérique.

Dans ce chapitre, nous délimitons le champ théorique et conceptuel de cette recherche en présentant les notions de base, les théories et les outils nous permettant d’analyser dans la partie pratique les données récoltées.

Le latin dans la langue française

Aperçu sur la langue latine

L’Académie française définit le latin comme : « La langue parlée et écrite dans la Rome antique, et qui fut la langue de l’Église et des savants en Europe jusqu’à la Renaissance et au-delà ». Une langue qui n’est à sa naissance, au VIIIe siècle av. J.-C., qu’un simple dialecte limité seulement à la région du Latium (Italie). Mais, la création de la ville de Rome en 753 av. J.-C., et l’expansion de l’Empire romain vont permettre au latin de régner sur la majeure partie de l’Europe et sur le bassin méditerranéen grâce à la politique linguistique impériale imposant aux autochtones colonisés l’usage de la langue latine.

Néanmoins, la chute de l’Empire, en l’an 476, face aux tribus barbares favorise l’émergence dans les anciennes colonies d’un latin populaire (vulgaire) mélangé aux dialectes locaux et aux langues germaniques. Un brassage qui au fil des siècles, se concrétise par la naissance de plusieurs langues vivantes contemporaines comme l’espagnol, l’italien, le français, le roumain, le portugais et le catalan. Le latin va dès lors progressivement disparaitre, malgré une revalorisation pendant la Renaissance au XVe siècle, jusqu’à être considéré comme une langue morte.

Usage du latin en presse numérique francophone

Toutefois, le latin continue aujourd’hui à être enseigné en Occident. Il est de surcroît la langue officielle d’un État « Le Vatican », et dispose d’un organisme « l’Académie pontificale de la latinité » dont le rôle principal est d’adapter le latin aux nouvelles réalités modernes en créant des termes comme fábula televisífica (série télé) ou fístula nicotiāna (cigarette) (Yurkina, 2012). Néologismes qui sont plus tard répertoriés dans un dictionnaire italo-latin « Le Lexicon Recentis Latinitatis ».

Une création lexicale latine qui n’est pas l’apanage de cette Académie. Elle est en effet présente entre autres dans les nomenclatures juridiques societas europaea (société européenne), scientifiques et techniques (Llorem Ipsum en informatique pour les pages tests) ou en politique comme pour pax americana (paix américaine) analogisme de pax romana. D’autres néologismes humoristiques et familiers font partie du latin de « Cuisine » ou « Macaronique » tels que pedibus cum jambis (à pied).

Au niveau grammatical, le latin se caractérise par un troisième genre dit « neutre ». Il se distingue aussi du français par ce qui est désigné en grammaire par « les cas » soit « les formes différentes que prennent les noms, les adjectifs et les pronoms suivant leur fonction dans la phrase » (Petitmangin, 1956, p. 3) et par les « déclinaisons » qui consistent à énumérer tous les cas (formes). Il existe ainsi pour les noms cinq types de déclinaisons et sept cas (nominatif, vocatif, accusatif, génitif, datif, ablatif, locatif).

La langue française, une langue deux fois latine

Avec l’Ordonnance de Villers-Cotterêts (août 1539), le français devient l’unique langue officielle du royaume de France. Une langue qui résulte en grande partie de la mutation au fil des siècles du latin populaire (vulgaire) parlé par les soldats romains lors de l’invasion de la Gaule au Ier siècle av. J.-C. Le français est du reste considéré comme une langue « deux fois latine » (Walter, 1997 : 54).

En effet, le vocabulaire français, d’abord issu dans sa majorité de ce latin vulgaire, va connaître une relatinisation, au XVe siècle, pendant la Renaissance, avec la création de mots « savants » provenant du latin classique. Cela explique la présence de doublets dans la langue française, comme avec « étroit/strict » qui viennent du latin strictus.

Néanmoins, à l’inverse des autres langues romanes comme l’espagnol et l’italien, le vocabulaire français d’origine latine subit à travers les siècles « une évolution forte » (Banniard, 1997, p. 39), mais qui épargne plusieurs mots et locutions. Ceux-ci gardant leur forme latine initiale avec parfois une francisation par accentuation.

À signaler, cependant, une différence entre les locutions et les mots. En effet, ces derniers sont généralement lexicalisés, comme le souligne H. Walter (2014, pp. 60-66) qui dresse une liste des cent lexies latines les plus fréquemment utilisées telles qu’« agenda », « tribunal », « forum », « examen », « aquarium »… Des mots qui « n’ont pas toujours gardé en français le sens qu’ils avaient en latin » (Walter, 2014, p. 60).

Les différents latins de la langue française

Le dictionnaire Le Robert 2010, dans sa version numérique compte environ 16 000 termes français d’origine latine (Leclerc, s. d.). Ces mots proviennent de sept (7) sources différentes : le latin classique (10 657 mots), le bas latin (1166 mots), le latin populaire (857 mots), le latin d’Église (419 mots), le latin tardif (600 mots), le latin juridique (98 mots), le latin scientifique (652 mots) et le latin moderne (79 mots).

Aussi, plusieurs dictionnaires et ouvrages évoquent d’autres latins comme le latin scolastique et le latin macaronique. De surcroît, plusieurs langues de spécialité sont latines aujourd’hui. Ce qui confirme l’existence dans la langue française de plusieurs latins parmi lesquels :

Le latin d’Église (ecclésiastique)

Du latin Ecclesia qui signifie « église ». C’est la langue utilisée dans la liturgie catholique. Selon les chrétiens, elle « figurait déjà sur l’écriteau apposé sur la croix du Christ » (Günst Horn, 2014, p. 9) entre l’hébreu et le grec.

Le latin philosophique et logique (scolastique)

Du latin scholasticus qui signifie « école ». C’est la langue employée dans la « philosophie et théologie enseignées au Moyen Âge par l’Université » (Le Robert). Aussi appelée « philosophie médiévale » et qui associe la philosophie grecque et le catholicisme.

Le latin juridique

Il renvoie au latin employé dans le domaine juridique. Il trouve son origine dans le droit romain. C’est une lingua franca qui facilite la coopération ente les pays vu qu’elle élimine « les difficultés de traduction et des querelles linguistiques » (E.S. Mattila, 2002, p. 724).

Le latin scientifique

Une langue de spécialité véhiculaire et sujette aux néologismes. Mais qui comme le rappelle Walter (2014, p. 94) : « N’est ni le latin classique de Cicéron ou de Virgile, ni le latin populaire ». Il s’est développé au XVIIIe siècle, il est utilisé notamment dans les nomenclatures en botanique, en zoologie, en chimie et en anatomie.

Le latin de cuisine ou macaronique

C’est un latin humoristique et familier, comparé à la confection d’« un plat à partir d’ingrédients alimentaires dans une cuisine » (Walter, 2014, p. 111). Il émerge au XVIe grâce au poète burlesque italien Teofilo Folengo (1491-1544) avant d’être employé entre autres par les auteurs français Rabelais (1483-1553) et Molière (1622-1673).

Le latin aujourd’hui comme langue des élites

Plusieurs pays occidentaux continuent à enseigner le latin dans leurs établissements scolaires et universitaires, notamment en France comme option dans les lycées et les collèges. Un libre choix qui selon des statistiques du ministère français de l’Éducation (Gasq & Touahir, 2015, pp. 3-4) est : « Plus souvent fait par les “meilleurs” élèves » et plus fréquent : « Chez les enfants issus de milieux aisés ».

En effet, parler la langue de Cicéron en Hexagone « est non seulement un gage de sérieux, mais la démonstration d’une culture littéraire et historique » (La Rédaction du Figaro, 2017). À ce titre, l’actuel président français emploie régulièrement des locutions latines, surtout rares, lors de ses interviews comme captatio benevolentiae qui signifie « recherche de la bienveillance » (Proust, 2021), ou encore pacta sunt servanda à savoir « les pactes doivent être respectés » (Develey, 2017).

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