Processus d'implantation d’un entrepreneur français aux Pays-Bas

3.3 Dépasser les stéréotypes; la clé du succès ?
3.3.1 Le rôle d’un médiateur lors de l’implantation
Les conditions pour être médiateur
La médiation est « un processus de construction, de réparation du lien social et de gestion des conflits de la vie quotidienne, dans lequel un tiers impartial, indépendant, sans autres pouvoirs que l’autorité que lui reconnaissant librement les partenaires (appelés « médieurs » ou parfois « médiés ») tente à travers l’organisation d’échanges entre les personnes ou les institutions de les aider soit à améliorer, soit à établir une relation, ou de régler un conflit » 167.
Dans la pratique, il s’est avéré régulièrement que la médiation est un concept utilisé, mais pas toujours respecté. C’est-à-dire que les dispositifs qui sont en vigueur pour la médiation ne sont pas toujours observés. Le concept de la médiation est bien décrit, mais il peut se montrer problématique et il est douteux si on satisfait aux conditions dans tous les cas 168.
Premièrement, dans la pratique, il s’est avéré que le tiers qui se trouve toujours au cœur de la médiation est souvent un trompe l’œil et de plus, les qualités exigées manquent souvent. Ce problème est le même qu’il s’est avéré dans les études imagologistes ; cette fois-ci aussi, le degré de vérité et l’objectivité est limité. La pratique a appris que le médiateur est rarement un vrai tiers. En effet, la médiation reste un métier qui est sujet à un des deux parties parmi lesquelles il médie.
Deuxièmement, les autres exigences qui sont en vigueur pour le métier de médiateur sont également problématiques. Dans le domaine de l’indépendance, il faut se demander si quelqu’un– dans ce cas le médiateur – qui dépend de façon financière et fonctionnelle est capable de rester indépendant. Au niveau de l’impartialité, ceci est très difficile aussi, étant donné que l’on est tous des êtres humains. Par conséquent, il est difficile d’établir un discernement personnel, parce que les projections personnelles sont toujours en arrière-plan et ce sont des sentiments qu’il n’est pas évident d’arrêter.
Finalement, la condition que le médiateur doive être sans pouvoir est souvent menacée à cause du fait que les médiateurs ont des pouvoirs officiels quand il s’agit de la médiation institutionnelle. Sinon, il est question d’un pouvoir de décision – dans le cas de la médiation municipale.
Bref, la théorie sur la médiation témoigne d’un pouvoir de dissolution et une vision novatrice, mais dans la pratique, il s’avère que l’on ne peut pas toujours répondre aux critères 169.
Cependant, la médiation peut jouer un rôle important pendant le lancement du e-commerce français sur le marché néerlandais, dans la capacité de reconnaître les différences entre les deux parties et de construire des ponts entre eux. De plus, le médiateur est capable de traduire et comparer les textes et discours impliqués dans la coopération et le lancement et de connecter les éléments isolés qui en feront un ensemble logique et clair. Dernièrement, si le médiateur est capable de respecter les différences, il pourra accepter une attitude éthique.
Le métier de la médiation comme étant une compétence est d’ordre cognitif aussi bien que relationnel : d’un côté, il faut comprendre et analyser les mécanismes qui jouent un rôle dans le processus de médiation et de l’autre côté, on suppose que le médiateur est capable d’une distribution culturelle qui exige de l’empathie et des connaissances, dont des connaissances linguistiques, culturelles et juridiques par exemple. Le médiateur travaille ainsi dans un contexte culturel et linguistique qui lui est étrange et il agit comme un acteur social. C’est lors de son travail que sont créées des conditions qui rendent possible de coopérer ou vivre ensemble.
Avant que l’on puisse être un médiateur, il faut donc répondre à ces exigences. De plus, il faut avoir des compétences interculturelles. Il ne suffit pas de connaître d’autres langues et cultures. C’est la reconnaissance de l’autre comme telle et l’acceptation qu’il y a des différences entre les individus d’origine différente. Ceci ce passe par un processus de relativisations par rapport à la propre culture, ce qui est en effet rare et difficile, mais également le plus important. Par conséquent, le médiateur prend de la distance par rapport à ses propres normes et valeurs et les stéréotypes, qui sont inconsciemment en vigueur.
Or, même si l’objectivité du médiateur est souvent mise en doute, le fait qu’il y a également des compétences interculturelles, rendent la médiation un métier précieux dans, par exemple, les relations bilatérales. De plus, le médiateur peut servir à l’entrepreneur pour mettre de son côté toutes les chances de réussite en lui renseignant par exemple sur les stratégies de communication adéquates.
L’organisation de la communication interculturelle
Le médiateur peut adapter ses connaissances bi-linguistiques et biculturelles à l’organisation de la communication interculturelle. Dans le domaine du e-commerce, il s’agit ainsi de l’adaptation d’un site web qui doit être transformé du français au néerlandais. Cette phase implique non seulement le texte français que doit être traduit en néerlandais, mais également les facteurs visuels qui sont différents. Pour l’organisation de la communication interculturelle, on se base sur Maurer & Hillman, qui ont donné des perspectives pluridisciplinaires dans le domaine des images et les textes 170 : les pratiques textuelles et discursives conditionnent la réception des images. Dans ce cas, l’image peut être considérée comme la connotation et le texte comme la dénotation, et les deux doivent être en harmonie.
Le site web étant un lieu virtuel avec l’utilisation des images et du texte, il faut également prendre en compte les symboles et icônes qui se trouvent sur un site web. La sémiotique permet d’analyser le rapport entre l’image et son sens, et dans le domaine du e-commerce, lier la dénotation (le texte) et la connotation (l’image) 171.
Un site web est fortement lié à une nation et sa culture. Cette représentation est visible sur les sites web des « 3 Suisses ». En haut et en bas des deux pages d’accueil, il y a plusieurs symboles et icônes visibles – ce que l’on considère la connotation. Cependant, les deux versions se servent de différentes images, tandis que les méthodes de paiement sont montrées avec les mêmes symboles. Les modes de représentation identitaire et culturelle peuvent être transmis par les images sur un site web, le site web étant un espace social et culturel dans un environnement médiatique particulier 172 173 . Le contexte détermine la sélection des images ; les « 3 Suisses » étant un magasin de vêtements, utilise des images exprimant le processus d’achat. En haut de la page néerlandaise, on trouve un panier et un téléphone. Cela exprime que le consommateur fait des achats et qu’il peut s’attendre à un service-client. Ayant expliqué déjà que les Néerlandais trouvent important le service après-vente, il n’est pas étonnant que le symbole d’un téléphone manque sur la version française. Par contre, vu que les deux versions ont pour but principal d e vendre leurs produits, il est logique que l’on retrouve les symboles des méthodes de paiement sur les deux versions, même si on s’aperçoit de différents moyens : la version française offre la possibilité de payer avec un Pass Cadeau ou un chèque, étant des moyens typiquement français qui manquent sur la version néerlandaise. La version néerlandaise, à son tour, offre la possibilité de payer avec un bulletin de versement prémarqué et iDEAL, qui sont considérés typiquement néerlandais et que l’on ne connaît pas en France.
De plus, aussi l’aspect textuel –la dénotation – est visible sur le site. Dans ce cas, les différences entre la France et les Pays-Bas se montrent par exemple avec l’utilisation des majuscules (version française) et minuscules (version néerlandaise). De nouveau, la version française est plus colorée et exubérante et la version néerlandaise est toujours sobre et discrète.
L’organisation de la communication interculturelle se déroule en plusieurs étapes quand un médiateur s’en occupe. D’abord, ses connaissances des contextes économique et socio-historique des deux pays rendent possible de mettre en perspective l’état des lieux et les contextes des deux e-commerces. Ensuite, ses connaissances bi-linguistiques et biculturelles serviront à concrétiser les différences culturelles, identitaires et linguistiques qui impliquent de différentes attentes et attitudes commerciales des Français et des Néerlandais. Ainsi, le médiateur, qui est impartial, indépendant et sans pouvoir, adaptera toutes ses connaissances pour mettre en évidence les différences qui mènent certes aux stéréotypes dans l’image de l’Autre, menaçant la communication interculturelle. En concrétisant ces différences, on peut arriver à construire un site web conforme aux standards culturels, identitaires et linguistiques avec lesquels le consommateur peut s’identifier. Finalement, ces efforts faciliteront les démarches pratiques et administratives, car le médiateur peut intervenir pour ouvrir un compte bancaire, s’inscrire à la Chambre de Commerce, renseigner sur la forme juridique à choisir, s’inscrire à une agence d’affiliate marketing, etc.
Enfin, l’organisation de la communication interculturelle dépasse le domaine de la communication uniquement et il s’agit donc également des démarches pratiques et administratives et des connaissances économiques, financières, culturelles, identitaires et linguistiques. Ainsi le métier de la médiation est plus que décrit dans Guillaume Hofnung. Le médiateur n’est peut-être pas complètement impartial, indépendant et sans pouvoir, mais son esprit entrepreneurial et les connaissances linguistiques et culturelles sont de valeur inestimables et peuvent influencer le succès de l’implantation décisivement.
Lire le mémoire complet ==> (Lancer une entreprise e-commerce aux Pays-Bas
Un guide pour une implantation réussie
)

Mémoire de fin d’études – Université d’Utrecht
Master de Langue et Civilisation Françaises – Spécialisation: Communication Interculturelle
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167 Guillaume Hofnung, M. (2002). Le concept de médiation et l’urgence théorique. Dans : Les Cahiers du CREMOC, n° 35, p. 20.
168 Ibid., p.21.
169Guillaume Hofnung, M. (2002). Le concept de médiation et l’urgence théorique. Dans : Les Cahiers du CREMOC, n° 35, p.21-23.
 

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