L’analyse des insectes nuisibles bois Douala met en lumière les risques phytosanitaires liés à l’exportation de bois, en identifiant les familles d’insectes et en mesurant leur coefficient d’infestation. Les résultats montrent un risque accru pour les bois en grume par rapport aux bois débités.
Risques phytosanitaires
- Catégorisation des organismes
Le tableau suivant illustre la catégorisation de chaque famille d’organisme nuisible :
Tableau 3 : Catégorisation des différentes familles d’insectes retrouvées au Parc du Port de Douala | |||
---|---|---|---|
Ordres | Familles | Organisme de quarantaine (oui ou non) | Contexte |
Hémiptère | Pyrrhocoridae | NON | Polyphage, coprophage et parfois prédatrice |
Coléoptères | Passalidae | NON | Xylophage |
Bostrichidae | NON | Xylophage | |
Staphylinidae | NON | Auxiliaire de culture | |
Tenebrionoidae | NON | Détritivore | |
Cleridae | NON | Prédateur | |
Nitidulidae | NON | Détritivore | |
Chrysomelidae | NON | ORNQ | |
Cerambicidae | OUI | ORQ | |
Curculionidae | OUI | ORQ | |
Orthoptères | Gryllidae | NON | Omnivore |
Isoptères | Termopsidae | NON | Xylophage |
Hyménoptères | Formicidae | NON | Auxiliaire de culture |
Braconidae | NON | Parasitoïde |
ORNQ : Organisme Règlementé non de Quarantaine. ORQ : Organisme Règlementé de Quarantaine.
Discussion
Insectes associés au bois
Les différentes collectes des insectes sur le bois du port de douala a permis d’identifier 05 ordres d’insectes comportant en tout 14 familles d’insecte, les plus nombreuses étant celles des coléoptères qui comptent 9 familles d’insecte.
Ce résultat montre une différence avec les travaux de Dupleix, 2006 qui lors de son analyse a découvert plutôt six (06) familles appartenant à l’ordre des Coléoptères.
Cette abondance de coléoptère sur le bois du parc est due principalement à :
- Les coléoptères comptent le plus grand nombre d’espèces connues que tous les autres groupes soit environ 40% de l’ensemble des insectes connus
- Ils ont une grande capacité d’adaptation que tous les autres organismes
- Les larves des coléoptères sont pour la plupart xylophage, le bois constitue un excellent moyen de dissémination des espèces.
- Leurs élytres qui sont leurs ailes antérieures épaisses protègent efficacement leur abdomen des agressions extérieur d’où leur résistance aux pesticides chimiques.
Le bois est un excellent moyen d’incubation et de dissémination des insectes inféodés au bois. Ces insectes creusent l’écorce du bois mort en profondeur pour y pondre les œufs, ce qui rend leur lutte difficile car le produit n’atteint pas la cible.
De même l’état du parc saturé, le mauvais entreposage du bois, le bois abandonné ne subissant plus de traitement phytosanitaire constituent un réel incubateur d’insectes nuisibles présentant un risque phytosanitaire. Ces éléments peuvent également être la cause de nouvelles infestations du parc à bois.
Les bois en grume de la CEMAC présentant le plus coefficient d’infestation peuvent également être la source de la présence de nouvelle infestation du parc à bois.
Infestations
- En fonction du degré de transformation du bois :
La comparaison des coefficients d’infestation des bois débités et en grumes montre que le bois en grume présente un coefficient d’infestation moyen plus élevé que celui des débités. Les raisons qui expliquent ce phénomène sont les suivantes :
- Le bois en grume possède l’écorce qui est un excellent abri pour les insectes xylophages qui y pondent les œufs, se nourrissent également de l’écorce du bois. Raison pour laquelle le bois débité possédant l’écorce appartenant à la société CUF présente un coefficient d’infestation élevé par rapport à ceux sans écorce du parc à bois.
- Le bois débité est stocké dans les meilleures conditions que les grumes. En effet on observe en général que le bois en grume du parc est stocké dans les eaux stagnantes qui fragilise la structure du bois et favorise le développement des organismes nuisibles.
- Cela laisse aussi à douter de l’efficacité des traitements phytosanitaires par pulvérisation sur le bois en grume du parc à bois du port autonome de Douala. En effet à cause du mauvais entreposage du bois, certaines parties ne sont pas touchées par le produit de même que l’écorce qui sert d’abris aux insectes et les œufs de ces derniers limite l’action des pesticides et favorise le développement des insectes.
Selon la provenance du bois
Le bois en grume de la CEMAC présente un coefficient d’infestation plus élevé que celui du Cameroun. Le bois en grume de la zone CEMAC est traité à l’aide du MAXYL GEO+ qui est un pesticide ayant une rémanence de 60 jours or les traitements par pulvérisation n’étant pas déjà très efficace sur les grumes à cause du mauvais entreposage du bois et la présence de l’écorce, l’efficacité du traitement est encore plus réduit avec une rémanence de 60 jours.
Sur les endroits du bois n’ayant pas été touché, les organismes ont assez de temps pour se développer à nouveau à cause de la fréquence de traitement qui est très longue. Alors que le bois du Cameroun est traité à l’aide de pesticide ayant une rémanence plus courte environ 28 jours en moyenne ce qui permet une fréquence de traitement plus régulière d’où une meilleure efficacité contre les insectes.
Concernant les débités, le bois de la CEMAC et celui du Cameroun ne présentent pas une différence significative de coefficient d’infestation à cause de l’absence de l’écorce et le meilleur entreposage du bois qui augmente l’efficacité des traitements chimiques.
Risques phytosanitaires
- Catégorisation de l’organisme nuisible
En fonction de la liste des organismes de quarantaine publié par l’union européenne il a été comparé les insectes collectés au parc à bois du port de Douala et il en ressort que le parc à bois abrite (02) organismes de quarantaines prioritaire de l’Union Européenne et (01) organisme règlementé non de quarantaine.
Ce qui montre une différence dans les travaux de (Dupleix et al., 2006) qui a découvert juste un organisme de quarantaine (Cerambicydae) au parc à bois. Cette comparaison montre également que, il y’a apparition de nouvelle famille d’insecte au parc à bois du port autonome de Douala ce qui augmente considérablement le risque phytosanitaire.
Conformément à l’article Article VII.2j de la CIPV, « Les parties contractantes surveilleront, du mieux qu’elles le peuvent, les organismes nuisibles et tiendront à jour des informations adéquates sur leur situation afin de faciliter leur catégorisation et la prise de mesures phytosanitaires appropriées. » (Article VII.2j) il est important de notifier ces changements au sein de l’’entomofaune du port de Douala afin d’ajuster les mesures de gestion du risque phytosanitaire et assurer une meilleure qualité des marchandises.
Probabilité d’introduction et de dissémination
A partir des informations sur la biologie de l’insecte, le temps du transport de la marchandise, et la durée de rémanence il est possible d’avoir une idée sur la probabilité d’introduction et de dissémination des organismes de quarantaine.
La probabilité que l’insecte survive lors du transport de la marchandise est encore plus élevée pour certaines famille d’insecte comme le cas des Cerambicydae dont les œufs éclosent après 3 semaines pour laisser place à une larve qui creusent le bois et y vit sur une période de plus de 1an.
Pour ce dernier la probabilité d’entrée est donc très élevée à cause de sa durée dans le bois et la difficulté de lutte de ce dernier. La présence de ces organismes de quarantaines identifiés au parc à bois du port autonome de Douala sur les marchandises constitue un haut risque phytosanitaire pour les forêts du pays importateur, dans l’horticulture et le bois de construction avec une incidence économique importante comme de le cas du Cerambicydé Cordylomera Spinicornis.
Le pays exportateur doit notifier ces organismes.
CONCLUSION, RECOMMANDATIONS ET PERSPECTIVES
Conclusion
Il en ressort de notre étude que :
- L’entomofaune du parc à bois du port autonome de Douala est constituée 5 ordres repartis en 15 familles dont 2 espèces des familles des Cerambicydae et des Curculionidae correspondant aux organismes règlementés de quarantaine prioritaire.
- Le niveau de risque phytosanitaire du port autonome de Douala est à considérer 2 familles d’insectes considérées comme des organismes de quarantaine prioritaire par l’union européenne ont été dénombrés.
- Le bois en grume venant de la zone CEMAC (19%) est plus infesté que celui du Cameroun (11,5%).
- Le bois en grume présente en général un coefficient (31,7%) d’infestation moyen significativement supérieur à celui des bois transformé (4,6%).
Recommandations
Pour le Poste de Police Phytosanitaire
- Effectuer constamment des inspections approfondies du bois en décelant le coefficient d’infestation moyen par marchandise, en collectant et identifiant les pathogènes suivant les essences.
- Veiller à ce que chaque marchandise soit traitée à la fin du temps rémanence du pesticide même dans le cas où la marchandise n’est pas prête à être embarquée dans un avenir proche afin d’éviter tout foyer d’infestation des marchandises.
- Avoir une base de données des organismes qui infestent les marchandises, les catégoriser, et suivre leur évolution avec le temps.
- Soumettre constamment un rapport d’analyse du risque phytosanitaire aux membres de la CIPV en faisant des recommandations pour diminuer le risque phytosanitaire.
- Faire état de la situation de l’état sanitaire des marchandises en faisant aussi des recommandations à la hiérarchie afin de réduire l’exportation des grumes de bois et le bois écorcé qui constituent un haut risque phytosanitaire.
- Proposer la création des parcs uniquement pour les marchandises venant de la zone CEMAC.
L’analyse du risque phytosanitaire doit se faire de façon approfondie comme suit :
- Analyser le niveau d’évolution des infestations en fonction des saisons afin de savoir quel est la saison la plus risquée pour les exportations de bois et prendre de mesures
- Analyser le niveau d’infestation des parcs du Cameroun en général
- Analyser les infestations en fonction des essences de bois, faire des recommandations et aussi ajuster les mesures phytosanitaires en fonction des essences les plus susceptibles aux organismes de quarantaines.
- S’assurer du bon état du produit phytosanitaire.
Pour les exportateurs
- Privilégier l’exportation du bois transformer sans écorces.
- Se rassurer du traitement effectif de la marchandise.
- Signaler la présence d’organisme de quarantaine sur les marchandises pour un meilleur suivit.
Perspectives
- Refaire le même travail en tenant compte des essences forestières et de leur provenance, traitement et la durée d’abattage.
- Faire une étude des insectes associés au bois en corrélation avec les facteurs climatiques.