Quelles stratégies de mise en œuvre pour l’AFD en Afrique ?

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🏫 Université Cheikh Anta Diop de Dakar - Faculté des Lettres et Sciences Humaines (FLSH) - Département d'Histoire
📅 Mémoire de fin de cycle en vue de l'obtention du diplôme de Master - 2021-2022
🎓 Auteur·trice·s
Pape Youssou Seck
Pape Youssou Seck

Les stratégies de mise en œuvre AFD révèlent une dynamique surprenante entre libéralisme et protectionnisme, transformant les économies africaines. Cette recherche met en lumière des résultats inattendus, essentiels pour comprendre l’impact historique de l’Agence Française de Développement sur les relations franco-africaines.


En partant d’une situation de fait, le non-développement des Etats avec lesquels la France coopère, et en présentant les tentatives de développement qui ont été expérimentées, y compris pendant la période coloniale, il apparait que la construction des économies s’est faite dans un cadre bien précis, parfaitement hétérodoxe, « puisqu’elle combine le libéralisme65 et le protectionnisme.

»66 L’avantage dans cette politique c’est qu’elle a permis d’élever les prix en moyenne de 25% par rapport aux cours mondiaux, et a donc permis un accroissement important des production avant les indépendances. Mais en perdant l’accès privilégié au marché français dans des conditions de sur-prêt, lors de l’entrée de la France dans le Marché commun, les pays africains ont commencé à connaitre des insuffisances des recettes de l’Etat français.

Ceci a entrainé des déséquilibres de leurs finances publics. Cette baisse des finances publiques du fait de la fin du protectionnisme qu’assurait la France a occasionné la dépendance des ex-colonies à l’aide extérieure.

Pour Claude FREUD, il n’est pas de développement possible pour des pays à structure économique primaire, dans un environnement de détérioration des termes de l’échange. Au lieu de mettre les pays africains sous tutelle, il faut se rendre à l’évidence que c’est à ces pays africains de prendre en charge la conduite de leur développement, « aux aides extérieures à appuyer cette démarche en rétablissant des règles du jeu plus équitables : allègement du poids de la dette, stabilisation du prix des matières premières67 ».

Les deux préoccupations présentées par l’auteur à la fin des années 1980 ont constitué plus tard des priorités de la politique française d’aide au développement, et même de celle de l’ensemble des donateurs de l’aide. La date en particulier est présentée comme l’un des obstacles majeurs au développement des pays africains.

Ce constat a permis d’aboutir à l’adoption de plusieurs initiatives tant au plan multilatéral de bilatéral, à l’instar de l’Initiative des pays pauvres et très endettés(I.P.P.T.E.) lancée à Lyon en 1996 par la Banque mondiale et le Fonds monétaire international, puis renforcée la Cologne en 1999. C’est également le cas du C2D mis sur pied de façon additionnel par la France en direction de certains pays de la zone de solidarité prioritaire (Z.S.P.).

Toujours dans le cadre de notre documentation, nous avons eu à consulter également des articles qui constituent une source d’information capitale sur l’A.F.D. et la politique française de coopération en relation avec l’Afrique noire française. La multiplicité et la diversité des articles nous ont amené à faire un tri. Ainsi par sélection arbitraire, nous avons eu à prendre quelques-uns qui peuvent mettre la lumière sur quelques zones d’ombres de notre thème.

De ce fait, en se rendant à l’évidence, nous avons consulté l’article de PACQUEMENT François sur « Le système d’aide au développement de la France et du Royaume-Unis » qui propose un regard sur les évolutions parallèles du système d’aide des deux anciennes puissances coloniales, « cinquante ans après les indépendances ».

A l’entame de cet article, l’auteur retrace la généalogie des institutions financières de ces deux anciennes puissances coloniales qu’il remonte avant les indépendances, entre « l’héritage coloniale et la seconde guerre mondiale »68. Considérant la Résistance comme une « source d’inspiration pour l’aide en France »69, François PACQUEMENT revient sur la mise en œuvre de la C.C.F.L., ancêtre de l’AFD, ainsi que ses contributions à la formation de la politique de reconstruction de l’Outre-mer.

Il revient également sur la loi du 30 avril 1946 mais aussi sur l’évolution de la Caisse centrale, de ses prérogatives et de ses réalisations jusqu’à ce qu’elle devient Caisse française de développement en 1992 avant de devenir Agence en 1998.

Parallèlement dans un autre article intitulé « Belle histoire de l’aide. Introduction thématique », PACQUEMENT fait le rapprochement de la politique de l’aide à celui de la mise en valeur coloniale. Il met ainsi en évidence ce qu’il appelle un « héritage ambigu » de l’aide qui succède la mise en valeur coloniale, « condamnée au moment des indépendances en tant que composante d’un pouvoir illégitime »70.

Il compare de ce fait ces deux politiques d’abord sur leurs activités qui se déclinent sur le terrain sous forme de projets ; ensuite qui sont articulées sous la forme de plans ou de cadres stratégiques, souvent ambitieux, dont la mise en œuvre pose alors une question de moyens financiers. Ainsi Lorsque la colonisation se pacifie, la mise en valeur coloniale apparaît, sous la forme d’investissements divers.

Elle ne s’établit vraiment que lorsqu’elle passe du microéconomique au politique « théorisée » et « planifiée » dans les années 1920 par le ministre des Colonies Albert Sarraut, « ce qui lui permet de prendre une certaine ampleur »71.

65 Théorie des avantages comparatifs.

66 Existence d’un espace économique protégé.

67 FREUD Claude, op.cit., p.7.

68 PACQUEMENT François, Le système d’aide au développement de la France et du Royaume-Uni : point de repère sur cinquante ans d’évolution depuis la décolonisation, Dans Revue Evolution des politiques de développement, 2010, pp.58.

69 Ibidem.

70 PACQUEMENT Français, Belle histoire de l’aide. Introduction thématique, Afrique contemporaine n°236, 2010/4, p.44.

71 Ibidem.

Il faut aussi noter l’article d’Agnès d’ ANGIO où elle évoque les différentes réalisations de la C.C.F.O.M. Cette partie correspond à la trajectoire de la C.C.F.O.M. Elle met aussi en exergue les différentes interventions de la Caisse centrale mais aussi les provenances de ses ressources qu’elle attribue à des subventions de l’Etat français.

Dans cet article, d’ANGINO met également en exergue les différentes sociétés fondées par la C.C.F.O.M. à partir de 194872, en association avec les pays d’Outre-mer ; trois catégories de sociétés décentralisées ayant leur sièges dans ces pays et qui sont capables de recourir à leur développement. Il s’agit ainsi des sociétés de crédit agricole et sociale, des sociétés immobilières et des sociétés d’énergie électrique, celle-ci ayant pour principal but de faire face à l’augmentation de la consommation d’énergie électrique dans les villes.

L’article de Catherine COQUERY-VIDROVITCH publié dans Le Monde social N°107 de juin 1979 revient sur la politique africaine de la France avec notamment la politique d’Albert Sarraut de mise en valeur coloniale qui est le socle de la création de l’A.F.D.

Au début de cet article, VIDROVITCH révèle une « politique impériale » qu’elle situe au lendemain de la première phase de conquête et d’installation coloniale. Cette politique qui commence à prendre forme au tournant de la seconde guerre mondiale apparait selon elle sous deux tendances à savoir : « celle des milieux d’affaire de type capitalistique et celle de la politique sociale qui s’exprimera à l’époque du Front populaire »73.

Cette politique africaine de la France, gérée par l’A.F.D., VIDROVITCH situe ses origines en 1921, l’année où le ministre des colonies Albert Sarraut élaborait un plan de mise en valeur des colonies sur dix à quinze ans, évalué à trois milliards et demi de francs environ soit plus de 270 milliards de francs CFA74 1976. Ce qui amène ainsi Catherine Coquery- VIDROVITCH à considérer Sarraut comme un « vulgarisateur » et lui octroie le mérite de propager les idées dont la guerre avait précipités l’évolution et qui avaient été explicitées dès la Conférence de 191775.

72 ANGIO Agnès, Les archives du ministère des finances relatives à l’électrification de l’Empire français, Revue d’histoire 334-335, 2002, p.26.

73 COQUERY-VIDROVITCH Catherine, Colonisation ou impérialisme : la politique africaine de la France entre les deux guerres, Le Monde social, n°107, Apr., juin 1979, p.51.

74 Ibidem.

75 Il s’agit de la Conférence coloniale de 1917 pour la mise en place d’un programme d’action économique immédiate et à plus long terme pour l’empire. Institué dans un esprit de partenariat nouveau, entre les intérêts coloniaux privés, les parlementaires du groupe colonial, l’Etat français et les administrations coloniales, la conférence annonce la politique d’une émergence économique impériales et une influence officielle des intérêts coloniaux sur cette politique. Voir l’article de Christophe BONNEUL, Des savants pour l’Empire. La

Par ailleurs, l’article de Pierre DENIS sur « Les finances de la France Libre », montre les circonstances dans lesquelles est née la C.C.F.L., en évoquant le statut de la France Libre. Ce statut a été à la base réglé par les accords76 signés par le général de Gaulle et le gouvernement britannique en mars 1941. Il précise ainsi que la création de la C.C.F.L., décidée par l’ordonnance de décembre 1941 « répondait à des préoccupations monétaire plutôt que financier »77, et elle eut ses sources dans l’accord financier de mars 1941. La Caisse centrale devint à cet effet la caisse du Trésor français.

A partir de 1941, les discussions avec les différents ministres britanniques furent remplacées par une négociation unique avec le Treasury (la Trésorerie britannique) pour l’approbation du budget de la France Libre et naturellement, des modifications qu’il était nécessaire d’y apporter au cours de l’année. Ce régime fut maintenu jusqu’en 1943, date à laquelle le gouvernement britannique, après la formation du Comité de la Libération nationale à Alger, dénonça l’accord de mars 194178, et laissa le comité, financièrement, de voler de ses propres ailes.

La dévaluation du franc France Libre et son assimilation avec le franc d’Alger entre 1943 et 1944 fut pars ailleurs réalisée au moment où intervient un accord financier entre l’Angleterre et le Comité de libération qui enlevait du moins tout souci immédiat sur la stabilité du franc. C’est ainsi aussi à la même date que la C.C.F.L. fut transformée en C.C.F.O.M. A cela, la nature de ses attributions se trouva défini d’une façon moins large qu’en 1941, mais ces attributions devaient désormais s’exercer dans tous les territoires placés sous l’autorité du C.F.L.N. Ces diverses réformes marquaient les principales étapes de la fusion des finances de la France Libre dans celle de l’Empire unifié.

A partir d’une perspective historique, Frank PETITEVILLE dans : « Quatre décennies de coopération franco-africaine : usages et usure d’un clientélisme », tente également de dresser le bilan de la politique de coopération de la France en Afrique noire francophone depuis 1960. Il opère un recul sur près de quatre décennies en s’appesantissant sur ce qu’il appelle « les invariants idéologiques et institutionnels de la coopération franco-africaine

structuration des recherches scientifiques coloniales au temps de la « mise en valeur des colonies françaises » 1917-1945, Paris 1991, Editions l’ORSTOM Collection Etudes et Thèses.

76 DENIS Pierre, les finances de la France Libre (juin 1940-juin 1943), Revue d’histoire de la Deuxième Guerre mondiale n°1, 1ère année, Novembre 1950 p.20. Il s’agit notamment de l’accord de Trésorerie et l’accord financier à la base desquels le gouvernement britannique, lors de la libération de la France, ouvrait au général de Gaulle des crédits nécessaires à la couverture des dépenses militaires de la France Libre, et des dépenses administratives, civiles de son organisation centrale.

77 DENIS Pierre op.cit., p.22.

78 Ibidem.

depuis ses origines », lesquels selon lui, sont désormais disponibles pour une analyse qui se veut approfondie79.

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65 Théorie des avantages comparatifs.

66 Existence d’un espace économique protégé.

67 FREUD Claude, op.cit., p.7.

68 PACQUEMENT François, Le système d’aide au développement de la France et du Royaume-Uni : point de repère sur cinquante ans d’évolution depuis la décolonisation, Dans Revue Evolution des politiques de développement, 2010, pp.58.

69 Ibidem.

70 PACQUEMENT Français, Belle histoire de l’aide. Introduction thématique, Afrique contemporaine n°236, 2010/4, p.44.

71 Ibidem.

72 ANGIO Agnès, Les archives du ministère des finances relatives à l’électrification de l’Empire français, Revue d’histoire 334-335, 2002, p.26.

73 COQUERY-VIDROVITCH Catherine, Colonisation ou impérialisme : la politique africaine de la France entre les deux guerres, Le Monde social, n°107, Apr., juin 1979, p.51.

74 Ibidem.

75 Il s’agit de la Conférence coloniale de 1917 pour la mise en place d’un programme d’action économique immédiate et à plus long terme pour l’empire. Institué dans un esprit de partenariat nouveau, entre les intérêts coloniaux privés, les parlementaires du groupe colonial, l’Etat français et les administrations coloniales, la conférence annonce la politique d’une émergence économique impériales et une influence officielle des intérêts coloniaux sur cette politique. Voir l’article de Christophe BONNEUL, Des savants pour l’Empire. La

76 DENIS Pierre, les finances de la France Libre (juin 1940-juin 1943), Revue d’histoire de la Deuxième Guerre mondiale n°1, 1ère année, Novembre 1950 p.20. Il s’agit notamment de l’accord de Trésorerie et l’accord financier à la base desquels le gouvernement britannique, lors de la libération de la France, ouvrait au général de Gaulle des crédits nécessaires à la couverture des dépenses militaires de la France Libre, et des dépenses administratives, civiles de son organisation centrale.

77 DENIS Pierre op.cit., p.22.

78 Ibidem.


Questions Fréquemment Posées

Quelles sont les stratégies de mise en œuvre de l’AFD en Afrique ?

L’AFD combine le libéralisme et le protectionnisme pour construire les économies africaines, permettant ainsi un accroissement des productions avant les indépendances.

Pourquoi les pays africains dépendent-ils de l’aide extérieure ?

La dépendance des ex-colonies à l’aide extérieure est due à la baisse des finances publiques causée par la fin du protectionnisme assuré par la France.

Quels obstacles majeurs au développement des pays africains sont identifiés ?

La date est présentée comme l’un des obstacles majeurs au développement des pays africains, ce qui a conduit à l’adoption de plusieurs initiatives d’aide au développement.

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