Les outils d’intervention de l’AFD révèlent une diversité surprenante, allant des prêts concessionnels aux partenariats stratégiques. Cette analyse met en lumière leur rôle crucial dans le développement économique et social des territoires africains francophones, transformant ainsi les dynamiques franco-africaines.
Les instruments d’intervention de l’A.F.D.
La diversité des types d’intervention de l’A.F.D. a pour concordance la différence de ses formes d’action. En effet, méthodiquement établi, les outils d’intervention de l’A.F.D. sont divers. Ainsi on peut noter trois outils qui sont à certains égards fondamentaux.
Les prêts
L’AFD accorde des prêts, concessionnels ou non, à des contreparties, souveraines, (collectivités locales par exemple) ou non souveraines, publiques ou privées. Elle accorde différents types de prêts. Leurs conditions sont déterminées en fonction de la nature du projet et de son environnement (impact et contexte politique, économique, social, environnemental) et de la qualité de l’emprunteur (secteur d’activité, notation, garanties).
Les prêts aux Etats : ces prêts contractés ou garantis par les États sont appelés prêts souverains188. Pour en bénéficier, les États doivent être en mesure d’emprunter et avoir une dette peu élevée. Autre possibilité : un pays dont la dette est redevenue faible à l’issue d’un programme d’allégement de la dette, dans le cadre de l’initiative Pays pauvres très endettés (PPTE). C’est le cas, par exemple, du Sénégal.
Prêts aux entreprises et collectivités : ces prêts dits « non souverains » s’adressent quant à eux à des collectivités locales ou établissements publics, sans garantie des États. Les prêts non souverains s’élèvent à 5,1 milliards d’euro en 2019189 et portent la croissance de l’activité du groupe l’A.F.D. L’AFD accorde aussi des prêts à des entreprises du secteur privé en charge de missions de service public. Ce type de financement, pour permettre la réalisation de grandes opérations d’infrastructures, est de plus en plus fréquent.
Prêts à conditions préférentielles : le prêt à conditions préférentielles, autrement appelé « concessionnel », est un prêt dont le taux d’intérêt est inférieur aux taux du marché. L’AFD propose ce type de financement lorsque le projet est une réelle opportunité pour le pays : il est considéré comme le moyen d’aller plus loin que les pratiques habituelles ou que la réglementation nationale dans un domaine spécifique. C’est la contribution budgétaire de l’État français qui permet ainsi de proposer ce type d’outil. Toutefois, afin d’éviter toute concurrence déloyale, l’intervention de l’AFD est conditionnée au principe de subsidiarité.
Prêts à conditions de marché : aux pays faiblement endettés ou aux partenaires disposant de projets rentables à financer, l’AFD propose des prêts à conditions de marché (aussi appelés « non concessionnels »). Ces prêts permettent de soutenir les États lorsqu’ils sont confrontés à une insuffisance de liquidité, en raison d’une crise ou d’un besoin pressant de crédit.
188 En 2019, l’A.F.D. avait accordé 5,3 Milliards d’euro d’autorisations de financement dans les différents pays de sa géographie d’intervention, dont 43 pays africains. Le prêt souverain reste le premier instrument de financement du groupe A.F.D., avec notamment 38% de l’activité. Voir Agence française de développement, Monde en commun, Rapport d’activité et de responsabilité sociétale 2020, Editions A.F.D., 2020, p.10.
189 Ibidem.
Les subventions, pour le développement des pays les plus endettés
Au niveau de l’AFD, l’indicateur subvention regroupe l’aide projet AFD et l’aide budgétaire globale. Il exclut la plupart des activités sur mandat spécifique à savoir : les contrats de désendettement et de développement (C2D), les projets d’appui aux initiatives ONG, les opérations de Co-développement, la méso-finance et les projets FFEM (Fonds français pour l’environnement mondial). Il exclut également les activités conduites en délégation sur ressources d’autres bailleurs. L’aide projet comprend les subventions relevant des activités courantes : subventions classiques, opérations de micro finance, fonds de renforcement des capacités de gouvernance ou FRCG, fonds d’études, fonds fiduciaires, évaluations, concours locaux de faible montant ou CLFM, assistance technique, fonds d’expertise et de renforcement des capacités ou FERC190.
Ainsi, l’AFD utilise les subventions pour financer des actions dans le secteur social (santé, éducation), des initiatives pour le développement rural et urbain ou encore des projets d’infrastructures. En 2020, les subventions de l’AFD ont représenté 1,8 milliard d’euros.
L’AFD accorde des subventions à un nombre limité d’Etats : les pays pauvres sont considérés comme prioritaires. Elle se conforme à la décision du Comité interministériel de la coopération internationale et du développement (CICID) 191 de juillet 2013 de consacrer aux pays pauvres prioritaires au moins les deux tiers des subventions. Les pays concernés sont : le Bénin, le Mali, le Burkina Faso, la Mauritanie, le Burundi, le Niger, le Djibouti, la République centrafricaine, les Comores, la République démocratique du Congo, le Ghana, le Tchad, la Guinée, le Togo, le Madagascar, et le Sénégal.
Les projets financés via des subventions sont évalués avec la même rigueur que ceux financés par des prêts. Les normes de qualité et d’exigences d’efficacité (mesure d’impact) sont identiques.
Le C2D, un mécanisme pour soulager les pays endettés
Le contrat de désendettement et de développement est par ailleurs un outil qui permet de reconvertir la dette de certains pays. Concrètement, une fois qu’un pays pauvre très endetté a signé un C2D avec l’AFD, le pays continue d’honorer sa dette jusqu’à son
190 Agence française de développement, l’AFD en chiffres 2012-2016. Analyse rétrospective de l’activité de l’Agence française de développement, Edition 2017, p.192.
191 Cette décision stipule qu’en solidarité avec les pays les plus pauvres, la France concentrera ses subventions sur un nombre limité de pays pauvres prioritaires. Faisant ainsi de l’Afrique et à la Méditerranée ses priorités, l’Etat français décide de consacrer au moins 85% de son effort financier en faveur du développement de l’Afrique subsaharienne et dans les pays voisins du Sud et de l’Etat de la Méditerranée.
remboursement et, à chaque échéance remboursée, l’AFD reverse au pays la somme correspondante sous forme de don. Cette notion de « Dons » regroupe l’ensemble des subventions et y ajoute l’ensemble des activités sur mandat spécifique exclues de l’indicateur de subventions, à savoir : les contrats de désendettement et de développement ou C2D, l’appui aux initiatives ONG, les opérations de Co-développement, la méso finance192.
Ce don sert alors à financer des programmes de lutte contre la pauvreté. Les actions financées dans le cadre des C2D doivent s’inscrire dans les stratégies de lutte contre la pauvreté des pays bénéficiaires, ainsi que dans les stratégies sectorielles des secteurs prioritaires validées par le CICID. Elles doivent de préférence être ciblées sur un nombre limité de secteurs, afin de limiter le risque de dispersion, mais aussi les coûts de transaction liés au nombre des points d’affectation.
Les fons des C2D constituent ce que Guy MVELLE qualifie de « nouvelle doctrine de la politique de l’aide de la France dans la plus part des pays africain »193, car l’une des préoccupations principales des C2D est de financer des programmes et projets de développement portés par les acteurs locaux comme c’est le cas du Cameroun l’un des dix-huit pays africains bénéficiaires de cette démarche.
Le contrat de désendettement et de développement (C2D) trouve ses origines en 1996, dans un contexte où la communauté internationale a reconnu que la situation d’endettement extérieur d’un certain nombre de pays très pauvres était devenue « intenable » et avait un effet négatif sur leurs perspectives de développement. Lancé cette année-là, le programme « pays pauvres très endettés (PPTE) » constitue une initiative coordonnée des créanciers du Club de Paris visant à réduire le poids de la dette extérieure de ces pays à un niveau soutenable. Lorsque la dernière étape du processus PPTE, le point d’achèvement, est atteinte, un effort bilatéral additionnel de l’État français peut-être consenti sous la forme d’un Contrat de Désendettement et de Développement (C2D).
Selon les modalités, un pays bénéficiaire d’un C2D continue d’honorer les échéances de la partie non annulée de sa dette. Mais à chaque échéance remboursée, l’AFD lui reverse la somme correspondante sous forme de don. Ce financement est destiné à des programmes de lutte contre la pauvreté qui sont sélectionnés d’un commun accord avec l’État partenaire. L’AFD se charge, pour le compte de l’État français, de mettre en œuvre et d’assurer le suivi technique du C2D pour les pays de la Zone de
192 Ibidem.
193 MVELLE Guy, L’aide française en Afrique. Les mutations via les contrats de désendettement et de développement (C2D) ; Paris, Harmattan, 2016, p.11.
Solidarité Prioritaire (ZSP). La remise de dette s’inscrit dans la durée : les échéances des prêts s’étalent souvent sur une vingtaine d’années. Le plus souvent, ils prennent la forme de plusieurs C2D successifs, conclus chacun pour une durée de trois à cinq ans. Cette procédure d’annulation des créances d’aide publique au développement (APD) est destinée aux États appartenant à la catégorie « pays pauvres très endettés » (PPTE).
Ainsi à travers son activité, l’A.F.D. contribue donc à la politique française d’aide au développement. En effet, elle avait « généré en 2008 16 % de l’A.P.D. française reconnue par le C.A.D., soit un triplement depuis 2004 »194. Elle gère pour le compte de l’Etat français les dons et subventions et bénéficie des dotations financières pour accorder des prêts dits concessionnels, c’est-à-dire bonifiés par rapport aux taux de marché pris en compte au titre de l’A.P.D.
Tableau 8 : Aide publique au développement nette bilatérale de l’A.F.D. (2004-2008)
Aide publique au développement nette bilatérale de l’A.F.D. (2004-2008) | |
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Paramètre/Critères | Description/Valeur |
APD nette bilatérale | 414 M€ à 1 366 M€ (soit 55 % de l’APD bilatérale nette programmable nationale) |
Part des prêts | Passée de 34 % en 2004 à 57 % en 2008 |
Part des subventions | Régressait de 36 % à 18 %. |
Source : http://www.assemblee-nationale.fr/13/pdf/B2857-05A.pdf.
Commentaire tableau 8 : au regard de ce tableau, il est constaté que l’APD nette bilatérale de l’AFD a fortement augmenté au cours des dernières années, passant de 414 M€ à 1 366 M€ (soit 55 % de l’APD bilatérale nette programmable nationale). Au sein de cette contribution, la part des prêts est passée de 34 % en 2004 à 57 % en 2008, tandis que celle des subventions régressait de 36 % à 18 %.
194 Cour des comptes, La place et le rôle de l’Agence française de développement (AFD) dans l’aide publique au développement, Communication à la Commission des finances de l’économie générale et du contrôle budgétaire de l’Assemblée nationale, 1é aout 2001, op.cit., p.2. Consulté sur http://www.assemble- nationale.fr/13/pdf/B2857-05A.pdf.
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188 En 2019, l’A.F.D. avait accordé 5,3 Milliards d’euro d’autorisations de financement dans les différents pays de sa géographie d’intervention, dont 43 pays africains. Le prêt souverain reste le premier instrument de financement du groupe A.F.D., avec notamment 38% de l’activité. Voir Agence française de développement, Monde en commun, Rapport d’activité et de responsabilité sociétale 2020, Editions A.F.D., 2020, p.10. ↑
190 Agence française de développement, l’AFD en chiffres 2012-2016. Analyse rétrospective de l’activité de l’Agence française de développement, Edition 2017, p.192. ↑
191 Cette décision stipule qu’en solidarité avec les pays les plus pauvres, la France concentrera ses subventions sur un nombre limité de pays pauvres prioritaires. Faisant ainsi de l’Afrique et à la Méditerranée ses priorités, l’Etat français décide de consacrer au moins 85% de son effort financier en faveur du développement de l’Afrique subsaharienne et dans les pays voisins du Sud et de l’Etat de la Méditerranée. ↑
193 MVELLE Guy, L’aide française en Afrique. Les mutations via les contrats de désendettement et de développement (C2D) ; Paris, Harmattan, 2016, p.11. ↑
194 Cour des comptes, La place et le rôle de l’Agence française de développement (AFD) dans l’aide publique au développement, Communication à la Commission des finances de l’économie générale et du contrôle budgétaire de l’Assemblée nationale, 1é aout 2001, op.cit., p.2. Consulté sur http://www.assemble- nationale.fr/13/pdf/B2857-05A.pdf. ↑
Questions Fréquemment Posées
Quels types de prêts l’AFD accorde-t-elle?
L’AFD accorde des prêts, concessionnels ou non, à des contreparties souveraines ou non souveraines, publiques ou privées.
Qu’est-ce qu’un prêt à conditions préférentielles de l’AFD?
Le prêt à conditions préférentielles, autrement appelé « concessionnel », est un prêt dont le taux d’intérêt est inférieur aux taux du marché, proposé lorsque le projet est une réelle opportunité pour le pays.
Comment l’AFD soutient-elle les pays les plus endettés?
Au niveau de l’AFD, l’indicateur subvention regroupe l’aide projet AFD et l’aide budgétaire globale, incluant des subventions classiques et des opérations de micro finance.