L’impact de la GRH sur la fidélité est analysé à travers les missions stratégiques de la Gestion des Ressources Humaines à la Caisse des Dépôts. Cet article confronte des résultats d’enquête empirique avec des hypothèses théoriques, mettant en lumière des dispositifs spécifiques de fidélisation des collaborateurs.
ANALYSE DE LA LITTERATURE
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L’influence de la Gestion des Ressources Humaines sur la fidélité des collaborateurs
L’évolution de l’environnement économique, les changements sociaux et les fortes innovations technologiques ont procuré à la fonction RH diverses missions stratégiques importantes. La terminologie « Ressources Humaines » qui s’est construite dans le temps avait fait son apparition dès la fin des années 1980. La fonction GRH prend alors conscience de l’importance d’une gestion de personnel de qualité et adaptable aux diverses transitions que peut rencontrer son organisation.
À la lecture de ce chapitre, nous verrons que la Fonction Ressources Humaines a évolué. Les salariés souhaitent que leurs besoins personnels soient davantage pris en compte afin de concilier vie personnelle/vie professionnelle. Les organisations déploient alors de nouvelles pratiques RH visant à trouver un équilibre entre besoins de l’employeur et attentes des salariés.
Chapitre 1 : La place de l’homme dans l’organisation
Définition et histoire des Ressources Humaines
1.1
Pour connaitre l’origine des Ressources Humaines et ainsi comprendre le lien qui s’est construit avec la fidélisation des salariés, faisons un petit retour dans le passé.
Je vais donc tenter de retracer l’histoire des Ressources Humaines à l’aide de ma recherche bibliographique et en m’appuyant notamment sur la partie « Les temps forts de la fonction RH » d’un article de SCOUARNEC (2005) 1 dans la revue Management & Avenir.
En se basant sur les travaux des auteurs Igalens (1999), Pfeffer (1999) et Thévenet (1999), Aline Scouarnec distingue 5 périodes qui retracent l’histoire de la gestion du personnel. J’y ajouterai modestement ma réflexion personnelle :
Avant 1914, la fonction GRH n’existe pas à proprement parler, car le début du XXème siècle est marqué par les modèles productifs du taylorisme puis du fordisme. A travers ces deux modèles, il n’existe pas de fonction destinée au personnel. La seule préoccupation des employeurs tournait autour de la production efficace et rentable pour l’entreprise. Le seul intérêt vis-à-vis du salarié concernait la main d’œuvre et les quelques aspects rudimentaires et administratifs de ses missions (versement des salaires en espèces, recrutements et départs, formation sur le tas…). L’idée de fidéliser les collaborateurs est donc loin d’être une dimension d’actualité.
1916-1947 : L’origine de la Fonction
Dans un contexte de deuxième révolution industrielle est apparu le courant de pensée classique du management. Dans un premier temps, on s’intéresse aux travaux de Taylor et Fayol qui, à partir de leurs expériences, ont permis aux entreprises de se développer en matière de gestion du personnel.
Fayol, ingénieur des mines et auteur, est considéré grâce à ses travaux comme l’un des pionniers de la gestion d’entreprise et du management. En 1916, lorsqu’il évoque les six grandes fonctions de l’entreprise, il ne mentionna pas explicitement la Fonction Personnel mais avait déjà inclus l’essentiel des tâches de la Gestion du Personnel dans la Fonction Administrative selon Igalens (1999).
Nous définissons la Fonction Personnel comme l’ensemble des moyens humains mis à disposition d’une entreprise pour assurer son bon fonctionnement. Peu à peu, cette appellation sera reconnue car avérée essentielle dans la gestion de l’embauche et de l’affectation selon (Bouchez, 1999)2, et aussi comme étant «un véritable système de gestion intégré du personnel ouvrier » (Guérin et al., 2009)3.
Cette période sera également marquée par un certain nombre de travaux d’auteurs de l’Ecole des Relations Humaines qui apportent des éléments de réponses aux limites des modèles rigides préconisés par des auteurs de l’école classique. On peut définir alors cette école comme le mouvement intellectuel rattaché à l’étude des organisations qui a redonné à l’homme une place centrale dans l’organisation. Ses principaux représentants sont Mayo, Moreno et Lewin. Mayo était l’un des premiers psychologues à s’intéresser à la psychologie du travail et aux conditions de travail, mettant en lumière le fait que la productivité individuelle augmente lorsque les collaborateurs se sentent valorisés. J’en déduis alors qu’il y a eu un impact positif sur l’implication des ouvriers.
1947-1960 : L’agrandissement de la Fonction
Comme le souligne Scouarnec dans 1, cette époque est affectée par les travaux de certains auteurs tels que Lewin (1951), Argyris (1957) ou Mac Gregor (1960) qui ont influencé chacun à leur tour la fonction en charge des hommes dans les organisations. À la suite d’une enquête réalisée par Mac Carthy (1959) et adaptée par Igalens (1999), on distingue clairement trois fonctions en matière de gestion des hommes : Les fonctions traditionnelles, élargies et connexes.
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Tableau 2 : Les trois fonctions selon Mac Carthy (1959), adaptées de Igalens (1999) | |
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Paramètre/Critère | Description/Valeur |
Fonctions traditionnelles | Description non fournie dans le texte |
Fonctions élargies | Description non fournie dans le texte |
Fonctions connexes | Description non fournie dans le texte |
1961-1975 : La période de stabilisation
Jusqu’aux années 1970, on parlait plutôt de « Gestion du Personnel ». Cette période dite de stabilisation se résumait à une simple vision opérationnelle de la paie et de la législation sociale pour une sécurité matérielle. Elle verra apparaître un changement important en matière de gestion : l’informatisation de la GRH.
Ainsi, toujours d’après Aline Scouarnec « cette période se caractérise par une diffusion d’outils inspirés de travaux de la période précédente. Igalens (1999) en identifie essentiellement trois : les démarches de description et d’analyse des emplois, l’enrichissement des tâches et la direction participative par objectif. » La direction participative par objectif c’est le processus qui consiste pour un responsable à fixer au collaborateur des objectifs atteignables en discutant avec lui des moyens et des délais.
1975-2000 : De la Fonction Personnel à la fonction RH
On bascule alors dans une ère nouvelle : on passe de la gestion du personnel à la gestion des ressources humaines et la fonction « Personnel » se transforme en fonction RH. Cette évolution se traduit par un renouveau dans la fonction RH qui adopte de nouvelles méthodes de recrutement, de rémunération, mais aussi de mobilités interne et externe. La fonction RH s’intéresse désormais à la gestion des talents et s’engage à accompagner l’évolution des salariés dans l’entreprise.
La période a mis en lumière les notions de compétences, de savoir-faire en y ajoutant une gestion prévisionnelle des emplois et des compétences « GPEC ».
On s’intéresse attentivement mais doucement à la notion de fidélisation des collaborateurs.
2000- Aujourd’hui :
Alors que les salariés étaient jusqu’ici considérés comme une simple force de travail mise à disposition de l’entreprise, ils sont dès les années 2000 placés au cœur de sa stratégie.
Aujourd’hui, le management des Ressources Humaines est centré sur les collaborateurs considérés comme les clients des RH. On se préoccupe alors davantage de l’équilibre vie professionnelle et vie personnelle des collaborateurs car les entreprises savent que la marge de liberté permet de garder les talents et de les fidéliser à l’organisation.
De nos jours, on parle de « Gestion Stratégique des Ressources Humaines ». Nous verrons dans la prochaine partie qu’une bonne stratégie RH permet de mettre en place des dispositifs qui répondent aux besoins de chaque collaborateur.
La Gestion Stratégique des Ressources Humaines et ses enjeux
1.2
Dans cette partie, nous verrons que le choix d’une bonne stratégie RH est essentielle pour toute organisation. La stratégie des RH peur être définie comme un plan capable de s’accorder avec la politique globale de l’organisation tout en tenant compte des transformations internes et externes de l’entreprise. Elle permet de cibler et d’ajuster les plans d’action d’une entreprise et lui apporter ainsi une vision sur le long terme en liant les enjeux RH à la performance globale.
L’un des enjeux de la stratégie RH qui nous intéresse ici concerne la nécessité pour une organisation de fidéliser ses collaborateurs. L’objectif est de développer le capital humain de l’entreprise et de mener à bien une gestion des talents qui assurera un avantage concurrentiel, compétitif et durable. Pour réussir une gestion des talents efficace, l’entreprise doit investir stratégiquement le champ du recrutement non seulement afin d’attirer les individus les plus talentueux, mais aussi et surtout les former régulièrement et les fidéliser.
Par la gestion efficace du recrutement, de la formation et de la mobilité interne, la stratégie des RH se positionne comme un acteur clé de la réussite d’une entreprise et de la fidélisation des collaborateurs. Il existe en la matière diverses stratégies des Ressources Humaines.
Guérin et Wils (2002) évoquent les modèles stratégiques des ressources humaines qui favorisent l’investissement dans le capital humain. Les deux chercheurs nous exposent d’abord l’idée selon laquelle il existe 4 typologies de stratégies RH proposées, dont celle présentée par Bamberger et Meshoulam (2000) qui se présente selon le schéma ci-dessous :
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Figure 1 : Typologie des stratégies RH selon Bamberger et Meshoulam (2000)
Ce schéma illustre de façon visuelle diverses recherches antérieurs menés par plusieurs auteurs : D’une part, nous avons les travaux de Delery et Doty (1996) ou de Baron et Kreps (1999) qui distinguent les stratégies RH selon la considération accordée à la main d’œuvre.
D’autre part, se trouvent des typologies comme celles de Schuler et Jackson (1987), de Dyer et Holder (1988) et de Snell (1992). Ces derniers auteurs différencient les modèles selon le mode de contrôle de la main-d’œuvre et le degré d’autonomie dans l’accomplissement des tâches.
Pour m’aider à mieux répondre à la problématique du sujet, je m’intéresse au modèle nommé « Partenaire professionnel (commitment) » qui « favorise le développement de la carrière, la dotation interne, la mobilité selon les besoins de l’employeur, le recrutement ciblé, la sélection de type culturel (plutôt que technique), l’accent mis sur l’équité interne, la rémunération au mérite, les avantages sociaux, l’aide extensive aux employés, la communication, les systèmes d’expression et la résolution des conflits à l’interne » (Bamberger et Meshoulam, 2000)4.
En pratique, les Ressources Humaines déploient de plus en plus de moyens afin de favoriser le développement de la carrière des salariés. Dans ce contexte, compte tenu de l’investissement fait par l’employeur à l’égard des collaborateurs, l’objectif de la stratégie RH est de retenir les talents et conserver les compétences au sein de l’organisation.
D’après les auteurs cités ci-dessus, l’employeur considérant ses employés comme des actifs autonomes et détenteurs de compétences, est amené à préserver son capital humain en lui accordant la sécurité de l’emploi.
Ainsi, à travers les deux sections précédentes, nous constatons que les Ressources Humaines ont évolué dans le temps en mettant en place des stratégies visant à considérer les salariés comme un capital qu’il fallait préserver. Ce capital humain qui n’est autre que l’ensemble des collaborateurs qui ont également des attentes vis-à-vis de leur employeur.
Les entreprises mettent alors en place des dispositifs RH leur permettant de s’adapter aux exigences des employés.
Dans la section suivante, il sera essentiel de découvrir les dispositifs RH présentés aux collaborateurs comme une réponse à leurs attentes.
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1 SCOUARNEC Aline, (2005), « Le DRH de demain : esquisse d’une rétro-prospective de la fonction RH », Management & Avenir, 2005/2 (n° 4), pp 111-138. ↑
2 BOUCHEZ Jean-Pierre, « La gestion des ressources humaines : son histoire et son devenir », in D. Weiss (coord.), Les Ressources Humaines, Editions d’Organisation, Collection Références, Paris, 1999, 824p. ↑
3 GUERIN Francis, PIGEYRE Frédérique et GILBERT Patrick, (2009), « La professionnalisation de la fonction RH. Mythes et limites », Revue Française de Gestion, vol 35, n°194, pp 105-121. ↑
4 BAMBERGER Peter et MESHOULAM Ilan, Human resource strategy : Formulation, Implementation, and Impact, Sage Publications, California, 2000, 224p. ↑