Les fibres de palmier pour sols offrent une solution innovante pour améliorer les sols argileux gonflants, comme démontré dans l’étude de cas des sols d’Igana. Les résultats montrent une augmentation significative de la résistance en compression et en cisaillement grâce à leur incorporation.
CHAPITRE 2 :
MATERIAUX, MATERIELS ET METHODES
Generalité
Dans un contexte où les infrastructures sont soumises à des contraintes croissantes, la recherche de matériaux et de méthodes innovants pour renforcer leur résistance est devenue une préoccupation majeure. Parmi les défis particuliers rencontrés, les zones à sols gonflants posent des problèmes significatifs en matière de stabilité et de durabilité des structures.
Face à cette réalité, l’utilisation des fibres de palmiers se révèle être une solution prometteuse. Ces matériaux, issus de ressources naturelles abondantes, offrent des propriétés mécaniques remarquables et une compatibilité environnementale recherchée. Leur intégration dans les matériaux de construction peut ainsi contribuer à renforcer la résistance des infrastructures tout en respectant les impératifs de durabilité et de préservation de l’environnement.
Ce chapitre se propose d’explorer la pertinence et les implications de l’utilisation des fibres de palmiers pour améliorer la résistance des infrastructures dans les zones à sols gonflant. Nous aborderons les méthodologies de mise en œuvre et les résultats attendus de cette approche novatrice à Pobè. Ensuite nous examinerons dans un premier temps les caractéristiques géotechniques spécifiques de cette région, mettant en évidence les défis posés par les sols gonflants et dans un deuxième temps, nous nous pencherons sur les propriétés des fibres de palmiers et leur potentiel en tant qu’agent de renforcement des matériaux de construction. Enfin nous simulerons dans le logiciel le comportement du matériau composite soumis au cisaillement direct.
Procedure expérimental
L’objectif général de ce travail vise à déterminer l’influence des caractéristiques géo mécaniques du sol argileux d’Igana stabilisé par les fibres de palmier. En effet, le comportement des sols argileux devient souvent problématique et l’utilisation des fibres naturelles pour améliorer ces sols ont déjà été mises en œuvre par plusieurs recherches antérieures (R P Munirwan, 2016 ; E R Sujatha, 2016).
Pour mener à bien cette étude, l’identification de l’argile s’avère indispensable. Cette identification passe par la connaissance de ces propriétés physiques telles que les éléments constitutifs du sol, ces caractéristiques physiques (teneur en eau, le poids volumique…), ces caractéristiques granulométriques. D’où les essais physiques qui sont réalisés. Avant les analyses, les échantillons ont été séchés à l’étuve.
A cet effet, pour étudier la répartition des différents grains de notre échantillon, l’analyse granulométrique (par tamisage humide et par sédimentométrie) a été faite respectivement selon les normes NF P18- 560 (1978) et NF P94-057 (1992). La limite de liquidité (WL) a été déterminée selon la méthode du disque de Casagrande et la limite de plasticité (WP) selon la méthode du rouleau.
Ces limites d’Atterberg ont été déterminées en suivant la norme NF P94-051 (1993). La teneur en eau optimale (Wopt) et la densité sèche maximale (δopt) ont été déterminées par l’essai Proctor normal selon la norme NF P94-093 (1999). La teneur en eau optimale est un indice qui a permis de caractériser le comportement d’un sol argileux en présence de l’eau. Aussi, afin d’effectuer une bonne caractérisation, on a déterminé la teneur en matières organiques du sol suivant la norme NF P 94-047. Cette détermination a été effectuée par attaque à l’eau oxygénée (Staljanssens et al. 1975).
A la suite des essais physiques, les essais mécaniques sont réalisés afin d’étudier le comportement de l’argile et du mélange : le tassement de l’argile (intact) sous l’effet d’un effort donné, sa cohérence, sa résistance…). Ainsi, il a été réalisé l’essai œdométrique suivant la norme XP P4 P94-090-0001 exprimé le tassement de l’argile intact sous l’effet d’un massif.
Ensuite, les tests Proctor ont été effectués selon la norme française NF P 94-093 pour déterminer la valeur de la teneur en eau optimale (OMC). L’essai de cisaillement direct et l’essai CBR ont été utilisés pour comprendre l’impact du renforcement par fibres de palmier sur la résistance au cisaillement du sol.
Ces différents ont été réalisés sur tous les mélanges à différentes teneurs en fibres de palmier. L’essai de compression simple, introduit pour la première fois par FENZY (1957), a été réalisé sur 12 éprouvettes suivant (la norme NF EN 13286-41). Et pour finir, il a été réalisé l’essai de flexion à trois points sur des 12 éprouvettes prismatiques de dimensions 16 x 4 x 4 cm3 suivant la norme (NBN EN 1015-11) afin d’étudier le comportement en flexion.
Quant ’à la composition des mélanges étudiés, les teneurs en fibres de (0.00% ; 0,15 % ; 0,3 % et 0,45 %.) ont été choisies en se référant sur les études antérieures, celles menées par (Aijun Chen, Chuanyang Ding). Le mélange des fibres de palmier et de l’argile s’est fait manuellement selon les teneurs en fibres. Cette méthode de traitement, très commune dans les techniques de stabilisation du sol, consiste à mélanger l’argile avec la fibre de palmier avant le compactage.
Les matériaux argile + eau sont d’abord mélangés manuellement. L’homogénéité des mélanges est effectuée pendant 5 minutes. Finalement on a procédé à l’ajout des fibres en faisant le malaxage manuellement. Le matériau est alors mis en place et compacté juste après le malaxage. Pour chaque mélange, 2 kg d’argile ont été prélevés.
La quantité d’eau ajoutée est celle qui favorise la maniabilité nécessaire à la préparation des éprouvettes. En effet, les éprouvettes ont été confectionnées à une compacité proche de l’optimum Proctor modifié et à différentes teneurs en eau soit 19,0% ; 19,1% et 17,2 %. Le moule de forme prismatique de dimensions 16 x 4 x 4 cm3 a été utilisé pour la flexion triaxiale et la compression (NF EN 13286-41).
Les moules prismatiques sont remplis en deux couches .Après les éprouvettes sont conservés en labo à température ambiante pendant 7 jours suivant les jours d’écrasement.
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Figure 9 : Proportion de fibre dans le matériau composite
Source : KOI YEBOU DODO Whylson Johannes, 2024
Présentation des sites de prélèvement des matériaux
Igana est un arrondissement du département du Plateau au Bénin. C’est une division administrative sous la juridiction de la commune de Pobè. Selon le recensement de la population effectué par l’Institut National de la Statistique Bénin en 2013, Igana compte 11848 habitants pour une population masculine de 5585 contre 6263 femmes pour un ménage de 1946 .Il couvre une superficie de 72,798km2 est compris entre 7°1’30’’ et 7°6’0’’ de latitude Nord et 2°40’30’’ et 2°46’30’’ de longitude-Est.
Il est limité au nord par l’arrondissement Towè au Sud par l’arrondissement d’Ahoyèyè à l’Est par la République fédérale du Nigéria et à l’Ouest par l’arrondissement d’Issaba. L’arrondissement d’Igana est composé de 23 localités tel que : Tgbo Iwadjo, Igboroko, Igana Ilè, Assaga Ikpakoto, Abilé Abèdè, Ikpangnikpan, Ihoro, Odjigbon, Igana, Akpaman, Abèkpè Alaga, Eguelou, Kodjèfo, Igbo Odou, Kadjola, Agbélé, Igbo Oko, Igno Ito, Aguido, Ogouba, Oko Ilakpo, Illèmon.
Il a une superficie de 400 km2, représentant 11% de la superficie du département et 0,46% de celle du Bénin. Elle est située dans une dépression médiane qui traverse tout le Bénin d’Ouest à Est située à l’extrémité Nord du département du Plateau.
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Figure 10 : Carte de localisation géographique de la zone prélèvement à Igana
Source : KOI YEBOU DODO Whylson Johannes ; 2024
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a-Case
b-habitation en bois de bambou
Image 5 : Construction Précaire dans la localité
Source : KOI YEBOU DODO Whylson Johannes, 2024
Pathologie des ouvrages réalisés dans les zones argiles gonflantes dans la zone d’étude
Lors du gonflement du sol, des efforts supplémentaires se développent dans la structure des bâtiments causant ainsi une dégradation de l’ouvrage. Les constructions légères sont plus exposées puisqu’elles sont souvent réalisées sans grands moyens techniques et financiers.
La fondation d’un bâtiment repose sur le sol et représente l’ouvrage assurant la transmission des charges de l’ouvrage au sol support. Il convient de la réaliser en suivant les règles de l’art en vue de limiter les désordres précoces dans les bâtiments.
D’après Jacquard et al. (2004) et Tessier et al. (2006) cité par Marie-Chrétien, les habitations les plus touchées sont celles dont les fondations sont situées en surface et jusqu’à 0,80 m de profondeur.
Les déformations de structures sont fonction du type de mouvement du sol et des mouvements différentiels admissibles. Elles sont révélées par des fissures présentant une orientation qui dépend du type de déformation.
L’humidification des sols argileux gonflants provoque l’apparition de déformations dangereuses des bâtiments édifiés sans mesures de protection des sols contre les inondations accidentelles. Il se trouve toutefois que la protection des sols contre l’eau ne donne pas de résultats positifs quand ces mesures techniques ne sont pas bien conçues ou quand les travaux de construction ont été mal exécutés.
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Image 6 : -A : Fissure sur les poteaux ; -B : Fissure sur la forme dallage
Source : KOI YEBOU DODO Whylson Johannes ; 2024
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Image 7 : Image de l’argile en terre d’Igana
Source : KOI YEBOU DODO Whylson Johannes, 2024
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A-fissure sur un poteau
B-fissure sur une forme dallage
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C-fissure sur le mur
D-fissure sur la forme dallage
Image 8 : -A -C: Fissures sur élément porteur ; -B-D : Fissure sur la forme dallage
Source : KOI YEBOU DODO Whylson Johannes, 2024
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A-Poteau incliné
B-Mur incliné
Image 9 :-A : Poteau incliné ; -B : Mur de clôture incliné
Source : KOI YEBOU DODO Whylson Johannes
Ces diverses formes de fissuration se retrouvent un peu partout sur les quelques bâtiments réalisés en matériaux durs dans notre zone d’étude. En réalité les populations optent pour la construction des habitations en paille ou en bois puisque ne maitrisant pas les techniques et précautions idoines à respecter pour la construction en matériaux définitifs sur leur sol.
Matériaux utilisés
Les matériaux qui ont fait l’objet de notre étude sont l’argile gonflantes et les fibres de palmier.
Sols : argile
Les matières premières argileuses qui font l’objet de l’étude ont été prélevées à Igana à une profondeur située entre 1,50 de 1,80 m dont les coordonnées sont les suivantes : latitude 7° 1’9,7572’’ Nord et la longitude 2° 42’16,06572’’Est.
Tableau 2 : Coordonnés géographiques de la zone de prélèvement | |||
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LOCALITE | COORDONNEES GEOGRAPHIQUES | PROFONDEUR DE PRELEVEMENT(m) | |
Longitude | Latitude | ||
IGANA | 2o 42’16,06572’’EST | 7o 1’16,06572’’NORD | -0.80 -1,00 -2,00 |
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A-Image d’extraction de l’argile
B-Sac de prélèvement
Image 10 : -A : Image d’extraction du sol ; -B : Prélèvement dans les sacs
Source : KOI YEBOU DODO Whylson Johannes ; 2024
L’eau de gâchage
L’eau utilisée est celle provenant de la Société Nationale des Eaux du Bénin (SONEB).
Les fibres
Nous avons choisis des palmiers de la localité d’IGANA. Ils produisent chaque année une quantité très importante de sous-produit forme de déchets abandonnés. La palme est le sous-produit le plus disponible des palmiers. Ainsi, l’intérêt de ce travail est de contribuer à la valorisation d’utilisation des fibres extraites de la palme.
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A-Branche de palmier
B-Tige de palmier
Image 11 : Photo -A : branche de palmier ; -B : Tige de rachis
Source : KOI YEBOU DODO Whylson Johannes, 2024
Présentation du matériau fibre
Le matériau de cette étude est des fibres de rachis des palmiers de l’arrondissement d’IGANA .Le rachis est un élément de base de la palme. Elle l’est constituée aussi par le pétiole, les épines et les folioles. Pour préparer les fibres de rachis (fibres de notre étude), on découper le pétiole à part, puis on récolter les folioles manuellement et finalement on découper le rachis en morceaux
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Image 12 : Différente partie de la branche de palmier
Source : KOI YEBOU DODO Whylson Johannes ; 2024
Extraction des fibres
Les fibres sont prises de la même ligne suivant la longueur de la palme. La longueur de chaque fibre est de 40 à 50 cm. La préparation des éprouvettes des fibres pour les essais mécaniques nécessite un traitement plus complexe. L’extraction mécanique des fibres à l’aide d’un outil métallique a été précédée par l’utilisation de la technique de rouissage à l’eau inspirée des travaux de (C. Baley). Cette technique consiste à tremper des morceaux de bois fibreux de pétiole et de rachis dans un bain d’eau pendant une semaine à dix jours. Les morceaux de 30 à 40 cm de bois fibreux de rachis ont été ensuite maintenus dans un sac en plastique noir pendant 30 à 45 jours jusqu’à ce que les champignons et les bactéries soient stimulés sur tous les morceaux de bois.
Cette technique biologique permet de faciliter le processus mécanique d’extraction. Ensuite, on soumet plusieurs fois les fibres obtenues de différent diamètre à un lavage à l’eau distillée et au séchage dans une étuve (BINDER) à une température de 110±1°C pendant une durée de 180 minutes (Djoudi, T).
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Fibre de rachis
Image 13 : image de la fibre de rachis
Source : KOI YEBOU DODO Whylson Johannes ; 2024
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Image 14 : Processus d’extraction de la fibre de rachis
Source : KOI YEBOU DODO Whylson Johannes ; 2024
L’élimination de la matrice végétale (Lignine) de la surface latérale de la fibre a été vérifiée par observation microscopique. La figure 15 présente l’observation microscopique de la surface des fibres avant et après lavage obtenue par le microscope optique (hund type H600 AM)
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Image 15 : observation microscopique de la surface des fibres avant et après lavage par le microscope optique
Source :Djoudi T