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Impact du déploiement diplomatique du Cameroun OUA/UA

Impact de la diplomatie camerounaise à l’OUA/UA : Cet article explore l’impact significatif du déploiement diplomatique du Cameroun à l’OUA/UA entre 1963 et 2003, soulignant ses contributions géopolitiques et politico-diplomatiques.

Impact de l’OUA/UA sur le Cameroun: Découvrez comment l’OUA et l’UA ont influencé le Cameroun sur le plan institutionnel, avec des initiatives majeures et des interventions significatives depuis 1974.

Chapitre IV :

Impact du déploiement diplomatique du Cameroun dans les instances multilatérales africaines OUA/UA (1963-2003)

Comme tout déploiement de l’outil diplomatique d’un Etat, celui du Cameroun au sein des institutions régionales africaines a pour objectif la préservation de ses intérêts et de son image de marque. A cela s’ajoute l’unité, la solidarité entre les Etats, le développement et la consolidation de la paix, gage de l’émergence de l’Afrique.

Durant près d’une quarantaine d’années de présence à l’OUA/UA, le Cameroun de par sa diplomatie, y a laissé une empreinte indélébile, en impactant positivement les instances. Ces dernières ont tout aussi eu à influencer de façon positive le Cameroun. La mise en lumière de cette double corrélation à la fois pour le Cameroun que pour l’OUA/UA fera l’objet de la première partie de ce dernier chapitre. Enfin, nous nous arrêterons sur les effets négatifs de cette projection notamment les limites qui ont pollué et enraillé son déploiement sur la scène régionale africaine.

A ce sujet, de nombreux aléas ont été observés dans la participation du Cameroun au fonctionnement des instances et dans sa projection extranationale. La mise en exergue de ceux-ci fera l’objet de la deuxième partie de ce chapitre.

I. Impact positif du déploiement diplomatique du cameroun a l’oua/ua (1963-2003)

Parler de l’impact positif du déploiement diplomatique du Cameroun à l’OUA-UA laisse entrevoir une analyse sous un double angle. D’un côté, nous avons les empreintes laissées par le Cameroun au sein des instances africaines, et vue sous un autre axe, celles-ci ont aussi eu à marquer de manière indélébile l’Etat du Cameroun.

1. Les différentes empreintes laissées par la diplomatie camerounaise à l’oua/ua

Les différentes facettes du déploiement diplomatique du Cameroun à l’OUA/UA sont de trois ordres : au niveau géopolitique, politico-diplomatique, et socio-économique.

1.1. Au niveau géopolitique

Les différentes implications du Cameroun dans la dynamique fonctionnelle de l’OUA/UA ont dans sa globalité contribué à façonner l’image de celle-ci du point de vue géopolitique sur la scène continentale africaine. A ce sujet, plusieurs arguments ont joué en faveur de cette perception.

Depuis le début des années 1970, après avoir évincé l’insurrection upéciste, le pays alors dirigé par Ahidjo a cessé d’être une ‘’diplomatie d’alignement’’ pour s’inscrire résolument dans la dynamique d’une diplomatie d’affirmation.

Malgré sa pluralité, la diversité des paysages, des climats, des peuples et de ses cultures, le Cameroun a laissé une marque indélébile au sein de l’OUA/UA dans l’ensemble, celle d’un Etat épris de paix. C’est cette image du pays qui prévaut sur l’échiquier régional africain et qui a conduit certains pays à signer certains accords de coopération avec le Cameroun touchant les domaines les plus variés tels que la culture, le commerce, les transports et le personnel.

Ceci a poussé tout aussi certains Etats de la sous-région à nouer des relations de bon voisinage avec le Cameroun. A ce sujet, certaines de ces relations ont atteint leur paroxysme dans le cadre de l’UDEAC ou l’organisation des Etats riverains du Lac-Tchad, au sein de laquelle une coopération pratique et efficace a été instaurée.

Il faut dire que c’est surtout l’engagement du Cameroun à la définition, la réalisation et la consolidation de l’unité africaine que découle cette perception positive du Cameroun du point de vue géopolitique sur l’échiquier régional africain.

Son attachement à la solidarité des Etats africains membres de l’OUA/UA peut leur permettre d’atteindre leurs objectifs fondamentaux de la libération totale de l’Afrique, de développement et d’affirmation de la personnalité africaine.

Cette volonté du Cameroun d’affirmation de la personnalité africaine fut une des marques de sa diplomatie, et qui a eu un effet géopolitiquement parlant sur le regard appréciatif du pays sur la scène régionale africaine.

A titre indicatif, la consécration de l’ex-président Ahmadou Ahidjo, chargé par ses collègues africains d’aller présenter ‘’le manifeste de Lusaka’’, à la 24ème session de l’Assemblée générale de l’ONU est une des manifestations de cette image appréciative et en témoigne la marque de confiance qu’ont les Etats africains à l’endroit du Cameroun.

A plus d’un titre également, l’ex-président a été membre du comité des sages ou de conciliation chargé de rechercher des solutions à certains conflits interafricains ou internationaux.

C’est également ce regard positif du Cameroun sur le plan géopolitique africain qui emmène les autres Etats membres de l’OUA/UA à opter son choix sur le Cameroun afin de faire sa première entrée au conseil de sécurité pour y représenter l’Afrique de 1974-1975.

On note aussi que le pays fut choisi par l’organisation continentale pour représenter l’Afrique à la conférence Nord-Sud à Paris de juillet-août 1977.

Le chef de l’Etat Paul Biya est jusqu’ici perçu à l’échelle continentale comme un sage africain, un leader apprécié, écouté et respecté par ses pères et par l’ensemble des dirigeants de prestigieuses institutions comme l’OUA/UA.

Dans l’ensemble, le Cameroun de par sa diplomatie à l’OUA/UA, a impacté positivement, ce du point de vue géopolitique africain la perception des autres Etats à son égard. Etudions maintenant comment dans le volet politico-diplomatique cette diplomatie a contribué à transfigurer l’image des instances.

Au niveau politico-diplomatique

Pour ce volet, durant quatre décennies, le Cameroun a bel-et-bien impacté l’organisation continentale. A ce sujet, de par sa diplomatie, il a favorisé l’établissement des relations bilatérales interafricaines et la création des organisations regroupant les Etats du continent. C’est ainsi que le pays participe à la mise en œuvre de l’Organisation des Etats riverains du lac Tchad (OERT) aujourd’hui CBLT, de même qu’à la création de l’UDEAC. Il est aussi au sein de l’OUA/UA membre fondateur de l’UAM.

De plus, le président Ahidjo a réussi un exploit historique d’imposer successivement deux diplomates camerounais à la tête de l’organisation panafricaine. Il s’agit d’abord de Joseph Nzo Ekangaki (1972-1974) et de William Aurélien Eteki Mboumoua (1974-1978).

De ce qui, le tableau suivant fait état des principaux secrétaires généraux de l’OUA/UA de 1963-2003.

Tableau 6 : Les principaux secrétaires généraux/président de la commission de l’OUA/UA (1963-2003).

Source : tableau réalisé à partir des données tirées du site de l’UA

Au regard de ce tableau, nous pouvons faire comme constat que le Cameroun est quasiment le seul pays en Afrique à avoir eu à placer successivement deux (2) de ses ressortissants comme secrétaires généraux de l’OUA.

En plus, c’est sur la présidence d’un camerounais en la personne de William Aurélien Eteki Mboumoua secrétaire général de l’organisation panafricaine que la totalité des Etats sous domination coloniale portugaise accédèrent à l’indépendance grâce à l’action directe ou indirecte du comité de libération de l’OUA basé à Dar-Es-Salam en Tanzanie. Pendant la même période, l’Afrique du Sud se retrouvait isolée sur la scène diplomatique internationale et africaine.

Entre 1974-1975, l’action engagée par le Cameroun auprès du Groupe africain des Nation Unies sous l’autorité du Président de la 29ème session de l’Assemblée générale de l’ONU, le ministre algérien des Affaires étrangères, Abdelaziz Boutéflika. Cette offensive diplomatique se solda par l’exclusion de l’Afrique du Sud des travaux de ladite session.

Aussi, en 1976, on assiste à un soutien plus marqué de l’OUA pour l’intensification de la lutte armée contre le régime raciste de Pretoria à travers l’action de deux mouvements de libération : l’ANC et le PAC, sous la houlette du Cameroun et de son secrétaire général. Toujours dans le registre de l’impact politico-diplomatique du Cameroun à l’OUA/UA, le pays a eu le bonheur d’assurer la présidence en exercice de ladite institution continentale à deux reprises à travers ses chefs de l’Etat notamment le Président Ahmadou Ahidjo (1969-1970) et Paul Biya (1996-1997).

De ce qui suit, le tableau suivant met en lumière les principaux présidents en exercice de l’organisation panafricaine de 1963-2003.

Tableau 7 : Les présidents en exercice de l’OUA/UA 1963-2003.Source : Tableau réalisé à partir des données tirées du site de l’UA.

Au regard de ce tableau, le Cameroun a eu à occuper deux (2) fois la présidence en exercice de l’OUA. A ce sujet, il n’y a que les pays comme l’Ethiopie, la Zambie, l’Egypte, et le Sénégal qui font mieux. A côté de cet impact politico-administratif de la diplomatie camerounaise à l’OUA/UA, le volet socio-économique mérite tout aussi d’être relevé.

Au niveau socio-économique

Dans l’aspect économique, le Cameroun de par l’entremise de sa diplomatie et du placement de son personnel humain dans l’architecture administrative des instances, a développé au sein de l’OUA/UA, au milieu des années 1970 trois initiatives qui corroboraient parfaitement avec la mandature de ses ressortissants.

En premier, les relations entre l’OUA et d’autres organisations internationales s’intensifièrent, comme l’illustre la mise en œuvre des accords de coopération liant l’organisation panafricaine à la Commission Economique des Nations Unies pour l’Afrique (C.E.A), à l’Organisation Internationale du Travail (O.I.T), à l’Organisation Maritime Consultative Intergouvernementale (OMCI), au Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD), à l’Union Internationale des Télécommunications (UIT), à la Banque Africaine de Développement (BAD) et à l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (OMPI).

En plus, l’OUA organisa conjointement avec la république d’Algérie, la deuxième foire commerciale panafricaine du 1er au 17 octobre 1976. Cette festivité avait permis de mettre en relief l’importance des ressources et des potentialités économiques et énergétiques de l’Afrique. Grâce au Cameroun, il fut créé en 1977, par résolution du Conseil des ministres africains de l’industrie, un centre d’adaptation des projets et de transfert de technologies industrielles. Fait assez rare dans le domaine du développement industriel et technologique de l’Afrique, une somme de 100 000 dollars américains, soit environ 55 000 000 de francs cfa est prélevée sur le budget de l’exercice 1978-1979 et allouée à la création de ce centre.

Troisièmement, il n’est pas très connu des observateurs de la scène économique africaine que le Cameroun a joué un rôle prépondérant dans la genèse du Plan d’Action de Lagos (P.A.L). C’est sous la mandature de William Aurélien Eteki Mboumoua, secrétaire général de l’OUA que ce plan est instauré. A titre illustratif, c’est lors de la onzième session extraordinaire du Conseil des ministres de l’institution continentale réunie à Kinshasa (Zaïre) du 6 au 10 décembre 1976, qu’a été adoptée la Déclaration de Kinshasa.

Il faut noter pour ce qui est du volet social que l’impact de la diplomatie camerounaise à l’OUA/UA est aussi visible par sa préoccupation majeure aux problèmes spécifiques de l’Afrique : la progression de la sécheresse et l’augmentation du nombre de réfugiés qui avait entrainé comme conséquence la paupérisation croissante des populations. A cet effet, c’est également sous la demande du Cameroun que depuis le 20 juin 1975, l’OUA célèbre chaque année la journée du réfugié africain.

L’on a parfois coutume à ne souligner que la façon dont le Cameroun de par sa diplomatie a impacté les instances africaines, en oubliant ou excluant la part d’action de l’OUA/UA au Cameroun.

Impact de l’OUA/UA au Cameroun

Les empreintes laissées par les institutions continentales au Cameroun après une quarantaine d’années de rapports multilatéraux sont de nature appréciative. Celles-ci peuvent se percevoir sur deux principaux angles à la fois socio-politique et institutionnel.

Du point de vue socio-politique

Le premier impact positif de l’OUA/UA au Cameroun dans leur coopération multilatérale peut se voir d’abord par plusieurs visites des personnalités importantes des organes de direction de ladite institution. Etant nombreux, nous allons nous limiter sur les personnalités les plus importantes notamment les secrétaires généraux. A ce sujet, le tableau suivant retrace les différentes visites des secrétaires généraux de l’OUA au Cameroun.

Tableau 8 : visites des secrétaires généraux de l’OUA au Cameroun 1963-1996.
Source : Archives de la direction des affaires d’Afrique (D1) du MINREX.

Au regard de ce tableau, nous pouvons tirer comme conclusion qu’au total, sept personnalités des organes dirigeants de l’OUA ont foulé le sol camerounais à savoir 6 secrétaires généraux et un adjoint.

Ces visites visaient à renforcer du point de vue socio-politique et coopérationnel, les relations entre cette institution et l’Etat du Cameroun. A titre indicatif, lors de sa visite au Cameroun, Idé Oumarou avait été reçu en audience par le président de la République. Au cours de celle-ci, il a remis un chèque comme témoignage de la compassion et de la sympathie de l’OUA aux sinistrés de la catastrophe du Lac Nyos qui survint le 21 août 1986. Cet épisode tragique a causé plus de 1500 victimes parmi les populations de Wum et des environs dans la région anglophone du Nord-Ouest.

En plus de cet aspect, le pays bénéficie aussi d’une aide de l’OUA d’un montant de 1000.000 $ US dans le cadre de la lutte antiacridienne dans les régions du Nord et de l’Extrême Nord. Au-delà de ces multiples actions, l’Institut des Relations Internationales du Cameroun (IRIC) a depuis 1974 un statut d’observateur auprès de l’OUA/UA, avec pour but d’œuvrer pour l’unité africaine. Durant la même année, plus précisément le 15 mai 1974, la Commission philatélique a émis un timbre en commémoration au dixième anniversaire de la création de l’OUA. Ce timbre-poste qui comporte les couleurs et la devise du Cameroun met en lumière des colombes de la paix, ainsi que le symbole de l’unité représenté par une ‘’main jointe’’ auquel le peintre a réussi à donner la forme qui occupe toute la carte de l’Afrique.

Du point de vue institutionnel

L’impact de l’OUA/UA au Cameroun est beaucoup plus perceptible au niveau institutionnel. A ce sujet, le pays abrite sur ses terres plusieurs sièges d’organismes spécialisés de l’institution panafricaine d’une importance capitale.

Il s’agit : de la pôle gouvernance sciences sociales et humanités de l’université panafricaine situé à l’université de Yaoundé I Ngoa Ekelle et à l’université de Yaoundé II Soa ; la base logistique continentale de la force africaine en attente (FAA) ; le rectorat de l’Université panafricaine, le siège du Fonds Monétaire Africain (FMA), le Conseil Phytosanitaire Interafricain (CPI) créé en 1964 ; le Conseil du Sport de l’Union africaine créé en lieu et place du Conseil Supérieur du Sport en Afrique (CSSA).

Le Cameroun est également l’hôte du Centre africain de Recherche et de Formation phytosanitaire (CARFOP) intégré à l’université de Dschang ; et de la Conférence africaine de Décentralisation et de Développement local (CADDEL).

Rendu au terme de cette première partie du chapitre quatre, nous pouvons retenir que le Cameroun a façonné positivement l’OUA/UA, tout comme celle-ci en a fait de même pour le pays pendant une quarantaine d’années. Cependant, plusieurs limites ont contribué un tout petit peu à entacher son déploiement diplomatique dans lesdites instances.

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