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Comment l’exploitation minière menace-t-elle les droits des communautés au Nord-Kivu ?

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🏫 Université de Gomadomaine des Sciences Juridiques, Politiques, Administratives, Management et Relations Internationales - Sciences juridiques
📅 Mémoire de fin de cycle en vue de l'obtention du diplôme de Master - 2022-2023
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Les droits des communautés au Nord-Kivu sont souvent bafoués par l’exploitation minière. Cette étude révèle comment les mécanismes de protection juridique peuvent transformer la réalité de ces populations, offrant des solutions essentielles pour préserver leurs droits face aux défis des activités extractives.


Le non-respect des engagements sociétaux par la SMB

Les activités minières entrainent nécessairement de dégâts sur les communautés locales, une panoplie de mesures est prévue pour protéger ces communautés contre ces dits dégâts.

D’une part, le législateur soumet les exploitants miniers aux obligations qui, faute de les remplir, entraîne la déchéance de leurs titres. 333 C’est notamment le respect de ses engagements vis-à-vis des obligations sociétales telles que repris dans le Cahier des charges et la responsabilité du fait de l’occupation du sol.334

Il s’avère cependant qu’après vingt-deux ans d’exploitation du PE 4731 et exportation des minerais pour plusieurs millions de dollars américains, la SMB SARL n’a jamais signé le «Cahier des charges des responsabilités sociétales», entendu, aux termes du code minier, comme «un ensemble d’engagements pris par l’entreprise titulaire des titres miniers pour la réalisation des infrastructures socio- économiques et services sociaux de base au profit des communautés impactées par son projet minier».335

Plusieurs faits l’attestent, à savoir l’inexistence des études et enquêtes démographiques et socio-économiques sur les personnes à déplacer, le défaut de l’étude d’impact environnemental et social et le manque des preuves de consultations et de sensibilisation des populations sur le projet minier de SMB SARL.

Ce qui lui fait tomber sous le coup des articles 286 à 291 du code minier pour défaut de «Cahier des charges des responsabilités sociétales». C’est-à-dire que les populations affectées par les activités minières de SMB n’ont jamais été dédommagées.336

Il n’est donc pas surprenant qu’aucune école, aucune route, aucun hôpital, voire un dispensaire, n’a été construit en faveur des communautés alors que de centaines de tonnes de minerais évalués à des centaines de millions USD sont sortis des terres du Masisi pendant plus de 20 ans.

Ces faits constituent une violation avérée du droit au développement de communautés locales.

D’autre part, la soumission des exploitants miniers au respect du Guide de l’OCDE sur le devoir de diligence.

« En effet, l’exploitation minière peut être un moteur important de la croissance inclusive, emplois et compétences, mais celle-ci, ainsi que le commerce de minerais qui en résultent, peuvent être associés à des violations sérieuses des Droits de l’Homme, au financement des conflits et du terrorisme, au blanchiment 9od’argent et à la

corruption.

De ce fait, le devoir de diligence est perçu comme un outil efficace permettant aux entreprises d’identifier des risques afin de prévenir leur survenance et/ou d’atténuer leur impact.

Le devoir de diligence incombant aux entreprises, implique que celle-ci doivent rechercher la maximisation de profits tout en respectant les règles de jeu liées notamment aux droits de l’homme, à l’environnement, au bien-être social…etc. »337

Selon Christine, les règles de due diligence reposent sur trois piliers : en premier lieu c’est la responsabilité de protection incombant à l’État conformément à divers traités internationaux relatifs aux droits de l’homme, de protéger les droits humains contre des violations commises par des tiers, dont les entreprises.

Ainsi donc, les États sont appelés à promouvoir une culture d’entreprise dans laquelle le respect des droits humains est intégré à l’activité économique.338

En deuxième lieu, la responsabilité incombe aux entreprises, qui sont appelées à respecter les droits de l’homme dans leurs activités.

Cela signifie qu’elles doivent s’engager clairement en ce domaine. Il leur faut également évaluer les conséquences de leurs activités pour les droits humains et gérer rigoureusement leurs affaires en fonction de ces derniers.339

Enfin en troisième lieu, c’est l’accès aux voies de recours, de conciliation et de réparation.

En effet, les États et les entreprises doivent offrir aux victimes de violations des droits humains des moyens efficaces pour porter plainte ou demander réparation.

Ces voies de recours peuvent prendre la forme de procédures judiciaires ou extrajudiciaires, devant un tribunal étatique ou non.340

Cependant, rares sont les dispositifs prévus où les victimes d’un préjudice ont accès à un recours et à des réparations.341

En marge de cette philosophie, SMB SARL se distingue plutôt par une politique délibérée aux antipodes des prescrits du «Guide de l’OCDE».

Elle est championne en violation des droits humains dans sa «concession» et en dehors de celle-ci en excellant par des actes de meurtres, tortures, extorsions et autres traitements inhumains et dégradants infligés aux populations locales par sa garde industrielle.

Ces actes ont été à la base d’une condamnation du propriétaire de la SMB, Edouard Mwangachuchu, à une peine capitale par la haute cours militaire.

Il s’avère même que la SMB détient dans ses services de sécurité, des éléments irréguliers sous couvert de la Police Nationale, soupçonnés d’être des anciens du RCD, CNDP, voire du M23 et porteurs de bulletins de service de la Police nationale sans indication des unités de provenance ou des numéros matricules.

Ce qui a coûté son poste au Colonel Van Kasongo, Commandant second de la Police provinciale du Nord-Kivu, rappelé depuis avril 2022 à Kinshasa et qui a été renseignant dans l’affaire Mwangachuchu.342

Par ailleurs, contrairement au Guide de l’OCDE, SMB SARL réceptionne des minerais des creuseurs et les exporte sans les désintéresser au préalable.

Ceux-ci restent ainsi impayés plusieurs mois, voire des années, devenant ainsi incapables de subvenir à leurs besoins élémentaires et ceux de leurs familles.

La société d’Edouard Mwangachuchu reconnaît, du reste, le solde de l’ordre de 4 675 317, 24 USD dû aux creuseurs dont elle a pris l’engagement d’éponger.

Pourtant les minerais reçus ont été exportés et réceptionnés par des consommateurs finaux bien identifiés ; C’est d’ailleurs l’une des causes majeures des tensions entre les creuseurs, donc les communautés locales outrées par ce traitement, et SMB SARL.343

Il ressort de ce qui précède, que la SMB SARL effectue une exploitation caractérisée par le défaut d’un «Cahier des charges des responsabilités sociétales», d’une étude d’impact environnementale et du non-respect du Guide de l’OCDE. 344

Non sans compter l’insécurité persistante à Rubaya, alimentée par la présence des infiltrés sous couvert de la Police nationale.345

Ces atteintes aux droits de communautés locales plus spécifiquement au droit foncier, au droit au développement et le droit à un environnement sain, ont entraîné la déchéance du permis d’exploitation de la SMB, par l’arrêté ministériel N° 00222/CAB.MIN/MINES/01/2023 du 14 juillet 2023 portant déchéance des droits sur le permis d’exploitation n°4731, pour non- respect des engagements vis-à-vis des obligations sociétales ».346

Un autre cas d’atteinte aux droits des communautés locales est celui de walikale.

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333 Code minier, article 196.

334 Ibid., articles 285.

335 Ibid.

336 Paul Kasereka Paluku, Tribune : bien longtemps avant le procès Mwangachuchu, le PE 4731 était en position de déchéance, (19 juin 2023), <https://7sur7.cd/2023/06/19/tribune-bien-longtemps-avant-le-proces- mwangachuchu-le-pe-4731-etait-en-position-de>, 26 septembre 2023.

337 Christine Kaufmann, La responsabilité sociétale des entreprises perce grâce à l’ONU, p.3. (22 juin 2017), < https://dievolkswirtschaft.ch/fr/2017/06/kaufmann-07-2017/> 18 janvier 2024.

338 Ibid.

339 Ibid, p.6.

340 Ibid.

341 Hugo Sada, Les droits de l’Homme au cœur de la responsabilité sociale des entreprises (RSE), Organisation internationale de la Francophonie, Paris, novembre 2012, p.6.

342 Ibid.

343 Mashauri Nkalirwa, supra note 321.

344 Paluku, supra note 326.

345 Ibid.

346 Arrêté ministériel N° 00222/CAB.MIN/MINES/01/2023 du 14 juillet 2023 portant déchéance des droits sur le permis d’exploitation n°4731, pour non-respect des engagements sociétaux indiqué par Mines. Cd sur <https://mines.cd/la-rdc-retire-le-permis-dexploitation-de-la-societe-miniere-de-coltan-de-mwangachuchu/ > 22 janvier 2024.


Questions Fréquemment Posées

Quels sont les droits des communautés locales au Nord-Kivu face à l’exploitation minière?

Les droits subjectifs reconnus aux communautés locales incluent le droit au développement, qui est violé par le non-respect des engagements sociétaux des exploitants miniers.

Comment la SMB SARL a-t-elle manqué à ses obligations sociétales?

La SMB SARL n’a jamais signé le ‘Cahier des charges des responsabilités sociétales’, entraînant l’absence de dédommagement pour les populations affectées par ses activités minières.

Quel est le rôle du devoir de diligence dans l’exploitation minière au Nord-Kivu?

Le devoir de diligence est un outil permettant aux entreprises d’identifier des risques et de prévenir les violations des droits de l’homme, en intégrant le respect des droits humains dans leurs activités.

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