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L’empreinte écologique du transport combiné rail-route

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🏫 Université Paris 1 Panthéon – Sorbonne
📅 Mémoire de fin de cycle en vue de l'obtention du diplôme de Master 2 Professionnel - 2009-2010
🎓 Auteur·trice·s
Anna Rollier
Anna Rollier

L’empreinte écologique du transport est significativement réduite grâce au transport combiné rail-route, qui offre une alternative performante au transport routier. Cet article analyse les avantages environnementaux et économiques de cette modalité, tout en abordant les défis et perspectives de son développement en Europe.


3.3. Le TCRR : réponse aux attentes en termes de développement durable

Nous l’avons compris le transport combiné réduit autant que possible le trajet réalisé par la route, et il offre, pour certains types de marchandises et de flux, une alternative performante au transport tout routier. Les avantages à la clé sont économiques, mais également environnementaux.

3.3.1. L’empreinte écologique

L’empreinte écologique mesure la charge qu’imposent les humains à la nature. C’est un outil comptable, développé depuis les années 1990 par William Rees et Mathis Wackernagel. Il mesure la superficie du sol et de l’eau nécessaire pour répondre durablement à la consommation de ressources, et aux besoins d’absorption des déchets d’une population.

Autrement dit, ce calcul montre le degré de dépendance entre une population et ses importations extérieures de ressources. Il permet de savoir si la productivité de la nature sera suffisante pour satisfaire les attentes de tous les humains1.

En moyenne, la surface de la planète disponible par habitant est de 1,9 hectare. Les ressources de 5 planètes seraient nécessaires pour poursuivre le mode de développement américain, et celles de trois planètes pour le mode de développement européen2.

Le planisphère ci-dessous représente l’empreinte écologique de l’ensemble du globe en 2003. Les couleurs indiquent le nombre d’hectares nécessaires à chaque pays au rythme actuel de la consommation des habitants. Rapportée à l’empreinte écologique mondiale, la taille de chaque pays est proportionnelle à sa propre empreinte écologique.

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Source : WWF (parue dans Le Monde du 24 octobre 2006)

Figure 2

On remarque sur cette carte que l’empreinte écologique évolue en fonction du développement des pays, et donc en fonction du niveau de vie des habitants. On sait, par exemple, que celle des pays les plus riches est jusqu’à 20 fois supérieure à celle des pays pauvres. L’empreinte écologique semble aussi augmenter plus vite que le niveau de développement : celle d’un américain est plus de deux fois plus élevée que celle d’un européen de l’Ouest, alors que le développement est quasiment le même dans ces deux régions. Donc à partir d’un certain niveau, les pays se développent peu alors qu’ils réalisent d’importants efforts en « dépensant » beaucoup. On dit que l’impact est exponentiel sur l’environnement.

Il faut donc au niveau local, tant qu’au niveau global, réduire l’empreinte écologique. Les actions mises en œuvre par les Etats tiennent de plus en plus compte de cette empreinte, pour en limiter les effets négatifs. Le secteur des transports est particulièrement concerné par certaines mesures, c’est ce que nous allons voir maintenant.

3.3.2. Les mesures concernant le secteur des transports

Le secteur des transports, tel qu’il est organisé actuellement, émet de grandes quantités de gaz à effet de serre (GES). Le transport route est le plus polluant : un camion émet en moyenne 164 grammes de CO2 par kilomètre.

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Le transport ferroviaire en émet trois fois moins, il constitue ainsi un enjeu majeur pour la réduction des émissions de GES. D’ailleurs, dans sa dernière étude intitulée « Les perspectives de l’environnement en 2030 », l’OCDE montre combien il est important de lutter contre la pollution atmosphérique et les émissions de GES liées aux transports. Selon ce rapport, la solution résiderait dans la suppression des subventions aux énergies fossiles, et dans la tarification des transports qui devrait tenir compte du coût des atteintes à l’environnement et à la santé, par le biais de la fiscalité des carburants et de la tarification routière3. Ce point est fondamental car si le prix des carburants correspondait à son coût réel pour l’environnement, d’autres modes de transport de marchandises, tels que le TC rail-route, deviendraient beaucoup plus attractifs et rentables économiquement. Tous les rapports aboutissent aux mêmes conclusions et préconisent les mêmes mesures : les pressions fiscales sur les émissions de CO2 sont à envisager, et très rapidement.

La taxe carbone en France :

La volonté d’imposer une taxe carbone au secteur des transports est ancienne mais n’a pas été acceptée : adoptée par le Parlement, elle a été censurée par le Conseil constitutionnel à la fin de l’année 20094. L’idée était d’encourager la modification des comportements des entreprises5, de stimuler des pratiques de consommation et d’achat plus sobres en carbone et en énergie. En effet et nous venons de le noter, les prix actuels des énergies fossiles ne tiennent pas compte de leur impact négatif sur le climat.

Ce projet n’a donc pas été abandonné, mais simplement reporter dans le temps et devra s’appliquer à tous les pays de l’UE : « Nous n’imposerons pas à nos industriels des contraintes si, dans le même temps, on autorise les importations venant de pays qui ne respectent aucune des règles environnementales à inonder nos marchés »6.

Lorsque le projet aboutira, le transport routier de marchandises (TRM) sera très certainement dans l’obligation de payer, au même titre que tous les autres usagers, la taxe carbone. Cette augmentation des coûts, non négligeable7, permettra ainsi un rééquilibrage modal. Selon le président de l’IFIP, « l’empilement des taxes va avoir comme résultat une addition un peu salée sur les prix à la pompe. Cette augmentation va être très, très importante. […] En cumulant l’ensemble des mesures qui s’appliqueront aux carburants en 2010 [si la loi est votée], les prix pourraient augmenter jusqu’à 8,8 centimes d’euros par litre d’essence et 10 centimes pour le gazole »8.

3.3.3. Répondre aux nouvelles exigences des clients et valoriser son image de marque

Comme dans le cas Geodis, les clients précisent de plus en plus dans leurs appels d’offre le fait qu’une proposition allant dans le sens d’une baisse des émissions de CO2 sera privilégiée. En effet, à l’heure actuelle, les entreprises ont l’obligation légale de faire connaître leurs rejets de gaz à effet de serre, et savent que leurs clients sont de plus en plus sensibles aux problématiques de développement durable et d’écologie. Ainsi émettre peu de CO2 leur permet de donner une image positive ; nous allons d’ailleurs nous intéresser à l’importance de l’image de marque.

3.3.3.1. Le développement durable procure une image responsable des entreprises qui en tiennent compte

La marque est « un signe distinctif qui permet au consommateur de distinguer le produit ou service d’une entreprise de ceux proposés par les entreprises concurrentes9». Mais depuis quelques années la marque prend beaucoup plus d’importance pour les entreprises et dépasse cette simple définition.

Dans un contexte où les produits sont de plus en plus similaires, le rôle de la marque ne consiste plus uniquement à identifier un produit, mais à lui conférer une valeur additionnelle. D’autre part, en matière de développement durable, la certification à certaines normes10 va permettre aux entreprises qui y ont recours de faire reconnaître leurs engagements et leurs efforts dans le domaine. Et d’ailleurs, comme l’évolution des contraintes législatives, l’évolution des normes et des labels environnementaux tend à ce que les entreprises modernes en tiennent davantage compte. C’est en effet une manière de donner une image responsable de l’entreprise, lui permettant de se démarquer de ses concurrents.

3.3.3.2. Le développement durable : valorisation de la marque

Les entreprises accordent donc une attention très particulière à la gestion de leurs marques, et le développement durable est un moyen aujourd’hui de les valoriser. Une étude marketing menée par Brown et Dacin en 1997 a montré que la performance sociétale de l’entreprise avait une influence sur leur image de marque, et par ricochet, sur l’image de marque du produit. Ceci nous permet de supposer que les entreprises négligeant le développement durable subiront certainement une détérioration de leur image de marque, c’est-à-dire d’un de leurs actifs, parfois le principal, remettant ainsi en cause leur compétitivité. Les entreprises ont donc tout intérêt à anticiper ce risque pour protéger leur performance, et même leur existence future.

3.4. Le TCRR et les attentes en termes de performance

Les attentes en termes de performance sont facilement compréhensibles : nous allons voir que le TC rail-route obtient une meilleure productivité, une fiabilité, une maîtrise et une sécurité que n’assure pas toujours de transport routier.

3.4.1. Meilleure productivité pour les longues distances

Le TC rail-route permet une meilleure productivité en transportant plus de marchandises avec le même personnel et le même parc. Le train est un mode de transport rapide, qui ne connaît pas la congestion des routes. Et le parcours route étant le plus faible possible, les risques d’encombrement sont réduits.

3.4.2. Fiabilité, maîtrise, sécurité…

Si l’on parle de fiabilité et de sécurité, c’est parce que les trains réalisent les longs trajets en un temps relativement limité. De ce fait, la durée pendant laquelle ils stationnent reste faible voir même inexistante, et les risques de vols sont minimes. Chez Sanofi-Aventis notamment, « les risques de vols pendant l’acheminement des produits pharmaceutiques sont relativement importants, et il sont proportionnellement bien plus importants lors des trajets routiers que lors des trajets ferroviaires. Les marchandises sont moins accessibles, et ne sont jamais laissées sans surveillance, à l’inverse des camions qui restent à l’arrêt, sur les aires de repos par exemple »11.

On parle également de fiabilité et de maîtrise pour le TC rail-route : en effet les risques imprévus de retard liés à des problèmes de circulation, d’intempéries et d’accidents sont moins importants que pour le tout routier. Le TC rail-route propose ainsi des délais performants, avec une régularité horaire : la durée d’acheminement d’un point A à un point B par rail sera connue à l’avance et certaine, alors que par la route uniquement, elle est souvent variable puisqu’elle est fonction du trafic.

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1 Dossier spécial de WWF, Les indicateurs de développement durable, novembre 2007.

2 Mémento sur le développement durable réalisé par le Haut Conseil de la Coopération Internationale, janvier 2005.

3 Payer l’énergie à son coût réel et taxer le CO2 au niveau mondial : des impératifs, 19/05/2008 http://www.notre-planete.info/actualites/actu_1663_payer_energie_cout_reel_taxe_CO2.php.

4 LEMONDE.FR, François Fillon enterre la taxe carbone avec AFP, 23.03.10. www.lemonde.fr/politique/article/2010/03/23/francois-fillon-enterre-la-taxe-carbone_1323228_823448.html.

5 La taxe devait influencer les entreprises, et également les comportements des ménages.

6 Interview du Présidant de la République accordée au Figaro Magazine – source : Nicolas Sarkozy : mon rôle est d’apaiser pour pouvoir réformer, 19/03/2010 – http://www.lefigaro.fr/politique/2010/03/12/01002-20100312ARTMAG00549–nicolas-sarkozy-mon-role-est-d-apaiser-pour-pouvoir-reformer-.php.

7 En effet selon l’UFIP, l’instauration d’une taxe carbone pourrait se traduire par une hausse d’au moins 4 % du prix du litre d’essence.

8 VANNESTE C., Taxe carbone et conséquences pour les routiers et les automobilistes, 9 mars 2010 http://www.christianvanneste.fr/2010/03/09/taxe-carbone-et-consequences-pour-les-routiers-et-les-automobilistes/.

9 Source : http://www.definitions-marketing.com/popup.php3?id_article=289.

10 « La certification est une activité par laquelle un organisme reconnu, indépendant des parties en cause, donne une assurance écrite qu’un produit, processus ou service est conforme à des exigences spécifiées » – Source : http://www.afnor.org/portail.asp?colfond=Vert+Certification&ref=ESP%5FCertification&lang=French.

11 Propos recueillis lors de mon entretien téléphonique avec Roger Rodriguez du service transport, Sanofi-Aventis Winthrop Industrie, 13/04/2010.

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